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18/06/2013 | FRANCE | N°11LY02152

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 18 juin 2013, 11LY02152


Vu la requête, enregistrée le 22 août 2011 au greffe de la Cour, présentée pour Mme C...B..., domiciliée ... ;

Mme B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0702790 du 15 juin 2011 du Tribunal administratif de Grenoble en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à la restitution des droits de taxe sur la valeur ajoutée qu'elle avait acquittés pour la période du 1er janvier 2004 au 31 décembre 2006 ;

2°) d'ordonner cette restitution ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de ju

stice administrative ;

Elle soutient qu'elle doit bénéficier de l'exonération de taxe s...

Vu la requête, enregistrée le 22 août 2011 au greffe de la Cour, présentée pour Mme C...B..., domiciliée ... ;

Mme B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0702790 du 15 juin 2011 du Tribunal administratif de Grenoble en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à la restitution des droits de taxe sur la valeur ajoutée qu'elle avait acquittés pour la période du 1er janvier 2004 au 31 décembre 2006 ;

2°) d'ordonner cette restitution ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient qu'elle doit bénéficier de l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée prévue par les dispositions de l'article 261-4-1° du code général des impôts, lesquelles doivent être interprétées à la lumière de l'article 13-1, paragraphe 1 c) de la 6ème directive n° 77/388/CE du 17 mai 1977, s'agissant de prestations de soins à la personne effectuées dans le cadre de l'exercice des professions médicales et paramédicales ; qu'elle justifie avoir suivi une formation et obtenu un diplôme en ostéopathie, qui lui a été délivré le 22 janvier 2005 ; que les actes qu'elle a délivrés doivent être regardés comme ayant été d'un niveau de qualité identique à ceux effectués par des médecins ; qu'elle a obtenu l'autorisation d'user du titre d'ostéopathe ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 22 janvier 2013, présenté par le ministre de l'économie et des finances, qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que la requérante ne peut se prévaloir des dispositions de l'article 75 de la loi du 4 mars 2005 qui n'avait aucune portée utile en matière fiscale ; que la charge de la preuve du caractère exagéré des impositions incombe au contribuable, en application de l'article R.* 194-1 du livre des procédures fiscales ; que la requérante n'a produit aucun élément permettant d'appréhender la nature et la qualité des actes d'ostéopathie qu'elle a accomplis au cours de la période litigieuse ; que le fait qu'elle avait obtenu un diplôme et qu'une autorisation d'user du titre d'ostéopathe lui a été ultérieurement délivrée ne sont pas de nature à établir qu'elle a pratiqué des actes de qualité équivalente à ceux des personnes bénéficiant de l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée ;

Vu l'ordonnance en date du 31 janvier 2013 fixant la clôture d'instruction au 28 février 2013, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la sixième directive n° 77/388/CEE du Conseil du 17 mai 1977 ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé ;

Vu le décret n° 96-879 du 8 octobre 1996 relatif aux actes professionnels et à l'exercice de la profession de masseur-kinésithérapeute ;

Vu le décret n° 2007-435 du 25 mars 2007 relatif aux actes et aux conditions d'exercice de l'ostéopathie ;

Vu le décret n° 2007-437 du 25 mars 2007 relatif à la formation des ostéopathes et à l'agrément des établissements de formation ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 mai 2013 :

- le rapport de M. Besse, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Lévy Ben-Cheton, rapporteur public ;

1. Considérant que MmeB..., qui exerce l'activité d'ostéopathe à Saint-Marcellin (Isère), a demandé le 22 décembre 2006 la restitution de la taxe sur la valeur ajoutée qu'elle avait spontanément acquittée pour la période du 1er janvier 2004 au 31 décembre 2006, en estimant pouvoir bénéficier des dispositions de l'article 261 du code général des impôts relatives à l'exonération de cette taxe ; qu'elle relève appel du jugement du 15 juin 2011 du Tribunal administratif de Grenoble en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à la restitution de cette taxe ;

