La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

05/11/2013 | FRANCE | N°13LY01644

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 05 novembre 2013, 13LY01644


Vu la requête, enregistrée le 25 juin 2013, présentée pour Mme B... épouseA..., domiciliée... ;

Mme A...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1300437-1300438 du 24 mai 2013 du Tribunal administratif de Grenoble rejetant sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 3 octobre 2012 par lequel le préfet de Haute-Savoie a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de 30 jours et a fixé le pays à destination duquel elle serait reconduite à l'expiration de ce délai ;

2°)

d'annuler lesdites décisions ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 ...

Vu la requête, enregistrée le 25 juin 2013, présentée pour Mme B... épouseA..., domiciliée... ;

Mme A...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1300437-1300438 du 24 mai 2013 du Tribunal administratif de Grenoble rejetant sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 3 octobre 2012 par lequel le préfet de Haute-Savoie a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de 30 jours et a fixé le pays à destination duquel elle serait reconduite à l'expiration de ce délai ;

2°) d'annuler lesdites décisions ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- dès lors qu'il n'a pas été précédé de l'avis du médecin de l'agence régionale de santé, le refus de titre de séjour méconnaît les dispositions de l'article L. 313-11-11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le refus de titre méconnaît encore ces mêmes dispositions, celles de l'article R. 313-22 ainsi que celles de l'instruction du ministre du travail du 10 novembre 2011 en ce qu'elles prévoient, en raison de circonstances humanitaires exceptionnelles, la consultation du directeur général de l'agence régionale de santé ;

- le préfet devait consulter la commission du titre de séjour avant de lui refuser ce titre ;

- dès lors qu'elle est entrée en France le 20 août 2009, accompagnée de son époux présentant des problèmes de santé au titre desquels il a obtenu une autorisation provisoire de séjour de six mois, et de leurs quatre enfants mineurs scolarisés, que leur dernier enfant est né sur le sol français et qu'elle a peu de liens avec son pays d'origine, ce refus de titre méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les dispositions de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'obligation de quitter le territoire français méconnaît les dispositions de l'article L. 511-4-10° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors que le stimulateur cardiaque qui lui a été implanté en 2009 nécessite un suivi régulier dont l'absence pourrait mettre en cause le pronostic vital ; l'accès aux soins étant particulièrement difficile, voire impossible au Kosovo, elle ne sera pas en mesure d'y bénéficier d'un traitement approprié en raison de ses faibles ressources ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les pièces desquelles il résulte que la requête a été notifiée au préfet de Haute-Savoie qui n'a pas produit d'observations ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention des Nations-Unies sur les droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Vu la décision par laquelle le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de présenter ses conclusions à l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 octobre 2013 :

- le rapport de Mme Courret, président-assesseur ;

1. Considérant que MmeA..., née le 12 août 1977, ressortissante du Kosovo, est entrée irrégulièrement en France accompagnée de son époux et de leurs quatre enfants mineurs à la date déclarée du 20 août 2009 ; qu'un cinquième enfant est né sur le sol français le 8 septembre 2011 ; que sa demande d'asile a été rejetée par décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 26 novembre 2009, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 28 janvier 2011 ; qu'elle a sollicité le 28 janvier 2010 la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par arrêté du 24 janvier 2012 le préfet de Haute-Savoie a rejeté sa demande et a assorti ce rejet de l'obligation de quitter le territoire français ; que sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté a été rejetée par un jugement du Tribunal administratif de Grenoble du 13 juillet 2012, confirmé par un arrêt de la Cour administrative d'appel de Lyon du 30 avril 2013 ; qu'elle a formulé une nouvelle demande d'asile qui a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 24 mai 2012 ; qu'elle a présenté le 29 juin 2012 un recours contre cette décision auprès de la Cour nationale du droit d'asile ; que Mme A...relève appel du jugement du 24 mai 2013 du Tribunal administratif de Grenoble rejetant sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 3 octobre 2012 par lequel le préfet de Haute-Savoie a rejeté sa demande de titre de séjour, assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire dans un délai de 30 jours et fixé le pays à destination duquel elle serait reconduite à l'expiration de ce délai ;

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...)11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. Le médecin de l'agence régionale de santé ou, à Paris, le chef du service médical de la préfecture de police peut convoquer le demandeur pour une consultation médicale devant une commission médicale régionale dont la composition est fixée par décret en Conseil d'Etat. " ; qu'en vertu de l'article L. 511-4 10° du même code un étranger dont l'état de santé répond aux conditions énoncées au 11° de l'article L. 313-11 ne peut faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire ; qu'enfin le 1er alinéa de l'article R. 313-22 du code dispose : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général. Par dérogation, à Paris, ce médecin est désigné par le préfet de police. " ;

