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18/05/2011 | FRANCE | N°11LY00220

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, Juge unique -1ère chambre, 18 mai 2011, 11LY00220


Vu la requête, enregistrée le 26 janvier 2011 à la Cour, présentée pour le PREFET DU RHONE ;

Le PREFET DU RHONE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1007638 du 27 décembre 2010 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a annulé son arrêté du 24 décembre 2010 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Mohamed Amine A, ainsi que ses décisions distinctes du même jour fixant le pays de destination de cette mesure de police et ordonnant le placement en rétention administrative de l'intéressé ;

2°) de

rejeter la demande présentée par M. A devant le Tribunal administratif de Lyon ;

Il sou...

Vu la requête, enregistrée le 26 janvier 2011 à la Cour, présentée pour le PREFET DU RHONE ;

Le PREFET DU RHONE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1007638 du 27 décembre 2010 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a annulé son arrêté du 24 décembre 2010 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Mohamed Amine A, ainsi que ses décisions distinctes du même jour fixant le pays de destination de cette mesure de police et ordonnant le placement en rétention administrative de l'intéressé ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A devant le Tribunal administratif de Lyon ;

Il soutient que M. A ne démontre pas qu'il s'occupe effectivement de son enfant en contribuant à son entretien ou à son éducation ; que celui-ci n'est pas fondé à se prévaloir des dispositions des alinéas 4 et 8 de l'article 7 de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008, relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 15 mars 2011 à la Cour, présenté pour M. Mohamed Amine A, domicilié chez M. Mohamed A, 37B rue du 8 mai 1945 à Villeurbanne (69100) ;

M. A demande à la Cour :

1°) de rejeter la requête du PREFET DU RHONE ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 196 euros, au profit de son conseil, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Il soutient que l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière et la décision fixant le pays de destination ont méconnu les stipulations des paragraphes 4 et 5 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, celles de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et celles du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant ; que les mêmes décisions ont méconnu les dispositions du paragraphe 6 de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que c'est à tort que le PREFET DU RHONE a pris à son encontre une mesure d'éloignement sur le fondement du 7° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il ne constitue plus une menace pour l'ordre public ; que la décision ordonnant son placement en rétention administrative est entachée d'un défaut de motivation ; que, dès lors qu'il disposait d'un passeport et présentait des garanties de représentation suffisantes, il n'y avait aucune nécessité pour le préfet de décider son placement en rétention administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, modifié, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 avril 2011 :

- le rapport de M. Bézard, président ;

- et les conclusions de M. Reynoird, rapporteur public ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

Considérant qu'aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 7° Si l'étranger a fait l'objet d'un retrait de son titre de séjour ou d'un refus de délivrance ou de renouvellement d'un titre de séjour, dans les cas où ce retrait ou ce refus ont été prononcés, en application des dispositions législatives et réglementaires en vigueur, en raison d'une menace à l'ordre public. (... ) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A, ressortissant algérien, né le 10 février 1985, est entré régulièrement en France le 26 novembre 2004 et a déposé une demande d'asile qui a été rejetée par l'Office français de la protection des réfugiés et apatrides, par décision du 23 mai 2005, confirmée le 6 mars 2007 par la Commission de recours des réfugiés ; qu'il a présenté, le 12 mars 2007, une demande de titre de séjour en qualité de conjoint de Français et que le PREFET DU RHONE a rejeté cette demande par décision du 10 avril 2008 au motif que sa présence en France représentait une menace grave pour l'ordre public dès lors qu'il a été reconnu coupable de vol, menace de délit, vol en réunion et violence avec usage ou menace d'une arme suivie d'incapacité n'excédant pas huit jours, commis entre février 2006 et mai 2006, et a fait l'objet de condamnations à des peines de six mois d'emprisonnement avec sursis en septembre 2006 et en octobre 2006 ; que, par suite, à la date de l'arrêté de reconduite à la frontière en litige, le 24 décembre 2010, M. A entrait dans le champ d'application des dispositions précitées du 7° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet pouvait décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français ou d'une mesure de reconduite à la frontière en application du présent chapitre : (...) 6° L'étranger ne vivant pas en état de polygamie qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans ; (...) et qu'aux termes de l'article 371-2 du code civil : Chacun des parents contribue à l'entretien et à l'éducation des enfants à proportion de ses ressources, de celles de l'autre parent ainsi que des besoins de l'enfant. (...) ;

Considérant que, pour annuler l'arrêté de reconduite à la frontière pris par le PREFET DU RHONE le 24 décembre 2010 à l'encontre de M. A, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Lyon a jugé que cette mesure d'éloignement méconnaissait les dispositions du 6° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile du fait que M. A est père d'un enfant français, né le 1er octobre 2007, que, séparé de son épouse, il dispose concernant cet enfant d'un droit de visite et d'hébergement dont les modalités sont libres, l'autorité parentale étant exercée en commun par les deux parents, et qu'il contribue à l'entretien et à l'éducation de son fils à proportion de ses ressources ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et notamment de l'acte de naissance en date du 3 octobre 2007, de la copie du jugement du Tribunal de grande instance de Lyon du 26 octobre 2009, de la déclaration de la contribution de M. A à l'entretien et à l'éducation de son enfant, rédigée par la mère de l'enfant le 26 décembre 2010, et des mandats adressés presque chaque mois à celle-ci entre avril 2008 et décembre 2010, dont le montant varie entre 65 et 105 euros, que M. A a contribué effectivement à l'entretien et à l'éducation de son enfant à proportion de ses ressources depuis au moins deux ans à la date de la décision en litige ; que, par suite, cette décision a méconnu les dispositions précitées du 6° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DU RHONE n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Lyon s'est fondé sur ce motif pour annuler l'arrêté du 24 décembre 2010 ordonnant la reconduite à la frontière de M. A et, par voie de conséquence, les décisions du même jour fixant le pays de destination de cette mesure de police et ordonnant le placement en rétention administrative de l'intéressé ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que M. A a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que le conseil de M. A, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 800 euros à son profit, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête du PREFET DU RHONE est rejetée.

Article 2 : L'Etat versera la somme de 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative au conseil de M. A, sous réserve que ce dernier renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au PREFET DU RHONE, à M. Mohamed Amine A et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.

Lu en audience publique, le 18 mai 2011.

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N° 11LY00220

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : Juge unique -1ère chambre
Numéro d'arrêt : 11LY00220
Date de la décision : 18/05/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Alain BEZARD
Rapporteur public ?: M. REYNOIRD
Avocat(s) : SCHMITT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2011-05-18;11ly00220 ?
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