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17/03/2011 | FRANCE | N°09LY00719

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 17 mars 2011, 09LY00719


Vu la requête, enregistrée le 30 mars 2009, présentée pour M. Gratien A, domicilié ... ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0401004 du 27 janvier 2009 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation des trois délibérations en date du 19 décembre 2003 par lesquelles le conseil municipal de la commune d'Aix-les-Bains a décidé de procéder à la désaffectation et au déclassement du domaine public de certains terrains et de les céder aux consorts B, à la société CAI, représentée par M. C, et à la

SCI Jules ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, lesdites délibérations ;

3°) de ...

Vu la requête, enregistrée le 30 mars 2009, présentée pour M. Gratien A, domicilié ... ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0401004 du 27 janvier 2009 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation des trois délibérations en date du 19 décembre 2003 par lesquelles le conseil municipal de la commune d'Aix-les-Bains a décidé de procéder à la désaffectation et au déclassement du domaine public de certains terrains et de les céder aux consorts B, à la société CAI, représentée par M. C, et à la SCI Jules ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, lesdites délibérations ;

3°) de mettre à la charge de la commune d'Aix-les-Bains la somme de 2 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient :

- s'agissant de la délibération concernant les ateliers municipaux, que pour pouvoir désaffecter un bien du domaine public, il faut que le service public y ait cessé dans les faits, préalablement ou concomitamment ; qu'en l'espèce, à la date des délibérations litigieuses, les services publics n'avaient pas encore quitté les lieux ; que les délibérations litigieuses ne font aucune référence à l'intérêt général qui pourrait justifier la cession des biens litigieux à un prix inférieur à leur valeur ; qu'en outre, le prix de cession est largement inférieur à la valeur des terrains ;

- s'agissant de la cité de l'entreprise, que le prix de vente était inférieur de plus de 18 pour cent à l'estimation faite par le service des domaines, elle-même très basse par rapport à la valeur réelle du terrain ; qu'il n'est pas établi que la lourdeur des frais de fonctionnement justifiait de céder les terrains et locaux à un prix aussi bas ; qu'en outre, il n'a été procédé à aucune offre publique de cession, ce qui a méconnu l'égalité entre les administrés ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 28 juin 2010, présenté pour la commune d'Aix-les-Bains qui conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de M. A au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient :

- que la requête, dirigée contre une ordonnance inexistante, est irrecevable ;

- qu'en première instance, M. A ne demandait l'annulation des délibérations litigieuses qu'en tant qu'elles étaient relatives à la cession des terrains litigieux et non en tant qu'elles déclassaient lesdits terrains ; que les conclusions dirigées contre les décisions de déclassement sont donc nouvelles en appel ;

- que les décisions de cession étant des actes non réglementaires, il ne peut plus être excipé de leur illégalité dans la mesure où le délai de recours à leur encontre a expiré ;

- que, s'agissant des ateliers municipaux, le prix de cession annoncé dans les délibérations litigieuses était hors taxe et a été majoré de la taxe sur la valeur ajoutée lors des ventes ; que les biens en cause n'ont pas été cédés à un prix inférieur à leur valeur ;

- que, s'agissant de la vente au profit de la société CAI, la circonstance que le prix de vente des futurs logements qu'elle envisage de réaliser soit supérieur à celui auquel les ateliers municipaux ont été cédés est sans influence ;

- que, s'agissant de la délibération relative à la cession de la cité de l'entreprise, aucune règle n'imposait de procéder à une offre publique de cession ; que les élus avaient connaissance de la situation déficitaire de la gestion de la cité de l'entreprise lors de leur convocation au conseil municipal et ont pu se prononcer sur l'opportunité de sa vente en étant suffisamment éclairés ; que le requérant ne démontre pas que l'estimation faite par le service des domaines serait insuffisante ; que le bien a été cédé à un prix inférieur de 18,25 pour cent à l'estimation faite par le service des domaines et non de 23 pour cent ; que le tribunal administratif ne s'est pas fondé, pour écarter l'argumentation de M. A, sur la circonstance que seuls 280 m² des 1 116,20 m² du terrain litigieux seraient utilisables ; qu'en tout état de cause, cette circonstance est établie ; que les spécificités architecturales du bien ont toujours rendu sa vente difficile ; qu'il ressort des pièces produites que les coûts d'entretien et de maintenance des locaux en cause justifiaient leur cession à un prix inférieur ;

Vu le mémoire, enregistré le 20 octobre 2010, présenté pour M. A, qui conclut aux mêmes fins que dans sa requête susvisée par les mêmes moyens ;

Il soutient en outre que sa requête est recevable et que sa demande devant le tribunal administratif était bien dirigée contre les délibérations dans leur ensemble et notamment contre les décisions de désaffectation ;

Vu le mémoire, enregistré le 18 février 2011, présenté pour la commune d'Aix-les-Bains, par lequel elle conclut aux mêmes fins que précédemment par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 février 2011 :

- le rapport de Mme Vinet, conseiller,

- les observations de Me Calloud représentant M. A, et de Me Camoin, représentant la commune d'Aix-les-Bains,

- et les conclusions de Mme Gondouin, rapporteur public,

La parole ayant été à nouveau donnée à Me Calloud et à Me Camoin ;

