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27/06/2013 | FRANCE | N°11LY00607

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 27 juin 2013, 11LY00607


Vu le recours, enregistré le 23 février 2011 au greffe de la Cour, présenté par le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat qui demande à la Cour :

1°) d'annuler l'article 1er du jugement n° 0800463 du 19 octobre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Dijon a déchargé M. et Mme C...des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre de la période du 1er janvier au 1er juillet 2003 ;

2°) de rétablir M. et MmeC..., en droits et pénalités, au rôle desdites cotisa

tions, pour un montant de 941 euros ;

Le ministre soutient que M.C..., qui a o...

Vu le recours, enregistré le 23 février 2011 au greffe de la Cour, présenté par le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat qui demande à la Cour :

1°) d'annuler l'article 1er du jugement n° 0800463 du 19 octobre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Dijon a déchargé M. et Mme C...des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre de la période du 1er janvier au 1er juillet 2003 ;

2°) de rétablir M. et MmeC..., en droits et pénalités, au rôle desdites cotisations, pour un montant de 941 euros ;

Le ministre soutient que M.C..., qui a opté pour la déduction de ses frais réels, ne peut en application des dispositions de l'article 83 du code général des impôts, bénéficier des déductions forfaitaires cumulées de 14 % et de 5 % sur ses rémunérations car il ne justifie pas de frais à hauteur de ce montant ; que M. C...ne peut être regardé comme ayant exercé ses fonctions dans des conditions analogues à celles d'un musicien professionnel et, par suite, comme entrant dans les prévisions de l'instruction 5 F-1-99 du 30 décembre 1998 ; que c'est en conséquence à tort que le tribunal administratif a déchargé M. et Mme C...de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu et des pénalités y afférentes auxquelles ils ont été assujettis à raison de la remise en cause des déductions pour frais professionnels de 14 % et de 5 % appliquées aux rémunérations perçues par M. C...en 2003 en sa qualité de professeur de musique ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 31 octobre 2011, présenté pour M. C...; il conclut au rejet du recours du ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat et à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient qu'ainsi qu'en a jugé le Conseil d'Etat dans son arrêt n° 316083 du 7 avril 2010, il ressort des termes mêmes de l'instruction 5 F-1-99 du 30 décembre 1998 qu'il convient de pratiquer l'abattement sur la totalité de la rémunération perçue par l'artiste musicien, y compris les rémunérations perçues par ce dernier au titre de son activité d'enseignement artistique et ce alors même que ces revenus présenteraient un caractère prépondérant ; qu'il peut ainsi légitimement bénéficier des déductions forfaitaires de 14 % et de 5 % sur l'intégralité de ses revenus imposables au titre de la période du 1er janvier au 1er juillet 2003, tant en qualité d'artiste musicien qu'en tant qu'enseignant dans une école de musique ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 4 novembre 2011, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat ; il persiste dans ses précédentes conclusions par les mêmes moyens que ceux invoqués dans son recours et soutient, en outre, que la réponse ministérielle A...du 11 novembre 2002 est opposable au contribuable dès lors qu'elle a fait l'objet d'une publication au journal officiel avant la date du fait générateur de l'impôt sur le revenu dû au titre de la période du 1er janvier au 1er juillet 2003 ; que M. C...ne peut être regardé comme exerçant ses fonctions dans des conditions analogues à celles d'un musicien professionnel ; que la demande de M. C...n'étant pas fondée il y a lieu de rejeter sa demande tendant à la condamnation de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire en défense complémentaire, enregistré le 17 novembre 2011, présenté pour M. C...; il persiste dans ses précédentes conclusions par les mêmes moyens et soutient, en outre, que la réponse ministérielle A...n'est pas valide dès lors que l'instruction 5 F-16-03 du 22 octobre 2003, qui reprenait cette réponse ministérielle, qui, dans la rigueur des principes, n'a en tout état de cause qu'une valeur documentaire, a été annulée par le Conseil d'Etat dans son arrêt n° 262982 du 6 mars 2006 ; qu'il est ainsi fondé à demander l'application de la doctrine contenue dans l'instruction du 30 décembre 1998 sans qu'il y ait lieu de tenir compte des conditions restrictives posée par la réponse ministérielle du 11 novembre 2002 qui a été annulée ;

Vu le mémoire en duplique, enregistré le 30 novembre 2011, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat ; il persiste dans ses précédentes conclusions par les mêmes moyens et soutient, en outre, que la validité de la position exprimée par la réponse ministérielle A...et par la documentation de base 5 F 2544 du 10 février 1999 ne saurait être remise en cause ;

Vu l'ordonnance en date du 26 avril 2013 fixant la clôture de l'instruction au 13 mai 2013 à 16 heures 30, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 juin 2013 :

- le rapport de Mme Mear, présidente ;

- et les conclusions de Mme Jourdan, rapporteur public ;

