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09/01/2014 | FRANCE | N°13LY01247

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre - formation à 3, 09 janvier 2014, 13LY01247


Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés respectivement les 16 et 31 mai 2013, présentés pour le préfet du Rhône qui demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1300838 du 9 avril 2013 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a annulé ses décisions du 4 janvier 2013 par lesquelles il a refusé de délivrer un titre de séjour à M.B..., l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination, lui a enjoint de lui délivrer un titre de séjour d'un an portant la mention " vie privée et familiale

" dans un délai d'un mois et a mis à la charge de l'Etat une somme de 1 000 e...

Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés respectivement les 16 et 31 mai 2013, présentés pour le préfet du Rhône qui demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1300838 du 9 avril 2013 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a annulé ses décisions du 4 janvier 2013 par lesquelles il a refusé de délivrer un titre de séjour à M.B..., l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination, lui a enjoint de lui délivrer un titre de séjour d'un an portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois et a mis à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. B...devant le Tribunal administratif de Lyon ;

3°) de mettre à la charge de M. B...la somme de 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que c'est à tort que le Tribunal a estimé que l'intéressé remplissait la condition de dix années de résidence en France pour bénéficier d'un certificat de résidence d'un an prévu au 1 de l'article 6 de l'accord franco-algérien, sa présence effective et continue en France n'étant pas établie entre 2003 et 2008 ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu l'ordonnance en date du 10 septembre 2013 fixant la clôture d'instruction au 25 octobre 2013, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire, enregistré le 19 septembre 2013, présenté pour M. A...B...qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que la requête est tardive ;

Vu le mémoire, enregistré le 24 octobre 2013 et régularisé le 20 novembre 2013, présenté pour M. B...qui conclut aux mêmes fins que précédemment et demande en outre qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de l'Etat sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- c'est à bon droit que le Tribunal a estimé que le refus de titre de séjour a méconnu les stipulations de l'article 6-1 de l'accord franco-algérien ;

- la commission du titre de séjour n'a pas été consultée ;

- le préfet a insuffisamment motivé sa décision concernant sa durée de résidence en France en méconnaissance de l'article 3 de la loi du 11 juillet 1979,

- le refus de titre de séjour méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'erreur d'appréciation concernant ses conséquences sur sa vie privée et familiale,

- le préfet s'est cru en situation de compétence liée pour décider de prononcer une obligation de quitter le territoire ;

- l'obligation de quitter le territoire et la décision fixant le pays de destination doivent être annulées en raison de l'illégalité dont est entaché le refus de titre, elles sont insuffisamment motivées et dépourvues de base légale, méconnaissent les stipulations de l'article 6-1 de l'accord franco-algérien et les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentale et sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision relative au délai de départ est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et méconnaît les dispositions de la directive 2008/115/CE notamment au regard ses articles 5, 6, 7 et le II de l'article L. 511-1 ;

- les dispositions de l'article L. 511-1-III du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ont été méconnues ;

Vu l'ordonnance en date du 25 octobre 2013 reportant la clôture d'instruction au 13 novembre 2013, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles ;

Vu la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée, relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 décembre 2013 :

- le rapport de M. Segado, premier conseiller ;

- et les conclusions de Mme Vigier-Carrière, rapporteur public ;

1. Considérant que M.B..., ressortissant algérien né le 15 juillet 1973, est entré en France le 25 octobre 2001 sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa de court séjour valable 30 jours ; que l'asile territorial lui a été refusé le 30 décembre 2002 ; que le préfet de la Seine-Maritime lui a ensuite refusé, le 6 mars 2003, la délivrance d'un titre de séjour ; qu'à la suite d'une nouvelle demande de titre de séjour présentée le 29 mai 2008, le préfet du Rhône lui a le 23 octobre 2008 opposé un refus assorti de l'obligation de quitter le territoire français ; que, sur une autre demande de titre de séjour présentée sur le fondement des stipulations du 7 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, le préfet du Rhône a, par arrêté du 5 janvier 2010, opposé un nouveau refus, assorti d'une obligation de quitter le territoire français ; qu'enfin, M. B... a sollicité, le 18 avril 2012, la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des stipulations du 1 de l'article 6 de l'accord franco-algérien ; que, par décisions du 4 janvier 2013, le préfet du Rhône a refusé de délivrer à M. B...un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ; que le préfet du Rhône relève appel du jugement du 9 avril 2013 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a annulé ces décisions du 4 janvier 2013, lui a enjoint de lui délivrer un titre de séjour d'un an portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois et a mis à la charge de l'Etat la paiement d'une somme de 1 000 euros à M. B...en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Sur la fin de non-recevoir opposée par M. B... à la requête du préfet du Rhône :

