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17/02/2011 | FRANCE | N°09LY01511

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 17 février 2011, 09LY01511


Vu la requête enregistrée le 3 juillet 2009, présentée pour la SOCIETE CRYSTAL dont le siège régional est 2 rue Bernard Palissy à Saint-Priest (69804) ;

La SOCIETE CRYSTAL demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0700254 du 23 avril 2009 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande de condamnation de la ville de Saint-Etienne à lui verser, à titre principal, les sommes de 384 121 euros outre intérêts de droit et de 20 000 euros en indemnisation du manque à gagner et du préjudice commercial résultant de son éviction du marché de trav

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Vu la requête enregistrée le 3 juillet 2009, présentée pour la SOCIETE CRYSTAL dont le siège régional est 2 rue Bernard Palissy à Saint-Priest (69804) ;

La SOCIETE CRYSTAL demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0700254 du 23 avril 2009 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande de condamnation de la ville de Saint-Etienne à lui verser, à titre principal, les sommes de 384 121 euros outre intérêts de droit et de 20 000 euros en indemnisation du manque à gagner et du préjudice commercial résultant de son éviction du marché de travaux du lot n° 2 équipements techniques, chaufferie bois et réseaux pré-isolés passé pour la construction de la chaufferie de Montreynaud, subsidiairement, la somme de 16 519,85 euros outre intérêts en indemnisation des frais qu'elle a exposés pour soumissionner ;

2°) de condamner la ville de Saint-Etienne à lui verser, à titre principal, les sommes de 384 121 euros outre intérêts de droit à compter de sa demande et de 20 000 euros, subsidiairement, la somme de 16 519,85 euros outre intérêts de droit à compter de sa demande ;

3°) de mettre à la charge de la ville de Saint-Etienne une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La SOCIETE CRYSTAL soutient que les documents du règlement de consultation ne permettent pas de connaître les critères d'appréciation de la valeur technique de l'offre ; que seuls deux critères étaient annoncés, lesquels ont été décomposés en 41 sous-critères non communiqués ; qu'en outre, la valeur comparée des offres n'a été analysée par la commission que sur 12 des 41 points prédéfinis ; que les points forts de son offre ont ainsi été occultés, tels que la puissance délivrée par sa chaudière, supérieure à celle de ses concurrents, la production de schémas techniques et d'un bilan de puissance ; que le motif qui a conduit à préférer l'offre de la société ABP sur le critère de la puissance de la chaudière est entaché d'erreur matérielle ; que l'évolutivité de la technologie de filtres proposée par ABP résulte d'exigences non annoncées par le cahier des clauses techniques particulières (CCTP) ; que son offre garantissait le respect des normes de rejets atmosphériques ; qu'il en est de même des valeurs contractuelles de performances du générateur Biomasse ; que la supériorité de l'offre d'ABP sur les autres performances n'est pas établie et résulte d'allégations ; que le total du manque à gagner, dont elle justifie, s'élève à 203 257 euros ; que le rejet de son offre en raison de son insuffisance technique génère nécessairement un préjudice commercial portant atteinte à sa réputation d'entreprise de référence sur le marché du génie thermique ; qu'elle justifie également des dépenses qu'elle a engagées pour présenter son offre ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire enregistré le 1er mars 2010, présenté pour la ville de Saint-Etienne (42000) ;