1. Considérant que M. C...E..., parallèlement à ses fonctions d'enseignant de musique, notamment au conservatoire de musique de Dijon, une activité d'artiste musicien ; qu'il a opté, au titre de l'année 2003, pour la déduction de ses frais professionnels réels et a déduit de l'ensemble de ses rémunérations imposables dans la catégorie des traitements et salaires, les déductions forfaitaires de 14 % et de 5 % prévues par l'instruction 5 F-1-99 du 30 décembre 1998 ; que l'administration a remis en cause une partie de ces déductions en estimant qu'elles ne pouvaient s'appliquer qu'aux seules rémunérations perçues en qualité d'artiste musicien au motif que M. C...exerçait, à titre principal, une activité d'enseignant ; que, par jugement n° 0800463 du 19 octobre 2010, le Tribunal administratif de Dijon a déchargé M. et Mme C...de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de la période du 1er janvier au 30 juin 2003 ; que le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat relève appel de ce jugement ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : " Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration. / Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente. Sont également opposables à l'administration, dans les mêmes conditions, les instructions ou circulaires publiées relatives au recouvrement de l'impôt et aux pénalités fiscales " ; que ces dispositions n'ont ni pour objet ni pour effet de conférer à l'administration fiscale un pouvoir réglementaire ou de lui permettre de déroger à la loi ; qu'elles instituent, en revanche, un mécanisme de garantie au profit du redevable qui, s'il l'invoque, est fondé à se prévaloir, à condition d'en respecter les termes, de l'interprétation de la loi formellement admise par l'administration, même lorsque cette interprétation ajoute à la loi ou la contredit ;

3. Considérant que ces dispositions ne permettent de se prévaloir d'une interprétation de la loi fiscale que dans son dernier état formellement accepté par l'administration à la date du fait générateur de l'imposition en litige ; qu'un redevable n'est donc pas fondé à se prévaloir de l'interprétation initialement admise par l'administration dans un premier acte lorsque cette interprétation a été complétée ou modifiée par un deuxième acte, et ce nonobstant l'annulation ultérieure de ce second acte ; qu'il a également la faculté d'opposer à l'administration l'interprétation formellement admise dans un acte, quand bien même un autre acte, exprimant la même interprétation a été annulé pour excès de pouvoir ;

4. Considérant qu'à la date du fait générateur de l'imposition litigieuse, soit au 1er juillet 2003, l'instruction 5 F-1-99 du 30 décembre 1998 avait été rapportée sur certains points par la réponse ministérielle du 11 novembre 2002 à la question de M.A..., député ; qu'à cette date, l'instruction 5 F-1-99 du 30 décembre 1998 ne pouvait donc plus être opposée à l'administration sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales s'agissant des modalités d'application des déductions forfaitaires de 14 % et de 5 % aux professeurs de musique exerçant parallèlement à leur activité d'enseignement une activité d'artiste musicien pour laquelle ils sont spécifiquement rémunérés ; qu'à cette même date, l'interprétation formellement admise par l'administration, qui était ainsi seule invocable, résultait de la réponse ministérielle du 11 novembre 2002 dès lors qu'elle contenait des dispositions impératives à caractère général et avait été régulièrement publiée ; que la circonstance que le contenu de cette réponse ministérielle a été repris, postérieurement au fait générateur de l'imposition litigieuse, par l'instruction 5 F-16-03 du 22 octobre 2003, et que cette dernière a été annulée par l'arrêt du Conseil d'Etat du 6 mars 2006, n° 262982, Syndicat national des enseignants et artistes, n'a pas eu pour effet de remettre en cause le caractère opposable de la réponse ministérielle du 11 novembre 2002 ni, par suite, de rendre à nouveau opposables les dispositions de l'instruction 5 F-1-99 du 30 décembre 1998 qui avaient été rapportées par cette réponse ministérielle ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que pour décharger M. et Mme D...de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de la période du 1er janvier au 1er juillet 2003, le Tribunal administratif de Dijon s'est fondé sur la doctrine administrative énoncée par l'instruction 5 F-1-99 ;

6. Considérant, qu'il appartient à la Cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. et Mme D... devant le Tribunal administratif et devant la Cour ;

7. Considérant qu'aux termes de l'article 83 du code général des impôts : " Le montant net du revenu imposable est déterminé en déduisant du montant brut des sommes payées et des avantages en argent ou en nature accordés : (...) 3° Les frais inhérents à la fonction ou à l'emploi lorsqu'ils ne sont pas couverts par des allocations spéciales. La déduction à effectuer du chef des frais professionnels est calculée forfaitairement en fonction du revenu brut (...) ; elle est fixée à 10 % du montant de ce revenu. (...) Les bénéficiaires de traitements et salaires sont également admis à justifier du montant de leurs frais réels (...). " ; que M. et MmeD..., qui ont opté pour la déduction de frais réels, ne justifient pas de frais d'un montant supérieur au montant retenu par l'administration ;

8. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède, que le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat est fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué le Tribunal administratif de Dijon a déchargé M. et Mme D...de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de la période du 1er janvier au 1er juillet 2003 et des pénalités y afférentes ; qu'il y a lieu, dès lors, d'annuler l'article 1er du jugement attaqué et de rétablir les intéressés dans le rôle de ladite imposition ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à M. C...la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : L'article 1er du jugement n° 0800463 du Tribunal administratif de Dijon en date du 19 octobre 2010 est annulé.

Article 2 : M. et Mme C...sont rétablis, en droits et pénalités, au rôle de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de la période du 1er janvier au 1er juillet 2003.

Article 3 : Les conclusions de M. C...tendant à la condamnation de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'économie et des finances et à M. et Mme B...C....

Délibéré après l'audience du 6 juin 2013 à laquelle siégeaient :

Mme Mear, présidente,

M. Reynoird, premier conseiller,

Mme Chevalier-Aubert, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 27 juin 2013.

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N° 11LY00607


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11LY00607
Date de la décision : 27/06/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

19-04-02-07-02-02 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Traitements, salaires et rentes viagères. Déductions pour frais professionnels. Frais réels.


Composition du Tribunal
Président : Mme MEAR
Rapporteur ?: Mme Josiane MEAR
Rapporteur public ?: Mme JOURDAN
Avocat(s) : FISCALEX

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2013-06-27;11ly00607 ?
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