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31/05/2011 | FRANCE | N°09LY01259

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 31 mai 2011, 09LY01259


Vu la requête, enregistrée le 5 mai 2009, présentée pour la SOCIETE SOPLANADE, dont le siège est 15 route de Lyon à Grenoble (38000) ;

La SOCIETE SOPLANADE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0502283 du 26 février 2009 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à ce que soit prononcée la restitution des droits de taxe sur les achats de viande qu'elle a acquittés au titre de la période du 1er janvier 2001 au 31 décembre 2003, assortie des intérêts moratoires prévus à l'article L. 208 du livre des procédures fisca

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2°) de prononcer la restitution de la taxe en litige, assortie des intérê...

Vu la requête, enregistrée le 5 mai 2009, présentée pour la SOCIETE SOPLANADE, dont le siège est 15 route de Lyon à Grenoble (38000) ;

La SOCIETE SOPLANADE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0502283 du 26 février 2009 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à ce que soit prononcée la restitution des droits de taxe sur les achats de viande qu'elle a acquittés au titre de la période du 1er janvier 2001 au 31 décembre 2003, assortie des intérêts moratoires prévus à l'article L. 208 du livre des procédures fiscales ;

2°) de prononcer la restitution de la taxe en litige, assortie des intérêts moratoires ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que la taxe sur les achats de viandes telle qu'elle existait au titre de la période en cause constituait une aide d'Etat au sens de l'article 92 du traité instituant la Communauté européenne, qui n'a pas été notifiée à la Commission européenne ; que faute de notification préalable, et de non exécution avant décision de la Commission, tant lors de sa création que lors de sa modification en 2001, cette taxe est contraire à l'article 88, paragraphe 3, du même traité ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire complémentaire, enregistré le 21 janvier 2010, présenté pour la SOCIETE SOPLANADE, qui conclut aux mêmes fins, par les mêmes moyens ;

Elle soutient en outre :

- qu'après avoir prononcé le dégrèvement de la taxe mise à sa charge, l'administration fiscale ne pouvait légalement revenir sur cette décision, sans procéder à la mise en recouvrement d'une nouvelle imposition, quand bien même le dégrèvement n'aurait pas donné lieu à restitution ; que cette nouvelle imposition ne pouvait au demeurant être mise en recouvrement qu'au terme d'une nouvelle procédure contradictoire ;

- que la remise en cause du dégrèvement initialement accordé constitue une atteinte au droit au respect des biens au sens de l'article 1er du 1er protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'elle méconnaît en outre les principes généraux de confiance légitime et de sécurité juridique, ainsi que de coopération et d'effectivité du droit communautaire ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 26 juillet 2010, présenté pour le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient :

- que le service était en droit de rapporter la décision de dégrèvement regardée rétroactivement comme illégale en tant qu'elle accordait indûment une restitution de taxe ; que la lettre modèle adressée à l'entreprise, l'informant du dégrèvement accordé n'était pas motivée, et ne pouvait dès lors être regardée comme une prise de position formelle ; que le service pouvait ainsi rapporter cette décision, dès lors qu'il avait constaté que lesdits dégrèvements, qui ne sont pas créateurs de droits, avaient été accordés à tort ; qu'ainsi, après avoir accordé un dégrèvement, l'administration fiscale peut établir, sur les mêmes bases, une nouvelle imposition en ayant préalablement informé le contribuable de son intention de l'imposer ; que le dégrèvement intervenu n'a aucune incidence sur la régularité des actes antérieurement et régulièrement accomplis ; qu'en l'espèce, la taxe sur les achats de viande avait été régulièrement déclarée et versée par la société requérante ; que, faute d'exécution comptable, ledit dégrèvement n'avait pas eu pour effet de faire disparaître l'imposition initiale ; que c'est donc à bon droit que le service a pu informer l'intéressée que le dégrèvement intervenu, procédant d'une erreur de liquidation, ne pouvait être maintenu ; que le service était en situation de compétence liée, ne pouvant renoncer à une imposition légalement due ; que n'ayant pas procédé au remboursement effectif des cotisations, il n'était pas tenu de suivre une nouvelle procédure de reprise, dans le délai de l'article L. 176 du livre des procédures fiscales, et d'émettre un nouvel avis d'imposition ; que l'entreprise ayant été, in fine, destinataire d'une décision de rejet motivée, elle n'a été privée d'aucune garantie de procédure ;

- que l'imposition en litige est bien fondée, et ne méconnaît aucune norme ni principe communautaire ;

- que le moyen tiré de la violation de l'article 1er du 1er protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est en l'espèce inopérant, et que la remise en cause du dégrèvement initialement accordé n'a méconnu aucun principe général issu du droit communautaire ;

