La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

12/05/2011 | FRANCE | N°09LY02407

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 12 mai 2011, 09LY02407


Vu la requête, enregistrée le 13 octobre 2009 au greffe de la Cour, présentée pour la société à responsabilité limitée (SARL) VISION INTERACTIVE, dont le siège est La Ferme Blanche, route d'Autun, à Châtenoy-le-Royal (71880) ;

La SARL VISION INTERACTIVE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0800803 du Tribunal administratif de Dijon du 25 juin 2009 rejetant sa demande en décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée et pénalités y afférentes d'un montant de 26 236 euros, 13 272 euros et 181 euros dont elle a été déclarée r

edevable au titre de la période du 1er janvier 2001 au 31 décembre 2003 ;

2°) de pr...

Vu la requête, enregistrée le 13 octobre 2009 au greffe de la Cour, présentée pour la société à responsabilité limitée (SARL) VISION INTERACTIVE, dont le siège est La Ferme Blanche, route d'Autun, à Châtenoy-le-Royal (71880) ;

La SARL VISION INTERACTIVE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0800803 du Tribunal administratif de Dijon du 25 juin 2009 rejetant sa demande en décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée et pénalités y afférentes d'un montant de 26 236 euros, 13 272 euros et 181 euros dont elle a été déclarée redevable au titre de la période du 1er janvier 2001 au 31 décembre 2003 ;

2°) de prononcer la décharge demandée ; à titre subsidiaire d'ordonner une expertise pour déterminer s'il y a eu augmentation de la surface habitable ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat, à son profit, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative la somme de 3 500 euros à raison des frais de première instance et de 3 500 euros au titre des frais d'appel non compris dans les dépens ;

Elle soutient :

- que le jugement a renversé la charge de la preuve, qui revient à l'administration fiscale ;

- que les travaux entrepris relèvent du taux réduit de TVA prévu par les dispositions de l'article 279-0 bis du code général des impôts ; qu'ils n'ont pas affecté le gros oeuvre ; que la dalle qui a été refaite ne concerne que 226 mètres carrés sur une surface de plancher de plus de 1 000 mètres carrés ; qu'il n'a pas été créé de nouvelles surfaces de plancher ; qu'il n'y a pas eu totale redistribution de l'immeuble mais que les appartements après travaux se situent à l'emplacement et dans les limites des appartements avant travaux ; qu'il y a eu mises aux normes actuelles et que les appartements de l'étage ont désormais directement accès aux combles qui les surplombent et que deux appartements ont été réunis pour n'en former plus qu'un ; que l'importance du montant des travaux, qui ne peut être retenue pour apprécier s'il y a " reconstruction ", tient notamment au surcoût lié au respect de l'architecture d'époque de l'immeuble ;

- que la surface après travaux n'a pas augmenté ; que les combles étaient habitables et avaient été habités, ainsi qu'il résulte des attestations produites ;

- que, selon l'instruction administrative du 28 août 2000, paragraphes 63 et 66, position reprise dans l'instruction du 8 décembre 2006, paragraphe 181, les combles relèvent du taux réduit ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 18 février 2010, présenté par le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient :

- que les travaux réalisés sur l'immeuble de la SCI FIH Thalie ont affecté de manière notable le gros oeuvre, ont eu pour effet d'accroitre la surface habitable et ont abouti à des aménagements qui, par leur importance, équivalent à une véritable reconstruction ;

- qu'il appartient au juge de l'impôt d'apprécier, au vu de l'instruction, si les opérations réalisées entrent dans le champ d'application du taux réduit ou du taux normal de la taxe sur la valeur ajoutée ;

- que les travaux ont entraîné la redistribution complète de la surface habitable existante et l'aménagement des combles par la création de trois appartements en duplex ; qu'il y a eu redistribution complète de l'espace intérieur ; qu'il apparaît indéniablement que les travaux litigieux, par leur nature et leur consistance, ont abouti à des aménagements internes qui, par leur importance, équivalent à une véritable reconstruction et qui ont affecté de manière notable le gros oeuvre de l'immeuble ;

- qu'il résulte des actes d'achat des immeubles de 1998 et 2000 que ceux-ci comptaient avant travaux une surface de plancher de 383,14 mètres carrés, dont 231,38 mètres carrés habitables, pour le bâtiment D et de 687,90 mètres carrés, dont 234,44 mètres carrés habitables pour le bâtiment B ; que la surface habitable a donc augmenté de manière significative ; que les pièces produites par la société appelante pour établir que les combles constituaient avant travaux une surface habitable n'ont aucune valeur probante ;