3. Considérant que le préfet de Haute-Savoie a fondé la décision attaquée sur le rejet de sa nouvelle demande d'asile ; que, si Mme A...avait antérieurement sollicité la délivrance d'une carte de séjour sur le fondement de l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en invoquant un même état de santé, cette demande avait été rejetée par un arrêté du 24 janvier 2012 du préfet de Haute-Savoie, rejet confirmé par les juridictions administratives ; que la requérante qui n'a pas sollicité la délivrance d'une nouvelle carte de séjour à ce titre, ne peut, dès lors, utilement soutenir que l'administration était tenue de solliciter l'avis du médecin de l'agence régionale de santé publique ; qu'elle n'apporte, par ailleurs, aucun élément de nature à établir une circonstance humanitaire exceptionnelle ; que Mme A...fait valoir qu'un trouble de conduction de haut grade a nécessité l'implantation, en septembre 2009, d'un stimulateur cardiaque ; que toutefois le certificat médical qu'elle produit, qui précise les caractéristiques et le suivi d'un stimulateur cardiaque, n'établit pas l'absence, au Kosovo, de possibilité de suivi des patients munis d'un tel appareil ; qu'au contraire, un courrier de l'officier de liaison en poste à l'ambassade de France au Kosovo daté du 9 novembre 2011 indique que le service de cardiologie de la clinique universitaire de Pristina réalise les soins et le suivi des patients munis d'un pacemaker ; que si la requérante se réfère à un rapport de l'organisation suisse d'aide aux réfugiés, daté du 1er septembre 2010, qui fait état de difficultés d'accès aux soins dans ce pays, il ne permet pas, à lui-seul, de conclure à une indisponibilité du suivi particulier qui lui est nécessaire ; que si elle fait valoir l'insuffisance de ses ressources, elle ne fournit aucun élément de nature à démontrer qu'elle serait dans l'impossibilité financière d'accéder à ces soins, alors qu'elle a conservé au Kosovo des attaches familiales en la personne de ses parents et de deux frères ; qu'ainsi le moyen tiré de ce que la décision susmentionnée aurait méconnu les dispositions précitées doit être écarté ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte des dispositions de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le préfet est tenu de saisir la commission du titre de séjour du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions d'obtention du titre de séjour sollicité auxquels il envisage de refuser ce titre de séjour et non de celui de l'intégralité des étrangers qui se prévalent de ces dispositions ; que Mme A...n'étant pas au nombre des étrangers qui peuvent obtenir de plein droit un tel titre, le préfet de Haute-Savoie n'était pas tenu de soumettre son cas à la commission susmentionnée avant de rejeter sa demande ;

5. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1 Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2 Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

6. Considérant que Mme A...fait valoir que quatre de ses enfants sont scolarisés, que le cinquième est né sur le territoire français, qu'elle apporte la preuve de son intégration, qu'elle n'a conservé que peu de liens avec son pays d'origine et que son époux présente des problèmes de santé ; que toutefois, il ressort des pièces du dossier qu'à la date de la décision attaquée, Mme A... ne résidait en France que depuis trois ans et que son époux, dont les certificats médicaux sont postérieurs à ladite décision, ne fait l'objet que d'une autorisation provisoire de séjour d'une durée de six mois ; que la requérante n'établit, ni même n'allègue qu'elle ne pourrait pas mener une vie familiale normale avec son mari et ses enfants scolarisés au Kosovo, où résident ses parents ainsi que deux frères ; que, dans ces conditions, eu égard à la durée et aux conditions du séjour en France de la requérante, la décision contestée n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; qu'elle n'a, ainsi, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

7. Considérant, enfin, que si les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, aux termes desquelles dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale, sont directement applicables en droit interne, Mme A...n'est pas fondée à en invoquer le bénéfice dès lors que le refus de séjour qui lui a été opposé et l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire n'ont ni pour objet, ni pour effet de la séparer de ses enfants, la seule circonstance que ses enfants sont scolarisés en France ne suffisant pas à établir que leur intérêt supérieur serait de rester en France ;

8. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... épouse A...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de Haute-Savoie.

Délibéré après l'audience du 15 octobre 2013 à laquelle siégeaient :

- M. Martin, président de chambre,

- Mme Courret, président-assesseur,

- Mme Dèche, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 5 novembre 2013.

''

''

''

''

2

N° 13LY01644

id


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13LY01644
Date de la décision : 05/11/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. MARTIN
Rapporteur ?: Mme Catherine COURRET
Rapporteur public ?: Mme SCHMERBER
Avocat(s) : BLANC

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2013-11-05;13ly01644 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award