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18/10/2012 | FRANCE | N°12LY00472

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 18 octobre 2012, 12LY00472


Vu la requête, enregistrée le 14 février 2012 au greffe de la Cour, présentée pour M. Nabil , domicilié ... ;

M. demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1102638 et n° 1103879, en date du 15 novembre 2011, par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 15 avril 2011 du préfet de l'Isère portant refus de renouvellement d'un titre de séjour, obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de son renvoi ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de l'Isère en date du 15 avril 2

011 ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère, sur le fondement de l'article L. 911-1 du ...

Vu la requête, enregistrée le 14 février 2012 au greffe de la Cour, présentée pour M. Nabil , domicilié ... ;

M. demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1102638 et n° 1103879, en date du 15 novembre 2011, par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 15 avril 2011 du préfet de l'Isère portant refus de renouvellement d'un titre de séjour, obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de son renvoi ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de l'Isère en date du 15 avril 2011 ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère, sur le fondement de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour " salarié " ou " vie privée et familiale " sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois à compter du prononcé du jugement et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour avec autorisation de travailler ;

4°) de condamner l'Etat à payer à son conseil la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, celui-ci s'engageant à renoncer à percevoir la somme correspondante à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle ;

Il soutient que :

- la décision de refus de titre de séjour est insuffisamment motivée au regard des dispositions de l'article 3 de la loi du 11 juillet 1979, car elle ne vise pas les articles L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) et 3 de l'accord franco-marocain ;

- cette décision est illégale pour absence d'examen réel de sa situation, car sa demande de titre de séjour formulée sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 3 de l'accord franco-marocain n'a pas été examinée ;

- cette décision méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, car il justifiait de motifs exceptionnels permettant la délivrance d'un titre de séjour " salarié ", dès lors qu'il réside en France depuis près de cinq ans, a exercé plusieurs emplois, a effectué deux formations dans le domaine de la sécurité et est titulaire d'un contrat de travail relatif à un poste d'agent de sécurité pour lequel il existe des difficultés de recrutement en Isère ;

- cette décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentale, d'une part, parce qu'il a installé sa vie privée et familiale depuis près de cinq ans en France, qu'il bénéficie d'un contrat à durée indéterminée, a suivi des formations dans le domaine de la sécurité et du secourisme, a su se créer de nombreuses relations amicales et est parfaitement intégré dans la société française, d'autre part, parce que son père, un ancien combattant qui réside régulièrement en France, a besoin de sa présence car il souffre d'une maladie chronique invalidante ;

- cette décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation compte tenu de son intégration en France, de l'état de santé de son père et du fait qu'il souffre d'un syndrome dépressif majeur ayant nécessité une hospitalisation ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour les motifs sus-évoqués ;

- cette décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation pour les motifs sus-mentionnés ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les pièces desquelles il résulte que la requête a été notifiée au préfet de l'Isère qui n'a pas produit d'observations ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle, section administrative d'appel, en date du 20 janvier 2012, par laquelle a été accordée à M. l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

Vu l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 en matière de séjour et d'emploi ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 septembre 2012 :

- le rapport de Mme Mear, président-assesseur ;

- et les conclusions de Mme Jourdan, rapporteur public ;

1. Considérant que M. Nabil , ressortissant marocain, a épousé au Maroc une ressortissante française le 19 décembre 2005 ; qu'il est entré en France le 8 octobre 2006 sous couvert d'un visa de long séjour ; qu'il a bénéficié d'un titre de séjour en qualité de conjoint d'une ressortissante française, renouvelé une fois et valable jusqu'au 12 mars 2009 ; que, par arrêté du 15 avril 2011, le préfet de l'Isère a refusé le renouvellement de ce titre de séjour, a fait obligation à M. de quitter le territoire français et a fixé le pays de son renvoi ; que M. fait appel du jugement en date du 15 novembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de l'Isère du 15 avril 2011 ;