- que les conclusions tendant au paiement d'intérêts moratoires sont, faute de litige né et actuel entre le comptable et le requérant, sans objet, et donc irrecevables ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 avril 2011 :

- le rapport de M. Lévy Ben Cheton, premier conseiller ;

- et les conclusions de Mme Jourdan, rapporteur public ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner sur les autres moyens de la requête ;

Considérant que la SOCIETE SOPLANADE, après avoir déclaré conformément aux dispositions de l'article 302 bis ZD du code général des impôts alors en vigueur la valeur de ses achats et payé la taxe sur les achats de viande qu'elle estimait en conséquence devoir au titre de la période du 1er janvier 2001 au 31 décembre 2003, en a demandé la restitution par deux réclamations des 18 décembre 2003 et 13 septembre 2004 ; que l'administration lui a accordé le dégrèvement total des impositions en litige par décision du 21 septembre 2004 ; qu'elle a ensuite adressé à la société une lettre du 12 novembre 2004 l'informant de sa décision de rapporter ledit dégrèvement, dès lors que la taxe sur les achats de viande avait été légalement perçue, avant de rejeter ses réclamations par décision du 14 mars 2005 ; que la société requérante relève appel du jugement du 26 février 2009 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à la restitution des sommes acquittées ;

Considérant qu'en vertu du VI de l'article 302 bis ZD du code général des impôts, alors en vigueur, la taxe sur les achats de viande est constatée, recouvrée et contrôlée selon les mêmes procédures et sous les mêmes sanctions, garanties et privilèges que la taxe sur la valeur ajoutée ; que selon l'article L. 256 du livre des procédures fiscales, dont les dispositions ont ainsi été rendues applicables à cette taxe : Un avis de mise en recouvrement est adressé par le comptable public à tout redevable des sommes, droits, taxes et redevances de toute nature dont le recouvrement lui incombe lorsque le paiement n'a pas été effectué à la date d'exigibilité (...) ; que, lorsqu'une taxe a été déclarée et payée spontanément par le redevable, puis a fait l'objet d'un dégrèvement, cette décision implique, alors même que le paiement a été effectué à la date d'exigibilité, que l'administration émette un avis de mise en recouvrement si elle entend rétablir l'imposition ; qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que faute d'avoir, après avoir prononcé le dégrèvement des taxes payées par la société au titre de la période du 1er janvier 2001 au 31 décembre 2003, émis un avis de mise en recouvrement correspondant au montant dégrevé, l'administration ne pouvait lui refuser la restitution de ces taxes ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 208 du livre des procédures fiscales : Quand l'Etat est condamné à un dégrèvement d'impôt par un Tribunal ou quand un dégrèvement est prononcé par l'administration à la suite d'une réclamation tendant à la réparation d'une erreur commise dans l'assiette ou le calcul des impositions, les sommes déjà perçues sont remboursées au contribuable et donnent lieu au paiement d'intérêts moratoires dont le taux est celui de l'intérêt de retard prévu à l'article 1727 du code général des impôts. Les intérêts courent du jour du paiement. Ils ne sont pas capitalisés. ; qu'en vertu du 3ème alinéa de l'article R. 208-1 du même livre, ces intérêts moratoires sont payés d'office en même temps que les sommes remboursées par le comptable chargé du recouvrement des impôts ; qu'en l'absence de litige né et actuel entre le comptable responsable du remboursement et la société requérante, les conclusions tendant au versement d'intérêts moratoires sont irrecevables et ne peuvent, par suite, qu'être rejetées ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SOCIETE SOPLANADE est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à la restitution desdites taxes ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à la SOCIETE SOPLANADE de la somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : Il est accordé à la SOCIETE SOPLANADE la restitution de la taxe sur les achats de viande qu'elle a versée au titre de la période du 1er janvier 2001 au 31 décembre 2003.

Article 2 : Le jugement n° 0502283 du 26 février 2009 du Tribunal administratif de Grenoble est réformé en ce qu'il est contraire au présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à la SOCIETE SOPLANADE une somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la SOCIETE SOPLANADE et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, porte-parole du Gouvernement.

Délibéré après l'audience du 19 avril 2011 à laquelle siégeaient :

M. Chanel, président de chambre,

MM. Pourny et Lévy Ben Cheton, premiers conseillers.

Lu en audience publique, le 31 mai 2011.

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N° 09LY01259


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09LY01259
Date de la décision : 31/05/2011
Type d'affaire : Administrative

Analyses

19-06-04 Contributions et taxes. Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées. Autres taxes sur le chiffre d'affaires et taxes assimilées.


Composition du Tribunal
Président : M. CHANEL
Rapporteur ?: M. Laurent LEVY BEN CHETON
Rapporteur public ?: Mme JOURDAN
Avocat(s) : CABINET SOCOJUR

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2011-05-31;09ly01259 ?
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