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05/11/2013 | FRANCE | N°13LY01104

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 05 novembre 2013, 13LY01104


Vu la requête, enregistrée le 2 mai 2013, présentée pour M. B... C..., domicilié ... ;

M. C... demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 1101013 du 5 mars 2013 du Tribunal administratif de Grenoble en tant, d'une part, qu'il a retenu l'existence d'une imprudence de sa part et par suite considéré que la responsabilité incombant à l'hôpital intercommunal de Morestel devait être fixée à la moitié des conséquences dommageables de son comportement et, d'autre part, l'a débouté de ses autres demandes indemnitaires ;

2°) de condamner l'hôpital in

tercommunal de Morestel au paiement d'une somme de 20 000 euros en réparation de son pré...

Vu la requête, enregistrée le 2 mai 2013, présentée pour M. B... C..., domicilié ... ;

M. C... demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 1101013 du 5 mars 2013 du Tribunal administratif de Grenoble en tant, d'une part, qu'il a retenu l'existence d'une imprudence de sa part et par suite considéré que la responsabilité incombant à l'hôpital intercommunal de Morestel devait être fixée à la moitié des conséquences dommageables de son comportement et, d'autre part, l'a débouté de ses autres demandes indemnitaires ;

2°) de condamner l'hôpital intercommunal de Morestel au paiement d'une somme de 20 000 euros en réparation de son préjudice moral et d'une somme de 10 000 euros en réparation de son préjudice personnel ;

3°) de mettre à la charge de l'hôpital intercommunal de Morestel une somme de 2 392 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- l'établissement hospitalier a commis des fautes dans le traitement de son dossier de demande de retraite anticipée de nature à engager sa responsabilité, en ce qu'il n'a pas vérifié qu'il remplissait les conditions de l'article 25-1 du décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003 pour en bénéficier ;

- aucune faute ou imprudence ne peut lui être opposée ; il a suivi les consignes données et a fourni les documents nécessaires demandés ; il a fait preuve de diligence auprès de son employeur en anticipant d'un peu plus de deux ans sa demande ; l'hôpital doit réparer l'ensemble du préjudice subi ;

- son préjudice est certain sur le plan moral ; en projetant de bénéficier d'une retraite anticipée, il avait organisé un projet de vie ; suite à l'abandon du projet, il a connu une grave dépression ;

- son préjudice est certain sur le plan professionnel, sa réintégration s'étant effectuée sur un poste différent de celui exercé auparavant et sur un mi-temps ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 5 juillet 2013, présenté pour l'hôpital local intercommunal de Morestel qui conclut, à titre principal, au rejet de la requête pour irrecevabilité, à titre subsidiaire, à l'annulation du jugement en tant qu'il a retenu sa responsabilité, au rejet de l'ensemble des demandes indemnitaires de M. C...et de mettre à sa charge une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- la requête est irrecevable ; il n'est pas établi qu'elle aurait respecté les dispositions de l'article R. 411-2 du code de justice administrative, la requête n'étant assortie ni de timbre fiscal, ni d'une demande d'aide juridictionnelle ;

- l'établissement hospitalier n'a commis aucune faute de nature à engager sa responsabilité, la décision d'admission à la retraite anticipée du requérant était une décision conditionnelle ; la décision a été prise à la demande de M. C...alors que l'établissement ne pouvait disposer de l'ensemble des informations nécessaires au traitement de sa demande ;

- le requérant a commis une imprudence ; il a été informé que seule la CNRACL disposait des informations indispensables pour apprécier ses droits à liquidation de pension, la décision litigieuse étant subordonnée à l'avis à intervenir de cette caisse ; l'agent a prévu son avenir sans prendre en compte ces réserves ;

- son préjudice moral n'est pas lié à la décision litigieuse ; l'hôpital n'est pas responsable de la circonstance qu'il ne disposait pas des conditions requises pour bénéficier d'une retraite anticipée ;

- il n'a subi aucun préjudice professionnel ; il a été réintégré rétroactivement à son poste ;

Vu le mémoire, enregistré le 7 août 2013, présenté pour M. C... qui persiste dans ses conclusions ;

Il soutient, en outre, que :

- sa requête est recevable ; il a déposé un dossier de demande d'aide juridictionnelle le 2 avril 2013, demande acceptée par une décision du 26 avril 2013 ;

