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13/11/2012 | FRANCE | N°12LY01270

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 13 novembre 2012, 12LY01270


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 16 mai 2012, présentée pour M. et Mme Ayhan A, domiciliés ... ;

M. et Mme A demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1106977 du 13 mars 2012 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, et des pénalités y afférentes, auxquelles ils demeurent assujettis au titre de l'année 2001, pour la période du 13 août au 31 décembre 2001, et de l'année 2002 ;

2°) de prononcer, à titre principal, la déc

harge demandée à hauteur, en droits et pénalités, de 84 226 euros au titre de l'année 200...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 16 mai 2012, présentée pour M. et Mme Ayhan A, domiciliés ... ;

M. et Mme A demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1106977 du 13 mars 2012 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, et des pénalités y afférentes, auxquelles ils demeurent assujettis au titre de l'année 2001, pour la période du 13 août au 31 décembre 2001, et de l'année 2002 ;

2°) de prononcer, à titre principal, la décharge demandée à hauteur, en droits et pénalités, de 84 226 euros au titre de l'année 2001 et de 54 299 euros au titre de l'année 2002 ;

3°) de prononcer, à titre subsidiaire, la décharge de la majoration pour mauvaise foi à hauteur de 21 319 euros pour 2001 et 15 027 euros pour 2002 ;

4°) de condamner l'Etat à leur verser une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

M. et Mme A soutiennent que :

- les chefs de redressement relatifs au " réalisme des redressements " et aux dépenses non justifiées dans l'intérêt de l'exploitation ne sont pas visés par l'appel ;

- le refus du directeur des services fiscaux de produire suite à la réclamation ainsi que devant le Tribunal les éléments obtenus de tiers les a privés de la possibilité de vérifier tant l'exactitude matérielle des éléments que leur interprétation par l'administration, ce qui entraîne ainsi la décharge des impositions en résultant ;

- le refus par le Tribunal d'ordonner à l'administration fiscale de produire les documents obtenus dans le cadre de l'exercice du droit de communication méconnaît les principes du respect des droits de la défense et du droit à un procès équitable garanti par l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 5 juillet 2012, présenté par le ministre de l'économie et des finances, qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que :

- l'administration n'est pas tenue de communiquer les informations sur lesquelles le vérificateur s'est fondé pour effectuer les redressements lorsque la demande du contribuable est postérieure à la mis en recouvrement des impositions ;

- il appartient au juge administratif, maître de l'instruction, d'apprécier s'il est utile, pour la solution du litige, de faire produire certaines pièces dont la communication est demandée ;

- les majorations de 40 % prévues en cas de mauvaise foi sont justifiées eu égard à la nature et au caractère répété des infractions constatées, à l'importance de ces minorations et à ce que M. A ne pouvait manifestement ignorer l'existence de ces minorations ;

- à titre subsidiaire, ces pénalités peuvent être maintenues par voie de substitution de base légale sur le fondement de l'article 1728 du code général des impôts en raison de l'absence de souscription des déclarations de résultats dans les délais de la première mise en demeure ;

Vu le mémoire enregistré le 18 octobre 2012, présenté pour M. et Mme A, qui concluent aux mêmes fins que précédemment, par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 23 octobre 2012 :

- le rapport de M. Segado, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Lévy Ben Cheton, rapporteur public ;

- et les observations de Me Gueraud-Pinet, avocat de M. et Mme A ;