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R.* 194-1 du livre des procédures fiscales : " Lorsque, ayant donné son accord à la rectification ou s'étant abstenu de répondre dans le délai légal à la proposition de rectification, le contribuable présente cependant une réclamation faisant suite à une procédure contradictoire de rectification, il peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition, en démontrant son caractère exagéré. / Il en est de même lorsqu'une imposition a été établie d'après les bases indiquées dans la déclaration souscrite par un contribuable (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions qu'un contribuable ne peut obtenir la restitution de droits de taxe sur la valeur ajoutée qu'il a déclarés et spontanément acquittés conformément à ses déclarations qu'à la condition d'en établir le mal-fondé ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 13, A, paragraphe 1 de la sixième directive du Conseil du 17 mai 1977 en matière d'harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires : " Sans préjudice d'autres dispositions communautaires, les Etats membres exonèrent, dans les conditions qu'ils fixent en vue d'assurer l'application correcte et simple des exonérations prévues ci-dessous et de prévenir toute fraude, évasion et abus éventuels : / (...) c) les prestations de soins à la personne effectuées dans le cadre de l'exercice des professions médicales et paramédicales telles qu'elles sont définies par l'Etat membre concerné (...) " ; qu'en vertu du 1° du 4 de l'article 261 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à la période d'imposition en litige, sont exonérés de la taxe sur la valeur ajoutée : " Les soins dispensés aux personnes par les membres des professions médicales et paramédicales réglementées (...) " ; qu'en limitant l'exonération qu'elles prévoient aux soins dispensés par les membres des professions médicales et paramédicales soumises à réglementation, ces dispositions ne méconnaissent pas l'objectif poursuivi par l'article 13, A, paragraphe 1, sous c) de la sixième directive, précité, qui est de garantir que l'exonération s'applique uniquement aux prestations de soins à la personne fournies par des prestataires possédant les qualifications professionnelles requises ; qu'en effet, la directive renvoie à la réglementation interne des États membres la définition de la notion de professions paramédicales, des qualifications requises pour exercer ces professions et des activités spécifiques de soins à la personne qui relèvent de telles professions ;

4. Considérant toutefois que, conformément à l'interprétation des dispositions de la sixième directive qui résulte de l'arrêt rendu le 27 avril 2006 par la Cour de justice des Communautés européennes dans les affaires C-443/04 et C-444/04, l'exclusion d'une profession ou d'une activité spécifique de soins à la personne de la définition des professions paramédicales retenue par la réglementation nationale aux fins de l'exonération de la taxe sur la valeur ajoutée prévue à l'article 13, A, paragraphe 1, sous c) de cette directive serait contraire au principe de neutralité fiscale inhérent au système commun de taxe sur la valeur ajoutée s'il pouvait être démontré que les personnes exerçant cette profession ou cette activité disposent, pour la fourniture de telles prestations de soins, de qualifications professionnelles propres à assurer à ces prestations un niveau de qualité équivalente à celles fournies par des personnes bénéficiant, en vertu de la réglementation nationale, de l'exonération ;

5. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 75 de la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé, dans sa version applicable au présent litige : " L'usage professionnel du titre d'ostéopathe ou de chiropracteur est réservé aux personnes titulaires d'un diplôme sanctionnant une formation spécifique à l'ostéopathie ou à la chiropraxie délivrée par un établissement de formation agréé par le ministre chargé de la santé dans des conditions fixées par décret. Le programme et la durée des études préparatoires et des épreuves après lesquelles peut être délivré ce diplôme sont fixés par voie réglementaire. (...) / Les praticiens en exercice, à la date d'application de la présente loi, peuvent se voir reconnaître le titre d'ostéopathe ou de chiropracteur s'ils satisfont à des conditions de formation ou d'expérience professionnelle analogues à celles des titulaires du diplôme mentionné au premier alinéa. Ces conditions sont déterminées par décret. (...) / Un décret établit la liste des actes que les praticiens justifiant du titre d'ostéopathe ou de chiropracteur sont autorisés à effectuer, ainsi que les conditions dans lesquelles ils sont appelés à les accomplir. / Ces praticiens ne peuvent exercer leur profession que s'ils sont inscrits sur une liste dressée par le représentant de l'État dans le département de leur résidence professionnelle, qui enregistre leurs diplômes, certificats, titres ou autorisations " ;

