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26/09/2013 | FRANCE | N°13LY00117

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre - formation à 3, 26 septembre 2013, 13LY00117


Vu la requête, enregistrée le 11 janvier 2013, présentée pour Mme A...B..., domiciliée... ;

Mme B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Grenoble n° 1001012 du 16 novembre 2012 en tant qu'il n'a condamné les Hôpitaux Drôme nord à lui verser qu'une somme de 3 500 euros en réparation du préjudice dont elle a souffert dans les suites de son hospitalisation, le 8 mars 2005 ;

2°) de porter à 40 500 euros le montant de l'indemnité allouée, avec intérêts au taux légal à compter du 21 décembre 2009 et capitalisation de

ces intérêts à partir du 21 décembre 2010 ;

3°) de mettre à la charge des Hôpitaux Drôm...

Vu la requête, enregistrée le 11 janvier 2013, présentée pour Mme A...B..., domiciliée... ;

Mme B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Grenoble n° 1001012 du 16 novembre 2012 en tant qu'il n'a condamné les Hôpitaux Drôme nord à lui verser qu'une somme de 3 500 euros en réparation du préjudice dont elle a souffert dans les suites de son hospitalisation, le 8 mars 2005 ;

2°) de porter à 40 500 euros le montant de l'indemnité allouée, avec intérêts au taux légal à compter du 21 décembre 2009 et capitalisation de ces intérêts à partir du 21 décembre 2010 ;

3°) de mettre à la charge des Hôpitaux Drôme nord une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- elle a souffert d'une incapacité temporaire totale entre les 9 juillet et 19 septembre 2005 ;

- elle a enduré des souffrances majorées par le sentiment d'abandon ;

- son préjudice moral, qui a un retentissement sur sa qualité de vie, est avéré ;

- son déficit fonctionnel permanent est de 5 % ;

- son préjudice d'agrément est certain ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 1er mars 2013, présenté pour la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de la Drôme, qui conclut à la condamnation des Hôpitaux Drôme nord à lui verser une somme de 1 528,20 euros avec intérêts au taux légal à compter du 22 juillet 2010, outre l'indemnité forfaitaire de 509,40 euros, et à la mise à la charge de cet établissement d'une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que le centre hospitalier a engagé sa responsabilité, ce qui a entraîné pour elle des frais et débours ;

Vu le mémoire, enregistré le 27 mai 2013, présenté pour le centre hospitalier de Romans (Hôpitaux Drôme nord), qui conclut à l'annulation du jugement attaqué et au rejet de la demande de Mme B... et, subsidiairement, au rejet de sa requête ;

Il soutient que :

- aucun retard de diagnostic ne lui est imputable, la patiente n'ayant fait état pour la première fois d'une douleur à l'épaule gauche et au bras que le 15 mars, jamais avant ;

- une fois signalée, cette douleur a été dument prise en compte ;

- cliniquement, aucun élément ne permettait de suspecter le diagnostic faute d'oedème et de rougeurs ;

- le diagnostic de thrombose ne pouvait être posé dès le 15 mars ;

- l'intéressée elle-même a attendu jusqu'au 19 mars avant de se manifester de nouveau et elle a été traitée dès ce moment ;

- subsidiairement, les sommes accordées par le Tribunal ne sont pas sous-évaluées ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu l'arrêté du 3 décembre 2012 relatif aux montants de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue aux articles L. 376-1 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 septembre 2013 :

- le rapport de M. Segado, premier conseiller ;

- les conclusions de Mme Vigier-Carrière, rapporteur public ;

- et les observations de Me Maury, avocat de Mme B... ;

1. Considérant que le 8 mars 2005, Mme B...a été admise au centre hospitalier de Romans (Hôpitaux Drôme nord) où, sous anesthésie générale, a été mise en place une voie veineuse centrale par ponction de la veine sous-clavière gauche afin de traiter, par antibiotiques, l'infection bactérienne récidivante des voies urinaires - pyélonéphrite - dont elle souffrait ; que, sortie de cet établissement le 16 mars suivant, elle y a de nouveau été admise le 19 mars pour une thrombose de la veine jugulaire interne gauche à l'endroit de la ponction ; que sur la demande de MmeB..., le juge des référés du Tribunal administratif de Grenoble a désigné un expert qui a remis son rapport le 20 mai 2008 ; que l'intéressée a demandé la condamnation du centre hospitalier de Romans à réparer le préjudice résultant pour elle du retard de ses services à diagnostiquer la thrombose ; que, par un jugement du 16 novembre 2012, le Tribunal a condamné le centre hospitalier à lui verser la somme de 3 500 euros à titre indemnitaire et a rejeté le surplus des conclusions des parties, notamment celles présentées par la CPAM de la Drôme ;

Sur le principe de la responsabilité :

2. Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise que la douleur dont souffrait Mme B...à l'épaule et au bras gauches s'est manifestée au plus tard dès le 9 mars 2005 et non, comme l'affirme le centre hospitalier de Romans, à compter du 15 mars suivant ; qu'en l'absence, dans les jours précédant sa sortie de l'hôpital, de signes cliniques évidents de thrombose, la légère inflammation de l'orifice de la ponction relevée le 9 mars suivant, mais sans hématome, ne pouvant en tenir lieu, le service hospitalier n'a commis aucune faute en se bornant à administrer à l'intéressée des antalgiques, dès le lendemain de l'intervention ; qu'en revanche, bien que de moindre intensité, la persistance de cette douleur, malgré le retrait de la voie veineuse le 15 mars 2005, aurait dû inciter l'hôpital à procéder, avant la sortie de la patiente, à des examens complémentaires afin d'en déterminer l'origine ; qu'en s'abstenant de le faire et en retardant donc d'environ quatre jours le diagnostic de la thrombose, posé finalement le 21 mars suivant, le centre hospitalier a commis une faute de nature à engager sa responsabilité ;

Sur le préjudice :

En ce qui concerne les pertes de revenus :

3. Considérant que si la CPAM de la Drôme demande une somme de 1 528,20 euros correspondant aux indemnités journalières qu'elle a versées à Mme B... pour la période comprise entre les 9 juillet et 31 août 2005, il ne résulte pas de l'instruction que ce préjudice est directement en rapport avec le retard fautif imputable à l'établissement hospitalier ;

En ce qui concerne les préjudices d'ordre personnel :

4. Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que la faute commise par le centre hospitalier a, en tant que telle, exposé l'intéressée à une incapacité temporaire totale plus importante que celle résultant pour elle de la thrombose dont elle s'est trouvée affectée ; qu'il n'en résulte pas davantage que la réaction anxio-dépressive réactionnelle, la douleur à la palpation et le discret oedème du membre supérieur gauche dont elle demeure atteinte, séquelles qualifiées de mineures par l'expert, lequel ne fait d'ailleurs état d'aucune conséquence fonctionnelle caractérisée, révèleraient un déficit fonctionnel permanent de 5 % en lien direct avec cette faute ; qu'aucun élément du dossier ne permet d'établir que le préjudice d'agrément dont elle se plaint, notamment l'impossibilité de pratiquer un sport, trouverait directement son origine dans le retard fautif imputable à l'hôpital ;

5. Considérant qu'en fixant à la somme de 3 500 euros l'indemnité réparant le préjudice de MmeB..., le Tribunal n'a pas inexactement apprécié les souffrances physiques et morales auxquelles la faute de l'hôpital l'a exposée, aucun préjudice moral distinct de ces souffrances n'étant en revanche, contrairement à ce qu'elle soutient, établi ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, d'une part, Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a seulement condamné le centre hospitalier de Romans (Hôpitaux Drôme nord) à lui verser une indemnité de 3 500 euros ; que, d'autre part, le centre hospitalier de Romans (Hôpitaux Drôme nord) n'est pas fondé à contester sa condamnation et que les conclusions de la CPAM de la Drôme doivent être rejetées ;

7. Considérant que Mme B...a droit aux intérêts au taux légal de la somme de 3 500 euros qui lui est due à compter du 23 décembre 2009, date à laquelle sa réclamation est parvenue au centre hospitalier ; que la capitalisation des intérêts a été demandée par la requête susvisée, enregistré le 11 janvier 2013, date à laquelle il était dû plus d'une année d'intérêts ; qu'il y a lieu, dès lors, de procéder à leur capitalisation à cette date et à chaque échéance annuelle ultérieure ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de Mme B...tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que les conclusions de la CPAM de la Drôme, partie perdante dans la présente instance, tendant aux mêmes fins, doivent être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : La somme de 3 500 euros que le centre hospitalier de Romans (Hôpitaux Drôme nord) a été condamné à verser à Mme B...par l'article 1er du jugement du Tribunal administratif de Grenoble du 16 novembre 2012 portera intérêts au taux légal à compter du 23 décembre 2009. Les intérêts échus le 11 janvier 2013 et à chaque échéance annuelle ultérieure seront capitalisés pour produire eux-mêmes intérêts.

Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Grenoble du 16 novembre 2012 est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 1er ci-dessus.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme B... est rejeté.

Article 4 : Les conclusions de la CPAM de la Drôme sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...B..., à la caisse primaire d'assurance maladie de la Drôme et au centre hospitalier de Romans (Hôpitaux Drôme nord).

Délibéré après l'audience du 5 septembre 2013 à laquelle siégeaient :

M. Clot, président de chambre,

M. Seillet, président-assesseur,

M. Segado, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 26 septembre 2013.

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N° 13LY00117 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13LY00117
Date de la décision : 26/09/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-02-01-01-01-01-02 Responsabilité de la puissance publique. Responsabilité en raison des différentes activités des services publics. Service public de santé. Établissements publics d'hospitalisation. Responsabilité pour faute simple : organisation et fonctionnement du service hospitalier. Existence d'une faute. Retards.


Composition du Tribunal
Président : M. CLOT
Rapporteur ?: M. Juan SEGADO
Rapporteur public ?: Mme VIGIER-CARRIERE
Avocat(s) : LE PRADO

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2013-09-26;13ly00117 ?
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