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07/07/2011 | FRANCE | N°09LY01044

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 07 juillet 2011, 09LY01044


Vu la requête, enregistrée le 14 mai 2009, présentée pour M. Jean-Luc A, domicilié ... ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0700945 du 24 mars 2009 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 11 décembre 2006 par laquelle l'inspecteur du travail a autorisé son licenciement ;

2°) d'annuler la décision du 11 décembre 2006 autorisant son licenciement par la société Novembal ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros à lui verser sur le fondement de

s dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que la...

Vu la requête, enregistrée le 14 mai 2009, présentée pour M. Jean-Luc A, domicilié ... ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0700945 du 24 mars 2009 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 11 décembre 2006 par laquelle l'inspecteur du travail a autorisé son licenciement ;

2°) d'annuler la décision du 11 décembre 2006 autorisant son licenciement par la société Novembal ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros à lui verser sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que la décision autorisant son licenciement est insuffisamment motivée en fait, dès lors qu'elle demeure muette sur les conséquences de la fermeture de l'usine de Les Chères sur son emploi et son contrat de travail ; que le motif économique de son licenciement est infondé, la nécessité de sauvegarder la compétitivité devant être établie dans le cadre adapté à l'activité internationale du secteur du groupe concerné et ne pouvant résulter de la seule réduction de frais fixes sur un site de production ; que la décision de l'inspecteur du travail, qui se contente du constat de la fermeture de l'usine d'injection de l'établissement de Les Chères, ne répond pas à l'exigence de démonstration de l'existence d'une cause économique ; que l'inspecteur du travail s'est borné à prendre acte de la situation avancée par la direction, sans en rechercher les fondements et justifications et sans faire porter son examen sur la situation du groupe Novembal ; que l'inspecteur du travail ne pouvait sans commettre d'erreur de droit ou d'erreur d'appréciation estimer que la réalité du motif économique invoqué par la société Novembal était établie ; que l'inspecteur du travail ne pouvait regarder la société Novembal comme ayant respecté son obligation de reclassement sans entacher sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation, l'envoi d'une liste de postes avec l'indication qu'ils sont également proposés à d'autres salariés ne constituant pas des propositions de reclassement concrètes, précises et personnalisées ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 19 octobre 2009, présenté pour la société Novembal, qui conclut au rejet de la requête et au versement, à son profit, par M. A, d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que la décision attaquée est suffisamment motivée en droit et en fait ; que l'inspecteur du travail a conclu à la réalité du motif économique après avoir examiné des notes d'information remises au comité d'établissement et un rapport établi par l'expert comptable mandaté par le comité central dans le cadre de l'examen annuel des comptes 2005 et procédé à une enquête contradictoire ; que la réalité du motif économique devait être appréciée, comme elle l'a été, à l'échelon de la branche d'activité économique de fabrication de bouchons appelée groupe Novembal et non à celle du groupe Tetra Pak dans son ensemble ; que les résultats du groupe Novembal en 2005 étaient déficitaires de 2 941 000 euros, la situation de la société Novembal elle-même étant encore plus dégradée ; que le plan de restructuration affectant la société Novembal s'inscrit dans le cadre d'un redéploiement industriel du groupe sur toute l'Europe ; que les obligations de reclassement ont été respectées et que M. A s'est vu proposer par courrier remis en mains propres le 27 octobre 2006 un poste de contrôleur laboratoire à Châteaubriant, de même niveau de qualification que son ancien poste, et des postes de conducteur de lignes, d'un niveau inférieur, à Les Chères, à Châteaubriant et Sezzadio ;

Vu le mémoire, enregistré le 14 mai 2010, présenté par le ministre du travail, de la solidarité et la fonction publique, qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que la requête de M. A n'appelle pas d'autres observations que celles produites en première instance par le directeur régional du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle de Rhône-Alpes ;

Vu l'ordonnance du 31 décembre 2010 fixant la clôture d'instruction au 28 janvier 2011, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 juin 2011 :

- le rapport de M. Pourny, premier conseiller ;

- les observations de Me Brangier, pour la société Novembal ;

- et les conclusions de Mme Jourdan, rapporteur public ;

La parole ayant à nouveau été donnée à la partie présente ;

