La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

08/11/2012 | FRANCE | N°12LY00747

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 08 novembre 2012, 12LY00747


Vu la requête, enregistrée le 22 mars 2012 au greffe de la Cour, présentée pour M. Murad B, demeurant ... ;

M. B demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1107336 du 29 février 2012 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Rhône en date du 4 novembre 2011 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai d'un mois et désignant le pays de son renvoi ;

2°) d'annuler les décisions du 4 novembre 2011 par lesquelles le p

réfet du Rhône lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le...

Vu la requête, enregistrée le 22 mars 2012 au greffe de la Cour, présentée pour M. Murad B, demeurant ... ;

M. B demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1107336 du 29 février 2012 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Rhône en date du 4 novembre 2011 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai d'un mois et désignant le pays de son renvoi ;

2°) d'annuler les décisions du 4 novembre 2011 par lesquelles le préfet du Rhône lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a désigné le pays de son renvoi ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer un titre de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter du prononcé de la décision ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 196 euros, à verser à son conseil, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 75-1 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Le requérant soutient :

Sur les conclusions aux fins d'annulation de la décision préfectorale lui refusant un titre de séjour :

- que cette décision méconnaît les dispositions de l'article L. 313-11-11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, car son état de santé, marqué par un état dépressif, des troubles psychiques importants et une dystonie cervicale, requiert une prise en charge médicale qui n'est pas envisageable dans son pays d'origine en l'absence de traitement, notamment en ce qui concerne l'accès à la toxine botulique ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation de l'obligation de quitter le territoire français :

- que cette décision est illégale du fait de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;

- que cette décision n'est pas motivée en fait, en méconnaissance des dispositions de l'article 12 de la directive n° 2008/115/ CE du 16 décembre 2008 ; que les dispositions de l'article L. 511-1, dans sa rédaction issue de la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011, qui prévoient que la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle relative au séjour, sont incompatibles avec les dispositions de cette directive ;

- que cette décision méconnaît les dispositions de l'article L. 511-4-10° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, car un défaut de prise en charge médicale peut entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et la pathologie qu'il présente ne peut valablement être prise en charge dans le pays dont il est originaire ;

- que cette décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation pour le même motif que celui précédemment énoncé ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation de la décision fixant le pays de renvoi :

- que cette décision est illégale du fait de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour et de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 13 août 2012, présenté par le préfet du Rhône, qui conclut au rejet de la requête ;

Le préfet soutient :

Sur la légalité de la décision portant refus de titre de séjour :

- que cette décision ne méconnaît pas les dispositions de l'article L. 313-11-11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi que cela résulte de l'avis du médecin de l'agence régionale de santé en date du 4 mai 2011 ;

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- que le requérant ne peut se prévaloir de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour pour contester la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

- qu'il ne peut se prévaloir d'un défaut de motivation de cette décision et d'une incompatibilité avec la directive n° 2008/115/CE ;

- qu'il n'est pas fondé à invoquer une violation de l'article L. 511-4-10° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'existence d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de renvoi :

- que le requérant ne peut se prévaloir de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français pour contester la légalité de la décision fixant le pays de son renvoi ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 28 août 2012, présenté pour M. B ; il persiste dans ses précédentes conclusions, par les mêmes moyens que ceux de sa requête, et soutient, en outre, que la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour est entachée d'une erreur de droit car le préfet s'est estimé lié par l'avis du médecin de l'agence régionale de santé ;

Vu le mémoire en défense complémentaire, enregistré le 25 septembre 2012, présenté par le préfet du Rhône, qui persiste dans ses précédentes écritures et soutient, en outre, que le moyen tiré de ce que l'administration se serait estimée liée par l'avis du médecin inspecteur de l'agence régionale de santé n'est pas fondé ;

Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle (section administrative d'appel) en date du 25 avril 2012 admettant M. B à l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008, relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 octobre 2012 :

- le rapport de Mme Mear, président-assesseur ;

- et les conclusions de Mme Jourdan, rapporteur public ;

1. Considérant que M. Murad B est, selon ses déclarations, entré en France le 2 octobre 2008 ; que sa demande d'asile a été rejetée par une décision du 11 août 2009 de l'office français de protection des réfugiés et des apatrides, confirmée par une décision du 25 novembre 2010 de la Cour nationale du droit d'asile ; que sa demande d'obtention d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade, présentée sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, a été rejetée par décision du 4 novembre 2011 du préfet du Rhône ; que, par jugement du 29 février 2012, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté la demande de M. B tendant à l'annulation des décisions du 4 novembre 2011 par lesquelles le préfet du Rhône lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a fixé le pays de son renvoi ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