Sur la décision de refus de titre de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, que, lorsqu'il est saisi d'une demande de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'une des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'est pas tenu, en l'absence de dispositions expresses en ce sens, d'examiner d'office si l'intéressé peut prétendre à une autorisation de séjour sur le fondement d'une autre disposition de ce code, même s'il lui est toujours loisible de le faire à titre gracieux ; que le préfet de l'Isère a examiné la demande de titre de séjour de M. au regard des dispositions des articles L. 314-9-3° et L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier et, notamment, du courrier de M. du 23 février 2011 dans lequel il sollicite le renouvellement de son titre de séjour qu'il avait obtenu en qualité de conjoint d'une ressortissante française, que ce dernier a sollicité un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article 3 de l'accord franco-marocain susvisé et de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, dès lors, les moyens tirés de ce que la décision portant refus de titre de séjour du 15 avril 2011 ne serait pas suffisamment motivée en droit au regard des dispositions de l'article 3 de la loi du 11 juillet 1979 en raison du défaut de mention de ces dernières dispositions et de ce qu'il n'aurait pas été ainsi procédé à un examen de sa situation personnelle au regard de ces mêmes dispositions doivent être rejetés ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 3 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 : " Les ressortissants marocains désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum, et qui ne relèvent pas des dispositions de l'article 1er du présent accord, reçoivent, après le contrôle médical d'usage et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an renouvelable et portant la mention "salarié " éventuellement assortie de restrictions géographiques ou professionnelles. " ; qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) " ; que les stipulations précitées de l'article 3 de l'accord franco-marocain prévoient les conditions dans lesquelles il est délivré aux ressortissants marocains un titre de séjour en qualité de salarié et font dès lors obstacle à l'application à ces mêmes ressortissants des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives à la délivrance d'une carte de séjour " salarié " ; que, dès lors, M. ne peut utilement faire valoir " qu'il justifiait de motifs exceptionnels permettant la délivrance d'un titre de séjour " salarié " en application des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que son moyen doit, par suite, être écarté comme inopérant ;

4. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; que M. soutient avoir installé sa vie privée et familiale en France depuis près de cinq ans, y être parfaitement intégré, disposer d'un contrat de travail à durée indéterminée après avoir suivi des formations dans le domaine de la sécurité et du secourisme, que l'état de santé de son père nécessite sa présence à ses côtés et que lui-même souffre de dépression ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier que M. est entré en France à l'âge de vingt-huit ans et y résidait depuis moins de cinq ans à la date de la décision du 15 avril 2011 lui refusant un titre de séjour et que le divorce entre M. et Mme a été prononcé par jugement du Tribunal de grande instance de Versailles en date du 5 novembre 2010 ; que, par ailleurs, il n'est pas établi que l'état de santé de son père rendrait nécessaire sa présence à ses côtés, ni que son propre état de santé nécessiterait une prise en charge médicale dont le défaut entrainerait pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité ; que, dans ces circonstances, la décision attaquée n'a pas porté au droit au respect de la vie privée et familiale de M. , qui n'est pas dépourvu d'attaches familiales au Maroc où résident sa mère et ses neuf frères et soeurs, une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise ; qu'elle n'a, dès lors, pas méconnu les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, pour les mêmes motifs, M. n'est pas non plus fondé à soutenir que la décision dont il demande l'annulation est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

5. Considérant que, pour les mêmes motifs que ceux précédemment développés en ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour, M. n'est pas fondé à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français prise à son égard méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par jugement du 15 novembre 2011, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de l'Isère en date du 15 avril 2011 ; que les conclusions de M. à fin d'injonction et celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique doivent, par voie de conséquence, être également rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. est rejetée.

Article 2 : Le présent jugement sera notifié à M. Nabil et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 27 septembre 2012 à laquelle siégeaient :

M. Montsec, président de chambre,

M. Mear, président-assesseur,

M. Chevalier-Aubert, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 18 octobre 2012.

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N° 12LY00472

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12LY00472
Date de la décision : 18/10/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. MONTSEC
Rapporteur ?: Mme Josiane MEAR
Rapporteur public ?: Mme JOURDAN
Avocat(s) : CANS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2012-10-18;12ly00472 ?
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