Vu la décision n° 344778 du 26 novembre 2012 par laquelle le Conseil d'Etat statuant au Contentieux a annulé l'arrêt de la Cour n° 08LY01165-08LY01192 du 10 juin 2010 en tant qu'il a statué sur la responsabilité du service départemental d'incendie et de secours (SDIS) du Puy-de-Dôme et a renvoyé, dans cette mesure, à la Cour le jugement de l'affaire ;
Vu l'arrêt n° 08LY01165-08LY01192 du 10 juin 2010 par lequel la Cour, a :
- annulé le jugement n° 061875 du 11 mars 2008 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a condamné solidairement la commune de Domaize et le SDIS du Puy-de-Dôme à verser à M. B...la somme de 40 000 euros en réparation des préjudices consécutifs à l'incendie de sa maison le 3 mars 2003 ;
- rejeté la demande d'indemnisation de M. B...ainsi que son appel incident ;
- mis à la charge de M. B...les frais d'expertise ;
Vu le mémoire, enregistré le 29 janvier 2013, présenté pour M. B...qui conclut au rejet de la requête du SDIS du Puy-de-Dôme et, par la voie de l'appel incident, à ce que la somme de 40 000 euros allouée par le Tribunal à titre de dommages intérêts soit portée à 65 000 euros ou, à tout le moins, à 44 500 euros, par les mêmes moyens que ceux précédemment invoqués ;
Il soutient en outre que suite à la décision du Conseil d'État du 26 novembre 2012, il est désormais établi que le SDIS du Puy-de-Dôme doit supporter l'entière responsabilité des dommages qu'il a subis en conséquence de l'incendie dont il a été victime ;
Vu l'ordonnance du 4 février 2013, prise sur le fondement des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative, fixant au 8 mars 2013 la date de clôture de l'instruction ;
Vu le mémoire, enregistré le 5 février 2013, présenté pour le SDIS du Puy-de-Dôme qui conclut à l'annulation du jugement attaqué, au rejet des conclusions de M. B...et à ce que soit mise à sa charge une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, par les mêmes moyens que ceux précédemment invoqués ;
Il soutient en outre :
- que compte tenu des informations qui ont été communiquées lors du signalement du sinistre, l'agent ayant reçu l'appel a pu estimer, alors même qu'il s'agissait d'un feu dans un immeuble d'habitation, que les moyens d'intervention puissent être limités à un seul camion d'interventions diverses (CID) et à un seul fourgon pompe tonne léger (FPTL) ;
- qu'il n'existe, en tout état de cause, aucun lien de causalité entre l'insuffisance des moyens qui ont été déployés et les conséquences dommageables de l'incendie ;
- qu'à supposer que sa responsabilité puissent être retenue, il devra en être exonéré en conséquence de la faute commise par M. B...;
- que M. B...ne justifie pas d'un préjudice supérieur à 40 000 euros ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu l'arrêté du 7 novembre 2001 du préfet du Puy-de-Dôme portant règlement opérationnel du SDIS ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 mars 2013 :
- le rapport de M. Poitreau, premier conseiller ;
- les conclusions de M. Pourny, rapporteur public ;
- et les observations de Me Francina, avocat du service départemental d'incendie et de secours du Puy-de-Dôme ;
1. Considérant que M.B..., dont la maison, située sur le territoire de la commune de Domaize (Puy-de-Dôme), a été partiellement détruite par un incendie survenu le 3 mars 2003, a mis en cause la responsabilité du service départemental d'incendie et de secours (SDIS) du Puy-de-Dôme et des communes de Domaize et de Tours-sur-Meymont dans la réalisation du sinistre ; que, par un jugement du 11 mars 2008, le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand, faisant partiellement droit à sa demande, a déclaré le SDIS du Puy-de-Dôme et la commune de Domaize partiellement responsables des dommages causés à sa maison et les a condamnés solidairement à lui verser une indemnité de 40 000 euros, correspondant à 50 % du préjudice subi, et à prendre en charge les frais d'expertise ; que, par un arrêt du 10 juin 2010, la Cour, statuant sur les requêtes de la commune de Domaize et du SDIS du Puy-de-Dôme, a annulé ce jugement en tant qu'il a prononcé cette condamnation, et rejeté la demande et les conclusions d'appel incident de M. B... ; qu'à la suite du pourvoi formé par M.B..., le Conseil d'Etat, par la décision susvisée du 26 novembre 2012, a annulé l'arrêt de la Cour en tant qu'il a statué sur la responsabilité du SDIS du Puy-de-Dôme et lui a, dans cette mesure, renvoyé le jugement de l'affaire ;
2. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 1424-3 du code général des collectivités territoriales : " Les services d'incendie et de secours sont placés pour emploi sous l'autorité du maire ou du préfet, agissant dans le cadre de leurs pouvoirs respectifs de police. " ; qu'aux termes de l'article L. 1424-4 du même code : " Dans l'exercice de tous pouvoirs de police, le maire et le préfet mettent en oeuvre les moyens relevant des services d'incendie et de secours dans les conditions prévues par un règlement opérationnel arrêté par le préfet après avis du conseil d'administration du service départemental d'incendie et de secours . (...) " ; qu'enfin l'article L. 1424-8 de ce code dispose que : " Sans préjudice des dispositions de l'article L. 2216-2, le transfert des compétences de gestion prévu par le présent chapitre au profit du service départemental d'incendie et de secours emporte transfert de la responsabilité civile des communes ou des établissements publics de coopération intercommunale au titre des dommages résultant de l'exercice de ces compétences. " ;
3. Considérant, d'autre part, que l'article 13 du règlement opérationnel des services d'incendie et de secours du Puy-de-Dôme prévoit qu' " en l'absence d'informations précises sur la nature, l'importance ou les conséquences du sinistre, les moyens a minima qui devront être engagés " a priori " sont fixés dans l'annexe 2 " ; que, selon cette annexe, en l'absence d'information précise lors de la réception de l'alerte, la mobilisation, en cas de feu concernant une maison à usage d'habitation, porte sur deux fourgons pompe tonne léger (FPTL), une voiture de secours aux asphyxiés et aux blessés (VSAB), un chef de garde (CDG) et une échelle pivotante semi-automatique (EPSA) ; qu'en cas d' " interventions diverses " la même annexe prévoit la mobilisation d'une camionnette d'interventions diverses (CID) ; que cette annexe précise en outre que le départ type peut être complété ou allégé en fonction des informations recueillies à la demande des secours ; que l'annexe 4 à ce même règlement, relative aux modalités d'engagement et d'emploi des centres d'intervention (CI) et des centres de première intervention (CPI), précise que si le CPI ou le CI ne dispose pas du matériel, du personnel ou des compétences pour assurer la mission, le centre de secours principal ou le centre de secours est systématiquement engagé en renfort du CPI ou du CI ; qu'il résulte, enfin, des dispositions combinées de l'article 15 du règlement opérationnel précité et du schéma départemental d'analyse et de couverture des risques (SDACR) applicable au département du Puy-de-Dôme que, s'agissant d'un incendie survenu dans une commune classée en zone 3, comme c'est le cas pour la commune de Domaize, les délais indicatifs d'intervention sont de 20 minutes pour le premier véhicule et de 25 minutes pour un engin pompe ;
4. Considérant que M. B...soutient que les conséquences dommageables de l'incendie qui a détruit partiellement sa maison d'habitation sont imputables aux fautes commises par le SDIS du Puy-de-Dôme qui n'a pas correctement évalué l'importance du sinistre lorsque celui-ci lui a été signalé et a tardé à mobiliser les moyens nécessaires pour combattre efficacement cet incendie ;
5. Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport de l'expertise ordonnée par le tribunal administratif, d'une part, que les voisins de M. B...en passant devant sa maison aux environs de 8 heures 15 ont constaté " que la fumée s'échappait de la toiture au niveau de la porte d'entrée et qu'un fort crépitement provenait de l'intérieur " ; que l'épouse d'un de ses voisins a prévenu par téléphone le centre de traitement de l'alerte du centre opérationnel départemental d'incendie et des secours (CTA-CODIS) du Puy-de-Dôme à 8 heures 31 en décrivant le sinistre comme étant un feu de cheminée ; qu'à la suite de cet appel téléphonique, le CPI de Tours-sur-Meymont, commune