La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

10/10/2013 | FRANCE | N°12LY02035

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre - formation à 3, 10 octobre 2013, 12LY02035


Vu la requête, enregistrée le 27 juillet 2012, présentée pour M. B...A..., domicilié ...;

M. A... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1002587 du 1er juin 2012 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 21 avril 2010 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi et de la santé, après avoir annulé la décision du 15 décembre 2009 de l'inspecteur du travail ayant autorisé son licenciement, a autorisé son licenciement pour faute ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décis

ion susmentionnée ;

3°) de mettre à la charge de la société Sodimas la somme de 1 50...

Vu la requête, enregistrée le 27 juillet 2012, présentée pour M. B...A..., domicilié ...;

M. A... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1002587 du 1er juin 2012 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 21 avril 2010 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi et de la santé, après avoir annulé la décision du 15 décembre 2009 de l'inspecteur du travail ayant autorisé son licenciement, a autorisé son licenciement pour faute ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision susmentionnée ;

3°) de mettre à la charge de la société Sodimas la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- la décision en litige est intervenue au terme d'une procédure irrégulière, dès lors qu'il n'a pu obtenir la communication des témoignages des salariés ayant porté des accusations contre lui ni leur identité, alors qu'il n'est pas démontré que la communication de ces témoignages avec l'identité de leurs auteurs aurait été de nature à leur porter gravement préjudice ;

- la décision de licenciement n'est pas sans lien avec son mandat, alors qu'il n'a pas été tenu compte du contexte, compte tenu de son absence d'appartenance syndicale et de ses difficultés de santé ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 7 septembre 2012, présenté pour la société Sodimas, qui conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de M. A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- l'inspecteur du travail a pu, sans méconnaître le principe du contradictoire, refuser de communiquer les témoignages des salariés afin de protéger leur santé et leur sécurité, alors au demeurant que M. A..., qui indique lui-même avoir eu connaissance des noms de ces salariés, a été mis en mesure de prendre connaissance des griefs qui lui étaient reprochés et a pu consulter l'ensemble des attestations figurant au dossier ;

- le requérant ne démontre pas l'existence d'un lien entre son mandat et son licenciement, et se borne à faire état d'un traitement médical sur une brève période, alors que les faits reprochés ne concernent pas cette seule période et qu'un traitement médical ne suffirait pas à justifier son attitude de management ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 septembre 2013 :

- le rapport de M. Seillet, président-assesseur ;

- et les conclusions de Mme Vigier-Carrière, rapporteur public ;

1. Considérant que M. A..., qui avait été recruté par la SA Sodimas, le 6 janvier 2000, en qualité de directeur général des filiales marocaines de cette entreprise, avant d'être muté, le 2 janvier 2003, au siège de la société, pour y exercer des fonctions de directeur export des départements composants électriques, et qui détenait également, depuis le 24 juillet 2006, le mandat de membre suppléant de la délégation unique du personnel, a fait l'objet, à compter du mois d'octobre 2009, d'une procédure disciplinaire ; que la société Sodimas a adressé à l'inspecteur du travail de la 1ère section de la Drôme une demande d'autorisation de licenciement de ce salarié protégé, en faisant état de propos vexatoires, de pressions psychologiques et d'intimidations envers des salariés ; que l'inspecteur du travail, qui avait auparavant, par une décision du 24 novembre 2009, rejeté la demande de communication des témoignages de salariés présentée par M. A..., a autorisé son licenciement, par une décision du 15 décembre 2009 ; que sur recours hiérarchique de ce salarié protégé, le ministre du travail, de l'emploi et de la santé a, par une décision du 21 avril 2010, d'une part, annulé la décision de l'inspecteur, au motif d'une insuffisante motivation et, d'autre part, autorisé le licenciement ; que M. A... fait appel du jugement du 1er juin 2012 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ladite décision du 21 avril 2010 du ministre du travail, de l'emploi et de la santé ;

Sur la légalité de la décision ministérielle en litige :

