Vu la requête, enregistrée le 6 novembre 2009, présentée pour la COMMUNE DE SEVRIER (Haute-Savoie) ;
La COMMUNE DE SEVRIER demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0901010 du 10 septembre 2009, par lequel le Tribunal administratif de Grenoble, à la demande de M. et Mme A, a annulé l'arrêté
du 2 septembre 2008 par lequel son maire a délivré un permis de construire à M. B, en vue de la réalisation d'un garage ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. et Mme A devant le Tribunal administratif ;
3°) de condamner M. et Mme A à lui verser une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
La commune soutient que :
- en écartant les constatations du géomètre-expert mandaté par M. B sans les confronter aux autres pièces du dossier et en ne retenant que la seule mention manuscrite figurant sur le plan présenté le 30 Mars 2004 par celui-ci à l'appui de sa première demande de permis de construire, le Tribunal administratif n'a pas motivé son jugement, comme l'exige l'article L. 9 du code de justice administrative ;
- le plan de masse figurant dans la demande de permis de M. B constitue une copie du plan de masse de la demande de permis de construire des époux A ; que les relevés topographiques de ce plan correspondent au terrain naturel avant les travaux réalisés en 1985, et non au terrain naturel tel qu'il existait à la date de la demande du permis litigieux ; que l'indication manuscrite figurant sur ledit plan, indiquant une cote de 85, résulte du fait qu'en 2004, il existait un dénivelé d'environ un mètre entre la propriété de M. B et celle des époux A, située en ce point à la cote de 86 ; que les relevés et les profils réalisés par le géomètre-expert qui a été mandaté par M. B, corroborés par les documents photographiques produits, permettent d'établir l'absence de tout remblai sous la dalle du projet litigieux ; que le terrain naturel se situait donc, avant les travaux, à la cote de 86,86 au droit du faîtage, soit une hauteur de la construction de 3,92 mètres, respectant les dispositions de l'article U 7 du règlement ; qu'aucune fraude n'a été commise ; que le Tribunal ne pouvait écarter, sans s'expliquer, les relevés topographiques qui permettent de conclure qu'au droit du faîtage, le terrain naturel se situe à ladite cote de 86,86, compte tenu du fait qu'à la base du muret, qui atteste du niveau du sol naturel, la cote est de 86,79 ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire, enregistré le 29 novembre 2010, présenté pour M. et Mme A qui demandent à la Cour :
- de rejeter la requête ;
- de condamner la COMMUNE DE SEVRIER à leur verser une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
M. et Mme A soutiennent que :
- la requête de la COMMUNE DE SEVRIER présente une identité d'objet, de cause et de parties avec l'affaire précédemment jugée le 16 octobre 2008 par le Tribunal administratif de Grenoble, qui n'a pas fait l'objet d'un appel ; que l'autorité de la chose jugée qui s'attache à ce jugement rend donc irrecevable toute discussion sur le niveau du terrain naturel ;
- le Tribunal administratif a suffisamment motivé son jugement, en fait comme en droit ;
- les photographies accompagnant la demande de permis de construire de M. B ne permettent pas d'apprécier l'impact visuel du projet ; que, par suite, l'arrêté attaqué méconnaît les dispositions des articles R. 431-10 et suivants du code de l'urbanisme ;
- M. B a construit une dalle en béton, puis a remblayé le terrain pour rehausser artificiellement le niveau du sol naturel, avant de laisser croire que cette dalle est située au niveau du terrain naturel, pour enfin procéder à une construction sur ladite dalle ; que le permis de construire attaqué est dès lors entaché de fraude ;
- le dénivelé important ne permet pas de connaître la topographie à un endroit donné par comparaison avec un autre endroit du terrain ; que la commune ne démontre pas que le plan de masse produit en 2004, qui indique une cote de 85, comporterait une erreur ; que les travaux de remblais sont intervenus avant l'examen du terrain par le géomètre-expert ; que celui-ci mentionne des talus sur les côté Est et Sud de la dalle en béton, qui correspondent aux remblais effectués ; que les relevés du géomètres-expert, qui ont varié, sont douteux ; que la commune reconnaît l'existence de remblais dans la partie Est de la dalle ; que l'apport d'un remblai a posteriori n'a eu d'autre but que de dissimuler la profondeur des fondations et, par suite, le niveau à partir duquel la hauteur de la construction doit être appréciée ; qu'en application de l'article U 7 du règlement, le projet, qui est implanté à moins de 4 mètres de la limite séparative, ne doit pas présenter une hauteur supérieure à 4 mètres ; que, compte tenu de l'exhaussement du terrain naturel et des propres relevés de M. C, la hauteur excède bien 4 mètres ;
