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30/10/2013 | FRANCE | N°13LY00721

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 30 octobre 2013, 13LY00721


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 20 mars 2013, présentée pour la société Casino de Montrond-les-Bains, dont le siège est 82 rue Francis Laur à Montrond-les-Bains (42210) ;

La société Casino de Montrond-les-Bains demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1004922 du 20 décembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a résilié à compter du 1er septembre 2013 la convention de délégation de service public conclue à son profit le 5 mai 2010 par la commune de Montrond-les-Bains pour la construction du nouveau casino municipal et s

on exploitation pendant une période de vingt années ;

2°) de rejeter comme irr...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 20 mars 2013, présentée pour la société Casino de Montrond-les-Bains, dont le siège est 82 rue Francis Laur à Montrond-les-Bains (42210) ;

La société Casino de Montrond-les-Bains demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1004922 du 20 décembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a résilié à compter du 1er septembre 2013 la convention de délégation de service public conclue à son profit le 5 mai 2010 par la commune de Montrond-les-Bains pour la construction du nouveau casino municipal et son exploitation pendant une période de vingt années ;

2°) de rejeter comme irrecevable la demande d'annulation de cette convention présentée devant le Tribunal par la société des loisirs de Montrond-les-Bains ;

3°) de mettre à la charge de la société des loisirs de Montrond-les-Bains une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La société Casino de Montrond-les-Bains soutient que la demande d'annulation présentée par la société de loisirs de Montrond-les-Bains devant le Tribunal administratif était irrecevable faute pour elle de justifier de sa capacité pour agir ; qu'en effet il résulte des articles 1832 et suivants du code civil, L. 210-6 du code de commerce et de la jurisprudence, que si une société en cours de formation peut ester en justice, c'est strictement sous réserve qu'elle dispose de statuts signés par les associés, comportant un minimum d'indications de l'objet de la société, du siège social, des dirigeants et d'informations certaines et précises sur la participation au capital de la future société ; qu'en l'espèce, à la date d'introduction de sa demande de première instance le 21 juillet 2010, la société de loisirs de Montrond-les-Bains n'était pas immatriculée au registre du commerce et des sociétés, et n'était pas non plus en cours de formation au sens de la jurisprudence dès lors que ses statuts n'ont été signés que le 24 mai 2011 et qu'il n'existait pas d'informations certaines et précises sur la participation à son capital ; que la signature des statuts le 24 mai 2011 et l'immatriculation le 19 juillet 2011, en cours d'instance, n'ont pas pu régulariser son recours dès lors que le délai pour agir contre la convention était expiré ; que ce délai de recours de deux mois avait commencé à courir le 21 mai 2010, date à laquelle la société de loisirs de Montrond-les-Bains en a, à sa demande, reçu copie ; que cette communication a constitué à son égard une publicité appropriée de sorte que le délai de recours expirait le 22 juillet 2010, date à laquelle cette société n'était pas immatriculée et ses statuts pas signés ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le nouveau mémoire, enregistré le 9 avril 2013, présenté pour la société Casino de Montrond-les-Bains qui conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens ; elle soutient en outre qu'elle a qualité et intérêt pour relever appel du jugement dès lors qu'elle était régulièrement intervenue en première instance et qu'elle aurait eu intérêt à former tierce opposition du jugement qui préjudicie à ses droits ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 19 avril 2013, présenté pour la Société de loisirs de Montrond-les-Bains qui conclut au rejet de la requête et à la condamnation de la société Casino de Montrond-les-Bains à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; elle soutient que la requête d'appel, présentée par la société Casino de Montrond-les-Bains le 20 mars 2013, est irrecevable comme tardive, comme émanant d'un intervenant en première instance et non d'une partie, comme constituant un appel incident à son propre appel enregistré le 15 mars 2013 qui, n'étant pas dirigée contre elle, ne lui conférait pas la qualité d'intimée, et dont le champ matériel était distinct ; que le moyen soulevé par la société Casino de Montrond-les-Bains tiré de l'irrecevabilité de la demande de première instance n'est pas fondé ; qu'en effet à la date d'introduction de sa demande, elle était bien en voie de constitution et plusieurs actes de création au sens de la jurisprudence étaient intervenus comme en atteste de dossier d'inscription au registre du commerce et des sociétés (RCS) ; qu'au sens de la jurisprudence, elle disposait déjà lors de la procédure de consultation préalable à l'attribution de la délégation de service public (DSP) d'informations précises sur la participation à son futur capital qui ne différaient des renseignements finalement déposés au RCS, notamment quant à la faiblesse de son capital, qu'en raison de la non obtention de la DSP ; que de surcroît elle était immatriculée au jour de l'audience et a fortiori du jugement, ce que le Tribunal a justement retenu ;