située à environ 6 kilomètres de Domaize, a été alerté à 8 heures 32 et qu'il a pu faire intervenir une CID qui est arrivée sur les lieux à 8 heures 48 ; que le CPI de Tours-sur-Meymont, qui ne disposait pas alors d'un chauffeur de poids lourds pour conduire un fourgon pompe tonne léger (FPTL), a parallèlement informé, à 8 heures 39, le CTA-CODIS pour lui signaler l'indisponibilité d'un tel engin ; que le CTA-CODIS a ensuite alerté, à 8 heures 39, le centre de secours (CS) de la commune de Cunlhat, située à 9 km de Domaize, qui a pu dépêcher un FPTL à 8 heures 44, lequel est arrivé sur les lieux à 8 heures 55 ; qu'il résulte également de l'expertise qu'eu égard à la propagation de l'incendie, le début d'affaissement du toit de la maison de M. B...a été constaté à 8 heures 40, et qu'à 8 heures 58 ou 9 heures, la toiture était affaissée, et la maison totalement embrasée vers 9 heures 05 ou 9 heures 10 ;
6. Considérant qu'il résulte de la chronologie des faits, rappelée ci-dessus, que, d'une part, dès la première intervention du CPI de Tours-sur-Meymont était prévue la mobilisation d'un FPTL, et que c'est en raison de l'indisponibilité de ce matériel qu'il a été fait appel, conformément à ce que prévoit l'annexe 4 au règlement opérationnel des services d'incendie et de secours du Puy-de-Dôme, au centre de secours (CS) de la commune de Cunlhat qui a pu dépêcher un tel matériel qui a pu intervenir sur les lieux du sinistre à 8 heures 55 ; que, contrairement à ce que soutient M.B..., l'indisponibilité du camion pompe au CPI de Tours-sur-Meymont, faute d'un conducteur pour le manoeuvrer, n'est pas, en elle-même, fautive dès lors qu'elle n'est pas à l'origine d'un retard d'intervention au regard du délai moyen d'intervention prévu par les dispositions de l'article 15 du règlement opérationnel et du SDACR qui fixe ce délai, eu égard à la situation de la commune de Domaize, à 25 minutes pour les engins pompe ; que, d'autre part, à supposer que le SDIS ait commis une faute en ne prévoyant pas, dès le signalement du sinistre, une mobilisation de l'ensemble des matériels prévus, en cas de feu dans un immeuble d'habitation, par l'annexe 2 au règlement opérationnel, il ne résulte pas de l'instruction qu'une telle faute a pu, en l'espèce, avoir une incidence sur l'aggravation des conséquences de l'incendie dès lors que, comme il a été précédemment rappelé, lorsque le FPTL est parvenu sur les lieux du sinistre, soit à 8 heures 55, l'ampleur de l'incendie était telle qu'il avait déjà été constaté, dès 8 heures 40, un début d'affaissement de la toiture et son affaissement complet à 8 heures 58 ou 9 heures, précédant l'embrasement total de la maison à 9 heures 05 ; que, dans ces conditions, les conséquences dommageables de cet incendie ne peuvent être, même partiellement, imputées aux conditions d'intervention du SDIS du Puy-de-Dôme ;
7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, d'une part, le SDIS du Puy-de-Dôme est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand l'a condamné à réparer partiellement les préjudices subis par M. B...en conséquence de l'incendie survenu le 3 mars 2003 ; que, d'autre part, M. B... n'est pas fondé à demander, par la voie de l'appel incident, une majoration de l'indemnité qui lui a été allouée ;
8. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, les frais de l'expertise doivent être laissés à la charge de M.B... ;
9. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions du SDIS du Puy-de-Dôme tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Clermont Ferrand du 11 mars 2008 est annulé en tant qu'il a condamné le SDIS du Puy-de-Dôme à verser à M. B...une somme de 40 000 euros.
Article 2 : Les conclusions de M. B...sont rejetées.
Article 3 : Les conclusions du SDIS du Puy-de-Dôme tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au service départemental d'incendie et de secours du Puy-de-Dôme et à M. A...B....
Délibéré après l'audience du 14 mars 2013 à laquelle siégeaient :
M. Clot, président de chambre,
M. Seillet, président-assesseur,
M. Poitreau, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 4 avril 2013.
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N° 12LY03001 2