- que la société requérante ne peut utilement invoquer l'instruction du 8 décembre 2006, publiée postérieurement à la proposition de rectification du 14 juin 2004 ; que le paragraphe 63 de l'instruction 3 C-7-00 du 5 septembre 2000 prévoit l'application du taux réduit de TVA pour des travaux d'aménagement de combles " dans la mesure où ils ont pour seul objet de permettre une meilleure utilisation de l'espace ", ce qui exclut les travaux s'intégrant dans une restructuration complète de l'immeuble ; que, dans ce cas, le taux normal de TVA s'applique à l'ensemble de l'opération ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 1er avril 2011, présenté pour la SARL VISION INTERACTIVE qui conclut aux mêmes fins que la requête ;

Elle soutient, en outre :

- qu'elle est en droit de faire la preuve par des attestations produites ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 avril 2011 :

- le rapport de M. Raisson, premier conseiller ;

- les observations de Me Roumier, avocat de la SARL VISION INTERACTIVE ;

- et les conclusions de M. Monnier, rapporteur public ;

- la parole ayant été à nouveau donnée à Me Roumier, avocat de la SARL VISION INTERACTIVE ;

Vu la note en délibéré enregistrée le 8 avril 2011, présentée pour la SARL VISION INTERACTIVE ;

Considérant que la SCI FIH Thalie a réhabilité un important immeuble d'habitation de construction très ancienne, situé à Chalon-sur-Saône, à l'angle de la rue de la Tahlie et de la rue de Lyon ; que la SARL VISION INTERACTIVE, qui a exécuté pour le compte de ce maître d'ouvrage les travaux relevant du lot plâtrerie, peinture et ravalement, a facturé, en 2001 et 2002, ses prestations en appliquant le taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée prévu par les dispositions de l'article 279-0 bis du code général des impôts ; que la SARL a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à la suite de laquelle le vérificateur a estimé que ces travaux relevaient du taux normal de taxe parce qu'ils avaient concouru à la production ou à la livraison d'un immeuble au sens du 7° de l'article 257 du même code ;

Considérant que, pour demander l'annulation du jugement du Tribunal administratif de Dijon qui a rejeté sa demande, la SARL soutient que les travaux qu'elle a entrepris relevaient du taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée tant sur le terrain de la loi fiscale que sur le terrain de la doctrine ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant que le Tribunal administratif de Dijon a précisé que les conditions de faits sur lesquelles il a fondé sa décision, et qu'il a exposées, ressortaient de l'instruction ; qu'il a ainsi implicitement mais nécessairement répondu au moyen de la société requérante qui soutenait qu'il appartenait à l'administration fiscale de prouver que les travaux entrepris étaient assimilables à une reconstruction de l'immeuble ; que le moyen tiré de l'irrégularité du jugement manque en fait ;

Sur le bien fondé des rappels de taxation :

En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :

Considérant qu'aux termes de l'article 278 du code général des impôts : " Le taux normal de la taxe sur la valeur ajoutée est fixé à 19,60 %. " ; qu'aux termes de l'article 279-0 bis du même code, dans sa rédaction alors en vigueur : " 1. La taxe sur la valeur ajoutée est perçue au taux réduit sur les travaux d'amélioration, de transformation, d'aménagement et d'entretien portant sur des locaux à usage d'habitation achevés depuis plus de deux ans (...). / 2. Cette disposition n'est pas applicable : a. Aux travaux qui concourent à la production ou à la livraison d'immeubles au sens du 7° de l'article 257 (...) " ; qu'aux termes de l'article 257 du même code : " Sont (...) soumises à la taxe sur la valeur ajoutée : (...) 7° Les opérations concourant à la production ou à la livraison d'immeubles (...) " ; que doivent être regardés comme des " opérations concourant à la production ou à la livraison d'immeubles ", au sens des dispositions précitées, les travaux entrepris sur des immeubles existants lorsqu'ils ont pour effet de créer de nouveaux locaux, notamment dans des locaux auparavant affectés à un autre usage, ou d'apporter une modification importante à leur gros oeuvre ou d'y réaliser des aménagements internes qui, par leur importance, équivalent à une véritable reconstruction, ou, enfin, d'accroître leur volume ou leur surface ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction, qu'au cours des années 2001 et 2002, la

