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06/12/2012 | FRANCE | N°12LY00541

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 06 décembre 2012, 12LY00541


Vu la requête, enregistrée le 15 février 2012, présentée pour M. et Mme Jean-Marc , domiciliés ... ;

M. et Mme demandent à la Cour :

1°) de surseoir à statuer sur leur requête dans l'attente de l'issue de la plainte pénale déposée par la société SGI ;

2°) à défaut, d'annuler le jugement n° 1001095 du 13 décembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté leur demande tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2005 ;

3°) de les dé

charger de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au ti...

Vu la requête, enregistrée le 15 février 2012, présentée pour M. et Mme Jean-Marc , domiciliés ... ;

M. et Mme demandent à la Cour :

1°) de surseoir à statuer sur leur requête dans l'attente de l'issue de la plainte pénale déposée par la société SGI ;

2°) à défaut, d'annuler le jugement n° 1001095 du 13 décembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté leur demande tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2005 ;

3°) de les décharger de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2005, d'un montant de 13 416 euros ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Ils soutiennent que :

- le Tribunal doit surseoir à statuer dans l'attente de l'aboutissement de la plainte pénale déposée par la société SGI ;

- la proposition de rectification qui leur a été adressée ne répond pas aux exigences de motivation de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales car la proposition de rectification des SEP Jacinthe 2 et 4 qui lui est jointe n'est pas suffisamment motivée et n'est étayée d'aucune pièce permettant de démontrer les dires de l'administration fiscale ;

- c'est à tort que l'administration considère que les investissements devaient être agréés car :

. l'administration méconnaît les dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, en se fondant sur l'instruction 4 H-2-07, du 30 janvier 2007, qui n'est pas applicable à des investissements réalisés en 2005 ;

. elle méconnaît les dispositions de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales en prétendant appliquer le seuil de 1 000 000 euros au niveau de l'exploitant, alors que telle n'a pas été son interprétation dans le cas de l'exploitant SNC SBTPC qui a bénéficié des investissements des six SEP Vence ;

. elle n'est pas fondée à soutenir que les investissements en cause sont soumis à agrément car, d'une part, le seuil de 300 000 euros ne doit pas s'apprécier au niveau de l'entreprise exploitante mais au niveau de la SEP, conformément aux dispositions de l'alinéa 2 du paragraphe II de l'article 199 undecies B du code général des impôts et, d'autre part, le financement de cette SEP ne dépasse pas le seuil de 300 000 euros ;

- c'est également à tort que l'administration considère que les investissements ayant été livrés en 2006 doivent être regardés comme réalisés en 2006 ; en tout état de cause, l'existence du matériel n'étant pas contestée, l'investissement pourrait être admis au titre de l'année 2006 à défaut d'être retenu pour 2005 ;

- c'est encore à tort que l'administration a considéré que l'investissement réalisé avait été surfacturé, car le service des douanes, dont la mission est de contrôler la valeur des marchandises, n'a pas fait d'observation ; la société SGI a d'ailleurs entamé une action en responsabilité à l'encontre du service des douanes ;

- l'administration a méconnu le principe de proportionnalité, car elle a appliqué sur le fondement de l'article 1740 du code général des impôts une amende au fournisseur du matériel, à son utilisateur et à la société SGI, gérante des SEP ; compte tenu du montant de ces amendes, ni le fournisseur, ni le locataire, ni le gérant ne seront en mesure de restituer son apport à l'investisseur ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 25 mai 2012, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat ; il conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que :

- la demande de sursis à statuer doit être rejetée car les faits fondant les rectifications effectuées sont établis et les faits des tiers sont sans incidence sur l'imposition des requérants ;

- la motivation de la proposition de rectification adressée à M. et Mme le 23 avril 2008 répond aux exigences de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales ; la source et la nature des informations recueillies auprès des tiers y figurent ; elle n'était pas tenue de produire ces éléments en l'absence de demande des requérants ; l'administration s'est ainsi conformée aux prescriptions des articles L. 57 et L. 76 B du livre des procédures fiscales ;

- les époux n'ayant pas répondu à la proposition de rectification, il leur incombe d'établir le caractère exagéré de l'imposition mise à leur charge ;

- les impositions sont bien fondées ; d'une part, il résulte des vérifications de comptabilité effectuées auprès de la gérante et du fournisseur que les biens affectés à la société Jacinthe 2 n'existent pas ; d'autre part, les vérifications de comptabilité effectuées chez le locataire et la gérante et l'exercice du droit de communication exercé auprès du fournisseur d'origine des investissements ont révélé que les biens figurant au bilan de la SEP Jacinthe 4 ont été surfacturés ;

- l'administration n'ayant pas fondé ses rectifications sur le défaut d'agrément préalable et le caractère tardif des livraisons de biens, les moyens invoqués par les requérants sur ces points doivent être écartés ;