En application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, par une ordonnance du 10 janvier 2011, la clôture de l'instruction a été fixée au 16 février 2011 ;
Vu le mémoire, enregistré le 17 janvier 2011, présenté pour la COMMUNE DE SEVRIER qui s'en rapporte à son mémoire d'appel ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 mai 2011 :
- le rapport de M. Chenevey, premier conseiller ;
- les observations de Me Collin, avocat de la COMMUNE DE SEVRIER ;
- les conclusions de M. Besson, rapporteur public ;
- et la parole ayant à nouveau été donnée à la partie présente ;
Considérant que, par un jugement du 10 septembre 2009, à la demande de M. et Mme A, le Tribunal administratif de Grenoble a annulé l'arrêté du 2 septembre 2008 par lequel le maire de la COMMUNE DE SEVRIER a délivré un permis de construire à M. B, en vue de la réalisation d'un garage, au motif que cet arrêté méconnaît les dispositions de l'article U 7 du règlement du plan local d'urbanisme de cette commune ; que la COMMUNE DE SEVRIER relève appel de ce jugement ;
Considérant, en premier lieu, que M. et Mme A se prévalent d'un jugement du Tribunal administratif de Grenoble du 16 octobre 2008, devenu définitif, par lequel le Tribunal a annulé un précédent permis de construire que le maire de la COMMUNE DE SEVRIER avait délivré le 12 novembre 2007 à M. B, pour soutenir que ce jugement se fondant sur la méconnaissance des dispositions de l'article U 7 du règlement du plan local d'urbanisme, l'autorité de chose jugée qui s'y attache fait obstacle à ce que la commune mette en cause le bien-fondé de la solution qui a été retenue par le Tribunal dans son jugement attaqué, fondé sur la méconnaissance des mêmes dispositions ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier que, même si le projet litigieux est très similaire à la construction qui avait été autorisée par le permis de construire précité du 12 novembre 2007, ce projet présente des proportions légèrement inférieures à cette dernière ; qu'ainsi, en présence de projets suffisamment différents, l'autorité de chose jugée ne s'oppose pas à une nouvelle discussion sur la conformité de l'arrêté attaqué à l'article U 7 du règlement du plan local d'urbanisme ;
Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article U 7 du règlement du plan local d'urbanisme, relatif à l'implantation des constructions par rapport aux limites séparatives :
(...) La distance comptée horizontalement de tout point de constructions, travaux ou ouvrages au point de la limite séparative qui en est le plus proche doit être au moins égale à la moitié de la différence d'altitude entre ces deux points, sans pouvoir être inférieure : / - en zone U (...) : 4 mètres. / (...) Les constructions et installations peuvent être admises jusqu'en limite séparative, dans les cas suivants : / (...) - bâtiments annexes non accolés à une construction principale, projetés sur le terrain d'assiette de celle-ci, dans la mesure où leur hauteur ne dépasse pas 4 mètres au faîtage (...) ; que, pour l'application de ces dispositions, ainsi que le précise l'article U 10 du règlement relatif à la hauteur maximale des constructions, la hauteur doit être mesurée à partir du sol naturel avant tous travaux d'exhaussement ou d'affouillement réalisés en vue de la réalisation du projet faisant l'objet de la demande, jusqu'au faîtage ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que si, à l'appui d'une précédente demande de permis de construire sur le même terrain, M. B a indiqué d'une manière manuscrite sur un plan de masse que le niveau du terrain d'assiette est situé à la cote 85, depuis lors, ce terrain a fait l'objet de relevés topographiques par un géomètre-expert,
le 30 octobre 2006, qui ont été complétés le 13 mai 2008 et ont donné lieu à un rapport
