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25/02/2014 | FRANCE | N°11LY22124

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 25 février 2014, 11LY22124


Vu I) la requête, enregistrée le 1er juin 2011 au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille, présentée pour M. et Mme A...B..., domiciliés chemin du Thor, Le Thor Nord à Grambois (84240) ;

M. et Mme B... demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1000946 du 25 mars 2011 par lequel le Tribunal administratif de Nîmes a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales, auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2007 et 2008 ;

2°) de prononcer la déc

harge des impositions contestées ;

Ils soutiennent que les factures qu'ils ont dédu...

Vu I) la requête, enregistrée le 1er juin 2011 au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille, présentée pour M. et Mme A...B..., domiciliés chemin du Thor, Le Thor Nord à Grambois (84240) ;

M. et Mme B... demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1000946 du 25 mars 2011 par lequel le Tribunal administratif de Nîmes a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales, auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2007 et 2008 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées ;

Ils soutiennent que les factures qu'ils ont déduites de leurs revenus fonciers étaient payables à leur réception ; qu'il n'y a donc pas lieu de tenir compte de leur date d'émission mais de leur date de réception ; que la facture du 29 décembre 2003 n'a pu être réglée qu'en 2004 ; qu'il appartient à l'administration d'établir le contraire ; qu'ils n'ont déduit la facture de 2004 qu'en 2007 car c'est à cette date que le montant de la précédente facture avait été totalement apuré par compensation sur les loyers versés par le locataire ; que les travaux réalisés n'étaient pas des travaux d'amélioration mais des travaux incombant au bailleur en vertu des dispositions du code civil ; qu'ils étaient donc déductibles des revenus fonciers ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 19 janvier 2012, présenté par le ministre de l'économie et des finances, qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient qu'il appartient au contribuable qui entend déduire de son revenu brut des dépenses constituant des charges de propriété de justifier de leur réalité et de leur caractère déductible ; qu'il y a lieu, en l'absence d'éléments contraires, de retenir la date d'émission des factures ; que la réalité des compensations de loyers n'est pas établie ; qu'il est contradictoire de ne déclarer en recettes qu'une partie des loyers tout en déduisant des charges correspondant à des compensations par la réduction des loyers ; que les dépenses facturées en 2004 n'étaient pas déductibles, dès lors qu'il s'agissait de dépenses d'amélioration menées dans des locaux commerciaux ;

Vu l'ordonnance du président de la section du contentieux du Conseil d'Etat, en date du 18 novembre 2013, attribuant le jugement de la requête à la Cour administrative d'appel de Lyon, en application de l'article R. 351-8 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu II) la requête, enregistrée le 10 juillet 2012 au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille, présentée pour M. et Mme A...B..., demeurant... ;

M. et Mme B... demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1101223 du 25 mai 2012 par lequel le Tribunal administratif de Nîmes a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales, auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2007 et 2008 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées ;

Ils soutiennent que la franchise de loyers consentie à leur locataire, la société Métaux Moteurs, en application du bail du 20 décembre 1999, ne constituait pas une libéralité, mais avait un intérêt pour eux, les locaux n'étant pas susceptibles d'être loués en l'état ; que la situation de la société Métaux Moteurs ne lui permettait pas de supporter à la fois le coût des travaux et des loyers ; qu'il y avait ainsi un intérêt partagé du propriétaire et du locataire ; qu'ils ont renoncé pour le même motif à l'application de la clause contractuelle de révision annuelle du loyer ; que les factures qu'ils ont déduites de leurs revenus fonciers étaient payables à leur réception ; qu'il n'y a donc pas lieu de tenir compte de leur date d'émission mais de leur date de réception ; que la facture du 29 décembre 2003 n'a pu être réglée qu'en 2004 ; qu'il appartient à l'administration d'établir le contraire ; qu'ils n'ont déduit la facture de 2004 qu'en 2007 car c'est à cette date que le montant de la précédente facture avait été totalement apuré par compensation sur les loyers versés par le locataire ; que les travaux réalisés n'étaient pas des travaux d'amélioration mais des travaux incombant au bailleur en vertu des dispositions du code civil ; qu'ils étaient donc déductibles des revenus fonciers ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 1er février 2012, présenté par le ministre de l'économie et des finances, qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que les loyers perçus par compensation constituent un revenu imposable ; qu'il n'est pas justifié des difficultés de trésorerie de la société Métaux Moteurs ; que les abandons de loyers ainsi consentis à une société dirigée par le fils des requérants constitue une libéralité ; qu'il était fondé, pour déterminer le revenu foncier imposable, à tenir compte de la clause contractuelle de révision du loyer ; que les dépenses facturées n'étaient pas déductibles, dès lors qu'il s'agissait de dépenses d'amélioration menées dans des locaux commerciaux ; que les prestations facturées en 2003 étaient, en application du bail, exclusivement à la charge du locataire ; qu'en l'absence d'éléments contraires, il y a lieu de considérer que la facture émise en 2003 a été réglée la même année ; qu'il n'est pas établi que les propriétaires ont effectivement réglé la facture de 2004 ;

