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14/04/2011 | FRANCE | N°10LY01426

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 14 avril 2011, 10LY01426


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 22 juin 2010, présentée pour M. Francisco A, domicilié ... ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1001033, en date du 20 mai 2010, par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 23 février 2010, du préfet de l'Isère, portant refus de délivrance d'un titre de séjour, assorti d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et prescrivant qu'à l'expiration de ce délai il soit reconduit d'office à destination

du pays dont il a la nationalité ou de tout pays où il établirait être légalement...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 22 juin 2010, présentée pour M. Francisco A, domicilié ... ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1001033, en date du 20 mai 2010, par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 23 février 2010, du préfet de l'Isère, portant refus de délivrance d'un titre de séjour, assorti d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et prescrivant qu'à l'expiration de ce délai il soit reconduit d'office à destination du pays dont il a la nationalité ou de tout pays où il établirait être légalement admissible, à ce qu'il soit enjoint au préfet de l'Isère de lui délivrer un titre de séjour ou, à défaut, un récépissé de demande de titre de séjour, sous astreinte, et à ce que la somme de 1 000 euros soit mise à la charge de l'Etat, à verser à son conseil sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 75-1 de la loi du 10 juillet 1991 ;

2°) d'annuler ces décisions du 23 février 2010 ;

3°) de faire injonction au préfet de l'Isère de lui délivrer un titre de séjour ou, à défaut, un récépissé de demande de titre de séjour, sous astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat, au profit de son conseil, une somme de 1 000 euros, sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 75-1 de la loi du 10 juillet 1991 ;

Il soutient que :

- la nouvelle demande qu'il avait formulée le 9 février 2010, relative à un titre de séjour pour motif de santé, aurait dû être prise en compte ;

- sa situation de santé peut avoir des conséquences graves en cas d'arrêt du traitement et nécessite des soins qu'il ne pourrait obtenir dans son pays d'origine ;

- l'arrêté attaqué est insuffisamment motivé ; sa situation de santé n'a pas été examinée et il n'est pas fait état d'un avis du médecin inspecteur de santé publique ;

- la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour est dépourvue de base légale, dans la mesure où il n'est pas établi que la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) lui a été notifiée ;

- elle est contraire aux dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; la décision de refus est intervenue sans que le préfet ait statué sur une des demandes et sans que l'avis du médecin inspecteur de santé publique ait été sollicité ; la décision est illégale par exception d'illégalité de la décision par laquelle le préfet a refusé d'enregistrer sa nouvelle demande ;

- elle est contraire aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, le centre de sa vie privée et familiale étant en France ;

- cette décision est en outre entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français méconnaît également les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- cette décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à sa situation de santé ;

- la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français méconnaît les mêmes dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il ne pouvait faire l'objet d'une telle décision alors que sa nouvelle demande restait pendante ;

- cette décision est également contraire aux dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'avis du médecin inspecteur de santé publique n'ayant pas été sollicité ;

- elle est aussi entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle, section administrative d'appel, en date du 10 septembre 2010, accordant à M. A le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 30 décembre 2010, présenté par le préfet de l'Isère, tendant au rejet de la requête de M. A ; le préfet se réfère aux moyens qu'il a présentés dans son mémoire en défense en première instance ; il fait valoir en outre qu'en l'absence d'éléments nouveaux les conclusions de la requête tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent être que rejetées ;

Vu l'ordonnance en date du 21 décembre 2010 fixant la clôture de l'instruction au 7 janvier 2011 à 16 heures 30, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 mars 2011 :

- le rapport de M. Montsec, président-assesseur ;

- et les conclusions de M. Monnier, rapporteur public ;

Considérant que M. Francisco A, ressortissant angolais, né le 7 mars 1975, est entré irrégulièrement en France, une première fois, le 8 avril 2006 ; qu'après que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) ait rejeté sa demande d'asile, par une décision du 23 août 2006 confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 25 juillet 2007, il a fait l'objet d'un premier arrêté du préfet de l'Essonne, en date du 21 septembre 2007, portant refus de délivrance d'un titre de séjour, assorti d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et fixant le pays de destination de sa reconduite au cas où il n'obtempérerait pas à cette obligation ; qu'il est alors, selon ses propres déclarations, retourné en Angola ; qu'il est revenu en France, toujours irrégulièrement, le 28 octobre 2009 et a présenté dès le 30 octobre 2009 une nouvelle demande d'asile ; que, par décision du 17 novembre 2009, le préfet de l'Isère, qui a considéré que cette demande présentait un caractère dilatoire, a refusé de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ; que, par jugement n° 0905817 du 20 mai 2010, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande dirigée contre cette décision du 17 novembre 2009 ; que, par une décision du 22 janvier 2010, l'OFPRA a rejeté sa demande d'asile présentée dans le cadre de la procédure prioritaire ; qu'alors que M. A venait de présenter le 9 février 2010, par l'intermédiaire de la commune de Pont-de-Claix, une nouvelle demande de titre de séjour en tant qu'étranger malade, que le préfet de l'Isère a refusé d'enregistrer au motif que le dossier présenté était incomplet, ledit préfet a pris un arrêté en date du 23 février 2010, portant refus de délivrance du titre sollicité en tant que réfugié, en assortissant cette décision d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et en prescrivant qu'à l'expiration de ce délai il soit reconduit d'office à destination du pays dont il a la nationalité ou de tout pays où il établirait être légalement admissible ; que M. A fait appel du jugement n° 1001033 du 20 mai 2010 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces trois décisions du préfet de l'Isère du 23 février 2010 ;

