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30/01/2014 | FRANCE | N°13LY01763

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 30 janvier 2014, 13LY01763


Vu la requête, enregistrée le 5 juillet 2013 au greffe de la Cour, présentée pour M. B... A...et Mme C...A..., domiciliés chez Point d'Eau, 31 rue Blanche Monnier à Grenoble (38000) ;

M. et Mme A...demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°s 1301456-1301466 du 4 juin 2013 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des arrêtés n°s 2012-EC-111 A et 2012-EC-112 A du 12 novembre 2012 du préfet de l'Isère les obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et désignant le pays à

destination duquel ils pourront être reconduits d'office à l'expiration de ce d...

Vu la requête, enregistrée le 5 juillet 2013 au greffe de la Cour, présentée pour M. B... A...et Mme C...A..., domiciliés chez Point d'Eau, 31 rue Blanche Monnier à Grenoble (38000) ;

M. et Mme A...demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°s 1301456-1301466 du 4 juin 2013 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des arrêtés n°s 2012-EC-111 A et 2012-EC-112 A du 12 novembre 2012 du préfet de l'Isère les obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et désignant le pays à destination duquel ils pourront être reconduits d'office à l'expiration de ce délai ;

2°) d'annuler ces arrêtés ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à leur conseil d'une somme de 2 600 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Ils soutiennent :

- que les arrêtés litigieux ont été adoptés à l'issue d'une procédure irrégulière, en raison de la méconnaissance du droit d'être entendu, consacré par l'article 41, paragraphe 2, de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- que le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de leurs situations personnelles ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les ordonnances en date des 27 novembre 2013, 17 décembre 2013 et 17 décembre 2013 fixant la clôture d'instruction au 11 décembre 2013, rouvrant l'instruction et fixant une nouvelle clôture d'instruction au 2 janvier 2014, en application des articles R. 613-1 et R. 613-4 du code de justice administrative ;

Vu les mémoires en défense, enregistrés le 30 décembre 2013, présentés par le préfet de l'Isère, qui conclut au rejet de la requête, en renvoyant à ses mémoires en défense produits en première instance ;

Vu la lettre du 17 décembre 2013, par laquelle la Cour a demandé au préfet de verser au dossier la copie des fiches d'audition de M. et Mme A...qui ont été, le cas échéant, établies par les services de police ou par les services préfectoraux ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu les décisions du 18 juillet 2013, par lesquelles le bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Lyon (section administrative d'appel) a, d'une part, admis M. A...au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale et, d'autre part, refusé d'admettre Mme A...au bénéfice de l'aide juridictionnelle ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Vu la décision du président de la formation de jugement dispensant le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience, en application des articles L. 732-1 et R 732-1-1 du code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu, au cours de l'audience publique du 9 janvier 2014, le rapport de M. Meillier, conseiller ;

1. Considérant que M. B...A...et Mme C...A..., son épouse, ressortissants roumains nés respectivement en 1955 et 1959, déclarent être entrés en France le 10 octobre 2012 ; que, par arrêtés en date du 12 novembre 2012, le préfet de l'Isère les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a désigné le pays à destination duquel ils pourront être reconduits d'office à l'expiration de ce délai ; que, par jugement unique du 4 juin 2013, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté les demandes de M. et Mme A...tendant à l'annulation de ces arrêtés ; que M. et Mme A...relèvent appel de ce jugement ;

Sur la légalité des arrêtés litigieux :

Sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-3-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative compétente peut, par décision motivée, obliger un ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne (...) ou un membre de sa famille à quitter le territoire français lorsqu'elle constate : / 1° Qu'il ne justifie plus d'aucun droit au séjour tel que prévu par les articles L. 121-1, L. 121-3 ou L. 121-4-1 ; / (...) L'autorité administrative compétente tient compte de l'ensemble des circonstances relatives à sa situation, notamment la durée du séjour de l'intéressé en France, son âge, son état de santé, sa situation familiale et économique, son intégration sociale et culturelle en France, et de l'intensité de ses liens avec son pays d'origine (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 121-1 du même code : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, tout citoyen de l'Union européenne (...) a le droit de séjourner en France pour une durée supérieure à trois mois s'il satisfait à l'une des conditions suivantes : / 1° S'il exerce une activité professionnelle en France ; / 2° S'il dispose pour lui et pour les membres de sa famille tels que visés au 4° de ressources suffisantes afin de ne pas devenir une charge pour le système d'assistance sociale, ainsi que d'une assurance maladie ; / 3° S'il est inscrit dans un établissement fonctionnant conformément aux dispositions législatives et réglementaires en vigueur pour y suivre à titre principal des études ou, dans ce cadre, une formation professionnelle, et garantit disposer d'une assurance maladie ainsi que de ressources suffisantes pour lui et pour les membres de sa famille tels que visés au 5° afin de ne pas devenir une charge pour le système d'assistance sociale ; / 4° S'il est un descendant direct âgé de moins de vingt et un ans ou à charge, ascendant direct à charge, conjoint, ascendant ou descendant direct à charge du conjoint, accompagnant ou rejoignant un ressortissant qui satisfait aux conditions énoncées aux 1° ou 2° ; / 5° S'il est le conjoint ou un enfant à charge accompagnant ou rejoignant un ressortissant qui satisfait aux conditions énoncées au 3° " ;

