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28/11/2013 | FRANCE | N°13LY00767

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre - formation à 3, 28 novembre 2013, 13LY00767


Vu la requête, enregistrée le 22 mars 2013, présentée pour M.C..., domicilié ... ;

M. C...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°1004846 du 15 janvier 2013 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a annulé la décision du 30 juin 2010 par laquelle le ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique a retiré sa décision rejetant implicitement son recours hiérarchique et a annulé la décision de l'inspectrice du travail autorisant la société MSA GALLET à le licencier ;

2°) de rejeter la demande présentée par la société MSA

GALLET ;

Il soutient que :

- la décision du 4 janvier 2010 prononçant son licencieme...

Vu la requête, enregistrée le 22 mars 2013, présentée pour M.C..., domicilié ... ;

M. C...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°1004846 du 15 janvier 2013 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a annulé la décision du 30 juin 2010 par laquelle le ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique a retiré sa décision rejetant implicitement son recours hiérarchique et a annulé la décision de l'inspectrice du travail autorisant la société MSA GALLET à le licencier ;

2°) de rejeter la demande présentée par la société MSA GALLET ;

Il soutient que :

- la décision du 4 janvier 2010 prononçant son licenciement n'est pas motivée ;

- le comité d'entreprise a émis un avis défavorable à son licenciement auquel il n'a pas pu avoir accès, son employeur ayant refusé de lui communiquer bien qu'il en ait expressément formulé la demande ;

- les premiers juges auraient dû écarter les courriels de Mme F...en date des 16 mars et 16 novembre 2009 qui sont étrangers au litige lié aux suites de l'incident des 22 et 23 juillet 2009 à l'origine de la sanction disciplinaire du 17 septembre 2009 ;

- pour annuler la décision en litige les premiers juges se sont fondés sur des faits qui n'étaient pas établis et qui ont déjà donné lieu à une sanction prononcée le 17 septembre 2009 ;

- l'employeur ne rapporte pas la preuve que le comportement déplacé qu'il aurait adopté envers Mlle A...aurait désorganisé l'entreprise ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu l'ordonnance du 17 juin 2013 fixant au 5 juillet 2013 la date de clôture de l'instruction ;

Vu le mémoire, enregistré le 27 juin 2013, présenté pour la société MSA GALLET qui conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge de M. C...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- eu égard aux conclusions que comportent sa requête, M. C...ne justifie pas d'un intérêt pour faire appel ;

- le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision de licenciement est inopérant ;

- le requérant ne justifie pas des raisons pour lesquelles certaines pièces devraient être écartées des débats ;

- le moyen tiré de ce que les premiers juges se seraient fondés sur des faits qui avaient déjà été sanctionnés manque en fait dès lors que le comportement déplacé auquel il est fait référence dans la demande d'autorisation de licenciement concerne des faits se rapportant à l'attitude observée par M. C...à l'égard de MmeB... ainsi que des propos tenus à l'égard de Mlle A...postérieurement à la sanction initialement prononcée ;

- le comportement déplacé de M. C...présente un caractère déterminant et justifie à lui seul l'autorisation qui lui avait été accordée par l'inspectrice du travail ;

Vu l'ordonnance du 1er juillet 2013 reportant au 26 juillet 2013 la date de clôture de l'instruction ;

Vu le mémoire, enregistré le 26 juillet 2013, présenté pour M. C...qui conclut aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens ; M. C...demande en outre qu'une somme de 10 000 euros soit mise à la charge de la société MSA GALLET en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient en outre que :

- contrairement à ce que fait valoir la société MSA GALLET les conclusions dont il a saisi la Cour sont bien recevables dès lors qu'elles tendent à l'annulation du jugement en ce qu'il a annulé la décision du ministre qui a annulé la décision de l'inspectrice du travail autorisant son licenciement ;

- la procédure de licenciement est entachée d'irrégularité dès lors qu'il ressort du compte rendu de l'entretien préalable qui a été signé par le délégué qui l'assistait lors de cet entretien que son employeur avait déjà pris la décision de le licencier avant cet entretien ;

