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07/04/2011 | FRANCE | N°09LY02630

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, Formation de chambres réunies, 07 avril 2011, 09LY02630


Vu la requête, enregistrée le 16 novembre 2009 au greffe de la Cour, présentée pour la CHAMBRE DE COMMERCE ITALIENNE DE LYON, dont le siège est 8 rue Joseph Serlin à Lyon cedex 01 (69282) ;

La CHAMBRE DE COMMERCE ITALIENNE DE LYON demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 0703722-0703723 en date du 15 septembre 2009, du Tribunal administratif de Lyon en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à la restitution de droits de taxe sur la valeur ajoutée déductibles au titre de la période du 1er janvier 2001 au 31 décembre 2002 ;

2°) d'ordonner ladite rest

itution ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat, à son bénéfice, la somme de 1 50...

Vu la requête, enregistrée le 16 novembre 2009 au greffe de la Cour, présentée pour la CHAMBRE DE COMMERCE ITALIENNE DE LYON, dont le siège est 8 rue Joseph Serlin à Lyon cedex 01 (69282) ;

La CHAMBRE DE COMMERCE ITALIENNE DE LYON demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 0703722-0703723 en date du 15 septembre 2009, du Tribunal administratif de Lyon en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à la restitution de droits de taxe sur la valeur ajoutée déductibles au titre de la période du 1er janvier 2001 au 31 décembre 2002 ;

2°) d'ordonner ladite restitution ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat, à son bénéfice, la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La CHAMBRE DE COMMERCE ITALIENNE DE LYON soutient que la réclamation qu'elle a présentée le 13 décembre 2006 était motivée par un arrêt de la Cour de justice des communautés européennes n° 243/03 commission c/ République française, qui a déclaré non conforme au droit communautaire la législation de l'Etat français imposant aux assujettis totaux de porter les subventions non imposables au dénominateur du prorata et limitant ainsi leur droit à déduction ; que c'est à tort que le Tribunal a estimé que l'instruction administrative 3 D-4-97 du 4 avril 1997, dont la décision juridictionnelle en cause a révélé la non-conformité à la règle de droit supérieure, n'avait pas de valeur légale ou réglementaire et ne pouvait pas constituer, au sens de l'article L. 190 du livre des procédures fiscales, une règle de droit dont il a été fait application pour fonder l'imposition ; qu'en effet la doctrine administrative constitue un substitut pur et simple de la loi ; que l'instruction dont elle a fait application, qui renvoie aux dispositions de l'instruction du 8 septembre 1994, lesquelles limitent le droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée, fait référence à l'article 212 de l'annexe II au code général des impôts issu du décret n° 94-452 du 3 juin 1994 ; que cet article est cité " in extenso " tant par le Tribunal administratif, que par la Cour de justice des communautés européennes ; que cette dernière a reconnu que l'instruction du 8 septembre 1994 avait un caractère de substitut pur et simple de la loi justifiant son annulation, dès lors qu'elle méconnaissait les articles 17 et 19 de la sixième directive 77/388/CE du conseil du 17 mai 1977 ; que l'administration a d'ailleurs tiré les conséquences de cette invalidation en supprimant, dans une instruction du 27 janvier 2006 3 D-1-06, les dispositions antérieures relatives à la condition financière restreignant le droit à déduction des entreprises bénéficiant de subventions non imposables ; que l'article 212 de l'annexe II au code général des impôts a également été supprimé et ses dispositions restrictives n'ont pas été reprises par le nouveau dispositif réglementaire ; qu'il s'ensuit que le refus du Tribunal d'appliquer les dispositions de l'article L. 190 du livre des procédures fiscales ne repose sur aucun fondement ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 16 mars 2010, présenté par le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat qui conclut au rejet de la requête ; il soutient qu'une décision administrative ou judiciaire modifiant la doctrine ou la jurisprudence fiscale antérieure ne peut, au sens de l'article R. 196-1 du livre des procédures fiscales, être considérée comme un " événement " susceptible d'être retenu comme point de départ du délai de réclamation ; qu'en l'espèce la demande de restitution de la taxe sur la valeur ajoutée, acquittée en 2001 et 2002, aurait dû parvenir à l'administration avant, respectivement, le 31 décembre 2003 et le 31 décembre 2004 ; que la demande de restitution de la taxe, dont la déduction n'a pas été effectuée en 2001 et 2002, qui a été formulée le 13 décembre 2006, après la parution de la nouvelle instruction administrative 3 D-l-06, est tardive ; que, concernant l'application de l'article L. 190 du livre des procédures fiscales, par un arrêt n° 243/03 du 6 octobre 2005, la Cour de justice des communautés européennes a jugé non conformes à la sixième directive 77/388/CE du conseil du 17 mai 1977, les paragraphes 150 et 151 de l'instruction administrative 3 CA-94 du 8 septembre 1994, qui prévoyaient une limitation de la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée grevant les investissements financés en tout ou partie par des subventions d'équipement non imposables ; qu'elle ne s'est en aucun cas prononcée sur la conformité au droit communautaire du dispositif français exposé tant dans les points 141 à 144 et 215 de l'instruction 3 CA-94 du 8 septembre 1994, que dans l'instruction 3 D-4-97, prévoyant que le montant d'une subvention non imposable à la taxe sur la valeur ajoutée devait être inscrit au dénominateur du rapport déterminant le pourcentage de déduction de son bénéficiaire, lorsque cette subvention n'est pas dissociable d'une opération placée dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée ; qu'il s'ensuit que seules les réclamations portant sur la limitation du droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée grevant les investissements financés par des subventions d'équipement sur le fondement du paragraphe 151 de l'instruction 3 CA-94, relèvent du délai spécial prévu par les 3ème et 4ème alinéas de l'article L. 190 du livre des procédures fiscales ; que la recevabilité de la réclamation de la CHAMBRE DE COMMERCE ITALIENNE DE LYON, qui n'était pas fondée sur la non-conformité de la condition financière visée au point 151 de l'instruction 3 CA- 94 du 8 septembre 1994, doit être appréciée au regard des dispositions du b) de l'article R. 196-1 du livre des procédures fiscales et non au regard de celles des 3ème et 4ème alinéas de l'article L. 190 du même livre ; qu'au surplus, alors qu'il n'est pas contesté que les activités exercées par la requérante sont placées dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée, une partie des activités couvertes par le versement de subventions ne donne lieu à aucune rémunération ; que ces subventions, qui représentent plus du tiers du total des produits d'exploitation déclarés au cours des années en litige, ne sont pas taxables à la taxe sur la valeur ajoutée ; que les frais exposés pour les besoins de ces activités n'ouvrent pas droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée ; que c'est donc à juste titre que le prorata trouve à s'appliquer à la situation de la requérante qui a la qualité de redevable partiel ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 mars 2011 :

