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22/02/2011 | FRANCE | N°10LY01113

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 22 février 2011, 10LY01113


Vu la requête, enregistrée le 17 mai 2010 à la Cour, présentée pour M. Nordine A, domicilié ... ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1000070, en date du 12 mars 2010, par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet de l'Isère, du 4 décembre 2009, portant refus de délivrance d'un titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et désignation du pays à destination duquel il serait reconduit à l'expiration de ce délai, à défaut pour l

ui d'obtempérer à l'obligation de quitter le territoire français qui lui était faite...

Vu la requête, enregistrée le 17 mai 2010 à la Cour, présentée pour M. Nordine A, domicilié ... ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1000070, en date du 12 mars 2010, par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet de l'Isère, du 4 décembre 2009, portant refus de délivrance d'un titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et désignation du pays à destination duquel il serait reconduit à l'expiration de ce délai, à défaut pour lui d'obtempérer à l'obligation de quitter le territoire français qui lui était faite ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions susmentionnées ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention vie privée et familiale dès la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de procéder au réexamen de sa demande dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1000 euros, au profit de son conseil, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Il soutient que la décision de refus de délivrance de titre de séjour contestée, qui ne fait pas référence aux enfants de son épouse, est entachée d'une insuffisance de motivation ; que cette même décision méconnaît les stipulations du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien ainsi que celles de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et celles du 1 de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant ; qu'enfin, le préfet de l'Isère, qui n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation personnelle, a commis une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences que ce refus impliquerait sur sa cellule familiale ; que l'obligation de quitter le territoire français doit être annulée du fait de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour qui la fonde ; que cette mesure d'éloignement méconnaît les stipulations du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien, celles de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que celles du 1 de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les pièces desquelles il résulte que la requête a été notifiée au préfet de l'Isère qui n'a pas produit d'observations ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 11 janvier 2011, présentée pour M. A ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention des Nations-Unies sur les droits de l'enfant du 20 novembre 1989, signée par la France le 26 janvier 1990 ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, modifié, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle en date du 1 juin 2010 accordant le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à M. A ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 janvier 2011 :

- le rapport de M. Bézard, président ;

- et les conclusions de M. Besson, rapporteur public ;

Sur la légalité de la décision portant refus de délivrance de titre de séjour :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 susvisée : Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui (...) restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...). et qu'aux termes de l'article 3 de la même loi : La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. ;

Considérant qu'il ressort des mentions de l'arrêté contesté que la décision portant refus de délivrance d'un certificat de résidence algérien vise notamment le 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ainsi que la demande de titre de séjour formulée sur ce fondement par M. A le 9 juillet 2009 et indique, en particulier, que l'intéressé, de nationalité algérienne, est l'époux d'une ressortissante marocaine titulaire d'un titre de séjour en cours de validité et qu'il entre donc dans la catégorie des étrangers susceptibles de bénéficier d'une procédure de regroupement familial, circonstance qui s'oppose à ce qu'il puisse prétendre à un titre de séjour sur le fondement du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien ; qu'il résulte de ce qui précède que cette décision est régulièrement motivée, tant en droit qu'en fait ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 susvisé : (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention vie privée et familiale est délivré de plein droit : (...) 5. Au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ; qu'il ressort des pièces du dossier que M. A, en sa qualité de conjoint d'une ressortissante marocaine résidant sur le territoire français sous couvert d'une carte de résident de dix ans, entre dans une catégorie lui ouvrant droit au regroupement familial ; que, dès lors, il ne peut pas utilement se prévaloir des stipulations précitées du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien susvisé ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ;

Considérant que M. A soutient, qu'eu égard à son ancienneté de séjour en France, où il est entré régulièrement, le 17 mars 2004, et s'est inséré socialement, et au fait qu'il est désormais dépourvu d'attaches familiales en Algérie, alors qu'il est l'époux d'une ressortissante marocaine, titulaire d'un titre de séjour de dix ans et mère de deux enfants mineurs orphelins de père dont il s'occupe, le refus de délivrance de titre de séjour qui lui a été opposé porte à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux motifs du refus ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que M. A, ressortissant algérien, est entré pour la dernière fois sur le territoire français à l'âge de quarante-trois ans ; qu'après avoir vu sa demande d'asile rejetée, il a fait l'objet d'une première mesure d'éloignement, le 17 avril 2007, à laquelle il n'a pas obtempéré ; que son mariage avec une ressortissante marocaine titulaire d'un droit au séjour en France a été célébré quinze mois seulement avant la décision contestée et qu'aucun enfant n'est né de cette union ; qu'il n'est pas dépourvu d'attaches en Algérie, pays où il a vécu la majeure partie de sa vie et où réside, notamment, son frère ; que, par suite, et alors même qu'il s'occuperait des enfants de son épouse, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et notamment du caractère récent de son union, la décision contestée n'a pas porté au droit de M. A au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux motifs du refus ; qu'elle n'a, par suite, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes du 1 de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant : Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait (...) des tribunaux, des autorités administratives (...), l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;

Considérant que M. A n'est pas le père des enfants de son épouse et que sa présence auprès de ces derniers est récente ; que, par suite, et alors même qu'il s'occuperait de ces enfants, la décision par laquelle le préfet de l'Isère a refusé la délivrance d'un titre de séjour au requérant, qui n'a au demeurant ni pour objet ni pour effet de séparer ce dernier desdits enfants, n'a pas méconnu les stipulations du 1 de l'article 3 de la convention des droits de l'enfant ;

Considérant, en dernier lieu, que, pour les motifs précédemment énoncés et eu égard notamment au caractère récent de l'union de M. A, le préfet de l'Isère n'a pas entaché sa décision de refus de titre de séjour d'une erreur manifeste d'appréciation, quant aux conséquences de ce refus sur la situation personnelle de l'intéressé ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

Considérant, en premier lieu, que compte tenu de ce qui vient d'être dit, le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français serait illégale, en conséquence de l'illégalité de la décision portant refus de délivrance de titre sur laquelle elle se fonde, doit être écarté ;

Considérant, en second lieu, que pour les motifs précédemment exposés dans le cadre de l'examen de la légalité du refus de titre de séjour, les moyens tirés de la violation, par l'obligation qui est faite à M. A de quitter le territoire français, des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de celles du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien et de celles du 1 de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant, doivent être écartés ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ; que ses conclusions aux fins d'injonction doivent être rejetées par voie de conséquence ;

Sur l'application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

Considérant que les dispositions susmentionnées s'opposent à ce que le conseil de M. A, lequel succombe dans l'instance, puisse obtenir le versement d'une somme quelconque à son profit, sous réserve qu'il renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Nordine A et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration. Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 4 janvier 2011 à laquelle siégeaient :

M. Bézard, président de chambre,

M. Fontbonne, président-assesseur,

M. Chenevey, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 22 février 2011

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N° 10LY01113


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 10LY01113
Date de la décision : 22/02/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. BEZARD
Rapporteur ?: M. Alain BEZARD
Rapporteur public ?: M. BESSON
Avocat(s) : PIEROT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2011-02-22;10ly01113 ?
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