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13/12/2011 | FRANCE | N°11LY01019

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 13 décembre 2011, 11LY01019


Vu la requête, enregistrée le 21 avril 2011, présentée pour Mme Manuela A, domiciliée ...;

Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0808157-0905537 du Tribunal administratif de Lyon en date du 2 mars 2011 en tant qu'il a rejeté ses demandes tendant à l'indemnisation des divers préjudices résultant des conditions de son engagement et de son licenciement ;

2°) de condamner la commune de Saint-Etienne à lui verser les sommes de 6 225 euros en réparation des préjudices qu'elle a subis du fait de la rupture abusive de son contrat de travail, de 3 1

12,50 euros au titre de l'indemnité de l'article L. 1245-2 du code du travail, de...

Vu la requête, enregistrée le 21 avril 2011, présentée pour Mme Manuela A, domiciliée ...;

Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0808157-0905537 du Tribunal administratif de Lyon en date du 2 mars 2011 en tant qu'il a rejeté ses demandes tendant à l'indemnisation des divers préjudices résultant des conditions de son engagement et de son licenciement ;

2°) de condamner la commune de Saint-Etienne à lui verser les sommes de 6 225 euros en réparation des préjudices qu'elle a subis du fait de la rupture abusive de son contrat de travail, de 3 112,50 euros au titre de l'indemnité de l'article L. 1245-2 du code du travail, de 1 556,25 euros au titre de l'indemnité de préavis, de 155,63 euros au titre des congés payés et de 3 004,49 euros au titre de l'indemnité de licenciement et celle de 21 785,52 euros au titre de rappels des indemnités de repas, de chambre et de petit déjeuner, toutes sommes portant intérêts au taux légal à compter du 26 janvier 2006, les intérêts étant eux mêmes capitalisés ;

3°) de condamner la commune de Saint-Etienne à verser à son conseil la somme de 7 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à charge pour ce dernier de renoncer au bénéfice de l'aide juridictionnelle ;

Elle soutient que :

- les différents contrats à durée déterminée conclus avec la ville de Saint-Etienne doivent être requalifiés en contrats à durée indéterminée ; le dernier ayant été rompu illégalement par la ville de Saint-Etienne, cette rupture doit être considérée comme un licenciement dépourvu de causes réelles et sérieuses ;

- contrairement à ce qu'a jugé le Tribunal administratif de Lyon, les dispositions d'ordre public du code du travail et celles de la convention collective nationale des entreprises artistiques sont opposables à la ville de Saint-Etienne dès lors qu'il existe un principe applicable devant toutes les juridictions, y compris administrative : Nemo auditur propriam turpitudinem allegans ;

- il appartenait au Tribunal, en application des règles légales, réglementaires et jurisprudentielles, de rechercher si, pour l'emploi concerné de violoniste, il était d'usage constant de ne pas recourir à un contrat à durée indéterminée ;

- le Tribunal n'a pas justifié qu'elle pouvait se prévaloir des dispositions de l'article 3 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;

- le Tribunal n'a pas précisé les éléments faisant obstacle à son embauche en contrat à durée indéterminée, tels qu'ils sont indiqués dans la directive n° 1999/70/CE du 28 juin 1999 ;

- que la ville de Saint-Etienne doit verser, en réparation du préjudice résultant de cette rupture illégale de contrat, une somme totale de 12 497,62 euros, outre 21 785,52 euros au titre du rappel de diverses indemnités ;

Vu le jugement ;

Vu le mémoire, enregistré le 27 septembre 2011, présenté pour la commune de Saint-Etienne, qui conclut au rejet de la requête ;

Elle soutient que :

- Mme A n'a aucun droit à la requalification de son contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, dès lors que le maintien en fonction à l'issue d'un contrat initial conclu pour une durée déterminée, n'a pas pour effet de le transformer en contrat à durée indéterminée ;

- l'appelante ne peut pas invoquer à son bénéfice les dispositions du code du travail alors qu'elle est agent non titulaire de droit public et ne relève pas de ces dispositions alors même que son contrat de travail visait l'article D. 121-2 du code du travail ;

- pour cette même raison, elle ne peut pas davantage invoquer la convention collective des entreprises artistiques et culturelles ;

- le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 38 du décret n° 88-145 du 15 février 1988 n'est pas assortie des précisions suffisantes pour pouvoir y répondre utilement ;

- Mme A n'établit pas l'existence de l'usage constant, qu'elle invoque, de recourir à des contrats à durée indéterminée pour le recrutement de musiciens dans la fonction publique territoriale ;

Vu le mémoire, enregistré le 18 novembre 2011, présenté pour Mme A qui persiste dans ses conclusions et moyens ;

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu la directive 1999/70/CE du 28 juin 1999 concernant l'accord cadre CES, UNICE et CEEP sur le travail à durée déterminée ;

Vu le code du travail ;

Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ;

Vu la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;

Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée portant droits et obligations des fonctionnaires ;

Vu le décret n° 88-145 du 15 février 1988 relatif aux agents non titulaires de la fonction publique territoriale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 29 novembre 2011 :

- le rapport de M. Givord, président ;

- les observations de Me Dimier, pour Mme A et de Me Riva, pour la commune de Saint-Etienne ;

- et les conclusions de Mme Schmerber, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée aux parties présentes ;

Considérant que par la présente requête, Mme A demande à la Cour, en premier lieu, d'annuler le jugement en date du 2 mars 2011 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté ses demandes tendant au versement, d'une part, de diverses indemnités en réparation des préjudices résultant de la fin des relations contractuelles et, d'autre part, au paiement des indemnités de déplacement pour les l'années 2001 à 2004 et, en second lieu, de condamner la commune de Saint-Etienne à lui verser la somme de 21 785,52 euros ;