La ville de Saint-Etienne conclut au rejet de la requête et demande à la Cour de mettre à la charge de la SOCIETE CRYSTAL une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La ville de Saint-Etienne soutient que la requête, qui ne comporte pas de moyens d'appel, est irrecevable ; subsidiairement, que le choix de l'offre de la société ABP n'est entaché d'aucune illégalité ; qu'elle n'avait pas d'obligation de mentionner la méthode de notation des critères dans l'avis d'appel public à la concurrence ; que les candidats avaient été informés, notamment par le CCTP, de tous les éléments intégrés dans l'appréciation de la valeur technique de l'offre ; que ces éléments, au nombre de 41, ne sont pas des sous-critères dès lors qu'ils se bornent à détailler les composantes techniques du lot ; que les offres ont été analysées au regard de tous ces éléments, relatifs aux quatre catégories de performances attendues de l'équipement ; que la supériorité technique de l'offre résulte, d'une part, de l'adaptation de la chaudière à la tranche de puissance demandée, d'autre part, des précisions données par la société ABP sur le rendement de ce matériel en matière de combustion de bois à fort taux d'humidité ; que de telles précisions, bien que demandées à la requérante, n'ont pas été fournies ; que, si le règlement de la consultation n'imposait pas un type de filtres, il n'interdisait pas non plus d'apprécier les avantages de chaque proposition ; que les données fournies par la requérante sur le rendement du générateur de biomasse étaient inexploitables faute de précisions sur les taux d'humidité afférents au pouvoir calorique garanti par type de combustible ; que les données relatives aux autres performances n'ont été que partiellement fournies par la requérante ; que, compte tenu de l'insuffisante performance de sa chaudière, la société requérante était dénuée de chance sérieuse d'emporter le marché ; qu'en outre, les éléments de son préjudice ne sont établis par aucun élément concret ; que la réalité de son préjudice commercial n'est pas établie ; que le chiffrage des frais engagés pour présentation de l'offre n'est appuyé d'aucune justification ;

Vu le mémoire enregistré le 10 juin 2010 par lequel la SOCIETE CRYSTAL conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens ;

Vu le mémoire enregistré le 20 janvier 2011 par lequel la commune de Saint-Etienne conclut aux mêmes fins que précédemment par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le décret n° 2006-975 du 1er août 2006, notamment son article 8 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 janvier 2011 :

- le rapport de M. Arbarétaz, premier conseiller ;

- les observations de Me Pouilly, représentant la commune de Saint-Etienne ;

- et les conclusions de Mme Gondouin, rapporteur public ;

La parole ayant été de nouveau donnée à Me Pouilly ;

Sur les conclusions indemnitaires de la requête :

Sans qu'il soit nécessaire d'examiner la fin de non-recevoir opposée par la ville de Saint-Etienne ;

Considérant qu'aux termes de l'article 53 du code des marchés publics, dans sa rédaction applicable à l'espèce : II - Pour attribuer le marché au candidat qui a présenté l'offre économiquement la plus avantageuse, la personne publique se fonde sur divers critères variables selon l'objet du marché, notamment le coût d'utilisation, la valeur technique de l'offre, son caractère innovant, ses performances en matière de protection de l'environnement, ses performances en matière d'insertion professionnelle des publics en difficulté, le délai d'exécution, les qualités esthétiques et fonctionnelles, le service après-vente et l'assistance technique, la date et le délai de livraison, le prix des prestations. / D'autres critères peuvent être pris en compte s'ils sont justifiés par l'objet du marché. / Si, compte tenu de l'objet du marché, la personne publique ne retient qu'un seul critère, ce critère doit être le prix. / Les critères sont définis dans l'avis d'appel public à la concurrence ou dans le règlement de la consultation. Ces critères sont pondérés ou à défaut hiérarchisés ; que ces dispositions imposent au pouvoir adjudicateur d'informer les candidats des critères de sélection des offres ainsi que de leur pondération ou hiérarchisation ; que s'il décide, pour mettre en oeuvre ces critères de sélection des offres, de faire usage de sous-critères également pondérés ou hiérarchisés, il doit porter à la connaissance des candidats la pondération ou la hiérarchisation de ces sous-critères dès lors que, eu égard à leur nature et à l'importance de cette pondération ou hiérarchisation, ils sont susceptibles d'exercer une influence sur la présentation des offres par les candidats et doivent, en conséquence, être eux-mêmes regardés comme des critères de sélection ; qu'il n'est, en revanche, pas tenu d'informer les candidats de la méthode de notation des offres lorsqu'il se borne à mettre en oeuvre les critères annoncés dans le règlement de consultation ;

