Vu la requête, enregistrée le 27 juin 2012 au greffe de la Cour, présentée pour Mme D...C..., épouseB..., domiciliée ...;
Mme C...épouse B...demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1201710, en date du 12 juin 2012, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 22 février 2012 par lequel le préfet de la Loire lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a prescrit qu'à l'expiration de ce délai elle serait reconduite d'office à destination du pays dont elle a la nationalité ou de tout pays où elle établirait être légalement admissible, à ce qu'il soit enjoint au préfet de la Loire de lui délivrer un titre de séjour temporaire sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 ou de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans le délai d'un mois, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou de réexaminer sa demande, dans le même délai et sous la même astreinte, et enfin à ce qu'une somme de 1 196 euros soit mise à la charge de l'Etat, à verser à son conseil au titre des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 75 de la loi du 10 juillet 1991 ;
2°) d'annuler ces décisions du préfet de la Loire en date du 22 février 2012 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat, au profit de son conseil, une somme de 1 196 euros TTC, sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 75 de la loi du 10 juillet 1991 ;
Elle soutient que :
- la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, celles de l'article L. 313-14 du même code, et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; elle est entachée en outre d'une erreur manifeste d'appréciation ; elle justifie en effet de circonstances humanitaires particulières liées au fait qu'elle doit pouvoir être autorisée au séjour le temps de l'examen de la demande d'asile présentée par son fils aîné, devenu majeur ;
- cette décision méconnaît également les stipulations de l'article 3 de la convention de New-York signée le 26 janvier 1990 relative aux droits de l'enfant ;
- la décision lui faisant obligation de quitter le territoire national est illégale du fait de l'illégalité de la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour ;
- cette décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- cette décision est encore contraire aux stipulations de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision fixant le pays de destination de sa reconduite est illégale du fait de l'illégalité des décisions lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire national ;
- cette décision méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle, section administrative d'appel, en date du 20 août 2012, par laquelle l'aide juridictionnelle totale a été accordée à Mme C...épouse B...;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 9 octobre 2012, présenté par le préfet de la Loire, qui conclut au rejet de la requête de Mme C...épouseB..., en renvoyant à ses écritures de première instance ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;
Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 20 novembre 1989, signée par la France le 26 janvier 1990 ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 29 novembre 2012 :
- le rapport de M. Montsec, président ;
- les conclusions de Mme Jourdan, rapporteur public ;
- et les observations de Me Genestier, avocat de Mme C...épouse B...;
1. Considérant que Mme D...C...épouseB..., née le 28 octobre 1967, de nationalité arménienne, est entrée irrégulièrement en France le 5 décembre 2008, avec ses deux enfants nés le 6 avril 1993 et le 30 mai 1995, pour y rejoindre son époux, M. A...B..., également de nationalité arménienne ; que sa demande d'asile a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides en date du 30 août 2010, confirmée par décision de la Cour nationale du droit d'asile en date du 4 juillet 2011 ; que, par un arrêté en date du 22 février 2012, le préfet de la Loire lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, en assortissant cette décision d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et en prescrivant qu'elle soit, à l'issue de ce délai, reconduite d'office à destination du pays dont elle a la nationalité, ou de tout pays où elle établirait être légalement admissible ; que Mme C...épouse B...fait appel du jugement en date du 12 juin 2012 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant, notamment, à l'annulation de ces décisions du préfet de la Loire en date du 22 février 2012 ;
Sur les conclusions à fin d'annulation des décisions attaquées :
En ce qui concerne le refus de délivrance d'un titre de séjour :