- le rapport de Mme Besson-Ledey, premier conseiller ;

- les observations de Me Masson, avocat de la CHAMBRE DE COMMERCE ITALIENNE DE LYON ;

- et les conclusions de M. Monnier, rapporteur public ;

- la parole ayant été de nouveau donnée à Me Masson, avocat de la CHAMBRE DE COMMERCE ITALIENNE DE LYON ;

Considérant que, pour déterminer le montant de la taxe sur la valeur ajoutée déductible, la CHAMBRE DE COMMERCE ITALIENNE DE LYON, qui ne réalise que des opérations placées dans le champ de cette taxe, a appliqué les dispositions de l'article 212 de l'annexe II au code général des impôts telles qu'interprétées par l'instruction de l'administration fiscale du 4 avril 1997, référencée 3 D-4-97 disposant que : " le montant d'une subvention non imposable à la taxe sur la valeur ajoutée doit être inscrit au dénominateur du rapport déterminant le pourcentage de déduction de son bénéficiaire lorsque cette subvention n'est pas dissociable d'une opération placée dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée " ; qu'elle a, en conséquence, au titre des années 2001 à 2004, inscrit au dénominateur les montants de subventions de fonctionnement qu'elle a perçues, ce qui a eu pour effet de réduire son droit à déduction ; que, par une réclamation du 13 décembre 2006, elle a sollicité la restitution des droits de taxe sur la valeur ajoutée déductibles correspondants ; que l'administration a partiellement rejeté sa demande pour tardiveté ; que la CHAMBRE DE COMMERCE ITALIENNE DE LYON relève appel du jugement du Tribunal administratif de Lyon en tant qu'il a rejeté sa demande de restitution des droits de taxe sur la valeur ajoutée déductibles au titre de la période du 1er janvier 2001 au 31 décembre 2002 ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 190 du livre des procédures fiscales : " Sont instruites et jugées selon les règles du présent chapitre toutes actions tendant à la décharge ou à la réduction d'une imposition ou à l'exercice de droits à déduction, fondées sur la non-conformité de la règle de droit dont il a été fait application à une règle de droit supérieure. Lorsque cette non-conformité a été révélée par une décision juridictionnelle, l'action en restitution des sommes versées ou en paiement des droits à déduction non exercés ou l'action en réparation du préjudice subi ne peut porter que sur la période postérieure au 1er janvier de la quatrième année précédant celle où la décision révélant la non-conformité est intervenue. " ; qu'aux termes de l'article R. 196-1 du même livre : " Pour être recevables les réclamations relatives aux impôts autres que les impôts directs locaux et les taxes annexes à ces impôts doivent être présentées à l'administration au plus tard le 31 décembre de la deuxième année suivant celle, selon le cas : a. de la mise en recouvrement du rôle ou de la notification d'un avis de mise en recouvrement ; b. du versement de l' impôt contesté lorsque cet impôt n'a pas donné lieu à l'établissement d'un rôle ou à la notification d'un avis de mise en recouvrement ; c. de la réalisation de l'événement qui motive la réclamation. (...) " ; et qu'aux termes de l'article 212 de l'annexe II au code général des impôts alors applicable : " 1. Les redevables qui, dans le cadre de leurs activités situées dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée, ne réalisent pas exclusivement des opérations ouvrant droit à déduction sont autorisés à déduire une fraction de la taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les biens constituant des immobilisations utilisées pour effectuer ces activités / Cette fraction est égale au montant de la taxe déductible obtenu, après application, le cas échéant, des dispositions de l'article 207 bis, multiplié par le rapport existant entre : a) Au numérateur, le montant total annuel du chiffre d'affaires, taxe sur la valeur ajoutée exclue, afférent aux opérations ouvrant droit à déduction y compris les subventions directement liées au prix de ces opérations ; b) Au dénominateur, le montant total annuel du chiffre d'affaires, taxe sur la valeur ajoutée exclue, afférent aux opérations figurant au numérateur ainsi qu'aux opérations qui n'ouvrent pas droit à déduction, et de l'ensemble des subventions, y compris celles qui ne sont pas directement liées au prix de ces opérations. (...) " ;