Considérant que M. A, qui exploitait une entreprise individuelle de carrelage, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 18 août 2000 au 6 juin 2002, date de cessation de son activité ; qu'à l'issue de ce contrôle, l'administration lui a adressé, le 15 décembre 2003, une notification de redressement portant notamment sur des rehaussements en matière de bénéfices industriels et commerciaux concernant son activité de carreleur au titre des années 2001 et 2002, selon la procédure d'évaluation d'office prévue aux dispositions des articles L. 68 et L. 73 du livre des procédures fiscales ; que M. et Mme A ont été informés, par une notification de redressement datée du même jour, des conséquences de ces redressements sur les revenus de leur foyer fiscal ; que les impositions ont été mises en recouvrement le 31 mars 2004 ; que M. et Mme A, qui n'entendent plus notamment contester les redressements relatifs aux dépenses non justifiées dans l'intérêt de l'exploitation, relèvent appel du jugement du 13 mars 2012 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande tendant à la décharge de ces impositions supplémentaires et des pénalités y afférentes dont ils demeurent assujettis ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant que M. et Mme A faisaient grief à l'administration de méconnaître le principe du contradictoire en ne produisant pas les éléments obtenus de tiers sur lesquels l'administration se fondait pour affirmer que les impositions en cause avaient été correctement établies au titre de la période litigieuse et demandaient ainsi au Tribunal d'ordonner la production de ces documents ; qu'il appartient, toutefois, au juge administratif, qui dirige l'instruction, d'apprécier s'il est utile, pour la solution du litige dont il est saisi, de faire produire certaines pièces dont la communication est demandée par les parties, le Tribunal n'étant pas ainsi tenu de répondre à ces conclusions tendant à ce que soit ordonnée la production par une autre partie de pièces dont il lui revient d'apprécier souverainement l'utilité pour l'instruction de l'affaire ; que, dès lors, M. et Mme A ne sont pas fondés à soutenir que le Tribunal, en n'ordonnant pas la production de ces documents, aurait méconnu les principes du contradictoire et des droits de la défense, ainsi que les stipulations des 1, 2 et 3 de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, lesquelles ne peuvent au demeurant être invoquées qu'à l'égard de la seule contestation des pénalités fiscales ;

Sur la régularité des procédures d'imposition :

Considérant qu'il incombe à l'administration, quelle que soit la procédure d'imposition mise en oeuvre, et au plus tard avant la mise en recouvrement, d'informer le contribuable dont elle envisage soit de rehausser, soit d'arrêter d'office les bases d'imposition, de l'origine et de la teneur des renseignements obtenus auprès de tiers qu'elle a utilisés pour fonder les impositions, avec une précision suffisante pour permettre à l'intéressé de demander que les documents qui contiennent ces renseignements soient mis à sa disposition avant la mise en recouvrement des impositions qui en procèdent ; que, lorsque le contribuable en fait la demande à l'administration, celle-ci est tenue de lui communiquer les documents ou copies de documents contenant les renseignements obtenus auprès de tiers qui lui sont opposés ; qu'il en va ainsi alors même que le contribuable a pu avoir connaissance de ces renseignements ou de certains d'entre eux, afin notamment de lui permettre d'en vérifier, et le cas échéant d'en discuter, l'authenticité et la teneur ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment de la notification du 15 décembre 2003, que M. et Mme A ont été informés, concernant l'origine et la teneur des informations obtenues auprès de tiers, de ce que le vérificateur avait exercé un droit de communication, en application des articles L. 81 et L. 96 du livre des procédures fiscales, auprès des clients de M. A, professionnels donneurs d'ordre, pour mettre à sa disposition le grand-livre fournisseur concernant l'entreprise du requérant et les factures afférentes ; que l'administration a notamment précisé le détail des recettes constatées à la suite de l'exercice de ce droit de communication auprès de ces clients ; que M. et Mme A ne contestent pas qu'à la suite des mentions ainsi portées concernant l'origine et la teneur de ces informations obtenues de tiers ils ont été mis à même de solliciter la communication de ces documents avant la mise en recouvrement des impositions ; qu'ils se bornent à soutenir que l'administration ne leur aurait pas transmis lesdits documents à la suite de leur réclamation en méconnaissance du principe du contradictoire, la décision de rejet de cette réclamation leur ayant seulement proposé une consultation gratuite sur place des documents ou une communication des copies de ces documents à leurs frais ; que toutefois, il est constant que M. et Mme A n'ont sollicité la communication des documents ou copies de documents contenant les renseignements ainsi obtenus auprès de tiers que lors de leur réclamation du 7 juillet 2006, soit postérieurement à la mise en recouvrement des impositions litigieuses le 31 mars 2004 ; que, par suite, la circonstance que l'administration ne leur a pas communiqué ces documents à la suite de cette réclamation présentée après la mise en recouvrement des impositions est sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition ;