Vu la décision du 26 avril 2013 par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Lyon, (section cour administrative d'appel) a accordé le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à M.C... ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

Vu la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaire relatives à la fonction publique hospitalière ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;

Vu le décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003 relatif au régime de retraite des agents des collectivités locales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 octobre 2013 :

- le rapport de Mme Courret, président-assesseur ;

- les conclusions de Mme Schmerber, rapporteur public ;

- et les observations de MeA..., représentant l'hôpital local intercommunal,de Morestel ;

1. Considérant que M.C..., qui exerçait les fonctions d'aide soignant à l'hôpital local intercommunal de Morestel, a sollicité le 29 décembre 2008, le bénéfice d'une retraite anticipée sur le fondement des dispositions alors applicables de l'article 25-1 du décret du 26décembre 2003 susvisé ; que, par une décision du 9 juin 2009, il a été admis à faire valoir ses droits à la retraite à compter du 1er juillet 2009, sous réserve de l'avis de la caisse de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL) ; qu'à la suite de l'avis défavorable de la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales, par une décision du 13 août 2009, il a été réintégré dans ses fonctions à compter du 1er juillet 2009 ; que par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a retenu la faute du centre hospitalier pour avoir admis M. C... à faire valoir ses droits à la retraite de façon anticipée ; qu'après avoir considéré que le requérant avait commis une imprudence en ne prenant pas en compte le risque, expressément signalé par l'établissement hospitalier, que la caisse de retraite refuse de lui servir une pension, le Tribunal a alloué, au titre du préjudice moral, une somme de 500 euros au requérant ; que, par son appel principal, M. C...conteste la part de responsabilité qui lui a été imputée ainsi que le rejet de ses autres conclusions indemnitaires ; que, par son appel incident, l'hôpital local intercommunal de Morestel intimé conteste l'engagement même de sa responsabilité en invoquant l'absence de faute et conclut au rejet de l'ensemble des demandes indemnitaires de M. C... ;

Sur la fin de non-recevoir opposée à la requête par l'hôpital local intercommunal de Morestel :

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 411-2 du code de justice administrative : " Lorsque la contribution pour l'aide juridique prévue à l'article 1635 bis Q du code général des impôts est due et n'a pas été acquittée, la requête est irrecevable. / Cette irrecevabilité est susceptible d'être couverte après l'expiration du délai de recours. Lorsque le requérant justifie avoir demandé le bénéfice de l'aide juridictionnelle, la régularisation de sa requête est différée jusqu'à la décision définitive statuant sur sa demande. " ;

3. Considérant que M. C...a demandé le bénéfice de l'aide juridictionnelle le 2 avril 2013 ; que par une décision du 26 avril 20013, l'aide juridictionnelle totale lui a été accordée par une décision du 26 avril 2013 du président du bureau d'aide juridictionnelle (section cour administrative d'appel) du bureau d'aide juridictionnelle du Tribunal de grande instance de Lyon ; que la fin de non-recevoir soulevée par l'intimé ne peut en conséquence être accueillie ;

Sur la responsabilité :

4. Considérant qu'aux termes de l'article 2 du décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003 susvisé : " Les fonctionnaires mentionnés à l'article 1er peuvent prétendre à pension au titre du présent décret dans les conditions définies aux articles 25 et 26 après avoir été radiés des cadres soit d'office, soit sur leur demande. (...) L'admission à la retraite est prononcée, après avis de la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales, par l'autorité qui a qualité pour procéder à la nomination (...). " ;

5. Considérant qu'il résulte de l'instruction que par un courrier du 29 mai 2008, M. C... a demandé au centre hospitalier un relevé de sa carrière dans la fonction publique afin de déposer une demande de retraite anticipée ; que l'établissement hospitalier, par un courrier du 20 juin 2008, lui a répondu qu'en l'absence de validation de la CNRACL et au vu des éléments dont il était sûr, il pourrait faire valoir ses droits à compter du 1er juillet 2009 ; que, par un courrier du 8 janvier 2009, l'établissement l'informe qu'il a pris note de sa cessation d'activité au 1er juillet 2009 et mentionne les documents à fournir pour constituer le dossier administratif d'étude des " droits à pension CNRACL " ; que, par une décision du 9 juin 2009, l'hôpital local intercommunal a admis M. C...à faire valoir ses droits à la retraite à compter du 1er juillet 2009 sous réserve de l'avis de la caisse de retraite des agents des collectivités locales ; que ledit avis du 17 juin 2009, qui informait le requérant de ce qu'il ne remplissait pas les conditions pour bénéficier de l'attribution anticipée d'une pension de retraite à compter du 1er juillet 2009, lui a été adressé le 3 juillet 2009, soit postérieurement à la décision attaquée, avis confirmé le 3 et 16 août 2009 ; qu'à la suite de cette information, par une décision du 13 août 2009, l'hôpital local a procédé à la réintégration de M. C... dans ses fonctions à compter du 1er juillet 2009 ;