Sur les conclusions tendant à la condamnation de la commune à réparer les préjudices résultant de la fin des relations contractuelles :

Considérant que la requérante a été employée, en qualité de second violon à partir de 1993, par l'Opéra théâtre de Saint-Etienne, géré en régie directe par la commune ; qu'à cette fin, elle a conclu avec la commune des contrats à durée déterminée couvrant des périodes non successives, généralement de quelques jours, et correspondant aux services de répétition et de représentation d'oeuvres musicales ; qu'en application du dernier contrat conclu le 21 janvier 2005, Mme A s'engageait à prêter son concours du 19 mars au 8 avril 2005, pour la présentation d'un opéra ;

Considérant que l'Opéra théâtre de Saint-Etienne gère un service public administratif ; qu'en conséquence, Mme A avait la qualité d'agent public ; que dès lors, le statut d'agent non titulaire de la fonction publique territoriale de Mme A fait obstacle à ce qu'elle puisse se prévaloir des dispositions du code du travail qui définissent les conditions dans lesquelles un contrat de travail peut être conclu à durée déterminée et des dispositions de la convention collective des entreprises artistiques et culturelles ;

Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article 3 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984, dans sa rédaction alors applicable : Les collectivités et établissements mentionnés à l'article 2 ne peuvent recruter des agents non titulaires pour occuper des emplois permanents que pour assurer le remplacement momentané de titulaires autorisés à exercer leurs fonctions à temps partiel ou indisponibles en raison d'un congé de maladie, d'un congé de maternité ou d'un congé parental, ou de l'accomplissement du service national, du rappel ou du maintien sous les drapeaux, ou pour faire face temporairement et pour une durée maximale d'un an à la vacance d'un emploi qui ne peut être immédiatement pourvu dans les conditions prévues par la présente loi. Ces collectivités et établissements peuvent, en outre, recruter des agents non titulaires pour exercer des fonctions correspondant à un besoin saisonnier pour une durée maximale de six mois pendant une même période de douze mois et conclure pour une durée maximale de trois mois, renouvelable une seule fois à titre exceptionnel, des contrats pour faire face à un besoin occasionnel. Des emplois permanents peuvent être occupés par des agents contractuels dans les mêmes cas et selon les mêmes conditions de durée que ceux mentionnés à l'article 4 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ; qu'en vertu de ces dernières dispositions, des agents contractuels peuvent, notamment, être recrutés lorsqu'il n'existe pas de cadre d'emplois correspondant aux fonctions exercées ;

Considérant que l'irrégularité alléguée des différents contrats conclus par Mme A au regard des dispositions précitées de l'article 3 de la loi du 26 janvier 1984, au demeurant non établie, n'est pas de nature à donner un caractère indéterminé aux engagements de l'intéressée ;

Considérant que le moyen tiré de ce que les engagements à durée déterminée de Mme A devraient être requalifiés en contrat à durée indéterminée en vertu de la directive 1999/70/CE du 28 juin 1999 est dénué des précisions permettant à la cour d'en apprécier le bien-fondé dès lors, notamment, que la directive permet, dans certains cas, le recours à des contrats à durée déterminée ;

Considérant qu'aux termes de l'article 38 du décret du 15 février 1988 : Lorsqu'un agent non titulaire a été engagé pour une durée déterminée susceptible d'être reconduite, l'administration lui notifie son intention de renouveler ou non l'engagement au plus tard : 1° Le huitième jour précédant le terme de l'engagement pour l'agent recruté pour une durée inférieure à six mois ; (...) ; que les engagements conclus par Mme A avaient pour objet une mission limitativement définie ; qu'ainsi, ils ne constituaient pas des engagements susceptibles d'être reconduits aux sens des dispositions précitées ; qu'au surplus, la méconnaissance du délai d'information prévue par les dispositions précitées est, en tout état de cause, sans influence sur la nature du contrat ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède, que la requérante n'est pas fondée à soutenir que ses engagements à durée déterminée doivent être requalifiés en un contrat à durée indéterminée et qu'en conséquence, la fin des relations contractuelles, non intervenue à sa demande, constitue un licenciement ; que par suite, ses conclusions tendant au versement d'une indemnité de préavis, de licenciement, de requalification de contrat et pour rupture abusive de contrat doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant au versement d'indemnités de déplacement :

Considérant que Mme A qui a, comme dit précédemment, la qualité d'agent public, ne peut utilement invoquer les dispositions du code du travail ou de la convention collective des entreprises artistiques et culturelles pour demander le versement d'indemnités de déplacement ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté ses demandes tendant à la condamnation de la commune de Saint-Etienne à lui verser diverses indemnités ;

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de la requérante la somme que la commune de Saint-Etienne demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; que les dispositions du même article font par ailleurs obstacle à ce que les sommes demandées à ce titre par la requérante soient mises à la charge de la commune de Saint-Étienne, qui n'est pas la partie perdante ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme A est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Saint-Etienne sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Manuela A et à la commune de Saint-Etienne.

Délibéré après l'audience du 29 novembre 2011, à laquelle siégeaient :

- M. Fontanelle, président de chambre,

- M. Givord, président assesseur,

- M. Seillet, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 13 décembre 2011.

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N° 11LY01019

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11LY01019
Date de la décision : 13/12/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-13-03 Fonctionnaires et agents publics. Contentieux de la fonction publique. Contentieux de l'indemnité.


Composition du Tribunal
Président : M. FONTANELLE
Rapporteur ?: M. Pierre Yves GIVORD
Rapporteur public ?: Mme SCHMERBER
Avocat(s) : SCP CROCHET-DIMIER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2011-12-13;11ly01019 ?
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