Sur la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour :

Considérant, en premier lieu, que, lorsque le préfet est saisi d'une demande de délivrance de titre de séjour sur le fondement de l'une des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il n'est pas tenu d'examiner d'office si l'intéressé peut prétendre à une autorisation de séjour sur le fondement d'une autre disposition de ce code ; que le préfet était à l'origine saisi d'une demande de titre en tant que réfugié et non en tant qu'étranger malade sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que la demande présentée le 9 février 2010 sur ce dernier fondement, que le préfet a d'ailleurs refusé d'enregistrer, doit ainsi être regardée, en tout état de cause, comme une nouvelle demande devant faire l'objet d'une autre décision, elle-même susceptible d'être contestée par la voie d'un nouveau recours pour excès de pouvoir ; que, dans ces conditions, M. A n'est pas fondé à soutenir que le préfet aurait dû tenir compte de cette nouvelle demande présentée le 9 février 2010 et solliciter l'avis du médecin inspecteur de santé publique ; qu'il n'est pas davantage fondé à soutenir que la décision attaquée portant refus de délivrance d'un titre de séjour, intervenue le 23 février 2010, serait insuffisamment motivée pour ne pas avoir mentionné son état de santé et ne pas s'être référée à un avis du médecin inspecteur de santé publique ; que, par ailleurs, il ne saurait, en tout état de cause, invoquer en l'espèce une exception d'illégalité de la décision par laquelle le préfet de l'Isère a refusé d'enregistrer sa demande présentée en tant qu'étranger malade ;

Considérant, en deuxième lieu, que la décision attaquée ne faisant pas réponse à une demande de titre en tant qu'étranger malade, M. A ne peut utilement faire valoir qu'elle serait contraire aux dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Considérant, en troisième lieu, que M. A ne peut utilement invoquer à l'encontre de la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour la circonstance que la décision de l'OFPRA en date du 22 janvier 2010 ne lui aurait pas été personnellement notifiée ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1- Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance, 2- Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sécurité publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

Considérant que, si M. A fait valoir que le centre de sa vie privée et familiale se situe en France et qu'il n'a plus d'attaches dans son pays d'origine, il ressort toutefois des pièces du dossier, d'une part, qu'entré en France une première fois trois ans et dix mois avant la date de l'arrêté attaqué, il n'était ré-entré en France, selon ses propres dires, que depuis seulement quatre mois, d'autre part, qu'il n'est pas dépourvu de tout lien personnel et familial en Angola où vivent ses deux enfants et où il a vécu jusqu'à l'âge de 31 ans ; que, par ailleurs, s'il produit à l'instance un unique certificat médical établi le 7 avril 2010, faisant état de ce qu'il est atteint d'asthme, " avec des crises plus ou moins sévères ", de troubles du sommeil et de l'humeur et de névrose post traumatique, nécessitant " une prise en charge spécialisée régulière ", il ne fournit aucune précision sur les traitements nécessaires qui ne pourraient pas selon lui être dispensés dans son pays d'origine ; que, dans ces conditions, la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour n'a pas méconnu les stipulations susmentionnées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur la décision faisant obligation à M. A de quitter le territoire français :

Considérant, en premier lieu, que, pour les même motifs que ceux indiqués ci-dessus pour ce qui concerne la décision portant refus de délivrance du titre de séjour, le moyen présenté par M. A à l'encontre de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français, relatif à la méconnaissance par cette décision des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, doit être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'en faisant état, dans les conditions susmentionnées, des pathologies dont il est atteint, il n'établit pas, en tout état de cause, que la décision attaquée serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à sa situation de santé et serait contraire aux dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 742-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger présent sur le territoire français dont la demande d'asile entre dans l'un des cas visés aux 2° à 4° de l'article L. 741-4 bénéficie du droit de se maintenir en France jusqu'à la notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, lorsqu'il s'agit d'une décision de rejet. En conséquence, aucune mesure d'éloignement mentionnée au livre V du présent code ne peut être mise à exécution avant la décision de l'office (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que la circonstance que M. A ait présenté une demande de reconnaissance du statut de réfugié auprès de l'OFPRA faisait seulement obligation au préfet de s'abstenir de mettre à exécution une mesure d'éloignement jusqu'à la notification de la décision de l'office à l'intéressé ; qu'il suit de là qu'en tout état de cause M. A n'est pas fondé à soutenir que la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français serait illégale à défaut que la décision de l'OFPRA en date du 22 janvier 2010 lui ait été notifiée ;

Considérant, en quatrième lieu, que, contrairement à ce que soutient M. A, le préfet de l'Isère pouvait assortir sa décision de refus de délivrance du titre sollicité en tant que réfugié d'une obligation de quitter le territoire français, sans attendre qu'il soit statué sur la nouvelle demande de l'intéressé présentée en tant qu'étranger malade, dont l'enregistrement avait d'ailleurs été refusé ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et à fin d'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Francisco A et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration. Copie en sera adressé au préfet de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 24 mars 2011 à laquelle siégeaient :

M. Duchon-Doris, président de chambre,

M. Montsec, président-assesseur,

M. Raisson, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 14 avril 2011.

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N° 10LY01426


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 10LY01426
Date de la décision : 14/04/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. DUCHON-DORIS
Rapporteur ?: M. Pierre MONTSEC
Rapporteur public ?: M. MONNIER
Avocat(s) : HUARD

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2011-04-14;10ly01426 ?
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