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 776-9 du code de justice administrative, applicables au contentieux des obligations de quitter le territoire français et des arrêtés de reconduite à la frontière : " Le délai d'appel est d'un mois. Il court à compter du jour où le jugement a été notifié à la partie intéressée. Cette notification mentionne la possibilité de faire appel et le délai dans lequel cette voie de recours peut être exercée. (...) " ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le jugement attaqué a été notifié au préfet du Rhône le 15 avril 2013 ; que le délai de recours, lequel est un délai franc, expirait donc le 16 mai 2013 ; que la requête présentée par le préfet du Rhône a été enregistrée au greffe de la Cour le 16 mai 2013 ; qu'ainsi, et contrairement à ce que soutient l'intimé, cette requête a été introduite dans le délai d'un mois prévu par les dispositions précitées du code de justice administrative ; que, par suite, la fin de non-recevoir opposée par M.B..., tirée de la tardiveté de la requête, ne peut être accueillie ;

Sur la légalité des décisions en litige :

4. Considérant qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien susvisé : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : / 1) au ressortissant algérien qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans ou plus de quinze ans si, au cours de cette période, il a séjourné en qualité d'étudiant (...) " ;

5. Considérant que pour annuler les décisions en litige, le Tribunal administratif de Lyon a jugé que M. B...justifiait de plus de dix ans de résidence habituelle en France entre la fin de l'année 2001 et la fin de l'année 2012 et que le préfet a ainsi méconnu les stipulations du 1 de l'article 6 de l'accord franco-algérien en lui refusant la délivrance d'un titre de séjour ;

6. Considérant qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que M. B...a produit pour les années 2004 à 2006, des certificats rédigés de manière identique par un médecin généraliste se bornant à indiquer que l'intéressé est venu en consultation avec mention de la date de la visite, une promesse d'embauche d'une entreprise de plomberie réitérée à plusieurs reprises au cours de ces années toutes rédigées de manière identique, un courrier du service client des transports en commun lyonnais du 27 juillet 2005 faisant état de la création d'une carte de transport le 3 janvier 2005, sans qu'il soit justifié d'abonnements et de l'utilisation de ces transports en commun au cours de ces années, et une attestation datée du 12 octobre 2011 établie par un coiffeur mentionnant sa venue à son salon de coiffure une fois par mois depuis 2006 ; qu'il a produit également une attestation d'un médecin psychiatre se bornant à mentionner qu'il le voit depuis plusieurs années après son arrivée sur le territoire français le 25 octobre 2001 puis à nouveau en 2010, sans autres précisions, et qui ne permet pas d'établir sa présence en France au cours des années 2004 à 2006 ; qu'ainsi, l'intimé n'a pas produit des éléments suffisamment probants permettant d'établir le caractère habituel de sa présence en France au cours des années 2004 et 2006 ; que, dès lors, l'intéressé ne démontre pas l'existence d'un séjour habituel en France de plus de dix ans à la date du refus de titre de séjour contesté ; que, par suite, c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a annulé ces décisions pour le motif tiré de ce que le refus de séjour a méconnu les stipulations du 1 de l'article 6 de l'accord franco-algérien ;

7. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens présentés par M.B..., tant devant le Tribunal administratif de Lyon que devant la Cour, contre ces décisions ;

En ce qui concerne la légalité de la décision portant refus de titre de séjour :

8. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 susvisée : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : - restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police ; (...). " et qu'aux termes de l'article 3 de la même loi : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. " ;

9. Considérant que la décision contestée énonce les considérations de droit et les raisons de fait justifiant le refus de titre de séjour opposé à M. B...et est ainsi suffisamment motivée au regard des exigences de l'article 3 précité de la loi du 11 juillet 1979 ;

10. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

11. Considérant si M.B..., célibataire et sans enfant, soutient qu'il réside depuis plus de dix ans en France, il ne justifie pas d'une résidence habituelle en France entre 2004 et 2006 ; que, par ailleurs, M. B...a fait l'objet le 23 octobre 2008 d'un refus de délivrance de titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français à laquelle il n'a pas obtempéré alors que la légalité de ces dernières décisions a été confirmée par le Tribunal administratif de Lyon le 26 mars 2009 ; qu'il a ensuite fait l'objet le 5 janvier 2010 d'un nouveau refus de titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois à laquelle il n'a pas non plus obtempéré ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que sa présence en France serait indispensable en raison de son état de santé et il ne justifie pas d'une insertion particulière ; que s'il soutient que son père réside régulièrement en Seine-Maritime, il n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où résident notamment ses frères et soeurs ; qu'ainsi, compte tenu notamment des conditions de son séjour en France, la décision refusant à M. B...la délivrance d'un titre de séjour n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise ; qu'elle n'a, dès lors, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, dans les circonstances de l'espèce, elle n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur la situation personnelle de M. B... ;

12. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12 ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3. (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que le préfet est tenu de saisir la commission du titre de séjour du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement toutes les conditions prévues à l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou des ressortissants algériens qui remplissent effectivement les conditions des articles de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 qui ont une portée équivalente à celle de cet article, auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions ; que M. B...n'établit pas être au nombre des étrangers pouvant obtenir de plein droit un titre de séjour ; que, par suite, le préfet du Rhône n'était pas tenu de soumettre son cas à la commission du titre de séjour avant de rejeter sa demande ; que le moyen tiré du vice de procédure doit, dès lors, être écarté ;

En ce qui concerne la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

13. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; (...) " ;

14. Considérant qu'ainsi qu'il vient d'être exposé, le préfet du Rhône a refusé le 4 janvier 2013 la délivrance d'un titre de séjour à M. B...; qu'ainsi, à cette date, il était dans le cas prévu par les dispositions précitées du 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet peut faire obligation à un étranger de quitter le territoire français ;

15. Considérant, en deuxième lieu, que la motivation de l'obligation de quitter le territoire français prise sur le fondement du 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile se confond avec celle du refus de titre de séjour dont elle découle nécessairement et n'implique pas, par conséquent, dès lors que ce refus est lui-même motivé et que les dispositions législatives qui permettent d'assortir le refus de séjour d'une obligation de quitter le territoire français ont été rappelées, de mention spécifique pour respecter les exigences des dispositions susmentionnées du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'en l'espèce, l'arrêté contesté vise les dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et mentionne que M. B...fait l'objet d'un refus de délivrance de titre de séjour et précise qu'il s'agit d'une décision de refus de séjour assortie d'une obligation de quitter le territoire, permettant ainsi de connaître les considérations de droit ayant constitué le fondement de l'obligation de quitter le territoire français ; qu'ainsi, ce refus est suffisamment motivé ;

16. Considérant, en troisième lieu, que, comme il a été dit ci-dessus, la décision refusant de délivrer un titre de séjour à M. B...n'est pas entachée d'illégalité ; que, par suite, le moyen tiré, par la voie de l'exception, de l'illégalité de la décision de refus de titre doit être écarté ;

17. Considérant, en quatrième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier, et notamment des mentions portées sur l'arrêté litigieux, que le préfet se serait estimé tenu d'assortir son refus de titre d'une obligation de quitter le territoire et qu'il n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation de l'intéressé ;

18. Considérant, en cinquième lieu, que, comme il a été dit ci-dessus, M. B... ne remplissait pas les conditions pour bénéficier d'un certificat de résidence sur le fondement du 1 de l'article 6 de l'accord franco-algérien ; que, par suite, ces stipulations ne faisaient pas obstacles à ce que l'intéressé puisse faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français ;

19. Considérant, en sixième lieu, que, compte tenu des circonstances de l'espèce sus-décrites et alors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'éloignement de M. B... ferait obstacle à ce qu'il puisse bénéficier des soins que son état de santé nécessiterait, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

20. Considérant, en dernier lieu, que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est sans incidence sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire qui constitue une décision distincte de celle fixant le pays de destination ;

En ce qui concerne la légalité de la décision fixant le délai de départ volontaire :

21. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " II. Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification et peut solliciter, à cet effet, un dispositif d'aide au retour dans son pays d'origine. Eu égard à la situation personnelle de l'étranger, l'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours. Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions, qui ne sont pas incompatibles avec les dispositions notamment de l'article 7 de la directive du 16 décembre 2008 susvisée, relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier, que la décision d'accorder un délai de départ volontaire ou de ne pas accorder un tel délai, dont l'objet même est distinct de celui de la mesure d'éloignement, résulte d'un examen par l'administration de la situation personnelle de l'étranger, au regard de critères différents de ceux qui fondent l'obligation qui lui est faite de quitter le territoire français ;