- les requérants ne sont pas fondés à invoquer la violation de principes généraux du droit communautaire à l'encontre de cotisations d'impôt sur le revenu, parce que les impôts directs ne relèvent pas de la compétence communautaire et qu'ils ne soutiennent pas que les dispositions de l'article 199 undecies B du code général des impôts seraient contraires aux principes découlant du traité CE ; que l'application de l'amende prévue par l'article 1740 du code général des impôts est liée à la reprise d'impôt visée à l'article 199 undecies B du code général des impôts ;

- le bien-fondé des impositions conduit au rejet de la demande présentée au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 novembre 2012 :

- le rapport de Mme Mear, président-assesseur ;

- et les conclusions de Mme Jourdan, rapporteur public ;

1. Considérant qu'en application des dispositions de l'article 199 undecies B du code général des impôts l'administration a remis en cause la réduction d'impôt sur le revenu dont M. et Mme ont bénéficié au titre de l'année 2005 à raison d'investissements effectués par les SEP Jacinthe 2 et 4, dont M. est associé, dans le cadre d'opérations de défiscalisation réalisées à La Réunion ; que l'administration a considéré, d'une part, que les investissements effectués par la SEP Jacinthe 2 et loués à l'entreprise Mounichy étaient fictifs et que, d'autre part, les investissements effectués par la SEP jacinthe 4 étaient surfacturés ; que, par jugement n° 1001095 du 13 décembre 2011, le Tribunal administratif de Lyon a confirmé ce rehaussement d'impôt ; que M. et Mme demandent à la Cour de surseoir à statuer sur leur requête et, à défaut, de les décharger de l'imposition correspondante d'un montant de 13 416 euros ;

Sur les conclusions aux fins de sursis à statuer :

2. Considérant qu'aucune disposition législative ou réglementaire ne fait obligation au juge de l'impôt de surseoir à statuer sur le litige dont il est saisi par M. et Mme jusqu'à l'aboutissement de la plainte avec constitution de partie civile déposée le 20 novembre 2006 auprès du Tribunal de grande instance de Saint Denis de La Réunion par la société SGI, gérante des SEP Jacinthe 2 et 4, des chefs de faux et usage de faux, d'escroquerie et d'association de malfaiteurs ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que, dans les circonstances de l'espèce, le maintien ou la décharge de la cotisation à l'impôt sur le revenu litigieuse soit subordonné à l'intervention d'une décision de justice statuant sur la plainte déposée ; qu'il n'y a pas lieu, dès lors, de surseoir à statuer ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (...) " ; qu'aux termes de l'article R.* 57-1 du même livre : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée. L'administration invite, en même temps, le contribuable à faire parvenir son acceptation ou ses observations dans un délai de trente jours à compter de la réception de la proposition " ; qu'il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition, et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les rectifications envisagées, de façon à permettre au contribuable de formuler ses observations de façon entièrement utile ; qu'en revanche, sa régularité ne dépend pas du bien-fondé de ces motifs ;

4. Considérant que la proposition de rectification adressée le 23 avril 2008 à M. et Mme mentionne que les rappels d'impôt sur le revenu dont ils ont fait l'objet au titre de 2005 résultent de la remise en cause, sur le fondement de l'article 199 undecies B du code général des impôts, de réductions d'impôt accordées au titre d'opérations d'investissements effectuées par les SEP Jacinthe 2 et 4, dont M. est associé ; qu'elle précise les motifs de cette remise en cause et les modalités de calcul, au niveau de chaque SEP, des rappels en cause ; que sa motivation ne se limite pas ainsi à une simple référence aux propositions de rectification adressées aux SEP Jacinthe 2 et 4 qui lui sont jointes ; qu'elle comporte également en annexe un tableau récapitulatif indiquant la nature et les sources des informations obtenues par l'administration fiscale dans le cadre des vérifications de comptabilité qu'elle a effectuées et de l'exercice de son droit de communication ; que l'administration n'était pas tenue de joindre l'ensemble de ces éléments à la proposition de rectification en cause, dont la communication n'a pas été au demeurant sollicitée par les requérants ; que ces derniers ne sont dès lors pas fondés à soutenir que la proposition de rectification du 23 avril 2008 ne répond pas aux exigences de motivation de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales ; que, s'ils entendent invoquer la violation de l'article L. 76 B du même livre, leur moyen doit être écarté, pour ces mêmes raisons ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