Vu l'ordonnance du président de la section du contentieux du Conseil d'Etat, en date du 18 novembre 2013, attribuant le jugement de la requête à la Cour administrative d'appel de Lyon, en application de l'article R. 351-8 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code civil ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 février 2014 :

- le rapport de M. Besse, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Lévy Ben Cheton, rapporteur public ;

1. Considérant que les requêtes enregistrées sous les n°s 11LY22124 et 12LY22791 concernent les mêmes contribuables et les mêmes années d'imposition ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

2. Considérant que M. et Mme B... ont fait l'objet d'un contrôle sur pièces à l'issue duquel le service a proposé, le 14 septembre 2009, des rehaussements en matière de revenus fonciers, après avoir refusé la prise en compte, au titre de l'année 2004, d'une facture datée du 29 décembre 2003 et avoir rapporté aux revenus fonciers de l'année 2004 une facture, datée du 31 décembre 2004, comptabilisée par les requérants au titre des revenus fonciers de l'année 2007 ; qu'en raison de la réduction du déficit foncier reportable qui s'en est ensuivie, ces rehaussements se sont traduits par des impositions supplémentaires au titre des années 2007 et 2008, mises en recouvrement le 16 décembre 2009 ; que, par jugement du 25 mars 2011, le Tribunal administratif de Nîmes a rejeté la demande de M. et Mme B... tendant à la décharge de ces impositions ; que, le 22 février 2010, l'administration a notifié aux intéressés une seconde proposition de rectification, aux termes de laquelle de nouveaux rehaussements leur ont été notifiés, au titre des mêmes années, du fait d'une part du refus de la déduction des frais qui leur ont été facturés le 31 décembre 2004, d'autre part de l'imposition des loyers que les intéressés ont renoncé à percevoir ; que, par jugement du 25 mai 2012, le Tribunal administratif de Nîmes, après avoir constaté un non-lieu à statuer sur les impositions de l'année 2006, a rejeté la demande de M. et Mme B... tendant à la décharge de ces nouvelles impositions, pour les années 2007 et 2008, qui avaient été mises en recouvrement le 27 octobre 2010 en matière d'impôt sur le revenu et le 16 novembre 2010 en matière de prélèvements sociaux ; que M. et Mme B... relèvent appel de ces deux jugements ;

Sur la renonciation à la perception de loyers :

3. Considérant qu'aux termes de l'article 28 du code général des impôts : " Le revenu net foncier est égal à la différence entre le montant du revenu brut et le total des charges de la propriété. " ; qu'aux termes de l'article 29 du même code : " Sous réserve des dispositions des articles 33 ter et 33 quater, le revenu brut des immeubles ou parties d'immeubles donnés en location, est constitué par le montant des recettes brutes perçues par le propriétaire, augmenté du montant des dépenses incombant normalement à ce dernier et mises par les conventions à la charge des locataires et diminué du montant des dépenses supportées par le propriétaire pour le compte des locataires (...). " ;

4. Considérant que M. et Mme B... sont propriétaires d'un bâtiment industriel à usage d'entrepôt qu'ils ont donné en location, par bail commercial en date du 20 décembre 1999, à la SAS Métaux Moteurs, qui est dirigée par leur fils ; qu'en vertu de l'article 9 de ce bail, ils n'ont perçu aucun loyer pour les années 2000 à 2002, " en raison de l'importance des travaux de gros entretien " ; que le bail prévoyait qu'ensuite les locataires devaient verser une somme de 216 500 francs (33 052 euros), somme actualisée en tenant compte de l'indice national du coût de la construction ; que, de 2003 à 2005, le loyer a toutefois été fixé à 10 000 euros par an, par avenant au bail en date du 1er janvier 2003 ; que M. et Mme B... indiquent n'avoir perçu aucune somme durant ces années, le montant des loyers étant compensé selon eux par celui des travaux refacturés par la SAS Métaux Moteurs ; qu'à compter de l'année 2006, ils ont perçu des loyers, d'un montant toutefois inférieur au prix fixé par le bail ; que l'administration, après avoir constaté que, de 2004 à 2008, M. et Mme B... avaient renoncé à percevoir une partie des loyers dus en application du bail commercial signé le 20 décembre 1999, a réintégré la différence dans leurs revenus fonciers ;

5. Considérant qu'il appartient à l'administration, lorsque comme en l'espèce le contribuable a refusé la rectification, d'établir que la renonciation à percevoir une partie des loyers procède d'un acte de disposition constitutif d'une libéralité au profit du preneur ;

6. Considérant que la circonstance que M. et Mme B... n'ont reçu aucune somme de leurs locataires à compter de l'année 2003, du fait de la compensation alléguée entre les loyers et les sommes qui leur étaient refacturées, ne les dispensait pas de déclarer lesdits revenus fonciers au cours de ces années ;