Vu le mémoire, enregistré le 16 mai 2013, présenté pour la société Casino de Montrond-les-Bains qui conclut aux mêmes fins que précédemment par les mêmes moyens ;

Elle fait en outre valoir que sa requête n'est pas tardive ; qu'eu égard à l'identité de ses actionnaires constitués de trois personnes physiques la société des loisirs de Montrond-les-Bains désormais immatriculée, d'un capital de 300 euros, est une personne distincte de celle qui s'est présentée comme candidate à l'attribution de la délégation de service public et qui devait être une filiale de la société financière de Montrond-les-Bains, holding prévue pour un capital d'un million d'euros avec participation majoritaire de la société Cobalt capital à 70 % ; que cette holding qui n'a jamais vu le jour n'a donc pu créer une filiale ; que, dans ces conditions, l'immatriculation au RCS le 19 juillet 2011 de la société de loisirs de Montrond-les-Bains n'a pu régulariser le contentieux engagé par une société qui n'a pas été créée ; qu'en outre la candidature déposée était elle-même irrégulière pour être fondée sur un pouvoir donné au porteur du dossier par une société holding qui n'existait pas, pour la société de loisirs de Montrond-les-Bains qui n'existait pas non plus ; que c'est à tort que le Tribunal a écarté sa fin de non-recevoir opposée à la demande de première instance ;

Vu l'ordonnance en date du 12 juin 2013 fixant la clôture d'instruction au 27 juin 2013, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire, enregistré le 26 juin 2013, présenté pour la commune de Montrond-les-Bains qui conclut à l'annulation du jugement et à ce que soit mise à la charge de la société de loisirs de Montrond-les-Bains une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761 du code de justice administrative ;

Elle soutient que la société Casino de Montrond-les-Bains a bien qualité pour agir en appel dès lors d'une part qu'il s'agit, non pas d'un appel incident mais d'un appel principal formé dans le délai d'appel, d'autre part qu'étant intervenue régulièrement en première instance cette société a qualité pour relever appel du jugement qui préjudicie à ses droits, ce qui lui aurait donné qualité pour former tierce opposition ; sa propre intervention au soutien de cette requête est également recevable ; que le jugement est irrégulier en ce qu'il a accueilli la demande de première instance de la société de loisirs de Montrond-les-Bains qui était irrecevable d'une part en l'absence de capacité et d'intérêt à agir à la date d'introduction de la demande devant le Tribunal, d'autre part pour avoir été formée plus de deux mois après la plus tardive des deux mesures de publicité de l'attribution de la délégation de service public ;

Vu l'ordonnance en date du 27 juin 2013 fixant la clôture d'instruction au 29 juillet 2013, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil ;

Vu le code de commerce ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 octobre 2013 :

- le rapport de M. Dursapt,

- les conclusions de Mme Samson-Dye, rapporteur public,

- et les observations de MeB..., représentant la société Casino de Montrond-les-Bains, de MeA..., représentant la société des loisirs de Montrond-les-Bains, et de Me C..., représentant la commune de Montrond-les-Bains ;

1. Considérant que, par jugement du 20 décembre 2012, le Tribunal administratif de Lyon a, sur la demande de la société de loisirs de Montrond-les-Bains, prononcé la résiliation à compter du 1er septembre 2013 de la convention de délégation de service public conclue le 5 mai 2010 entre la commune de Montrond-les-Bains et la société Casino de Montrond-les-Bains pour l'exploitation du casino pendant une période de 20 années ; que la société Casino de Montrond-les-Bains relève appel de ce jugement tandis que la commune intervient au soutien de sa requête ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les fins de non-recevoir opposées à la requête par la société de loisirs de Montrond-les-Bains ;

2. Considérant, en premier lieu, qu'indépendamment des actions dont les parties au contrat disposent devant le juge du contrat, tout concurrent évincé de la conclusion d'un contrat administratif est recevable à former devant ce même juge un recours de pleine juridiction contestant la validité de ce contrat ou de certaines de ses clauses, qui en sont divisibles, assorti, le cas échéant, de demandes indemnitaires ; que ce recours doit être exercé, y compris si le contrat contesté est relatif à des travaux publics, dans un délai de deux mois à compter de l'accomplissement des mesures de publicité appropriées, notamment au moyen d'un avis mentionnant à la fois la conclusion du contrat et les modalités de sa consultation dans le respect des secrets protégés par la loi ;