Considérant, en premier lieu, que le règlement de consultation du marché négocié notifié aux trois soumissionnaires qui avaient participé à l'appel d'offres déclaré infructueux précisait, en son article 6, que l'offre économiquement la plus avantageuse serait déterminée en fonction des critères du prix et de la valeur technique, notés sur 20 et pondérés, respectivement, à hauteur de 60 % et de 40 % ; que la valeur technique des trois offres concurrentes a été appréciée au regard des 41 rubriques de l'annexe au CCTP renseignées par les candidats et qui permettaient de connaître le détail des performances de chaque projet exprimées en termes de puissance, de rendement, de pression, de consommation, d'émissions polluantes et de sujétions d'entretien ; que, ce faisant, la ville de Saint-Etienne s'est bornée à mettre en oeuvre le second critère de notation en fonction d'éléments qui avaient été portés à la connaissance des candidats ; que, par suite, la SOCIETE CRYSTAL ne saurait utilement soutenir que la note de 17,30/20 qui a été attribuée à la valeur technique de son offre aurait été déterminée selon des sous-critères qui n'auraient pas été portés à sa connaissance ou qui auraient été érigés en critères de sélection sans qu'elle en ait été informée ;

Considérant, en deuxième lieu, que si pour départager la valeur technique des offres de la société ABP et de la requérante, la commission d'appel d'offres - dont le conseil municipal s'est approprié l'avis - compare les chaudières biomasse et les performances des filtres, cette circonstance révèle non pas que les offres n'auraient pas été analysées au regard de chacune des 41 rubriques de l'annexe au CCTP, mais qu'elles différaient sur ces deux postes, ce qui justifiait une différence de note ; que si le pouvoir adjudicateur n'avait pas à préconiser de marque de chaudières et n'a pas imposé de techniques de filtrage des fumées, il gardait la faculté d'apprécier les avantages et les inconvénients des solutions et des matériels que lui proposaient les candidats en ces deux domaines ;

Considérant, enfin, que la SOCIETE CRYSTAL n'ayant pas, contrairement à la société ABP, précisé dans son offre initiale les conditions de rendement de son installation en fonction d'un taux d'humidité déterminé, n'est pas fondée à soutenir qu'elle aurait continué à proposer un matériel plus performant que celui d'ABP après que la ville de Saint Etienne avait demandé aux candidats de s'engager sur des performances combustible inférieures (PCI) avec un taux d'humidité du combustible ramené de 45 % à 40 % ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la ville de Saint-Etienne n'ayant pas entaché le choix de l'offre de la société ABP d'une violation des dispositions précitées de l'article 53 du code des marchés publics, ne saurait être tenue d'indemniser la SOCIETE CRYSTAL qui n'est, dès lors, pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le Tribunal a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que, d'une part, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la Cour fasse bénéficier la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais exposés à l'occasion du litige soumis au juge et non compris dans les dépens ; que, dès lors, les conclusions de la SOCIETE CRYSTAL doivent être rejetées ; que, d'autre part, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SOCIETE CRYSTAL une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la ville de Saint Etienne et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SOCIETE CRYSTAL est rejetée.

Article 2 : La SOCIETE CRYSTAL versera à la ville de Saint-Etienne une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SOCIETE CRYSTAL, à la ville de Saint-Etienne et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.

Délibéré après l'audience du 27 janvier 2011 à laquelle siégeaient :

M. du Besset, président de chambre,

Mme Verley-Cheynel, président-assesseur,

M. Arbarétaz, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 17 février 2011.

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N° 09LY01511


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09LY01511
Date de la décision : 17/02/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. du BESSET
Rapporteur ?: M. Philippe ARBARETAZ
Rapporteur public ?: Mme GONDOUIN
Avocat(s) : BERNARD CARREAU

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2011-02-17;09ly01511 ?
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