7. Considérant que, pour justifier avoir renoncé à percevoir une partie des loyers prévus par le bail commercial, M. et Mme B... font valoir que la SAS Métaux Moteurs avait avancé le montant des travaux entrepris sur le bâtiment mis en location, lesquels leur ont été refacturés les 29 décembre 2003 et 31 décembre 2004 et soutiennent que ladite société n'aurait pu prendre en charge à la fois ces travaux et les loyers prévus au bail sans se trouver en situation déficitaire, d'une part et qu'ils avaient eux-mêmes intérêt à ce que la SAS Métaux Moteurs avançât le coût des travaux, qui étaient indispensables pour que les locaux puissent continuer à être loués, d'autre part ; que, s'ils font état à l'appui de leurs allégations du montant des bénéfices réalisés par la société Métaux Moteurs en 2001, 2002 et 2003, lesquels étaient proches du montant des loyers qui auraient pu être exigés durant ces années, ce seul élément ne peut permettre d'établir la réalité de difficultés financières de la SAS Métaux Moteurs au cours des années 2004 à 2008, lesquelles ne sont pas établies par les pièces produites ; que, par ailleurs, il résulte de l'instruction que M. et Mme B..., à qui incombaient seulement, en vertu du bail commercial, les travaux de grosses réparations prévus à l'article 606 du code civil, ont pris en charge des travaux qui étaient à la charge du locataire, notamment la remise en état du système électrique du bâtiment ; qu'ils ne justifient ainsi pas que la renonciation à percevoir des loyers aurait été principalement motivée pour eux par la volonté de ne pas avancer des frais qui étaient à leur charge ; que, dans ces conditions, l'administration établit que la renonciation à percevoir une partie des loyers était constitutive d'une libéralité consentie en faveur de la SAS Métaux Moteurs ;

Sur la déduction de charges :

8. Considérant qu'aux termes de l'article 31 du code général des impôts, dans sa rédaction alors applicable : " I. Les charges de la propriété déductibles pour la détermination du revenu net comprennent : 1° Pour les propriétés urbaines : a) Les dépenses de réparation et d'entretien, les frais de gérance et de rémunération des gardes et concierges, effectivement supportés par le propriétaire ; (...) b) Les dépenses d'amélioration afférentes aux locaux d'habitation, à l'exclusion des frais correspondant à des travaux de construction, de reconstruction ou d'agrandissement ; b bis) Les dépenses d'amélioration afférentes aux locaux professionnels et commerciaux destinées à protéger ces locaux des effets de l'amiante ou à faciliter l'accueil des handicapés, à l'exclusion des frais correspondant à des travaux de construction, de reconstruction ou d'agrandissement ; "; qu'il résulte des dispositions précitées que s'agissant, comme en l'espèce, de travaux réalisés dans un local professionnel ou commercial et sans lien avec l'accueil des handicapés ou la protection des effets de l'amiante, seules les dépenses correspondant à des travaux de réparation et d'entretien sont déductibles ;

9. Considérant qu'il appartient au contribuable qui entend déduire de son revenu brut les dépenses constituant, selon lui, des charges de la propriété, de justifier de la réalité, de la consistance et par suite du caractère déductible de ces charges ;

10. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, la SAS Métaux Moteurs, locataire du bien, a refacturé à M. et MmeB..., les 29 décembre 2003 et 31 décembre 2004, des travaux qu'elle avait entrepris ; qu'il ressort des écritures mêmes des requérants que les travaux électriques étaient des travaux de mise en conformité, l'ancienne installation ne satisfaisant plus aux normes en vigueur, que la pose d'un volet roulant visait à remplacer la vieille porte basculante qui n'offrait pas une sécurité suffisante et que l'ancien système de climatisation à air pulsé, qui était hors d'usage, a été remplacé par un système de pompes à chaleur réversible, consommant peu d'énergie ; que ces travaux, qui apportaient une valeur nouvelle au bien, étaient des travaux d'amélioration non déductibles des revenus fonciers ; que, s'agissant des travaux de reprise des façades, lesquelles étaient selon eux gravement fissurées et menaçaient tant la sécurité des passants que l'étanchéité du bâtiment, et de la verrière, laquelle risquait de s'effondrer, les intéressés n'apportent aucun élément précis sur la nature de ces travaux et n'établissent par suite pas qu'ils consistaient en de simples travaux visant à maintenir ou à remettre en état l'existant ; que, par suite, les dépenses refacturées à M. et Mme B... n'étaient pas déductibles de leurs revenus fonciers ;

11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, le Tribunal administratif de Nîmes a rejeté leurs demandes ;

DÉCIDE :

Article 1er : Les requêtes de M. et Mme B... sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A...B..., ainsi qu'au ministre de l'économie et des finances.

Délibéré après l'audience du 4 février 2014 à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Samson, président-assesseur,

M. Besse, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 25 février 2014.

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N° 11LY22124, ...

jb


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11LY22124
Date de la décision : 25/02/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-02 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Revenus fonciers.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: M. Thierry BESSE
Rapporteur public ?: M. LEVY BEN CHETON
Avocat(s) : SELARL CABINET PATRICK ITEY

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2014-02-25;11ly22124 ?
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