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française, ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 313-14 du même code : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme C...épouseB..., qui est entrée en France à l'âge de plus de quarante et un ans, ne démontre ni être dépourvue d'attaches familiales en Arménie, ni qu'elle ne pourrait y reconstituer la cellule familiale avec son époux, lequel fait également l'objet d'un refus de titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français pris le 14 février 2012, et leurs deux enfants ; que, d'autre part, Mme C...épouse B...ne saurait utilement se prévaloir de ce que son fils ainé, devenu majeur, a présenté une demande d'asile, en cours d'examen par la Cour nationale du droit d'asile, cette circonstance étant sans incidence sur son propre droit au séjour en France et n'étant pas de nature à constituer un motif exceptionnel d'admission au séjour au sens des dispositions susrappelées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite et eu égard aux conditions et à la durée de son séjour en France, la requérante n'est pas fondée à soutenir que le préfet de la Loire aurait, en refusant de lui délivrer un titre de séjour, porté une atteinte à son droit au respect de sa vie privée et familiale disproportionnée au regard des motifs de cette décision, au sens de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et méconnu l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'eu égard à ce qui précède, Mme C... épouse B...n'est pas davantage fondée à soutenir que le préfet de la Loire a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle ;
4. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée le 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux , des autorité administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. " ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;
5. Considérant, toutefois, qu'ainsi qu'il est dit ci-dessus, rien ne s'oppose à ce que la famille se reconstitue en Arménie ; que, si le fils aîné de Mme C...épouseB..., d'une part, était inscrit en lycée professionnel en 2010-2011 et, en 2011-2012, en certificat d'aptitude professionnelle (CAP) de serrurier-métallier, et envisage de préparer un baccalauréat professionnel après avoir obtenu ce CAP, et, d'autre part, avait demandé le statut de réfugié, cette demande étant encore en cours d'examen à la date de la décision attaquée, il est constant qu'il était majeur à cette date ; que la requérante ne saurait, dès lors, utilement invoquer à son égard la convention internationale relative aux droits de l'enfant, pour soutenir que la décision contestée aurait pour effet de le séparer de ses parents ; qu'en se bornant par ailleurs à faire valoir que sa fille, mineure, est scolarisée en classe de seconde, alors qu'elle peut poursuivre sa scolarité hors de France et que la décision attaquée n'a pas pour effet de séparer cet enfant de ses parents, Mme C... épouse B...n'établit pas que la décision contestée méconnaîtrait les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire national :
6. Considérant, en premier lieu, que, compte tenu de ce qui précède, le moyen tiré, par la voie de l'exception d'illégalité, de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire national serait illégale, en conséquence de l'illégalité de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour sur laquelle elle se fonde, doit être écarté ;
7. Considérant, en deuxième lieu, que, pour les mêmes motifs que précédemment, la décision portant obligation de quitter le territoire national ne méconnaît ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni celles du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée le 26 janvier 1990 et n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination de sa reconduite :
8. Considérant, en premier lieu, que, compte tenu de ce qui précède, le moyen tiré, par la voie de l'exception d'illégalité, de ce que la décision fixant le pays de destination serait illégale, en conséquence de l'illégalité des décisions portant refus de délivrance d'un titre de séjour et obligation de quitter le territoire français sur lesquelles elle se fonde, doit être écarté ;
9. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ;
10. Considérant qu'en se bornant à renvoyer au récit qu'elle avait présenté dans le cadre de ses demandes d'asile, qui ont d'ailleurs été rejetées par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, avec confirmation par la Cour nationale du droit d'asile, Mme C... épouse B...ne démontre pas le caractère réel, personnel et actuel des menaces auxquelles elle serait exposée en cas de retour en Arménie ; que son moyen relatif à la méconnaissance des stipulations susrappelées de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut dès lors qu'être écarté ;
11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme C...épouse B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
12. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ;
13. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que la somme demandée à ce titre par Mme C...épouseB..., au profit de son conseil, soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme C...épouse B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D...C...épouse B...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Loire.
Délibéré après l'audience du 29 novembre 2012 à laquelle siégeaient :
M. Montsec, président de chambre,
Mme Mear, président-assesseur,
Mme Chevalier-Aubert, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 20 décembre 2012.
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N° 12LY01622
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