Sur le bien fondé des impositions :

Considérant que les impositions contestées résultant des redressements relatifs aux recettes omises constatées dans le cadre du droit de communication exercé par l'administration auprès des clients du contribuable au titre des années 2001 et 2002, ayant été évaluées d'office conformément aux dispositions des articles L. 68 et L. 73 du livre des procédures fiscales, il incombe à M. et Mme A d'apporter la preuve de l'exagération de ces dernières, en vertu des dispositions de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales ;

Considérant que, pour contester le bien-fondé de ces impositions, M. et Mme A se bornent à soutenir que l'absence de communication par l'administration, malgré la demande qu'ils ont présentée, des éléments obtenus par elle auprès de tiers, les a privés de la possibilité de vérifier tant l'exactitude matérielle de ces éléments que leur interprétation par l'administration ;

Considérant toutefois que, comme il a été dit ci-dessus, la notification de redressement du 15 décembre 2003 a informé de manière détaillée les requérants des omissions de recettes constatées à la suite de l'exercice de ce droit de communication auprès des clients de M. A, après avoir indiqué les modalités d'exercice de ce droit de communication et de détermination de ces recettes à partir d'un rapprochement entre, d'une part, les montants déclarés encaissés par le contribuable et, d'autre part, les recettes constatées à partir des grands livres fournisseurs des clients de M. A concernant son entreprise et des factures afférentes obtenues dans le cadre de ce droit de communication ; qu'elle a ainsi précisé, pour chacune de ces recettes omises, le nom du client, la date de la facture, le chantier concerné, le montant hors taxe, le montant de la taxe sur la valeur ajoutée, le montant encaissé et l'année de règlement, à l'exception du client Clair Logis pour lequel le nom du chantier en ce qui concerne les sommes encaissées en 2001 et 2002, et la date pour l'année 2002, n'ont pas été mentionnés, le contribuable ayant discuté du bien-fondé de ces éléments avec le vérificateur au cours du contrôle ; que, compte tenu des informations qui ont été ainsi communiquées aux requérants, lesquels au demeurant ne contestent pas avoir été mis à même de pouvoir demander à l'administration communication de ces éléments avant la mise en recouvrement des impositions, la seule circonstance, invoquée par M. et Mme A, et tirée de ce que l'administration ne leur a pas communiqué, à la suite de leur réclamation et au cours de la procédure contentieuse, copie des documents qu'elle a obtenus auprès des tiers, ne suffit pas à les regarder comme n'ayant pas été mis à même de pouvoir contester le bien-fondé de ces éléments et des redressements qui en découlent ; que M. et Mme A ne font état d'aucun élément de nature à remettre en cause les éléments ainsi exposés par l'administration concernant le bien-fondé de ces redressements ; qu'il s'ensuit, et sans qu'il soit besoin d'ordonner à l'administration de produire les documents qu'elle a obtenus auprès de tiers, que M. et Mme A n'apportent pas la preuve, qui leur incombe, du caractère exagéré des impositions résultant de ces redressements ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme A ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande en décharge ; que leurs conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées par voie de conséquence ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme Ayhan A et au ministre de l'économie et des finances.

Délibéré après l'audience du 23 octobre 2012 à laquelle siégeaient :

M. Chanel, président de chambre,

M. Bourrachot, président-assesseur,

M. Segado, premier conseiller.

Lu en audience publique le 13 novembre 2012.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12LY01270
Date de la décision : 13/11/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

Contributions et taxes - Généralités - Règles générales d'établissement de l'impôt - Redressement.

Procédure - Instruction - Pouvoirs généraux d'instruction du juge.


Composition du Tribunal
Président : M. CHANEL
Rapporteur ?: M. Juan SEGADO
Rapporteur public ?: M. LEVY BEN CHETON
Avocat(s) : LIBERALIS SOCIETE D'AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2012-11-13;12ly01270 ?
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