2. Considérant qu'en vertu des dispositions du code du travail, les salariés légalement investis de fonctions représentatives bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des salariés qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que, lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail, et le cas échéant au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement, compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi ; qu'à l'effet de concourir à la mise en oeuvre de la protection ainsi instituée, l'article R. 2421-11 prévoit que l'inspecteur du travail saisi d'une demande d'autorisation de licenciement d'un salarié protégé " procède à une enquête contradictoire au cours de laquelle le salarié peut, sur sa demande, se faire assister d'un représentant de son syndicat " ;

3. Considérant que le caractère contradictoire de l'enquête menée conformément aux dispositions mentionnées ci-dessus impose à l'autorité administrative, saisie d'une demande d'autorisation de licenciement d'un salarié protégé fondée sur un motif disciplinaire, d'informer le salarié concerné des agissements qui lui sont reprochés et de l'identité des personnes qui en ont témoigné ; qu'il implique, en outre, que le salarié protégé soit mis à même de prendre connaissance en temps utile de l'ensemble des pièces produites par l'employeur à l'appui de sa demande, sans que la circonstance que le salarié est susceptible de connaître le contenu de certaines de ces pièces puisse exonérer l'inspecteur du travail de cette obligation ; que c'est seulement lorsque l'accès à certains de ces éléments serait de nature à porter gravement préjudice à leurs auteurs que l'inspecteur du travail doit se limiter à informer le salarié protégé, de façon suffisamment circonstanciée, de leur teneur ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'eu égard aux fonctions d'encadrement exercées par M. A..., qui était, en tant que directeur export des départements composants électriques, susceptible de retrouver autorité sur certains des salariés ayant témoigné contre lui, aux faits reprochés à l'intéressé, en raison d'une attitude de mépris, de dénigrement, d'humiliation, d'injustice et de propos vexatoires et déplacés, la communication des attestations établies par des salariés ou anciens salariés de l'établissement aurait été susceptible de porter gravement préjudice à leurs auteurs ; que, dès lors, M. A... ayant eu connaissance de la teneur des témoignages formulés à son encontre au cours de l'enquête conduite par l'inspecteur du travail, ledit inspecteur a pu, sans méconnaître le caractère contradictoire de l'enquête prévue à l'article R. 2421-11 du code du travail, se limiter à informer l'intéressé de la teneur des documents concernés, sans le mettre à même d'en prendre connaissance, alors au demeurant qu'il résulte des propres écrits du requérant que les noms de certains des salariés ayant témoigné ont été portés à sa connaissance ;

5. Considérant qu'en se bornant à invoquer son état de santé, ayant justifié un traitement médical, entre août et octobre 2008, et son placement en arrêt de maladie après sa mise à pied conservatoire, M. A... ne démontre pas l'existence d'un lien entre les faits reprochés et ledit état de santé, de nature à l'exonérer de sa responsabilité dans le cadre de la procédure disciplinaire ayant conduit à son licenciement ;

6. Considérant que l'existence d'un lien entre le mandat détenu par M. A..., qui se borne à invoquer sur ce point son absence d'appartenance à une organisation syndicale, et la procédure de licenciement dont il a fait l'objet, n'est pas établi ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Sur les conclusions de la société Sodimas tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant qu'il y lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A... la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés à l'occasion de la présente instance par la société Sodimas et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : M. A... versera la somme de 1 000 euros à la société Sodimas au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social et à la société Sodimas.

Délibéré après l'audience du 19 septembre 2013 à laquelle siégeaient :

M. Clot, président de chambre,

M. Seillet, président-assesseur,

M. Segado, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 10 octobre 2013.

''

''

''

''

1

2

N° 12LY02035


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12LY02035
Date de la décision : 10/10/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-07-01 Travail et emploi. Licenciements. Autorisation administrative - Salariés protégés.


Composition du Tribunal
Président : M. CLOT
Rapporteur ?: M. Philippe SEILLET
Rapporteur public ?: Mme VIGIER-CARRIERE
Avocat(s) : FAYOL ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2013-10-10;12ly02035 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award