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07/03/2011 | FRANCE | N°10LY02467

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 07 mars 2011, 10LY02467


Vu la requête, enregistrée le 29 octobre 2010 à la Cour, présentée pour Mme Mirita A, de nationalité kosovare, domiciliée ...;

Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1001012, en date du 23 septembre 2010, par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet de l'Allier, du 16 avril 2010, portant refus de délivrance d'un titre de séjour et obligation de quitter le territoire français ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions susmentionnées ainsi que la dé

cision du préfet de l'Allier du 16 avril 2010 désignant le pays de destination de la me...

Vu la requête, enregistrée le 29 octobre 2010 à la Cour, présentée pour Mme Mirita A, de nationalité kosovare, domiciliée ...;

Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1001012, en date du 23 septembre 2010, par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet de l'Allier, du 16 avril 2010, portant refus de délivrance d'un titre de séjour et obligation de quitter le territoire français ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions susmentionnées ainsi que la décision du préfet de l'Allier du 16 avril 2010 désignant le pays de destination de la mesure d'éloignement ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Allier de lui délivrer un titre de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale dans le délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros, au profit de son conseil, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que la décision portant refus de délivrance de titre de séjour est insuffisamment motivée ; que cette décision est entachée d'erreur de fait et de droit au regard de sa nationalité et de la qualité de réfugié de son compagnon ; que cette décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que la décision portant obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée ; que cette décision est illégale en conséquence de l'illégalité de la décision portant refus de délivrance de titre de séjour qui la fonde ; que la décision fixant le pays de destination est insuffisamment motivée ; que cette décision est illégale en conséquence de l'illégalité de la décision portant refus de délivrance de titre de séjour qui la fonde ; que le préfet de l'Allier a commis une erreur de fait sur sa nationalité et qu'elle ne peut pas retourner dans son pays d'origine ; que cette décision méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 25 novembre 2010, présenté par le préfet de l'Allier, qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que les décisions portant refus de délivrance de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français ne sont pas entachées d'incompétence ; que ces décisions sont suffisamment motivées ; que ces décisions ne sont pas entachées d'erreur de droit ni d'erreur matérielle au regard de la nationalité de Mme A ; que les mêmes décisions ne sont pas non plus entachées d'erreur de droit au regard de la qualité de réfugié du compagnon de Mme A ; que la décision portant refus de délivrance de titre de séjour n'est entachée ni d'erreur de droit, ni d'erreur manifeste d'appréciation et ne méconnaît ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni celles du 1 de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant ;

Vu la lettre, en date du 11 février 2011, par laquelle le président de la formation de jugement, sur le fondement de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, a informé les parties de ce que la décision paraissait susceptible d'être fondée sur un moyen d'ordre public ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention des Nations-Unies sur les droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 1er mars 2011 :

- le rapport de M. Bézard, président ;

- et les conclusions de M. Besson, rapporteur public ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation des décisions refusant de délivrer un titre de séjour à Mme A et lui faisant obligation de quitter le territoire français :

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme A, qui déclare qu'elle est originaire du Kosovo, est entrée en France au plus tard le 10 janvier 2007, lorsqu'elle a demandé l'asile, et vit maritalement avec M. B, titulaire d'une carte de résident en qualité de réfugié, avec lequel elle a eu deux enfants, nés le 2 avril 2008 et le 27 septembre 2009 ; qu'elle partage le même domicile que sa soeur, qui est titulaire d'un titre de séjour en qualité de réfugiée ; que, dans ces conditions, en refusant de délivrer un titre de séjour à Mme A, le préfet de l'Allier a porté au droit de celle-ci au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts poursuivis et a, dès lors, méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, dans ces conditions, la décision de refus de titre de séjour doit être annulée ; que, par voie de conséquence, la décision portant obligation de quitter le territoire français, fondée sur ce refus, doit également être annulée ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande ; qu'il y a lieu d'annuler ledit jugement ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision fixant le pays de destination :

Considérant que ces conclusions ont été présentées pour la première fois en appel et sont, par suite, irrecevables ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. ; qu'aux termes de l'article L. 911-3 du même code : Saisie de conclusions en ce sens, la juridiction peut assortir, dans la même décision, l'injonction prescrite en application des articles L. 911-1 et L. 911-2 d'une astreinte qu'elle prononce dans les conditions prévues au présent livre et dont elle fixe la date d'effet. ;

Considérant que le présent arrêt, qui annule la décision de refus de séjour du préfet de l'Allier du 16 avril 2010 et la mesure d'éloignement subséquente, implique nécessairement, eu égard au motif sur lequel il se fonde, que le préfet de l'Allier délivre le titre sollicité à la requérante ; que, par suite, il y a lieu d'enjoindre audit préfet de délivrer à Mme A une carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale en fixant à deux mois à compter de la notification qui lui sera faite du présent arrêt, le délai qui lui est imparti pour procéder à cette délivrance ; que, dans cette attente, elle devra être munie d'une autorisation provisoire de séjour, sans qu'il y ait lieu d'assortir ces injonctions d'une astreinte ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstance de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le paiement de la somme de 1 000 euros au profit de Mme A au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1001012, en date du 23 septembre 2010, du Tribunal administratif de Clermont-Ferrand et les décisions du 16 avril 2010, par lesquelles le préfet de l'Allier a refusé de délivrer un titre de séjour à Mme A et lui a fait obligation de quitter le territoire français, sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de l'Allier de délivrer à Mme A une carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Dans cette attente, elle devra être munie d'une autorisation provisoire de séjour.

Article 3 : L'Etat versera à Mme A la somme de mille euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme A est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Mirita A, au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration et au préfet de l'Allier.

Délibéré après l'audience du 1er mars 2011 à laquelle siégeaient :

M. Bézard, président de chambre,

M. Fontbonne, président-assesseur,

M. Chenevey, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 7 mars 2011

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N° 10LY02467


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 10LY02467
Date de la décision : 07/03/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. BEZARD
Rapporteur ?: M. Alain BEZARD
Rapporteur public ?: M. BESSON
Avocat(s) : SAINT-PAUL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2011-03-07;10ly02467 ?
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