22. Considérant que le préfet a accordé à M. B...un délai de départ volontaire de 30 jours identique à celui par principe prévu par les dispositions précitées du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que l'intéressé n'établit pas qu'un délai de départ volontaire supérieur à 30 jours aurait dû lui être accordé en raison notamment de son état de santé ; que les moyens tirés de l'appréciation manifestement erronée qu'aurait portée l'administration sur sa situation et de la méconnaissance des dispositions précitées du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peuvent donc qu'être écartés ;

En ce qui concerne la légalité de la décision fixant le pays de destination :

23. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. (...)L'obligation de quitter le territoire français fixe le pays à destination duquel l'étranger est renvoyé en cas d'exécution d'office " ; qu'aux termes de l'article L. 513-2 du même code : " L'étranger qui doit être reconduit à la frontière est éloigné : 1° A destination du pays dont il a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Commission des recours des réfugiés lui a reconnu le statut de réfugié ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ; 2° Ou à destination du pays qui lui a délivré un document de voyage en cours de validité ; 3° Ou à destination d'un autre pays dans lequel il est légalement admissible. Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 " ;

24. Considérant, en premier lieu, que la décision contestée, fixant l'Algérie comme pays de destination, est suffisamment motivée en droit par le visa des dispositions de l'article L. 511-1-I de code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui prévoient que la décision portant obligation de quitter le territoire français " fixe le pays à destination duquel l'étranger sera renvoyé s'il ne respecte pas le délai de départ volontaire " et de l'article L. 513-2 du même code ; que cette décision est suffisamment motivée en fait par l'indication que l'intéressé est de nationalité algérienne, qu'il pourra être reconduit d'office à la frontière du pays dont il a la nationalité ou de tout autre pays où il établit être légalement admissible, et qu'il n'établit pas que sa vie ou sa liberté est menacée ou qu'il est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dans le cadre de l'exécution de cette décision ;

25. Considérant en deuxième lieu, que, pour fixer le pays de destination, le préfet a pu légalement se fonder sur les dispositions précitées du I de l'article L. 511-1 et L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

26. Considérant, en troisième lieu, que pour les motifs indiqués ci-dessus, M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision fixant l'Algérie comme pays de destination en cas de reconduite forcée est illégale pour être fondée sur un refus de séjour et une obligation de quitter le territoire français eux-mêmes illégaux ;

27. Considérant, en quatrième lieu, que, pour les mêmes motifs que ceux exposés dans le cadre de l'examen de la légalité de l'obligation de quitter le territoire, les stipulations du 1 de l'article 6 de l'accord franco-algérien ne font pas obstacle à ce que l'intéressé soit éloigné à destination de l'Algérie ; que, par ailleurs, compte tenu des circonstances de l'espèce sus-décrites et alors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il ne puisse pas bénéficier dans son pays des soins que son état de santé nécessiterait, la décision fixant le pays n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

28. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants " ; qu'en se prévalant de son état de santé, alors qu'il n'est pas établi qu'il ne pourrait bénéficier d'un suivi médical dans son pays, l'intimé ne justifie pas qu'il serait exposé à des risques de traitements inhumains et dégradants dans son pays ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de destination aurait méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;

29. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préfet du Rhône est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a annulé ses décisions du 4 janvier 2013, lui a enjoint de délivrer à M. B...un titre de séjour d'un an portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois et a mis à la charge de l'Etat le paiement d'une somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

30. Considérant qu'il n'y a pas lieu dans les circonstances de l'espèce de faire droit aux conclusions présentées en appel par le préfet du Rhône, tendant à l'application de ces dispositions ; que l'Etat n'étant pas la partie perdante dans la présente instance, les conclusions présentées par M. B...sur le fondement de ces dispositions doivent être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Lyon n° 1300838 du 9 avril 2013 est annulé.

Article 2 : Les conclusions de M. B...sont rejetées.

Article 3 : Les conclusions du préfet du Rhône tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Rhône et au procureur de la République près le Tribunal de grande instance de Lyon.

Délibéré après l'audience du 19 décembre 2013, à laquelle siégeaient :

M. Clot, président de chambre,

M. Seillet, président-assesseur,

M. Segado, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 9 janvier 2014.

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N° 13LY01247


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13LY01247
Date de la décision : 09/01/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. CLOT
Rapporteur ?: M. Juan SEGADO
Rapporteur public ?: Mme VIGIER-CARRIERE
Avocat(s) : MEZIANE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2014-01-09;13ly01247 ?
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