3. Considérant que le préfet doit procéder à un examen particulier de la situation personnelle de chaque étranger avant de prendre toute décision le concernant ;

4. Considérant que les arrêtés du 12 novembre 2012, rédigés dans des termes identiques et à l'aide de formules stéréotypées, se bornent à reproduire les conditions énumérées à l'article L. 121-1 précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en indiquant que M. et Mme A...ne justifient pas les remplir ; que ces arrêtés, qui ne statuent pas sur des demandes susceptibles de contenir des éléments de fait relatifs à la situation personnelle de M. et MmeA..., n'en mentionnent aucun, si ce n'est que les intéressés sont nés les 3 mai 1955 et 5 février 1959 en Roumanie, sont entrés en France depuis moins de trois mois et qu'ils ont fait l'objet de la même mesure du même jour ; que les requérants soutiennent que le préfet de l'Isère n'a ni recueilli leurs observations avant l'édiction de ses arrêtés, ni réuni d'informations relatives à leur situation personnelle et notamment à leur état de santé ; que ces allégations ne sont pas contredites par le préfet, qui s'était borné, dans ses mémoires en défense présentés en première instance, à indiquer que les intéressés avaient été mis à même de présenter leurs observations en présence d'un interprète le jour de la notification des arrêtés attaqués et qu'il avait pris en considération leur durée de séjour, leur âge et leur situation économique et familiale ; que, malgré la mesure d'instruction effectuée par la Cour, le préfet n'a produit aucune fiche d'audition susceptible de contenir des éléments relatifs à la situation des intéressés ; que les arrêtés attaqués ne mentionnent d'ailleurs pas l'état de santé de M. et MmeA..., alors que les requérants produisent des certificats médicaux établis antérieurement à ces arrêtés et indiquant que M. A...souffre d'hypertension et que Mme A...présente un goitre thyroïdien faisant suspecter une thyroïdite ; que, dans ces conditions, il ressort des pièces du dossier que le préfet de l'Isère a omis de réunir, avant de prendre les arrêtés attaqués, les éléments personnalisés qui lui auraient permis de décider du sort des intéressés en toute connaissance de cause ; que, dès lors, M. et Mme A...sont fondés à soutenir que ledit préfet n'a pas procédé à un examen particulier de leurs situations personnelles préalablement à l'adoption des arrêtés litigieux ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme A...sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté leurs demandes ;

Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :

6. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, partie perdante, le versement à Me Costa, avocat de M. et MmeA..., d'une somme de 1 000 euros au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me Costa renonce à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n°s 1301456-1301466 du 4 juin 2013 du Tribunal administratif de Grenoble est annulé.

Article 2 : Les arrêtés en date du 12 novembre 2012 du préfet de l'Isère obligeant M. et Mme A... à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant leur pays de destination sont annulés.

Article 3 : L'Etat versera une somme de 1 000 euros à Me Costa en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me Costa renonce à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...et Mme C...A...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 9 janvier 2014, à laquelle siégeaient :

M. Montsec, président de chambre,

Mme Mear, président assesseur,

M. Meillier, conseiller.

Lu en audience publique, le 30 janvier 2014.

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N° 13LY01763

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13LY01763
Date de la décision : 30/01/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Actes législatifs et administratifs - Validité des actes administratifs - motifs - Pouvoirs et obligations de l'administration - Obligation de procéder à un examen particulier de chaque demande.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. MONTSEC
Rapporteur ?: M. Charles MEILLIER
Rapporteur public ?: Mme CHEVALIER-AUBERT
Avocat(s) : COSTA et MLADENOVA-MAURICE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2014-01-30;13ly01763 ?
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