En ce qui concerne la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. Le médecin de l'agence régionale de santé ou, à Paris, le chef du service médical de la préfecture de police peut convoquer le demandeur pour une consultation médicale devant une commission médicale régionale dont la composition est fixée par décret en Conseil d'Etat " ; qu'il résulte de ces dispositions qu'il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser la délivrance d'un titre de séjour à un étranger qui en fait la demande au titre des dispositions du 11° de l'article L. 313-11, de vérifier, au vu de l'avis émis par le médecin mentionné à l'article R. 313-22, que cette décision ne peut pas avoir de conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait un défaut de prise en charge médicale dans le pays dont l'étranger est originaire ; que, lorsque le défaut de prise en charge risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'intéressé, l'autorité administrative ne peut légalement refuser le titre de séjour sollicité que s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause dans son pays d'origine ;

3. Considérant que M. B soutient que son état de santé requiert des soins dont le défaut entraînerait des conséquences d'une exceptionnelle gravité ; qu'il produit, à l'appui de ses dires, le rapport médical établi le 15 avril 2011 par le docteur Chalumeau, neuropsychiatre agréé, pour le médecin de l'agence régionale de santé ; que, toutefois, ce certificat n'est pas de nature à lui seul à infirmer l'avis rendu par le médecin de l'agence régionale de santé en date du 4 mai 2011 qui indique que, si l'état de santé de M. B nécessite une prise en charge médicale, le défaut d'une telle prise en charge ne devrait pas entraîner de conséquences d'une exceptionnelle gravité ; que, si M. B produit un certificat médical, établi le 22 mars 2012, par le même médecin neuropsychiatre, soit postérieurement à la décision attaquée, ce certificat ne révèle pas d'éléments pathologiques nouveaux antérieurs à la décision attaquée par rapport à ceux figurant dans le rapport médical sur le fondement duquel le médecin de l'agence régionale de santé a émis son avis ; que, par suite, le moyen tiré de la violation des dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté ;

4. Considérant, en second lieu, qu'il ressort des pièces du dossier, notamment des termes mêmes de la décision du 4 novembre 2011, que le préfet du Rhône a procédé à l'examen particulier de la situation personnelle de M. B avant de décider de ne pas faire droit à sa demande de délivrance d'un titre de séjour au titre des stipulations précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le préfet aurait commis une erreur de droit en s'estimant en situation de compétence liée par l'avis du médecin inspecteur de la santé publique pour prendre cette décision doit être écarté ;

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

5. Considérant, en premier lieu, que M. B n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision d'éloignement prise à son encontre ;

6. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 12 de la directive n° 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 susvisée : " Les décisions de retour (...) sont rendues par écrit, indiquent leurs motifs de fait et de droit et comportent des informations relatives aux voies de recours " ; qu'aux termes du 7ème alinéa de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction issue de la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011 portant transposition des dispositions de cette directive, et qui n'est pas incompatible avec celle-ci : " La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III. " ; que la motivation de l'obligation de quitter le territoire français se confond avec celle du refus ou du retrait de titre de séjour dont elle découle nécessairement et n'implique pas, par conséquent, dès lors que ce refus ou ce retrait est lui-même motivé et que les dispositions législatives qui permettent d'assortir le refus de séjour d'une obligation de quitter le territoire français ont été rappelées, de mention spécifique pour respecter les exigences de l'article 12 de la directive du 16 décembre 2008 précité ; qu'en l'espèce, l'arrêté est, ainsi qu'il a été dit, suffisamment motivé en tant qu'il porte refus de titre de séjour ; qu'il rappelle, par ailleurs, les dispositions législatives qui permettent d'assortir ce refus de séjour d'une obligation de quitter le territoire français ; que, par suite, la décision faisant obligation à M. B de quitter le territoire français est motivée en fait et en droit et a été prise conformément aux exigences de forme et de fond prévues par les dispositions précitées de l'article 12 de la directive n° 2008/115/CE ;

7. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-4-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé " ;

8. Considérant que, pour les mêmes motifs que ceux ci-dessus mentionnés pour considérer que la décision portant refus de délivrance ne méconnaît pas les dispositions de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les moyens tirés de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît les dispositions précitées du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et qu'elle serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation doivent également être écartés ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

9. Considérant, en premier lieu, que M. B n'est pas fondé à exciper de l'illégalité des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français à l'encontre de la décision fixant le pays de son renvoi ;

10. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. B n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Rhône en date du 4 novembre 2011 ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

11. Considérant que la présente décision qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M. B n'appelle pas de mesures d'exécution ; que ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte doivent, dès lors, être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Considérant que la demande présentée par le conseil de M. B tendant à l'application à son profit des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peut qu'être rejetée dès lors que le requérant est la partie succombante à l'instance ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié M. Murad A et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 11 octobre 2012 à laquelle siégeaient :

M. Montsec, président de chambre,

Mme Mear, président-assesseur,

Mme Chevalier-Aubert, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 8 novembre 2012.

''

''

''

''

1

2

N° 12LY00747

sh


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12LY00747
Date de la décision : 08/11/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. MONTSEC
Rapporteur ?: Mme Josiane MEAR
Rapporteur public ?: Mme JOURDAN
Avocat(s) : SABATIER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2012-11-08;12ly00747 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award