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28/11/2013 | FRANCE | N°13LY00496

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 28 novembre 2013, 13LY00496


Vu la requête, enregistrée le 25 février 2013 au greffe de la Cour, présentée pour Mme C... B...épouseA..., domiciliée... ;

Mme B...épouse A...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1205367 du 30 octobre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 28 juin 2012 par lequel la préfète de la Loire lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et fixé le pays de destination ;

2°) d'annuler ledit arrêté pour excès de pou

voir ;

3°) d'enjoindre à la préfète de la Loire de lui délivrer une carte de séjour " vie ...

Vu la requête, enregistrée le 25 février 2013 au greffe de la Cour, présentée pour Mme C... B...épouseA..., domiciliée... ;

Mme B...épouse A...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1205367 du 30 octobre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 28 juin 2012 par lequel la préfète de la Loire lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et fixé le pays de destination ;

2°) d'annuler ledit arrêté pour excès de pouvoir ;

3°) d'enjoindre à la préfète de la Loire de lui délivrer une carte de séjour " vie privée et familiale " ou tout autre titre dans le délai de dix jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, ou à tout le moins une autorisation provisoire en vue du réexamen de sa demande, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au profit de son conseil à charge pour ce dernier de renoncer au bénéfice de l'aide juridictionnelle ;

Mme B...épouseA... soutient que :

- les décisions contestées méconnaissent les dispositions de l'article 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et celles de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant ;

- elle est mariée depuis le 25 août 2012 avec un compatriote qui a obtenu le statut de réfugié et est ainsi titulaire d'une carte de séjour d'une durée de dix ans ;

- le Tribunal a omis de statuer sur la violation de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant ainsi que sur l'application de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination sont illégales par voie d'exception de l'illégalité de la décision refusant la délivrance du titre de séjour ;

- la décision fixant le pays de renvoi a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur d'appréciation de la gravité de la situation de sa famille ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Lyon, du 10 janvier 2013, admettant Mme B...au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 4 juillet 2013, présenté par la préfète de la Loire qui conclut au rejet de la requête ;

La préfète de la Loire soutient que :

- le mariage de la requérante, qui n'a pas été porté à la connaissance du Tribunal, est postérieur à l'arrêté contesté et ne peut être pris en compte pour apprécier sa légalité ;

- le fait que le couple se soit marié en août 2012 n'est pas, par ailleurs, de nature à remettre en cause l'appréciation portée sur la réalité et la durée de la cohabitation entre les deux ressortissants kosovars, en l'absence de tout justificatif probant ;

- M. A...peut solliciter le bénéfice du regroupement familial s'il estime les conditions remplies ;

- le moyen tiré de la violation de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant n'a pas été soulevé en première instance ;

- la preuve que M. A...contribue à l'éducation et à l'entretien de son enfant n'est pas établie, nonobstant l'acte de reconnaissance signé le 30 mars 2012 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et son décret d'application n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Sur sa proposition, le rapporteur public a été dispensé de prononcer des conclusions à l'audience en application de l'article R. 732-1-1 du code de justice administrative par le président de la formation de jugement ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 novembre 2013 :

- le rapport de Mme Samson, président-assesseur ;

1. Considérant que Mme B...épouseA..., de nationalité kosovare, entrée en France à la date déclarée du 29 décembre 2009, à l'âge de dix-sept ans, accompagnée de sa famille, a sollicité le statut de réfugié qui lui a été refusé par une décision du 23 mars 2011 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée le 22 décembre 2011 par la Cour nationale du droit d'asile ; qu'elle a, le 18 juin 2012, présenté une demande de titre de séjour au titre de sa vie privée et familiale sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 et de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par arrêté du 28 juin 2012, la préfète de la Loire lui a refusé la délivrance du titre sollicité et a assorti sa décision d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, en fixant le pays de destination ; que Mme B...épouse A...relève appel du jugement n° 1205367 du 30 octobre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant que, ainsi que le soutient la requérante, le Tribunal administratif de Lyon a omis de statuer sur le moyen tiré de ce que l'arrêté du 28 juin 2012 de la préfète de la Loire méconnaîtrait les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; qu'il y a lieu, en conséquence, d'annuler le jugement attaqué du 30 octobre 2012 et, par la voie de l'évocation, de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mme B...devant le Tribunal administratif de Lyon ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

