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27/11/2012 | FRANCE | N°12LY00642

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 27 novembre 2012, 12LY00642


Vu la requête, enregistrée le 8 mars 2012, présentée pour M. , domicilié 4 rue Marchande à Aurillac (15000) ;

M. demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1102119 du 7 février 2012 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant :

- d'une part, à l'annulation des décisions du 17 octobre 2011 par lesquelles le préfet de la Côte d'Or a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français et a fixé le délai de départ volontaire à trente jours ;
r>- d'autre part, à ce qu'il soit enjoint au préfet de la Côte d'Or de lui délivrer un titre d...

Vu la requête, enregistrée le 8 mars 2012, présentée pour M. , domicilié 4 rue Marchande à Aurillac (15000) ;

M. demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1102119 du 7 février 2012 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant :

- d'une part, à l'annulation des décisions du 17 octobre 2011 par lesquelles le préfet de la Côte d'Or a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français et a fixé le délai de départ volontaire à trente jours ;

- d'autre part, à ce qu'il soit enjoint au préfet de la Côte d'Or de lui délivrer un titre de séjour ou de réexaminer sa situation ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir les décisions susmentionnées ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Côte d'Or de lui délivrer un titre de séjour temporaire, sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter du délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) à défaut, d'enjoindre au préfet de la Côte d'Or de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 313-11 6° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il justifie avoir contribué et contribue encore à l'entretien et à l'éducation de sa fille Rose et s'occuper de cette enfant depuis sa naissance ; il ne saurait lui être fait grief de ne pas voir régulièrement son enfant, la contribution prévue par cet article n'incluant pas une obligation de communauté de vie ; l'article L. 313-11 6° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'implique pas davantage une reconnaissance de l'enfant dès sa naissance ;

- c'est à tort que les premiers juges ont considéré que la décision de refus de titre de séjour n'avait pas été prise sur le fondement de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors que le préfet, qui n'a pas produit la demande de titre, devait examiner sa demande sur ce fondement et qu'il a d'ailleurs motivé son refus sur la base de cet article ;

- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile puisque la mesure qui le touche aurait pour conséquence de rompre inéluctablement les liens personnels et familiaux qu'il entretient avec sa fille Rose mais également avec son fils Mamadou, scolarisé à Aurillac et dont il prend en charge les frais de vêtement, de nourriture et médicaux ; il est intégré en France et ne peut exercer sa profession de footballeur qu'à défaut d'autorisation de travail alors qu'il fait partie de l'effectif du club de football d'Aurillac ;

- le préfet a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en tant que la mesure litigieuse porte atteinte de façon disproportionnée à sa vie privée et familiale alors qu'il entretient des liens étroits avec ses deux enfants ;

- la décision de refus de titre de séjour méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant qui fait que l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale, dès lors qu'il est de l'intérêt de ses enfants d'être élevés par leurs deux parents, sa compagne, de nationalité sénégalaise, étant au demeurant enceinte ;

- dès lors que la décision portant refus de titre de séjour est illégale, la décision portant obligation de quitter le territoire français est dépourvue de fondement et se trouve donc être aussi illégale ; la décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation pour les motifs développés précédemment ainsi qu'au regard de l'article L. 211-2 1° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision fixant le délai de départ volontaire à trente jours est dépourvue de motivation quant à sa situation personnelle dès lors qu'elle ne lui accorde pas un délai supérieur tel qu'il est prévu à l'article L. 511-1 II du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lequel article ne prévoit pas qu'une telle dérogation soit uniquement accordée à titre exceptionnel ; le délai de trente jours est insuffisant compte tenu de ses deux enfants qui vont demeurer sur le territoire français ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les pièces desquelles il résulte que la requête a été notifiée au préfet de la Côte d'Or, qui n'a pas produit d'observations ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention internationale des droits de l'enfant ;

Vu le code civil ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Vu la décision par laquelle le président de la formation de jugement, sur proposition du rapporteur public, a dispensé celui-ci d'exposer ses conclusions à l'audience, en application de l'article L. 732-1 du code de justice administrative ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 novembre 2012 :

- le rapport de M. Clément, premier conseiller ;

1. Considérant que M. , de nationalité sénégalaise, entré en France le 25 décembre 2002, à l'âge de 18 ans, a résidé sur le territoire français du 21 janvier 2004 au 30 juin 2009 sous couvert de cartes de séjour temporaire portant la mention "salarié" puis celle de "travailleur temporaire", délivrées pour lui permettre d'exercer sa profession de joueur de , né le 21 octobre 2008, en Saône-et-Loire, de sa relation avec une compatriote, Mme et d'un second, Rose , née le 4 juin 2009 d'une mère de nationalité française, qu'il a reconnue le 11 janvier 2011 et qui a pris son nom à la même date ; qu'il a ensuite quitté la France, le 30 juin 2009, pour rejoindre l'Espagne où il a résidé du 27 octobre 2009 au 23 juin 2010 ; qu'il a sollicité, à son retour en France, le 16 août 2010, la délivrance d'un titre de séjour ; que par un arrêté du 17 octobre 2011, le préfet de la Côte d'Or a rejeté la demande titre de séjour présentée par M. , résidant alors à Aurillac, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français et a fixé le délai de départ volontaire à trente jours ; que M. fait appel du jugement du 7 février 2012 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l'annulation desdites décisions du 17 octobre 2011 du préfet de la Côte d'Or ;