Considérant que la CHAMBRE DE COMMERCE ITALIENNE DE LYON, dont la réclamation en tant qu'elle portait sur la période antérieure au 1er janvier 2003 était tardive au regard des dispositions du b) de l'article R. 196-1 du livre des procédures fiscales, conteste le motif de rejet de sa demande par les premiers juges qui ont estimé que l'instruction dont elle a fait application ne pouvait être regardée comme une règle de droit et se prévaut, en appel, de l'arrêt de la Cour de justice des communautés européennes n° 243/03 du 6 octobre 2005 Commission contre République française comme constituant un événement au sens de l'article L. 190 du livre des procédures fiscales de nature à rouvrir le délai de réclamation sur le fondement du c) de l'article R. 196-1 précité ;

Considérant que si la Cour de justice des communautés européennes, saisie d'une action en manquement contre la République française, a jugé, par cet arrêt, que la France avait effectivement manqué aux obligations qui lui incombent en vertu du droit communautaire et notamment des articles 17 et 19 de la sixième directive 77/388 des communautés européennes du 17 mai 1977, en prévoyant, dans son droit national, une règle particulière soumettant le droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée, lorsque l'acquisition du bien concerné est financé par une subvention, à la condition que les amortissements de ce bien soient répercutés dans le prix des opérations effectuées par l'assujetti, elle ne s'est toutefois pas prononcée sur la validité de l'application, objet du présent litige, d'un prorata de déduction de la taxe sur la valeur ajoutée supportée par des assujettis n'effectuant que des opérations taxées mais percevant des subventions non imposables ; que, par suite, cette décision juridictionnelle ne peut constituer en l'espèce un événement au sens du c) de l'article R. 196-1 du livre des procédures fiscales, dès lors qu'elle ne révèle pas la non-conformité au droit communautaire des dispositions de l'article 212 de l'annexe II au code général des impôts, telles qu'interprétées par la doctrine 3 D-4-97, dont la CHAMBRE DE COMMERCE ITALIENNE DE LYON a fait application ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la CHAMBRE DE COMMERCE ITALIENNE DE LYON n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que les conclusions qu'elle a présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées par voie de conséquence ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la CHAMBRE DE COMMERCE ITALIENNE DE LYON est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la CHAMBRE DE COMMERCE ITALIENNE DE LYON et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat.

Délibéré après l'audience du 24 mars 2011 à laquelle siégeaient :

M. Le Gars, président de la Cour,

M. Chanel et M. Duchon-Doris, présidents de chambre,

M. Montsec, président-assesseur,

M. Pourny, M. Segado et Mme Besson-Ledey, premiers conseillers.

Lu en audience publique, le 7 avril 2011.

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N° 09LY02630


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : Formation de chambres réunies
Numéro d'arrêt : 09LY02630
Date de la décision : 07/04/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

19-02-02-02 Contributions et taxes. Règles de procédure contentieuse spéciales. Réclamations au directeur. Délai.


Composition du Tribunal
Président : M. LE GARS
Rapporteur ?: Mme Laurence BESSON-LEDEY
Rapporteur public ?: M. MONNIER
Avocat(s) : REQUET CHABANEL ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2011-04-07;09ly02630 ?
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