La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

12/12/2013 | FRANCE | N°13LY00661

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre - formation à 3, 12 décembre 2013, 13LY00661


Vu la requête, enregistrée le 12 mars 2013, présentée pour la commune de Saint-Martin d'Uriage (38410), représentée par son maire en exercice, complétée par un mémoire enregistré le 6 juin 2013 ;

La commune de Saint-Martin d'Uriage demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0900547 du 31 décembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble l'a condamnée à payer à Me C...en qualité de liquidateur judiciaire de la société Apollon la somme de 115 000 euros et à M. B...A...la somme de 1 500 euros en réparation des conséquences dommageables qu'a

comportées la réalisation de travaux de voirie durant les mois de septembre 2003 ...

Vu la requête, enregistrée le 12 mars 2013, présentée pour la commune de Saint-Martin d'Uriage (38410), représentée par son maire en exercice, complétée par un mémoire enregistré le 6 juin 2013 ;

La commune de Saint-Martin d'Uriage demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0900547 du 31 décembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble l'a condamnée à payer à Me C...en qualité de liquidateur judiciaire de la société Apollon la somme de 115 000 euros et à M. B...A...la somme de 1 500 euros en réparation des conséquences dommageables qu'a comportées la réalisation de travaux de voirie durant les mois de septembre 2003 à juillet 2004 ;

2°) de rejeter la demande présentée par Me C...et M. A...devant le tribunal administratif ;

3°) de mettre les dépens à la charge de Me C...et de M. A...et, à la charge de chacun, une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que la société Apollon n'a été concernée par les travaux que durant une courte période, de fin juin 2004 à juillet 2004 ; que l'accès à son établissement a toujours été possible ; qu'elle n'a donc subi aucun préjudice anormal et spécial ; qu'en ce qui concerne le préjudice, le Tribunal s'est borné à reprendre les données de l'expert, succinctes et imprécises, l'expert ayant confondu bénéfice et chiffre d'affaires ; que le chiffre d'affaires a commencé à diminuer dès janvier 2004, avant le début des travaux ; que n'a pas été précisé le prix retiré de la vente du fonds de commerce ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les deux mémoires, enregistrés le 7 juin 2013 et le mémoire, enregistré le 16 juillet 2013, présentés pour Me C...en qualité de liquidateur judiciaire de la société Apollon, et pour M. B...A...qui concluent :

- au rejet de la requête ;

- à ce que la somme de 1 500 euros que la commune de Saint-Martin d'Uriage a été condamnée à payer à M. A...par l'article 2 du jugement attaqué soit portée à 95 835,10 euros ;

- à la mise à la charge de la commune de Saint-Martin d'Uriage des dépens et d'une somme de 4 000 euros chacun au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Ils soutiennent que des travaux ont été réalisés dès septembre 2003 avenue des Thermes, aux abords de l'établissement de la société Apollon, ce qui en a gêné l'accès ; que cette situation a entraîné une chute du chiffre d'affaires ; qu'il en est résulté un préjudice anormal et spécial, tant pour la société Apollon, dont le préjudice s'élève à 115 000 euros, que pour son ancien gérant, M.A..., qui a perdu ses apports (7 500 euros), le montant de son compte courant d'associé (27 000 euros), la plus-value qu'il aurait pu réaliser (38 195 euros), a subi des troubles dans ses conditions d'existence (12 000 euros) et a dû payer une somme en qualité de caution (11 140,10 euros) ; que la note technique produite par la commune est dépourvue de valeur probante ;

Vu le mémoire, enregistré le 22 juillet 2013, présenté pour la commune de Saint-Martin d'Uriage qui conclut aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens et au rejet des conclusions de M.A... ;

Elle soutient en outre que M. A...doit supporter les dettes de la société à concurrence de ses apports ; que les pertes et les paiements allégués ne sont pas établis ;

Vu l'ordonnance du 14 juin 2013 fixant au 24 juillet 2013 la date de clôture de l'instruction ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 novembre 2013 :

- le rapport de M. Clot, président ;

- et les conclusions de Mme Vigier-Carrière, rapporteur public ;

1. Considérant que la commune de Saint-Martin d'Uriage fait appel du jugement du 31 décembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble l'a condamnée à payer à MeC..., en qualité de liquidateur judiciaire de la société Apollon, la somme de 115 000 euros et à M.A..., associé et gérant de cette société, la somme de 1 500 euros en réparation des conséquences dommageables de travaux de voirie réalisés durant les mois de septembre 2003 à juillet 2004 ; que par la voie d'un appel incident, M. A...demande que la somme qui lui a été allouée soit portée à 95 835,10 euros ;

Sur le principe de la responsabilité :

2. Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expert désigné par le juge des référés du Tribunal administratif de Grenoble, que du mois de septembre 2003 au mois de juillet 2004, la commune de Saint-Martin d'Uriage a fait réaliser d'importants travaux de voirie pour l'aménagement de l'entrée de la station thermale, notamment avenue des Thermes, voie où la société Apollon, dont le gérant était M.A..., exploitait, depuis le mois de septembre 2002, un salon de coiffure et d'esthétique ; qu'il en est résulté une forte diminution des possibilités de stationnement à proximité de ce commerce, une interruption de la liaison piétonnière avec le centre de la station, malgré la signalisation mise en place, ainsi que des nuisances sonores ; que le chiffre d'affaires moyen mensuel de cet établissement, de 13 444 euros pour les mois de septembre à décembre 2002 et de 14 052 euros en 2003, n'a toutefois été que de 13 186 euros et 13 586 euros en octobre et novembre 2003 ; qu'il n'a atteint que 5 245 euros en moyenne en 2004, année au cours de laquelle il a régulièrement diminué, passant de 9 483 euros en janvier 2004 à 2 442 euros en décembre 2004 ; que la société Apollon a été placée en redressement judiciaire par jugement du Tribunal de commerce de Grenoble du 3 juin 2005, puis en liquidation judiciaire par jugement du 19 août 2005 ; que si cette société avait été récemment créée, l'expert estime toutefois que, compte tenu de ses résultats en 2003, elle aurait dû, dans les mêmes conditions d'activité, parvenir, à tout le moins, à un résultat d'exploitation équilibré en 2004 ; que si la commune fait valoir que l'établissement n'a, en réalité, subi des nuisances du fait des travaux que durant les seuls mois de juin et juillet 2004, il résulte de l'analyse du calendrier des travaux à laquelle s'est livré l'expert que son activité en a été affectée dès la fin de l'année 2003 et, de manière plus significative à partir du mois de mars 2004 ; qu'ainsi, ces travaux ont causé à la société Apollon un dommage grave et spécial, dont elle est fondée, de même que son associé, M. A..., à demander réparation à la commune de Saint-Martin d'Uriage, alors même qu'aucun autre commerçant n'aurait formulé de réclamation ;

Sur le préjudice de la société Apollon :

3. Considérant que, alors que, selon l'expert, compte tenu de ses résultats de l'année 2003, son résultat d'exploitation aurait dû atteindre l'équilibre en 2004, le résultat net de la société Apollon a été déficitaire de 38 277 euros ; que, dès lors, elle a droit à ce titre à une indemnité que le Tribunal n'a pas commis d'erreur en la fixant à 30 000 euros, compte tenu notamment de ce qu'elle avait cessé son activité d'esthétique ; que sur la base des données comptables de 2003, l'expert a estimé la valeur du fonds de commerce à 115 000 euros, alors que ce fonds n'a été cédé, dans le cadre de la liquidation judiciaire, que pour 45 000 euros ; qu'ainsi, il en est résulté une perte de 70 000 euros ; qu'enfin, l'expert a évalué à 15 000 euros les dépenses nettes liées à la liquidation de la société ; que, dès lors, le préjudice de celle-ci est de 115 000 euros ;

Sur le préjudice de M.A... :

4. Considérant que la perte des apports de M. A...à la société Apollon et du solde de son compte courant d'associé dans cette société ne constituent pas pour lui un préjudice indemnisable distinct de celui subi par celle-ci, dont la réparation incombe à la commune de Saint-Martin d'Uriage ; que la perte de la plus-value qu'il aurait été susceptible de réaliser lors de la revente de son fonds de commerce n'a qu'un caractère éventuel ; que M. A...a été condamné en qualité de caution à verser les loyers restés impayés de la société Apollon ; que le tribunal administratif n'a pas fait une inexacte évaluation des troubles de toute nature subis par l'intéressé en les fixant à la somme de 1 500 euros ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la commune de Saint-Martin d'Uriage n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble l'a condamnée à payer au liquidateur de la société Apollon et à M. A... les sommes de, respectivement, 115 000 euros et 1 500 euros ; que M. A...n'est pas fondé à demander, par la voie de l'appel incident, la majoration de l'indemnité qui lui a été allouée ;

6. Considérant que les dépens doivent, dans les circonstances de l'espèce et comme l'a décidé le tribunal administratif, être laissés à la charge de la commune de Saint-Martin d'Uriage ; que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de Me C..., liquidateur judiciaire de la société Apollon, ou de M. A..., qui ne sont pas, dans la présente instance, les parties perdantes ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la commune de Saint-Martin d'Uriage, en application de ces dispositions, le paiement à Me C... d'une somme de 750 euros et de la même somme à M.A... ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la commune de Saint-Martin d'Uriage est rejetée.

Article 2 : La commune de Saint-Martin d'Uriage versera, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 750 euros à Me C...et la même somme à M. A....

Article 3 : Le surplus des conclusions de Me C...et de M. A... est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Saint-Martin d'Uriage, à Me C...en qualité de liquidateur judiciaire de la société Apollon et à M. B... A....

Délibéré après l'audience du 21 novembre 2013 à laquelle siégeaient :

M. Clot, président de chambre,

M. Seillet, président-assesseur,

M. Poitreau, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 12 décembre 2013.

''

''

''

''

2

N° 13LY00661


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13LY00661
Date de la décision : 12/12/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

67-03-04-01 Travaux publics. Différentes catégories de dommages. Dommages créés par l'exécution des travaux publics. Travaux publics de voirie.


Composition du Tribunal
Président : M. CLOT
Rapporteur ?: M. Jean-Pierre CLOT
Rapporteur public ?: Mme VIGIER-CARRIERE
Avocat(s) : MARTIN MARIE GUILLON

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2013-12-12;13ly00661 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award