5. Considérant qu'aux termes de l'article 199 undecies B du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à l'imposition en litige : " I. Les contribuables domiciliés en France au sens de l'article 4 B peuvent bénéficier d'une réduction d'impôt sur le revenu à raison des investissements productifs neufs qu'ils réalisent dans les départements d'outre-mer (...) dans le cadre d'une entreprise exerçant une activité agricole ou une activité industrielle, commerciale ou artisanale relevant de l'article 34. Toutefois, n'ouvrent pas droit à la réduction d'impôt les investissements réalisés dans les secteurs d'activité suivants : (...). Les dispositions du premier alinéa s'appliquent aux investissements réalisés par une société soumise au régime d'imposition prévu à l'article 8 ou un groupement mentionné aux articles 239 quater ou 239 quater C, dont les parts sont détenues directement, ou par l'intermédiaire d'une entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée, par des contribuables domiciliés en France au sens de l'article 4 B. En ce cas, la réduction d'impôt prévue est pratiquée par les associés ou membres dans une proportion correspondant à leurs droits dans la société ou le groupement. La réduction d'impôt prévue au premier alinéa est pratiquée au titre de l'année au cours de laquelle l'investissement est réalisé (...) / La réduction d'impôt prévue au présent I s'applique aux investissements productifs mis à la disposition d'une entreprise dans le cadre d'un contrat de location si les conditions mentionnées aux quatorzième à dix-septième alinéas du I de l'article 217 undecies sont remplies et si 60 % de la réduction d'impôt sont rétrocédés à l'entreprise locataire sous forme de diminution de loyer et du prix de cession du bien à l'exploitant. Ce taux est ramené à 50 % pour les investissements dont le montant par programme et par exercice est inférieur à 300 000 euros par exploitant (...) " ;

6. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales : " Lorsque, ayant donné son accord à la rectification ou s'étant abstenu de répondre dans le délai légal à la proposition de rectification, le contribuable présente cependant une réclamation faisant suite à une procédure contradictoire de rectification, il peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition, en démontrant son caractère exagéré (...) " ; que M. et Mme n'ont pas répondu à la proposition de rectification qui leur a été faite au titre de l'année 2005 ; qu'il leur appartient, dès lors, d'établir le caractère exagéré des impositions supplémentaires mises à leur charge ;

7. Considérant, en deuxième lieu, que les requérants ne contestent pas le caractère fictif de l'investissement effectué par la SEP Jacinthe 2 et le bien fondé du rehaussement d'impôt en résultant ;

8. Considérant, en troisième lieu, que l'administration soutient que les vérifications de la comptabilité de la société SGI, gérante de la SEP Jacinthe 4, et du locataire des investissements réalisés par cette SEP, ainsi que l'exercice de son droit de communication auprès du fournisseur d'origine de ces investissements, ont mis en évidence que ces derniers ont été surfacturés par la société IPC ; que les requérants n'établissent pas que le prix mentionné sur la facture de la société IPC à la société SGI correspond à la valeur des biens en cause ou à leur prix de revient et qu'ainsi il n'aurait pas été surfacturé ; qu'ils ne peuvent utilement invoquer à cet égard le fait que le service des douanes n'aurait pas fait d'observation et que la société SGI a entamé une action en responsabilité à l'encontre de ce service ; que, dès lors, les requérants ne sont pas fondés à contester le bien-fondé du rappel d'impôt résultant de cette surfacturation ;

9. Considérant, en quatrième lieu, que l'administration fiscale a fondé les rehaussements d'impôt en cause sur le caractère fictif des investissements effectués par la SEP Jacinthe 2 et sur la surfacturation des investissements réalisés par la SEP jacinthe 4 ; que les requérants ne peuvent utilement soutenir que les investissements en cause n'avaient pas à faire l'objet d'un agrément et que leurs livraisons sont intervenues en 2005, dès lors que les rehaussements d'impôt litigieux ne sont pas fondés sur ces derniers motifs ; que leur demande tendant à la prise en compte de ces investissements au titre de 2006 ne peut également qu'être rejetée ;

10. Considérant, en cinquième lieu, que les requérants ne peuvent utilement faire valoir que la remise en cause par l'administration fiscale de leur réduction d'impôt méconnaît le principe de proportionnalité aux motifs qu'ils sont de bonne foi et qu'en raison du montant des amendes appliquées par l'administration, sur le fondement des dispositions de l'article 1740 du code général des impôts, ni le fournisseur, ni le locataire, ni le gérant ne seront en mesure de leur restituer leur apport, dès lors que ces circonstances sont sans incidence sur le bien-fondé des rappels d'impôt litigieux ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal Administratif de Lyon a rejeté leur demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à M. et Mme quelque somme que ce soit au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme Jean-Marc et au ministre de l'économie et des finances.

Délibéré après l'audience du 15 novembre 2012, à laquelle siégeaient :

M. Montsec, président de chambre,

Mme Mear, président-assesseur,

Mme Chevalier-Aubert, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 6 décembre 2012.

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N° 12LY00541


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12LY00541
Date de la décision : 06/12/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Composition du Tribunal
Président : M. MONTSEC
Rapporteur ?: Mme Josiane MEAR
Rapporteur public ?: Mme JOURDAN
Avocat(s) : COSICH

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2012-12-06;12ly00541 ?
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