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09/01/2014 | FRANCE | N°13LY00611

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 09 janvier 2014, 13LY00611


Vu la requête, enregistrée le 9 mars 2013 au greffe de la Cour, présentée pour Mme D...B..., domiciliée ...cedex) ;

Mme B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1207408 du 7 février 2013 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 28 septembre 2012 par lesquelles le préfet du Rhône lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixé le pays de destination ;

2°) d'annuler lesdites décision

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3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer un titre de séjour l'autorisant...

Vu la requête, enregistrée le 9 mars 2013 au greffe de la Cour, présentée pour Mme D...B..., domiciliée ...cedex) ;

Mme B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1207408 du 7 février 2013 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 28 septembre 2012 par lesquelles le préfet du Rhône lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixé le pays de destination ;

2°) d'annuler lesdites décisions ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer un titre de séjour l'autorisant à travailler portant la mention " vie privée et familiale " sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter du prononcé de l'arrêt à intervenir ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros au profit de son conseil à charge pour ce dernier de renoncer au bénéfice de l'aide juridictionnelle ;

MmeB... soutient que :

- la décision portant refus de tire de séjour est intervenue en violation des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'illégalité par exception de l'illégalité de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour ;

- la décision fixant le pays de destination est entachée d'illégalité par exception de l'illégalité des décisions portant refus de délivrance d'un titre de séjour et obligation de quitter le territoire français et est intervenue en violation de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision fixant le pays de destination est intervenue en méconnaissance de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que Mme B... n'a jamais été valablement convoquée par la Cour nationale du droit d'asile et n'a pas été entendue sur son recours sur lequel ladite Cour n'a pas encore statué ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu la décision du 4 avril 2013 du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Lyon, admettant MmeB... au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 17 juillet 2013, présenté par le préfet du Rhône qui conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de Mme B...de la somme de 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Le préfet soutient que :

- s'il n'est pas contesté que le défaut de prise en charge de l'état de santé de Mme B... pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il ressort de l'instruction et notamment de l'avis émis par le médecin inspecteur de santé publique de l'agence régionale de santé en date du 18 juin 2012 qu'un traitement approprié existe au Congo ;

- le certificat médical produit en appel ne démontre pas l'indisponibilité des soins dans le pays d'origine ;

- si Mme B...soutient que son état de santé serait lié aux évènements qu'elle aurait vécus au Congo, les instances compétentes en matière d'asile n'ont pas considéré comme établies les craintes alléguées et la requérante ne justifie pas qu'un retour dans son pays d'origine entraînerait une aggravation telle de son état de santé qu'elle présenterait un obstacle à une prise en charge appropriée ;

- il n'est pas établi que Mme B...ne pourrait pas bénéficier d'un suivi adapté au Congo alors qu'elle est originaire de Kinshasa où se trouve le centre neuro psycho pathologique de l'université de Kinshasa ;

- l'illégalité du refus de séjour n'étant pas démontrée, Mme B...n'est pas fondée à exciper de l'illégalité de cette décision pour contester l'obligation de quitter le territoire français ;

- pour les mêmes motifs que ceux retenus dans le cadre de l'examen de la légalité de la décision portant refus de titre de séjour en qualité d'étranger malade, le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaîtrait les dispositions de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté ;

- l'appelante n'est pas fondée à exciper de l'illégalité des décisions portant refus de délivrance d'un titre de séjour et obligation de quitter le territoire français pour solliciter l'annulation de celle fixant le pays de destination ;

- Mme B...ne produit aucun document de nature à établir que son retour au Congo présenterait un danger ;

- le recours en rectification d'erreur matérielle introduit par la requérante devant la Cour nationale du droit d'asile le 29 juin 2011 a été rejeté par la Cour par une décision du 20 avril 2012, notifiée le 16 mai 2012 ;

- dès lors que les conclusions de Mme B...sont vouées au rejet, l'Etat est fondé à solliciter le versement, par l'intéressée, d'une somme de 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la directive 2005/85 du 1er décembre 2005 relative à des normes minimales concernant la procédure d'octroi et de retrait du statut de réfugié dans les Etats membres ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et son décret d'application n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 décembre 2013 :

- le rapport de M. Bourrachot, président,

- et les conclusions de M. Levy Ben Cheton, rapporteur public ;