En ce qui concerne les décisions portant refus de délivrance d'un titre de séjour et obligation de quitter le territoire français :

3. Considérant, en premier lieu, que l'arrêté attaqué a été signé par M. Patrick Férin, secrétaire général de la préfecture de la Loire, titulaire d'une délégation de signature à cet effet par arrêté préfectoral du 10 février 2012, régulièrement publié au recueil des actes administratifs du même jour ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte attaqué doit être écarté ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. /2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l' exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

5. Considérant que si Mme B...épouseA..., arrivée en France en 2009, fait valoir qu'elle est mariée depuis le 25 août 2012 à un compatriote qui bénéficie du statut de réfugié et dont elle a eu un enfant le 30 mars 2012, il ressort toutefois des pièces du dossier que l'intéressée n'apporte aucune pièce probante permettant d'établir la communauté de vie avec son époux ni que ce dernier participerait à l'éducation et l'entretien de leur enfant ; que ses parents ont également fait l'objet d'une décision de refus de séjour et ont dès lors vocation à quitter le territoire français où ils séjournent en situation irrégulière ; que, compte tenu des circonstances de l'espèce, notamment de la durée et des conditions de séjour de Mme B...épouseA..., l'arrêté contesté n'a pas porté au respect dû à la vie familiale et personnelle de l'intéressée une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris et n'a, par suite, méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers en France et du droit d'asile ;

6. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. " ;

7. Considérant que Mme B...épouse A...ne fait état d'aucun motif exceptionnel ou considération humanitaire susceptible d'ouvrir droit à l'admission au séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 précité ;

8. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent des enfants, qu'elles soient le fait (...) des tribunaux, des autorités administratives (...), l'intérêt supérieur des enfants doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces dernières stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir formé contre une décision de refus de délivrance d'un titre de séjour, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;

9. Considérant que Mme B...épouse A...n'apporte aucune précision sur la participation de son époux à l'éducation de son enfant et n'est dès lors pas fondée à soutenir que la décision contestée aurait porté atteinte à l'intérêt supérieur de son enfant en méconnaissance de l'article 3-1 de la convention susvisée ;

10. Considérant, enfin, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision contestée serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de Mme B...épouse A...;

En ce qui concerne la décision désignant le pays de destination :

11. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède que les moyens tirés de l'exception d'illégalité des décisions de refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français et de l'incompétence de l'auteur de l'acte ne peuvent, pour les mêmes motifs que ceux précédemment évoqués, qu'être écartés ;

12. Considérant, en second lieu qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants " ;

13. Considérant que Mme B...épouseA..., n'établit, par aucune pièce, ni la réalité des risques auxquels elle serait exposée, selon elle, en cas de retour dans son pays d'origine, ni leur caractère personnel et actuel alors que tant l'Office français de protection des réfugiés et apatrides que la Cour nationale du droit d'asile ont estimé que ses assertions quant aux discriminations diverses dont elle a pu être victime en raison de son origine rom ne sont étayées par aucun élément probant ; que la décision désignant le pays de destination n'a, ainsi, pas méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

14. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme B...épouse A...n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêté du 28 juin 2012 de la préfète de la Loire ; que par voie de conséquences ses conclusions aux fins d'injonction ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

15. Considérant que l'Etat n'étant pas dans la présente instance la partie perdante, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à sa charge le paiement de la somme de 1 500 euros réclamée par la requérante au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1205367 du 30 octobre 2012 du Tribunal administratif de Lyon est annulé.

Article 2 : La demande de Mme B...épouse A...et le surplus des conclusions de sa requête sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...B...épouse A...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée à la préfète de la Loire.

Délibéré après l'audience du 12 novembre 2013 à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président,

Mme Samson, président-assesseur,

Mme Terrade, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 28 novembre 2013.

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N° 13LY00496


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13LY00496
Date de la décision : 28/11/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Dominique SAMSON
Rapporteur public ?: M. LEVY BEN CHETON
Avocat(s) : MAHDJOUB

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2013-11-28;13ly00496 ?
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