Sur la légalité de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 6° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil, depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, sans que la conditions prévue à l'article L. 311-7 soit exigée " et qu'aux termes de l'article 371-2 du code civil : " Chacun des parents contribue à l'entretien et à l'éducation des enfants à proportion de ses ressources, de celles de l'autre parent, ainsi que des besoins de l'enfant. Cette obligation ne cesse pas de plein droit lorsque l'enfant est majeur." ;

3. Considérant qu'en se bornant à produire des pièces relatives à des versements, d'un montant total d'un peu plus de 2 000 euros, effectués au profit de la mère de sa fille Rose, au cours des mois de février, avril et juillet 2011, après la reconnaissance de sa paternité, intervenue au demeurant plus d'un an et demi après la naissance de cette enfant, ainsi qu'une lettre de la mère de cette dernière, au demeurant postérieure à la date de la décision en litige, évoquant les relations de M. avec son enfant, sans précision suffisante quant à la fréquence des visites de M. auprès de sa fille et quant au moment du début de ces visites, le requérant n'établit pas qu'il a contribué à l'entretien et à l'éducation de son enfant de nationalité française depuis sa naissance ou depuis au moins deux ans à la date de la décision en litige ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que le préfet de la Côte d'Or aurait commis une erreur manifeste d'appréciation de sa situation au regard des dispositions de l'article L. 313-11-6° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté ;

4. Considérant, en deuxième lieu, que lorsqu'il est saisi d'une demande de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'une des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'est pas tenu, en l'absence de dispositions expresses en ce sens, d'examiner d'office si l'intéressé peut prétendre à une autorisation de séjour sur le fondement d'une autre disposition de ce code, même s'il lui est toujours loisible de le faire à titre gracieux, notamment en vue de régulariser la situation de l'intéressé ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier, à défaut de production par M. de la lettre du 16 août 2010 par laquelle il a sollicité la délivrance d'une carte de séjour temporaire, qu'il aurait présenté cette demande sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, dès lors, le préfet de la Côte d'Or n'était pas tenu d'examiner sa demande sur ce fondement ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il aurait examiné la demande de M. sur ce même fondement, nonobstant la circonstance qu'il a rappelé la situation familiale et personnelle de l'intéressé ; que, par suite, M. ne peut utilement se prévaloir de la méconnaissance des dispositions de cet article ;

5. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

6. Considérant que M. se prévaut des liens étroits qu'il dit entretenir avec ses deux enfants nés en France, ainsi que de son insertion professionnelle, en faisant état de sa qualité de membre de l'équipe de football du club d'Aurillac Football Cantal Auvergne ; que, toutefois, ainsi qu'il a été dit, le requérant n'établit pas la réalité et l'intensité de ses liens affectifs avec sa fille Rose à la date de la décision de refus de titre de séjour en litige ; que s'il produit des éléments de nature à démontrer la proximité de son autre enfant, scolarisé à Aurillac depuis la rentrée de septembre 2011, et la prise en charge de certains frais de cet enfant, il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision en litige ferait obstacle à la poursuite des relations familiales de M. avec son fils et la mère de celui-ci, de nationalité sénégalaise, dont il ne mentionne pas les conditions de séjour en France ; qu'il n'en ressort pas davantage que cette décision ferait obstacle à la poursuite de la carrière professionnelle de M. , qui a déjà exercé sa profession dans d'autres pays que la France ; qu'ainsi, la décision en litige ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit de M. au respect de sa vie familiale et personnelle et ne méconnaît pas les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

7. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. " ; que la décision en litige n'implique pas, ainsi qu'il a été dit, la séparation de M. et de son fils né d'une mère de nationalité sénégalaise ; que les relations affectives de M. et de sa fille de nationalité française ne sont pas établies à la date de la décision en litige ; que, dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant doit être écarté ;

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

8. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède que M. ne peut utilement exciper de l'illégalité de la décision du préfet de la Côte d'Or portant refus de délivrance d'un titre de séjour au soutien de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision du même jour portant obligation de quitter le territoire français ;

9. Considérant, en second lieu, que pour les motifs énoncés précédemment pour écarter les moyens soulevés à l'encontre de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour, le moyen tiré d'une erreur manifeste d'appréciation doit être écarté ;

Sur la légalité de la décision fixant le délai de départ volontaire à trente jours :

10. Considérant que le moyen, que M. soulevait déjà en première instance, tiré de ce que la décision fixant le délai de départ volontaire à trente jours est dépourvue de motivation quant au refus de lui accorder un délai supérieur, tel qu'il est prévu à l'article L. 511-1 II du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, doit être écarté par le motif retenu par les premiers juges et qu'il y a lieu, pour la Cour d'adopter ; qu'eu égard à l'absence de démonstration de l'intensité des relations de M. avec ses enfants, le délai de trente jours n'est pas insuffisant ;

11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande ; que doivent être également rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et tendant au bénéfice de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Côte d'Or.

Délibéré après l'audience du 6 novembre 2012 à laquelle siégeaient :

M. Tallec, président de chambre,

M. Rabaté, président-assesseur,

M. Clément, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 27 novembre 2012.

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N° 12LY00642

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12LY00642
Date de la décision : 27/11/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. TALLEC
Rapporteur ?: M. Marc CLEMENT
Rapporteur public ?: Mme SCHMERBER
Avocat(s) : CABINET MERAL-PORTAL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2012-11-27;12ly00642 ?
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