Considérant que par une délibération, n° 11 a), du 19 décembre 2003, le conseil municipal de la commune d'Aix-les-Bains a décidé la désaffectation et le déclassement d'une partie du domaine public des ateliers municipaux d'une surface d'environ 2 500 m² et sa cession aux consorts B pour le prix de 130 000 euros ; que par une deuxième délibération du même jour, n° 11 b), il a décidé la désaffectation et le déclassement d'une autre partie de ces ateliers municipaux d'une surface d'environ 9 400 m² et sa cession à la société CAI, pour une somme de 210 000 euros ; que par une troisième délibération du même jour, n° 12, il a décidé la cession à la SCI Jules d'un ensemble situé dans la cité de l'entreprise , composé de parkings extérieurs, de locaux d'une surface de 1 116,20 m² et de terrains d'une surface de 900 m², pour le prix de 304 898 euros ; que M. A relève appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces trois délibérations ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées par la commune d'Aix-les-Bains :

Sur la légalité des délibérations n° 11 a) et 11 b) :

Considérant, en premier lieu, que la désaffectation d'une dépendance du domaine public peut résulter soit d'une situation de fait, soit d'une décision expresse, qui peut alors être prise sans que cette dépendance soit encore désaffectée dans les faits ; qu'ainsi, la circonstance que les locaux des ateliers municipaux auraient été encore affectés au service public au jour des délibérations décidant de leur désaffectation et de leur déclassement est sans influence sur la légalité de ces délibérations ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'estimation réalisée par la direction des services fiscaux de la Savoie de la valeur de ces terrains aurait été insuffisante ; qu'à cet égard, la circonstance qu'un promoteur immobilier aurait l'intention de commercialiser des logements nouvellement construits sur ces terrains pour un prix largement supérieur à cette estimation, faite au regard de terrains servant d'assiette à des bâtiments ne pouvant servir d'habitation, n'est pas de nature à démontrer que celle-ci serait manifestement erronée ;

Considérant, en troisième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment des actes de vente produits par la commune d'Aix-les-Bains, que le prix stipulé dans chacun de ces actes n'était pas libellé toutes taxes comprises et n'était, dès lors, pas inférieur au prix retenu par la direction des services fiscaux, calculé hors taxe ; que, par suite, le moyen tiré de ce que les parcelles vendues aux consorts B et à la société CAI l'auraient été pour un prix inférieur à l'estimation faite par le service des estimations domaniales manque en fait ;

Sur la légalité de la délibération n° 12 :

Considérant, en premier lieu, que M. A soutient que l'estimation réalisée par le service des évaluations domaniales du prix des locaux situés dans la cité de l'entreprise était insuffisante, et produit deux attestations émanant de ce même service, concernant des locaux à usage de bureau situés à la même adresse, estimés à des prix compris entre 459 et 696 euros le m² ; que si l'ensemble des lots vendus à la SCI Jules l'a été à un prix de 265 euros le m², il ressort toutefois des pièces produites que les différents lots en cause comprennent des surfaces correspondant, pour une large part, à des galeries circulaires donnant sur un vaste hall d'entrée, à des locaux techniques et à des escaliers, dont la valeur vénale ne saurait être évaluée au même prix que des bureaux et placards ; que, d'ailleurs, s'agissant des surfaces des lots 181, 183 et 184, correspondant à un bureau et deux placards, le service des évaluations domaniales les a estimés à un prix de 549 euros le m² ; que les autres évaluations produites par le requérant concernent des locaux à usage d'habitation sans rapport avec les locaux litigieux et ne sauraient donc constituer un élément de comparaison ; qu'ainsi, il ne ressort pas des pièces du dossier que la direction des services fiscaux de la Savoie aurait manifestement sous-évalué les locaux en cause ;

Considérant, en deuxième lieu, que le coût d'entretien des locaux situés dans la cité de l'entreprise est élevé et que la commune a rencontré des difficultés pour les vendre du fait de la spécificité de leur architecture ; qu'ainsi, en les cédant à la SCI Jules après avoir consenti un rabais de 68 102 euros HT par rapport au prix résultant de l'estimation précitée, la commune d'Aix-les-Bains n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation de la valeur des locaux en cause au jour de la délibération litigieuse ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'imposait à la commune de faire précéder les ventes litigieuses de mesures de publicité et d'organiser une mise en concurrence des acquéreurs éventuels ; que, par suite, le moyen tiré de ce que l'égalité entre les administrés aurait été méconnue faute de publicité préalable est inopérant ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la commune d'Aix-les-Bains dans l'instance et non compris dans les dépens ;

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune d'Aix-les-Bains, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse quelque somme que ce soit à M. A au titre des frais exposés dans l'instance et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : M. A versera à la commune d'Aix-les-Bains une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Gratien A, à la commune d'Aix-les-Bains et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.

Délibéré après l'audience du 24 février 2011, où siégeaient :

- M. du Besset, président de chambre,

- Mme Verley-Cheynel, président-assesseur,

- Mme Vinet, conseiller.

Lu en audience publique, le 17 mars 2011.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09LY00719
Date de la décision : 17/03/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

135-01-03-02 Collectivités territoriales. Dispositions générales. Biens des collectivités territoriales. Régime juridique des biens.


Composition du Tribunal
Président : M. du BESSET
Rapporteur ?: Mme Camille VINET
Rapporteur public ?: Mme GONDOUIN
Avocat(s) : CALLOUD

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2011-03-17;09ly00719 ?
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