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12/07/2012 | FRANCE | N°11LY02954

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 12 juillet 2012, 11LY02954


Vu la requête, enregistrée le 15 décembre 2011 au greffe de la Cour, présentée pour M. Emmanuel A, ... ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1105541, en date du 15 novembre 2011, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 20 août 2011 du préfet du Rhône portant obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et prescrivant qu'à l'expiration de ce délai, il serait reconduit d'office à destination du pays dont il a la nationalité ou de tout pays où il étab

lirait être légalement admissible, à ce qu'il soit enjoint au préfet du Rhône de l...

Vu la requête, enregistrée le 15 décembre 2011 au greffe de la Cour, présentée pour M. Emmanuel A, ... ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1105541, en date du 15 novembre 2011, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 20 août 2011 du préfet du Rhône portant obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et prescrivant qu'à l'expiration de ce délai, il serait reconduit d'office à destination du pays dont il a la nationalité ou de tout pays où il établirait être légalement admissible, à ce qu'il soit enjoint au préfet du Rhône de lui délivrer un titre de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", sous astreinte de 100 euros par jour de retard, enfin à ce qu'une somme de 1 196 euros soit mise à la charge de l'Etat, à verser à son conseil au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve qu'il renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat ;

2°) d'annuler ces décisions du préfet du Rhône du 20 août 2011 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer un titre de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter du prononcé de la décision ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros HT, soit 1 196 euros TTC, à verser à son conseil sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 75-1 de la loi du 10 juillet 1991, à charge pour lui de renoncer au bénéfice de l'aide juridictionnelle ;

Il soutient que :

- la décision portant obligation de quitter le territoire français viole les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans la mesure où il est soigné à l'hôpital suite à un coup de fusil de chasse reçu en 2002 ; le Tribunal administratif de Lyon a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation en considérant à tort que le certificat médical produit, en date du 1er septembre 2011, n'établit pas clairement que son état de santé nécessite une prise en charge dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, ni qu'il ne pourrait pas bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ;

- la décision fixant le pays de destination de la reconduite est illégale par exception d'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dans la mesure où il établit la réalité des risques qu'il encourrait directement et personnellement en cas de retour dans son pays d'origine, en raison de ses origines et de sa religion chrétienne ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle, section administrative d'appel, en date du 26 décembre 2011, par laquelle a été accordée à M. A le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 23 mai 2012, présenté par le préfet du Rhône, tendant au rejet de la requête de M. A ; il fait valoir que la requête est irrecevable faute d'être accompagnée du jugement attaqué ; que le requérant ne justifie pas entrer dans la catégorie visée au 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que les certificats médicaux produits ne permettent pas en effet d'établir que son état de santé nécessiterait une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il ne pourrait bénéficier d'un traitement approprié dans le pays de renvoi ; que la décision lui faisant obligation de quitter la France n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; que la décision obligeant l'intéressé à quitter le territoire français étant légale, il ne peut exciper de l'illégalité de cette décision à l'encontre de la décision fixant le pays de destination ; qu'il ne justifie d'aucun élément probant permettant d'établir qu'il se trouve personnellement et spécialement exposé à des risques de mauvais traitement en cas de retour dans son pays ; que la décision fixant le pays de destination de la reconduite ne méconnaît donc pas les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que ses conclusions à fin d'injonction et d'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées par voie de conséquence ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 juin 2012 :

- le rapport de M. Montsec, président-assesseur ;

- et les conclusions de M. Monnier, rapporteur public ;

Considérant que M. Emmanuel A, né le 25 décembre 1985 et qui est de nationalité nigériane, est entré en France une première fois en février 2010, après avoir vainement demandé l'asile en Espagne, dès le 20 janvier 2004, puis séjourné en Italie de 2004 à 2010 ; qu'après que l'Espagne ait, le 31 mars 2010, donné son accord pour la réadmission de M. A sur son territoire, le préfet du Rhône a, par un arrêté en date du 26 avril 2010, décidé la remise de l'intéressé aux autorités espagnoles ; que M. A a été ainsi reconduit en Espagne le 17 mai 2010 ; que l'intéressé étant cependant revenu irrégulièrement sur le territoire français, à une date indéterminée, le préfet du Rhône l'a, par un nouvel arrêté en date du 20 août 2011, obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours, en prescrivant qu'il serait, à l'issue de ce délai, reconduit d'office à destination du pays dont il a la nationalité, ou de tout pays où il établirait être légalement admissible ; que M. A fait appel du jugement en date du 15 novembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions du préfet du Rhône en date du 20 août 2011 ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le préfet du Rhône à la requête de M. A :

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entrainer pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé (...) " ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A a été blessé à la jambe suite à un coup de fusil de chasse reçu en 2002 ; que, toutefois, les certificats médicaux qu'il produit à l'instance, dressés par le même médecin généraliste, le 1er septembre et le 12 décembre 2011, d'ailleurs postérieurement à la décision attaquée et de nombreuses années après les faits, dénués de toute précision sur les traitements qui lui ont été dispensés depuis 2002 et sur ceux qui seraient encore nécessaires, ne permettent d'établir ni que son état de santé, à la date de la décision attaquée, neuf années après cette blessure, nécessite une prise en charge dont le défaut pourrait entrainer des conséquences d'une exceptionnelle gravité, ni qu'il ne pourrait bénéficier d'un traitement approprié dans le pays de renvoi ; que le préfet n'a ainsi pas méconnu les dispositions précitées du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, pour les mêmes motifs et en l'absence de tout autre élément, le préfet du Rhône n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de sa décision sur la situation personnelle de M. A ;

Sur la décision fixant le pays de destination :

Considérant, en premier lieu, qu'eu égard à ce qui a été énoncé ci-dessus, M. A n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français qui lui a été faite à l'appui de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision fixant le pays de destination de la mesure d'éloignement ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ;

Considérant que M. A soutient qu'il a été poursuivi en 2002 par la volonté de vengeance de la famille d'obédience musulmane d'une jeune fille qui était enceinte de lui, alors que lui-même est chrétien ; que, toutefois, en se bornant à invoquer à cet égard les fortes tensions interreligieuses persistant au Nigéria entre chrétiens et musulmans, il n'établit pas la réalité des risques qu'il encourrait directement et personnellement en cas de retour au Nigéria ; que le moyen tiré d'une méconnaissance des stipulations précitées de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit, dès lors, être écarté ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, en date du 15 novembre 2011, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté susmentionné du préfet du Rhône en date du 20 août 2011 ; que ses conclusions à fin d'injonction et à fin d'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées par voie de conséquence ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Emmanuel A et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 21 juin 2012 à laquelle siégeaient :

M. Duchon-Doris, président de chambre,

M. Montsec, président-assesseur,

Mme Chevalier-Aubert, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 12 juillet 2012.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11LY02954
Date de la décision : 12/07/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. DUCHON-DORIS
Rapporteur ?: M. Pierre MONTSEC
Rapporteur public ?: M. MONNIER
Avocat(s) : SABATIER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2012-07-12;11ly02954 ?
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