Vu l'ordonnance du 2 août 2013 portant réouverture de l'instruction ;

Vu la mise en demeure, du 27 août 2013, adressée au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, de produire dans un délai de quinze jours ses conclusions en réponse à la requête ;

Vu l'ordonnance du 27 août 2013 fixant au 27 septembre 2013 la date de clôture de l'instruction ;

Vu le mémoire, enregistré le 27 septembre 2013, présenté pour M.C..., qui maintient ses conclusions par les mêmes moyens ;

Vu l'ordonnance du 3 octobre 2013 portant réouverture de l'instruction ;

Vu les mémoires, enregistrés les 31 octobre et 4 novembre 2013, présentés pour M. C..., qui maintient ses conclusions par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 novembre 2013 :

- le rapport de M. Poitreau, premier conseiller ;

- les conclusions de Mme Vigier-Carrière, rapporteur public ;

- et les observations de Me de la Lande, avocat de M.C..., et de Me Duverneuil, avocat de la société MSA GALLET ;

1. Considérant que la société MSA GALLET, qui a pour activité la fabrication d'équipements de sécurité, a sollicité l'autorisation de licencier, pour faute, M.C..., responsable commercial, candidat aux élections des délégués du personnel du 26 octobre 2009 ; que, par décision en date du 22 décembre 2009, l'inspectrice du travail de la 3ème section de l'Ain a accordé l'autorisation ainsi sollicitée ; que, suite au recours hiérarchique exercé par M.C..., le ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique a, par décision du 30 juin 2010, retiré sa décision rejetant implicitement le recours hiérarchique dont il était saisi, annulé la décision de l'inspectrice du travail du 22 décembre 2009 et estimé qu'il n'y avait plus lieu à statuer sur la demande d'autorisation de licenciement de la société MSA GALLET ; que M. C...fait appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Lyon a annulé la décision du ministre en tant qu'elle retire la décision rejetant implicitement son recours hiérarchique et annule la décision de l'inspectrice du travail autorisant son licenciement ;

2. Considérant qu'en vertu des dispositions du code du travail, les salariés légalement investis de fonctions représentatives bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que lorsque le licenciement de l'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou avec l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail saisi et, le cas échéant, au ministre compétent de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement, compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi ; qu'en outre, pour refuser l'autorisation sollicitée, l'autorité administrative a la faculté de retenir des motifs d'intérêt général relevant de son pouvoir d'appréciation de l'opportunité, sous réserve qu'une atteinte excessive ne soit pas portée à l'un ou l'autre des intérêts en présence ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'au cours du premier semestre de l'année 2009, à la suite d'une réorganisation de l'entreprise, le secteur Maghreb jusqu'alors confié à M.C... a été attribué à un autre salarié ; qu'en septembre de la même année, l'intéressé a fait l'objet d'une mise à pied disciplinaire de cinq jours eu égard au comportement inapproprié qu'il avait adopté au mois de juillet précédent à l'égard d'une jeune collaboratrice lors d'un déplacement professionnel ; qu'il ressort des pièces du dossier que ces faits, relatifs au comportement adopté par M. C...à l'égard d'une jeune collaboratrice, ne figuraient pas au nombre des griefs que comportaient la demande d'autorisation de licenciement présentée par la société MSA GALLET, ni au nombre des motifs de la décision du ministre en litige ; qu'au demeurant, comme le fait valoir M.C..., les faits en cause, qui avaient déjà été sanctionnés par la société MSA GALLET, ne pouvaient donner lieu à une nouvelle sanction ; que, par suite, c'est à tort que, pour annuler la décision du ministre en litige, les premiers juges se sont fondés sur le motif tiré de ce que les faits relatifs au comportement inapproprié de M. C...à l'égard d'une de ses collaboratrices étaient établis et d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement ;

4. Considérant toutefois qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par la société MSA GALLET tant devant le Tribunal administratif de Lyon que devant la Cour ;