6. Considérant que le décret du 25 mars 2007 relatif aux actes et aux conditions d'exercice de l'ostéopathie et le décret du même jour relatif à la formation des ostéopathes et à l'agrément des établissements de formation, pris pour l'application de cet article, n'ont été publiés que le 27 mars 2007 ; que, durant la période en litige, les actes d'ostéopathie ne pouvaient être pratiqués que par les docteurs en médecine et, pour certains actes, sur prescription médicale, par les masseurs-kinésithérapeutes, en vertu de la réglementation de leur profession, notamment les dispositions des articles 5 et 7 du décret du 8 octobre 1996 susvisé repris aux articles R. 4321-5 et R. 4321-7 du code de la santé publique ;

7. Considérant qu'il résulte de l'ensemble des dispositions précitées que, pour obtenir la restitution des droits de taxe sur la valeur ajoutée acquittés par Mme B...sur ses prestations d'ostéopathie, celle-ci doit démontrer qu'elle disposait, pour la fourniture de ces prestations, de qualifications professionnelles propres à leur assurer un niveau de qualité équivalente à celles fournies par un médecin ; que l'appréciation de la qualité des actes accomplis par Mme B...ne peut être portée qu'au vu de la nature des actes accomplis sous la dénomination d'actes d'ostéopathie et, s'agissant des actes susceptibles de comporter des risques en cas de contre-indication médicale, en considération des conditions dans lesquelles ils ont été effectués ; qu'est en revanche sans incidence, pour apprécier la nature de ces actes au regard de leur assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période en cause, la circonstance, à la supposer établie, que l'intéressée a pu ultérieurement faire valoir certains éléments relatifs à sa pratique professionnelle, lors de la mise en oeuvre des mesures transitoires prévues à l'article 16 du décret n° 2007-435 du 25 mars 2007 en vue d'autoriser l'usage du titre professionnel d'ostéopathe par les praticiens en exercice à la date de publication de ce décret ; qu'il appartient, dès lors, à Mme B..., pour mettre le juge à même de s'assurer que la condition tenant à la qualité des actes était remplie, de produire, d'une part, et sous réserve de l'occultation des noms des patients, des éléments relatifs à sa pratique permettant d'appréhender, sur une période significative, la nature des actes accomplis et les conditions dans lesquelles ils l'ont été et, d'autre part, tous éléments utiles relatifs à ses qualifications professionnelles ;

8. Considérant qu'à l'appui de sa demande de restitution, Mme B...se prévaut, d'une part, de l'obtention d'un diplôme d'ostéopathie, après une formation à l'institut supérieur d'ostéopathie de Lyon, lequel figure sur la liste des établissements agréés dispensant une formation en ostéopathie fixée par l'arrêté du 9 août 2007, lors de laquelle elle a bénéficié de 2 129 heures d'enseignement en médecine académique et de 2 308 heures d'enseignement ostéopathique, et à l'issue de laquelle elle a soutenu son mémoire de fin d'études le 30 juin 2002, et, d'autre part, de ce qu'elle a obtenu l'autorisation d'user du titre d'ostéopathe par décision du préfet de la région Rhône-Alpes du 3 mars 2008 ; que pour permettre au juge de se prononcer sur la nature des actes accomplis et les conditions dans lesquelles ils ont été effectués, il lui appartenait également de fournir des éléments permettant de s'assurer que ces actes n'étaient pas interdits ou n'avaient pas été accomplis sans avis médical préalable lorsque celui-ci était requis ; qu'en l'espèce, elle n'a produit aucun élément relatif à sa pratique en 2004, 2005 et 2006 ; que Mme B...n'établit pas, ainsi, que les actes d'ostéopathie qu'elle avait accomplis auraient pu être considérés comme d'une qualité équivalente à ceux qui, s'ils avaient été effectués par un médecin pratiquant l'ostéopathie, auraient bénéficié de l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande de restitution ; que, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...B...et au ministre de l'économie et des finances.

Délibéré après l'audience du 28 mai 2013 à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président,

MM. A...et Besse, premiers conseillers.

Lu en audience publique, le 18 juin 2013.

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N° 11LY02152


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11LY02152
Date de la décision : 18/06/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

19-06-02-02 Contributions et taxes. Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées. Taxe sur la valeur ajoutée. Exemptions et exonérations.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: M. Thierry BESSE
Rapporteur public ?: M. LEVY BEN CHETON
Avocat(s) : FLAICHER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2013-06-18;11ly02152 ?
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