Considérant que M. Jean-Luc A exerçait des fonctions de délégué du personnel suppléant au sein de l'établissement situé à Les Chères de la société Novembal ; que l'inspecteur du travail a autorisé cette société à le licencier, pour motif économique, par une décision du 11 décembre 2006 ; que M. A conteste le jugement du 24 mars 2009 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision du 11 décembre 2006 autorisant son licenciement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 425-1 du code du travail, dans sa numérotation alors en vigueur : Tout licenciement envisagé par l'employeur d'un délégué du personnel, titulaire ou suppléant, est obligatoirement soumis au comité d'entreprise qui donne un avis sur le projet de licenciement. / Le licenciement ne peut intervenir que sur autorisation de l'inspecteur du travail dont dépend l'établissement. (...) ; qu'en vertu de ces dispositions, le licenciement des délégués du personnel, qui bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle, est subordonné à une autorisation de l'inspecteur du travail dont dépend l'établissement ; que, lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande d'autorisation de licenciement est fondée sur un motif de caractère économique, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si la situation de l'entreprise justifie le licenciement, en tenant compte notamment de la nécessité des réductions envisagées d'effectifs et de la possibilité d'assurer le reclassement du salarié dans l'entreprise ou au sein du groupe auquel appartient cette dernière ; que, pour apprécier la réalité des motifs économiques allégués à l'appui d'une demande d'autorisation de licenciement d'un salarié protégé présentée par une société qui fait partie d'un groupe, l'autorité administrative ne peut se borner à prendre en considération la seule situation de l'entreprise demanderesse, mais est tenue, dans le cas où la société intéressée relève d'un groupe dont la société mère a son siège à l'étranger, de faire porter son examen sur la situation économique de l'ensemble des sociétés du groupe intervenant dans le même secteur d'activité que la société en cause, sans qu'il y ait lieu de borner cet examen à celles qui ont leur siège social en France, ni aux établissements de ce groupe situés en France ; qu'en outre, pour refuser l'autorisation sollicitée, l'autorité administrative a la faculté de retenir des motifs d'intérêt général relevant de son pouvoir d'appréciation de l'opportunité, sous réserve qu'une atteinte excessive ne soit pas portée à l'un ou l'autre des intérêts en présence ;

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 436-4 du code du travail, dans sa numérotation alors en vigueur : La décision de l'inspecteur est motivée. (...) ; que la décision attaquée, après avoir rappelé les articles du code du travail applicables à la situation de M. A, retient la réalité du motif économique, en indiquant que l'usine d'injection de l'établissement situé à Les Chères devait fermer en fin d'année, l'échec des efforts de reclassement au sein du groupe, en précisant que l'intéressé a refusé un poste correspondant à sa qualification, et l'absence de lien entre le mandat détenu par M. A et la demande d'autorisation de licenciement ; que, contrairement à ce que soutient le requérant, cette décision est ainsi suffisamment motivée, même si l'inspecteur n'a pas précisé que la fermeture de l'usine d'injection entraînait nécessairement la suppression du poste occupé par M. A au sein de cette usine ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que, malgré les bonnes performances obtenues en Amérique du Nord et une amélioration en 2003, les différentes sociétés du groupe Novembal, oeuvrant dans le même secteur d'activité que la société Novembal, avaient encore un résultat net négatif, avec une perte de 2 941 000 euros en 2005, liée à une surcapacité de production en Europe et à une pression sur les prix par ses principaux clients ; que, par suite, l'inspecteur du travail a pu, sans entacher sa décision d'erreur d'appréciation, regarder comme établie la réalité du motif économique justifiant la fermeture de l'usine d'injection où travaillait M. A, ainsi que la suppression de l'emploi de ce dernier, même si ladite société a conservé une autre branche d'activité dans son établissement à Les Chères ;

Considérant, en troisième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'inspecteur du travail se serait borné à prendre en considération la seule situation de la société Novembal pour apprécier la réalité du motif économique invoqué pour solliciter l'autorisation de licencier M. A ; que le moyen tiré de ce qu'il aurait entaché sa décision d'une erreur de droit en ne retenant que cette situation ne peut en conséquence être retenu ;

Considérant, en quatrième lieu, que la société Novembal a adressé à M. A une proposition de reclassement sur un poste de contrôleur de laboratoire à Châteaubriant, de même niveau de qualification que son ancien poste, et plusieurs propositions de poste de conducteur de lignes, d'un niveau de qualification inférieure à son ancien poste, au sein de la division vins et spiritueux, dans divers établissements dont celui de Les Chères et un établissement italien ; que M. A n'a pas accepté ces offres, qui étaient précises et personnalisées quand bien même ces postes auraient également été proposés à d'autres salariés ; que l'inspecteur du travail était ainsi fondé à estimer que la société Novembal avait satisfait à son obligation de rechercher les possibilités de reclasser M. A au sein du groupe auquel elle appartient ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que les conclusions qu'il présente au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées ;

Considérant qu'il n'y pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées pour la société Novembal au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées pour la société Novembal au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Jean-Luc A, à la société Novembal et au ministre du travail, de l'emploi et de la santé.

Délibéré après l'audience du 21 juin 2011 à laquelle siégeaient :

M. Chanel, président de chambre,

MM. Pourny et Segado, premiers conseillers.

Lu en audience publique, le 7 juillet 2011.

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N° 09LY01044

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09LY01044
Date de la décision : 07/07/2011
Type d'affaire : Administrative

Analyses

66-07-01-04-03 Travail et emploi. Licenciements. Autorisation administrative - Salariés protégés. Conditions de fond de l'autorisation ou du refus d'autorisation. Licenciement pour motif économique.


Composition du Tribunal
Président : M. CHANEL
Rapporteur ?: M. François POURNY
Rapporteur public ?: Mme JOURDAN
Avocat(s) : SCP MASANOVIC PICOT DUMOULIN THIEBAULT CHABANOL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2011-07-07;09ly01044 ?
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