du 20 avril 2009 ; qu'il n'est pas démontré que les relevés ainsi effectués seraient erronés ou contradictoires ; qu'ainsi, notamment, si M. et Mme A font valoir que le plan de coupe BB' a été repris pour être modifié par l'expert, le plan auquel ils se réfèrent ne correspond pas à un véritable plan de coupe, mais à un plan de la façade Est, sur lequel sont indiquées les cotes du terrain naturel avant travaux au droit de cette façade ; qu'il n'y a donc pas deux plans de coupe BB' successifs contradictoires ; que, si M. et Mme A soutiennent que les cotes du sol naturel relevées par l'expert ne tiennent pas compte des remblais réalisés en vue du projet, non indiqués sur les plans de la demande et qui existaient déjà à la date d'intervention de l'expert, il ne ressort pas des photographies de l'état du terrain avant travaux versées aux débats que le projet aurait nécessité un remblaiement au niveau de l'entrée des garages, en façade Ouest ; que le muret en pierres sèches préexistant construit en limite séparative, immédiatement au Nord du projet, qui permet de situer le sol naturel avant tous travaux, ne fait pas apparaître que des remblais auraient précédemment été réalisés ; que, compte tenu de la pente affectant le terrain, les seuls remblais que nécessite le projet, qui sont bien indiqués sur les plans de la demande de permis, sont situés dans la partie Est de la construction ; que, dans ces conditions, la hauteur du projet au faîtage, situé à la cote de 90,77, alors que le sol naturel se situe au droit du faîtage à la cote de 86,86, n'excède pas la hauteur maximale de 4 mètres autorisée par les dispositions précitées pour les bâtiments annexes non accolés à la construction principale implantés, comme en l'espèce, à moins de 4 mètres de la limite séparative ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la COMMUNE DE SEVRIER est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a estimé que l'article U 7 du règlement du plan local d'urbanisme a été méconnu et, en conséquence, a annulé le permis de construire attaqué ;
Considérant qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés en première instance comme en appel devant le juge administratif ;
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 431-10 du code de l'urbanisme : Le projet architectural comprend (...) : / d) Deux documents photographiques permettant de situer le terrain respectivement dans l'environnement proche et, sauf si le demandeur justifie qu'aucune photographie de loin n'est possible, dans le paysage lointain. Les points et les angles des prises de vue sont reportés sur le plan de situation et le plan de masse (...) ; que, contrairement à ce que soutiennent M. et Mme A, les photographies que contient le dossier de demande de permis, au nombre de quatre, permettent d'apprécier l'impact visuel du projet ;
Considérant, en second lieu, que, pour les raisons indiqués précédemment, il ne ressort pas des pièces du dossier que des remblais auraient été réalisés sur le terrain d'assiette du projet, avant les travaux qui ont été autorisés par le permis de construire litigieux, dans le but de construire à une hauteur supérieure à la hauteur maximale normalement autorisée par les dispositions du plan local d'urbanisme ; que, par suite, M. et Mme A ne sont pas fondés à soutenir que le permis attaqué a été obtenu à la suite de manoeuvres frauduleuses et, en conséquence, est entaché d'illégalité ;
Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner la régularité du jugement, la COMMUNE DE SEVRIER est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a annulé l'arrêté du 2 septembre 2008 par lequel son maire a délivré un permis de construire
à M. B, en vue de la réalisation d'un garage ; qu'il y a lieu d'annuler ce jugement et de rejeter la demande de M. et Mme A devant le Tribunal administratif ;
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la COMMUNE DE SEVRIER, qui n'est pas, dans la présente instance, partie perdante, soit condamnée à payer à M. et Mme A la somme qu'ils demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de M. et Mme A le versement d'une somme quelconque au bénéfice de cette commune sur le fondement de ces mêmes dispositions ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Grenoble du 10 septembre 2009 est annulé.
Article 2 : La demande de M. et Mme A devant le Tribunal administratif de Grenoble est rejetée.
Article 3 : Les conclusions des parties présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la COMMUNE DE SEVRIER et à M. et Mme Jean-Marie A.
Délibéré après l'audience du 24 mai 2011, à laquelle siégeaient :
M. Fontbonne, président,
M. Chenevey et Mme Chevalier-Aubert, premiers conseillers.
Lu en audience publique, le 14 juin 2011.
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N° 09LY02577