5. Considérant qu'à la suite de la sanction de mise à pied disciplinaire de cinq jours dont il a fait l'objet en conséquence des faits relatifs au comportement inapproprié qu'il avait adopté à l'égard d'une jeune collaboratrice, M. C...a adressé plusieurs courriers à la direction de la société MSA GALLET ainsi qu'à la direction internationale du groupe, en affirmant, d'une part, que cette sanction disciplinaire reposait sur de fausses accusations, alors qu'il ressort des pièces du dossier que les faits à l'origine de la sanction précitée ont été dénoncés par la salariée qui en a été victime et dont les accusations ont été corroborées par la teneur de plusieurs messages électroniques que lui avaient adressés M.C..., et, d'autre part, que la mesure de réorganisation qui avait conduit à confier à un autre salarié le secteur Maghreb ne répondait pas à des considérations professionnelles mais était inspirée par la volonté de lui nuire, alors qu'il ressort également des pièces du dossier que M. C...avait accepté la mesure de réorganisation ayant conduit à lui retirer le secteur géographique du Maghreb dans le cadre d'un avenant à son contrat de travail signé le 30 juin 2009 et qu'il n'apporte aucun élément propre à accréditer ses affirmations selon lesquelles cette mesure aurait été prise en vue de lui nuire professionnellement ;

6. Considérant qu'il ressort également des pièces du dossier que M. C...a affirmé, à plusieurs reprises, que le personnel dirigeant de la société MSA GALLET s'était fondé sur des " accusations mensongères " de la salariée qui l'avait mise en cause et avait conduit à cette occasion à son encontre une " instruction à charge ", voire une " cabale " et l'avait accusé d'avoir adopté un comportement à la limite du " harcèlement sexuel ", alors que ces accusations ne sont pas confirmées par lesdites pièces ; qu'il ressort aussi de ces pièces, et notamment du rapport rédigé par l'inspecteur du travail à la suite du recours hiérarchique, que M. C... a tenté de discréditer et de dénigrer la nouvelle organisation auprès de la direction internationale, à la veille de la présentation par la personne nouvellement en charge du secteur du Maghreb du budget 2010 auprès de la direction américaine du groupe, en mettant en cause son successeur et son supérieur hiérarchique ; qu'ainsi, M. C...a porté des accusations revêtant un caractère diffamatoire et qui constituent, en tant que telles, eu égard à la nature des fonctions occupées par ce salarié, une faute d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement ;

7. Considérant que le motif tiré du caractère diffamatoire des accusations portées par M. C... à l'égard de son employeur étant à lui seul de nature à justifier l'autorisation de licenciement accordée notamment pour ce motif par l'inspectrice du travail, le ministre, en annulant cette décision, en considérant que lesdites accusations ne présentaient pas un caractère fautif au motif qu'elles ressortissaient à l'exercice de la liberté d'expression reconnue au salarié dans l'entreprise, a entaché sa décision d'une erreur d'appréciation ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par la société MSA GALLET, que M. C...n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que M. C...ayant la qualité de partie perdante dans la présente instance, les conclusions qu'il a présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la société MSA GALLET sur le fondement du même article ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la société MSA GALLET au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. E...C..., au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social et à la société MSA GALLET.

Délibéré après l'audience du 7 novembre 2013 à laquelle siégeaient :

M. Seillet, président,

MM. D...et Poitreau, premiers conseillers.

Lu en audience publique, le 28 novembre 2013.

Le rapporteur,

G. Poitreau

Le président,

Ph. Seillet

Le greffier,

J. Billot

La République mande et ordonne au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition,

Le greffier,

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N° 13LY00767 6

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13LY00767
Date de la décision : 28/11/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-07-01-04-02 Travail et emploi. Licenciements. Autorisation administrative - Salariés protégés. Conditions de fond de l'autorisation ou du refus d'autorisation. Licenciement pour faute.


Composition du Tribunal
Président : M. SEILLET
Rapporteur ?: M. Gérard POITREAU
Rapporteur public ?: Mme VIGIER-CARRIERE
Avocat(s) : CABINET SCHUCKE-NIEL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2013-11-28;13ly00767 ?
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