3. Considérant qu'il résulte de l'instruction que les avis d'attribution de la délégation de service public en cause, publiés au bulletin officiel des annonces des marchés publics le 14 mai 2010 et dans le journal des casinos le 19 mai 2010 ne mentionnaient pas la conclusion du contrat et les modalités de sa consultation, mais seulement la date d'attribution de la délégation à la société Casino de Montrond-les-Bains par le conseil municipal ; que le délai de recours de 2 mois n'ayant donc pu courir, la commune n'est pas fondée à soutenir que la demande de première instance était tardive et que le Tribunal aurait dû la rejeter pour ce motif ;

4. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 1411-1 du code général des collectivités territoriales : " Une délégation de service public est un contrat par lequel une personne morale de droit public confie la gestion d'un service public dont elle a la responsabilité à un délégataire public ou privé, dont la rémunération est substantiellement liée aux résultats de l'exploitation du service. Le délégataire peut être chargé de construire des ouvrages ou d'acquérir des biens nécessaires au service. / (...) Les garanties professionnelles sont appréciées notamment dans la personne des associés et au vu des garanties professionnelles réunies en son sein. Les sociétés en cours de constitution ou nouvellement créées peuvent être admises à présenter une offre dans les mêmes conditions que les sociétés existantes. / (...) " ;

5. Considérant d'une part qu'il résulte de l'instruction que la société des loisirs de Montrond-les-Bains, représentée par son futur président, s'est portée candidate le 26 janvier 2010 à l'attribution de la délégation de service public du casino de Montrond-les-Bains, en produisant notamment le projet de ses statuts et un engagement de la société Cobalt Capital qui devait détenir 70 % du capital de sa société holding ; que cette candidature qui comportait ainsi des informations suffisamment certaines et précises sur la composition du capital de la future société permettant à la commune d'en apprécier les garanties et les capacités, comme elle l'a d'ailleurs fait, était bien recevable, contrairement à ce que soutient la société Casino de Montrond-les-Bains ;

6. Considérant d'autre part que si, à la date d'enregistrement de sa demande devant le Tribunal administratif, la société des loisirs de Montrond-les-Bains dont l'offre n'a pas été retenue, était toujours en cours de constitution, il résulte de l'instruction que ses statuts ont été signés le 1er juin 2011 et qu'elle a été immatriculée au registre du commerce le 21 juillet 2011 ; que par suite et quand bien même elle ne s'est finalement pas constituée selon les participations qui étaient initialement prévues pour son objet lequel visait exclusivement l'obtention de la gestion du casino, elle devait être regardée comme étant en cours de constitution à la date d'introduction de sa demande devant le Tribunal administratif et par suite recevable, en tant que candidat évincé, à présenter un recours contentieux ; que c'est ainsi à juste titre que les premiers juges ont estimé que sa demande était recevable ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société Casino de Montrond-les-Bains et la commune de Montrond-les-Bains ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a résilié la convention de délégation de service public conclue entre elles le 5 mai 2010 ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ;

9. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la société des loisirs de Montrond-les-Bains, qui n'est pas partie perdante dans l'instance, une somme quelconque au titre des frais exposés par la société Casino de Montrond-les-Bains et par la commune de Montrond-les-Bains ;

10. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Casino de Montrond-les-Bains la somme de 1 500 euros au titre des frais non compris dans les dépens exposés par la société des loisirs de Montrond-les-Bains ;

DECIDE :

Article 1er : La requête 13LY00721 de la société Casino de Montrond-les-Bains et les conclusions de la commune de Montrond-les-Bains sont rejetées.

Article 2 : La société Casino de Montrond-les-Bains versera à la société des loisirs de Montrond-les-Bains, une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Casino de Montrond-les-Bains, à la commune de Montrond-les-Bains, à la Société de loisirs de Montrond-les-Bains et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 10 octobre 2013, où siégeaient :

- M. Wyss, président de chambre,

- M. Mesmin d'Estienne, président-assesseur,

- M. Dursapt, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 30 octobre 2013.

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N° 13LY00721


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

54-01-06 Procédure. Introduction de l'instance. Capacité.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. WYSS
Rapporteur ?: M. Marc DURSAPT
Rapporteur public ?: Mme SAMSON DYE
Avocat(s) : SELARL ADAMAS AFFAIRES PUBLIQUES

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Date de la décision : 30/10/2013
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 13LY00721
Numéro NOR : CETATEXT000028143300 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2013-10-30;13ly00721 ?
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