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30/04/2013 | FRANCE | N°12LY02535

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 30 avril 2013, 12LY02535


Vu la requête, enregistrée à la Cour le 28 septembre 2012, présentée pour M. C...A..., domicilié ...;

M. A...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1201250 du 29 mai 2012 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet du Rhône, du 16 décembre 2011, lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et désignant le pays à destination duquel il serait reconduit ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les

décisions susmentionnées ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer un titre d...

Vu la requête, enregistrée à la Cour le 28 septembre 2012, présentée pour M. C...A..., domicilié ...;

M. A...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1201250 du 29 mai 2012 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet du Rhône, du 16 décembre 2011, lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et désignant le pays à destination duquel il serait reconduit ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions susmentionnées ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros, au profit de son conseil, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Il soutient que le préfet, s'estimant lié par l'avis consultatif émis par le médecin de l'agence régionale de santé, s'est abstenu d'apprécier, au vu des informations dont il disposait, s'il existait ou non au Kosovo des possibilités de traitement approprié de l'affection dont M. A... est atteint ; que, par suite, la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour est entachée d'une erreur de droit ; qu'il ne peut bénéficier, dans son pays d'origine, d'un traitement approprié à son état de santé et que, par suite, la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que cette même décision de refus ainsi que la mesure d'éloignement qui l'accompagne et la décision fixant le pays de renvoi sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation et méconnaissent, en outre, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les pièces desquelles il résulte que la requête a été notifiée au préfet du Rhône, qui n'a pas produit d'observations ;

Vu la décision du 20 août 2012, par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Lyon (section administrative d'appel) a accordé le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à M. A... ;

Vu l'ordonnance du 11 février 2013 portant clôture de l'instruction au 27 février 2013 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée, relative à l'aide juridique ;

Vu la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Sur sa proposition, le rapporteur public a été dispensé de prononcer des conclusions à l'audience en application de l'article R. 732-1-1 du code de justice administrative, par le président de la formation de jugement ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 avril 2013 :

- le rapport de M. Chanel, président de chambre ;

Sur la décision de refus de délivrance de titre de séjour :

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, notamment des termes mêmes de la décision du 16 décembre 2011 attaquée, que le préfet du Rhône a procédé à l'examen particulier de la situation personnelle de M. A... avant de décider de ne pas faire droit à sa demande de délivrance d'un titre de séjour au titre des stipulations du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le préfet aurait commis une erreur de droit en s'estimant en situation de compétence liée par l'avis du médecin inspecteur pour prendre cette décision doit être écarté ;

2. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. Le médecin de l'agence régionale de santé ou, à Paris, le chef du service médical de la préfecture de police peut convoquer le demandeur pour une consultation médicale devant une commission médicale régionale dont la composition est fixée par décret en Conseil d'Etat. " ; qu'aux termes de l'article R. 313-22 du même code, modifié par le décret n° 2011-1049 du 6 septembre 2011 : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général. Par dérogation, à Paris, ce médecin est désigné par le préfet de police. L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un médecin praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur l'existence d'un traitement dans le pays d'origine de l'intéressé. Quand la commission médicale régionale a été saisie dans les conditions prévues à l'article R. 313-26, l'avis mentionne cette saisine. Le préfet peut, après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, prendre en considération une circonstance humanitaire exceptionnelle pour délivrer la carte de séjour temporaire même s'il existe un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. L'étranger mentionné au 11° de l'article L. 313-11 qui ne remplirait pas la condition de résidence habituelle peut recevoir une autorisation provisoire de séjour renouvelable pendant la durée du traitement. " ;

3. Considérant qu'il résulte de ces dispositions, éclairées par les travaux parlementaires qui ont précédé l'adoption de la loi du 16 juin 2011 susvisée, dont sont issues les dispositions précitées de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qu'il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser la délivrance d'un titre de séjour à un étranger qui en fait la demande sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11, de vérifier, au vu de l'avis émis par le médecin mentionné à l'article R. 313- 22 précité, que cette décision ne peut avoir de conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait un défaut de prise en charge médicale dans le pays dont l'étranger est originaire ; que lorsque le défaut de prise en charge risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'intéressé, l'autorité administrative ne peut légalement refuser le titre de séjour sollicité que s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause dans son pays d'origine ;

4. Considérant que M. A..., de nationalité kosovare, a sollicité la délivrance d'une carte de séjour temporaire sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en faisant état d'une sinusite chronique ainsi que des troubles psychologiques dont il est atteint ; que, dans son avis rendu le 8 août 2011, le médecin de l'agence régionale de santé a estimé que si l'état de santé de M. A... nécessitait une prise en charge médicale, le défaut de cette prise en charge ne devait toutefois pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il pouvait, en tout état de cause, avoir accès au Kosovo à un traitement approprié à ses pathologies ; que le préfet du Rhône a refusé, le 16 décembre 2011, de délivrer à M. A... le titre de séjour qu'il sollicitait ; que les pièces médicales produites par l'intéressé ne permettent pas de conclure que l'absence de la prise en charge médicale dont il bénéficie en France pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité ; qu'en particulier, si M. A... fait valoir que ses souffrances psychologiques l'exposent à un risque suicidaire, le seul certificat versé à l'appui de cette allégation, délivré par le docteur Chalumeau le 11 février 2012, n'est pas de nature à infirmer, sur ce point, la teneur de l'avis rendu par le médecin de l'agence régionale de santé ; que, par suite, le moyen tiré de la violation des dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté ;

5. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M.A..., ressortissant kosovar né le 30 juillet 1986, est entré irrégulièrement en France le 18 juin 2010 ; que s'il soutient que son état de santé requiert son admission au séjour en France pour bénéficier d'une prise en charge qui lui est nécessaire, il résulte de ce qui vient d'être énoncé qu'un défaut de prise en charge médicale ne devrait toutefois pas entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité ; qu'en outre, les pièces médicales versées au dossier ne permettent de démontrer qu'il ne pourrait bénéficier, dans son pays d'origine, d'une prise en charge adaptée à son état de santé ; qu'enfin, célibataire et sans enfant, M. A...est entré récemment en France où il ne justifie d'aucune attache ; que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, la décision contestée n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise ; qu'elle n'a, ainsi, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'elle n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

7. Considérant, qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction modifiée par la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011 : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; (...) " ;

8. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M.A..., de nationalité kosovare, s'est vu refuser la délivrance d'un titre de séjour par décision du 16 décembre 2011 ; qu'ainsi, à la date de l'arrêté attaqué, le même jour, il était dans le cas prévu par les dispositions précitées du 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet peut faire obligation à un étranger de quitter le territoire français ;

9. Considérant que pour les mêmes motifs que ceux retenus dans le cadre de l'examen de la légalité des décisions de refus de titre de séjour, la mesure d'éloignement prise à l'encontre de M. A...et la décision fixant le pays de destination ne méconnaissent pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et ne sont pas davantage entachées d'erreur manifeste d'appréciation de leurs conséquences sur la situation personnelle du requérant ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, qui est suffisamment motivé, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que ses conclusions aux fins d'injonction et de mise à la charge de l'Etat des frais exposés par lui et non compris dans les dépens doivent être rejetées par voie de conséquence ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...A...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 9 avril 2013 à laquelle siégeaient :

- M. Chanel, président de chambre,

- M.B..., president-assesseur,

- M. Segado, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 30 avril 2013.

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N° 12LY02535


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12LY02535
Date de la décision : 30/04/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. CHANEL
Rapporteur ?: M. Christian CHANEL
Rapporteur public ?: M. LEVY BEN CHETON
Avocat(s) : ESQUERRE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2013-04-30;12ly02535 ?
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