1. Considérant que MmeB..., ressortissante de la République démocratique du Congo, entrée irrégulièrement en France le 12 novembre 2009, a sollicité le statut de réfugié, qui lui a été refusé par une décision du 12 avril 2010 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée le 25 mai 2011 par une décision de la Cour nationale du droit d'asile ; que le recours en rectification d'erreur matérielle introduit par la requérante devant cette Cour le 29 juin 2011 a été rejeté par une décision du 20 avril 2012, notifiée le 16 mai suivant ; que, le 1er septembre 2011, Mme B...a présenté une demande de titre de séjour en se prévalant de son état de santé ; que, par arrêté du 28 septembre 2012, le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et désigné le pays à destination duquel elle serait reconduite à l'expiration de ce délai, à défaut pour elle d'obtempérer à l'obligation de quitter le territoire français qui lui était faite ; que Mme B...relève appel du jugement du 7 février 2013 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation dudit arrêté ;

Sur la légalité de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. Le médecin de l'agence régionale de santé ou, à Paris, le chef du service médical de la préfecture de police peut convoquer le demandeur pour une consultation médicale devant une commission médicale régionale dont la composition est fixée par décret en Conseil d'Etat " ;

3. Considérant que Mme B...fait valoir qu'elle souffre d'un état post traumatique avec un état dépressif nécessitant un suivi médico-psychologique qui n'est pas disponible en République démocratique du Congo ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier, et notamment de l'avis du 18 juin 2012 du médecin de l'agence régionale de santé que si le défaut de la prise en charge médicale de Mme B...peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, un traitement approprié à sa pathologie existe dans le pays dont elle originaire et que l'intéressée peut voyager sans risque vers ce pays ; que le certificat médical du 9 novembre 2012 ne précise pas que le traitement médicamenteux préconisé ne serait pas disponible en République Démocratique du Congo ; qu'ainsi, contrairement à ce que soutient MmeB..., le préfet du Rhône n'a pas méconnu les dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

4. Considérant que l'illégalité de la décision de refus de séjour opposée à Mme B... n'étant pas établie, l'intéressée n'est pas fondée à l'appui de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision du préfet du Rhône lui faisant obligation de quitter le territoire français, à exciper de l'illégalité de cette décision qui en constitue la base légale ;

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français: (...) - 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé ; (...) " ;

6. Considérant que, pour les motifs ci-avant énoncés dans le cadre de l'examen du respect des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, Mme B...n'est pas fondée à soutenir que la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français méconnaît les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du même code ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

7. Considérant que l'illégalité des décisions de refus de séjour et obligation de quitter le territoire français opposées à Mme B...n'étant pas établie, l'intéressée n'est pas fondée à l'appui de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision du préfet du Rhône fixant le pays de destination, à exciper de l'illégalité de ces décisions qui en constituent la base légale ;

8. Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants " ;

9. Considérant qu'en se bornant à soutenir qu'elle encourt des risques pour sa vie, sa liberté et son intégrité physique, Mme B...qui n'apporte aucune pièce de nature à corroborer ses allégations n'est pas fondée à soutenir que la décision litigieuse méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

10. Considérant que, si Mme B...soutient que cette décision ne lui permettrait pas d'assister à l'audience de la Cour nationale du droit d'asile, en méconnaissance du droit d'exercer un recours effectif devant une juridiction, protégé par les stipulations de l'article 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et par la directive du 1er décembre 2005 susvisée, il n'est, en tout état de cause, pas porté atteinte à ce droit lorsque l'étranger a, en vertu des textes de procédure applicables à ce litige, la faculté de se faire représenter devant cette juridiction par un conseil ou par toute autre personne ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du droit à un recours effectif doit être écarté ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées ; que si une personne publique qui n'a pas eu recours au ministère d'avocat peut néanmoins demander au juge le bénéfice de l'article L. 761-1 du code de justice administrative au titre des frais spécifiques exposés par elle à l'occasion de l'instance, elle ne saurait se borner à faire état d'un surcroît de travail de ses services et doit faire état précisément des frais qu'elle aurait exposés pour défendre à l'instance ; que le préfet du Rhône ne faisant état d'aucun frais précis, il y a lieu de rejeter ses conclusions tendant au remboursement de ses frais d'instance non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du préfet du Rhône tendant au remboursement de ses frais d'instance non compris dans les dépens sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D...B...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 10 décembre 2013 à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

M. A...et MmeC..., premiers conseillers.

Lu en audience publique, le 9 janvier 2014.

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N° 13LY00611


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13LY00611
Date de la décision : 09/01/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: M. François BOURRACHOT
Rapporteur public ?: M. LEVY BEN CHETON
Avocat(s) : OLONGO

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2014-01-09;13ly00611 ?
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