6. Considérant que le directeur du centre hospitalier ne pouvait prononcer l'admission à la retraite de M. C...qu'après avis de la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales ; qu'ainsi, en admettant M. C...à faire valoir ses droits à la retraite anticipée sans s'être préalablement assuré que les conditions pour en bénéficier soient remplies, l'établissement hospitalier a commis une faute de nature à engager sa responsabilité ; que par suite, le requérant est fondé à demander réparation des préjudices résultant non du retrait de la décision litigieuse, mais des conséquences dommageables que son intervention a pu comporter ;

7. Considérant, toutefois, qu'il est constant que M. C...était informé que le prononcé de son admission à faire valoir ses droits à la retraite était pris sous réserve de l'avis rendu par la caisse de retraite des agents des collectivités locales ; que, par suite, il a commis une imprudence en considérant comme certaine la date d'effet du 1er juillet 2009 alors que cet avis n'était pas intervenu ; que, compte tenu de cette faute, les premiers juges n'ont pas fait une inexacte appréciation de la part de responsabilité qui doit être mise à la charge de l'administration en limitant la condamnation de celle-ci à la moitié des conséquences dommageables de son comportement ;

Sur l'indemnisation :

8. Considérant qu'en principe, toute illégalité commise par l'administration constitue une faute susceptible d'engager sa responsabilité, pour autant qu'il en soit résulté un préjudice direct et certain ;

9. Considérant, en premier lieu, que le Tribunal n'a pas fait une appréciation insuffisante du préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence subis par M. C... des suites de la décision de mise à la retraite anticipée en les évaluant à la somme de 1 000 euros ; que, compte tenu de l'étendue de sa responsabilité, les droits de M. C...s'élèvent donc à un montant de 500 euros ;

10. Considérant, en second lieu, que le centre hospitalier a prononcé la réintégration de M. C... à la date du 1er juillet 2009 ; que si ce dernier fait valoir qu'il aurait subi, une perte de salaire en étant réintégré sur un poste à mi-temps, que son état de santé s'est dégradé et qu'il doit attendre l'âge de 55 ans pour pouvoir bénéficier d'une retraite, ces préjudices allégués sont sans lien avec la faute commise par le centre hospitalier ; que, dès lors, il ne peut être indemnisé du préjudice professionnel qu'il prétend avoir subi ;

11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort, que par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble lui a imputé une part de responsabilité dans le préjudice subi et a rejeté ses autres conclusions indemnitaires ; qu'il en résulte également que l'hôpital local intercommunal de Morestel n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par ledit jugement, le Tribunal administratif de Grenoble l'a condamné à verser une somme de 500 euros au titre du préjudice moral subi par M. C... ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'hôpital local intercommunal de Morestel, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par M. C... , au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. C...la somme demandée par l'hôpital local intercommunal de Morestel, au même titre ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C...et les conclusions incidentes de l'hôpital local intercommunal de Morestel sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C...et à l'hôpital local intercommunal de Morestel.

Délibéré après l'audience du 15 octobre 2013, où siégeaient :

- M. Martin, président de chambre,

- Mme Courret, président-assesseur,

- Mme Dèche, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 5 novembre 2013.

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N° 13LY01104


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13LY01104
Date de la décision : 05/11/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Cessation de fonctions - Mise à la retraite sur demande.

Responsabilité de la puissance publique - Faits susceptibles ou non d'ouvrir une action en responsabilité - Agissements administratifs susceptibles d'engager la responsabilité de la puissance publique.


Composition du Tribunal
Président : M. MARTIN
Rapporteur ?: Mme Catherine COURRET
Rapporteur public ?: Mme SCHMERBER
Avocat(s) : AXIOME AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2013-11-05;13ly01104 ?
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