SARL VISION INTERACTIVE a exécuté, sur l'immeuble à usage d'habitation en deux corps de bâtiments appartenant à la SCI FIH Thalie à Châtenoy-le-Royal, à la suite de la défaillance d'une entreprise, des travaux pour la réalisation de dix logements locatifs, qui ont consisté pour l'essentiel à aménager les anciens combles de l'immeuble et à les relier, par des escaliers privatifs, aux locaux à usage d'habitation existants afin de former des duplex; que s'il ressort des pièces du dossier que les travaux ont comporté notamment la démolition et la construction de murs en agglomérés creux, l'installation de poteaux et de poutres métalliques, le remplacement de 20 % des dalles de plancher ainsi que des travaux de reprise de la charpente, ces travaux ne peuvent, eu égard à leur nature et à leur ampleur limitée, être regardés comme ayant apporté une modification importante au gros oeuvre de l'immeuble ou comme étant équivalent à une véritable reconstruction de celui-ci ; qu'en revanche, si la SARL VISION INTERACTIVE soutient que les travaux n'ont pas augmenté la surface habitable de l'immeuble dès lors que les combles étaient constitués de pièces autrefois destinées à l'habitation bien que d'un confort très sommaire, elle n'apporte, à l'appui de cette allégation, que deux témoignages de personnes qui n'ont pénétré dans l'immeuble que de manière ponctuelle et ne produit pas d'attestations plus étayées provenant, par exemple, des architectes et techniciens ayant participé au chantier ou d'anciens habitants de l'immeuble ; qu'un tel usage ne ressort pas, par ailleurs, des documents produits par la société ; que, dans ces conditions, les travaux litigieux doivent être regardés comme ayant consisté en la transformation en logements de locaux préalablement affectés à un autre usage et concourant à l'augmentation de la surface habitable au sens des dispositions précitées ; que, par suite, la SARL VISION INTERACTIVE n'est pas fondée à demander l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il lui a refusé le bénéfice de la loi fiscale ;

Mais en ce qui concerne la doctrine :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 80 A du Livre des procédures fiscales : " Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration. / Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente. "

Considérant que l'instruction administrative 3 C-7-00 du 28 août 2000 relative aux travaux sur locaux à usage d'habitation distingue, s'agissant des opérations concernées, les " travaux concourant à la production d'un immeuble neuf au sens de l'article 257-7° du code général des impôts " et " les travaux de transformation en logements de locaux préalablement affectés à un autre usage " ; qu'elle dispose notamment dans ses paragraphes 63 et suivants : " Aménagement de greniers ou de combles. / 63. Les travaux d'aménagement de combles et de grenier sont, en principe, soumis au taux réduit dans la mesure où ils ont pour objet de permettre une meilleure utilisation de l'espace. / 64. La création d'un plancher, le renforcement ou le remplacement d'une charpente ou d'un plancher, peuvent notamment bénéficier du taux réduit. / 65. En revanche, une opération d'aménagement de combles comportant des travaux de surélévation, même partielle, de la toiture relève dans sa totalité du taux normal. / 66. Cela étant, il est admis que la création de " chiens assis " ne remette pas en cause l'application du taux réduit " ;

Considérant qu'il est constant que les travaux entrepris, en tant qu'ils augmentaient la surface habitable, ont eu pour objet principal l'aménagement de combles en vue de permettre une meilleure utilisation de l'espace ; qu'ils n'ont pas emporté modification de la toiture et n'ont pas concouru à la production d'un immeuble neuf au sens du A de la section I du chapitre II de l'instruction du 28 août 2000 ; que, par suite, la SARL VISION INTERACTIVE est fondée à soutenir, contrairement à ce qu'a retenu le Tribunal administratif, que les travaux litigieux entraient dans les prévisions de la doctrine qui soumet au taux réduit les travaux tendant à l'aménagement des combles et par suite, se prévaloir, sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 80 A du Livre des procédures fiscales, de la doctrine ainsi évoquée ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SARL VISION INTERACTIVE est fondée à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Dijon n'a pas admis que l'instruction administrative précitée du 28 août 2000 l'autorisait à taxer au taux réduit ses factures émises à l'adresse de la SCI FIH Thalie, et qu'il y a lieu, sur ce seul moyen, d'annuler son jugement ;

Sur les conclusions relatives à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat au profit de la SARL VISION INTERACTIVE la somme de 1 500 euros ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 0800803 du Tribunal administratif de Dijon du 25 juin 2009 est annulé.

Article 2 : La SARL VISION INTERACTIVE est déchargée des rappels de taxe sur la valeur ajoutée dont elle a été déclarée redevable au titre de la période du 1er janvier 2001 au 31 décembre 2003.

Article 3 : L'Etat versera à la SARL VISION INTERACTIVE la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL VISION INTERACTIVE et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat.

Délibéré après l'audience du 7 avril 2011 à laquelle siégeaient :

M. Duchon-Doris, président de chambre,

M. Montsec, président-assesseur,

M. Raisson, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 12 mai 2011.

''

''

''

''

1

2

N° 09LY02407


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09LY02407
Date de la décision : 12/05/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

19-06-02-09-01 Contributions et taxes. Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées. Taxe sur la valeur ajoutée. Calcul de la taxe. Taux.


Composition du Tribunal
Président : M. DUCHON-DORIS
Rapporteur ?: M. Denis RAISSON
Rapporteur public ?: M. MONNIER
Avocat(s) : SCP LE SERGENT-ROUMIER-FAURE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2011-05-12;09ly02407 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award