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06/01/2011 | FRANCE | N°09LY02774

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre - formation à 3, 06 janvier 2011, 09LY02774


Vu, enregistrée le 9 décembre 2009, la requête présentée pour M. et Mme A, domiciliés ... ;

Ils demandent à la Cour :

1°) l'annulation du jugement n° 0603058 du 16 octobre 2009 du Tribunal administratif de Grenoble qui a rejeté leur demande de condamnation du centre hospitalier universitaire de Grenoble à réparer les préjudices, tels que fixés par expertise, résultant de l'opération chirurgicale pratiquée sur leur fille Sixtine le 28 août 2001 ;

2°) de faire droit à leur demande en condamnant le centre hospitalier à leur verser, pour le compte de leur

fille, une somme de 253 000 euros et en réparation de leur préjudice personnel, une s...

Vu, enregistrée le 9 décembre 2009, la requête présentée pour M. et Mme A, domiciliés ... ;

Ils demandent à la Cour :

1°) l'annulation du jugement n° 0603058 du 16 octobre 2009 du Tribunal administratif de Grenoble qui a rejeté leur demande de condamnation du centre hospitalier universitaire de Grenoble à réparer les préjudices, tels que fixés par expertise, résultant de l'opération chirurgicale pratiquée sur leur fille Sixtine le 28 août 2001 ;

2°) de faire droit à leur demande en condamnant le centre hospitalier à leur verser, pour le compte de leur fille, une somme de 253 000 euros et en réparation de leur préjudice personnel, une somme de 5 000 euros chacun, avec intérêts et capitalisation ;

3°) de mettre à la charge du centre hospitalier la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Ils soutiennent que :

- le centre hospitalier a commis une faute médicale en sectionnant le nerf facial à l'origine de la paralysie faciale de leur fille ;

- le chirurgien n'a pas été prudent alors que les accidents doivent être évités dans la majorité des cas ;

- il n'est pas démontré que le nerf était bifide ;

- il y a eu défaut d'information et la responsabilité du centre est encourue de ce fait ;

- jamais elle n'aurait accepté d'être opérée si elle avait été informée d'un risque d'inefficacité de l'opération ;

- leur fille a un taux d'incapacité permanente partielle de 10%, des déficiences esthétiques de 15 à 35%, un prétium doloris de 3/7, un préjudice moral important et un préjudice esthétique de 4/7 ;

- ils ont encouru des frais divers notables et exposé un sérieux préjudice moral.

Vu le jugement attaqué ;

Vu, enregistré le 22 octobre 2010, le mémoire présenté pour le centre hospitalier de Grenoble qui conclut au rejet de la requête ;

Il fait valoir que :

- l'accident dont a été victime Sixtine a pour origine une particularité anatomique et non une faute de l'hôpital, qui n'est pas démontrée par les intéressés ;

- le nerf facial présentait un caractère bifide, ce que le compte rendu du scanner pratiqué en 2005 ne peut remettre en cause ;

- le chirurgien n'a pas été imprudent, les anomalies du nerf facial étant imprévisibles et peu fréquentes, son repérage en préopératoire n'étant pas d'usage à l'époque ;

- les propos tenus devant l'expert montrent qu'ils auraient consenti à l'opération même en étant bien informés des risques ;

- il n'existait pas d'alternative thérapeutique ;

- les indemnités demandées sont excessives ou injustifiées.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 décembre 2010 :

- le rapport de M. Picard, premier conseiller ;

- les observations de Me Para, avocat de M. et Mme A et de Me Demailly, avocat du centre hospitalier universitaire de Grenoble ;

- et les conclusions de Mme Marginean-Faure, rapporteur public ;

La parole ayant été de nouveau donnée aux parties présentes ;

Considérant que Mlle Sixtine A, née en 1992, a subi le 28 août 2001 au centre hospitalier universitaire de Grenoble une greffe du tympan rendue nécessaire par une perforation du tympan droit consécutive à des otites séro-muqueuses sévères ; qu'à la suite de cette intervention, et malgré une reprise chirurgicale réalisée rapidement, elle a été victime d'une paralysie faciale droite entraînant une déformation du visage ; que M et Mme A, ses parents, ont recherché la responsabilité du centre hospitalier universitaire de Grenoble devant la Tribunal administratif de Grenoble qui, par un jugement du 16 octobre 2009, a rejeté leur demande ;

Considérant d'une part que si, au cours de l'intervention du 28 août 2001, le chirurgien du centre hospitalier de Grenoble a sectionné le nerf facial, provoquant une paralysie de la partie droite du visage de Sixtine, il résulte de l'instruction et notamment des conclusions de l'expert, que ne suffisent pas à remettre en cause les documents produits par les requérants, que cette lésion n'est pas imputable à une faute médicale dans le déroulement de cette opération, qui était nécessaire et a été pratiquée sans erreur technique, mais résulte d'une anomalie de trajet du nerf facial ; que la survenance d'une telle lésion, connue mais rare, n'était pas prévisible alors, qu'à l'époque, la réalisation avant l'intervention d'un repérage par scanner du nerf facial n'était pas recommandée pour ce type de chirurgie ;

Considérant d'autre part que lorsque l'acte médical envisagé, même accompli conformément aux règles de l'art, comporte des risques connus de décès ou d'invalidité, le patient doit en être informé dans des conditions qui permettent de recueillir son consentement éclairé ; que si cette information n'est pas requise en cas d'urgence, d'impossibilité ou de refus du patient d'être informé, la seule circonstance que les risques ne se réalisent qu'exceptionnellement ne dispense pas les praticiens de leur obligation ; que le défaut d'information ouvre droit à réparation lorsqu'il a eu pour conséquence la perte par le patient d'une chance d'échapper, en refusant de subir l'acte qui lui était proposé, au dommage qui a résulté pour lui de la réalisation d'un risque de décès ou d'invalidité ; que l'intervention subie par Sixtine présentait un risque connu de paralysie faciale ; que ce risque devait être porté à la connaissance des intéressés ; que le centre hospitalier de Grenoble n'apporte pas la preuve, qui lui incombe, que ce risque a été porté à leur connaissance ; qu'il a ainsi commis une faute de nature à engager sa responsabilité ; qu'il ne résulte toutefois pas de l'instruction que, compte tenu de l'évolution de l'affection dont Sixtine était atteinte et de la nécessité d'intervenir chirurgicalement, de l'absence d'alternative à ce geste chirurgical et des risques de complication encourus en cas de renoncement à toute intervention, et alors que le risque de survenance d'une paralysie faciale est qualifié de rare par l'expert, ses parents se seraient opposés à l'opération en litige ; que, dans ces circonstances, la faute commise par le centre hospitalier de Grenoble n'a pas entraîné de perte de chance pour Sixtine, de se soustraire au risque qui s'est réalisé ; que toute indemnisation à ce titre doit être écartée ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme A ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal a rejeté leur demande ; que les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent donc qu'être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M et Mme A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme Régis A, au centre hospitalier universitaire de Grenoble et à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 16 décembre 2010 à laquelle siégeaient :

M. Vivens, président de chambre,

Mme Steck-Andrez, président-assesseur,

M. Picard, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 6 janvier 2011.

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N° 09LY02774


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09LY02774
Date de la décision : 06/01/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. VIVENS
Rapporteur ?: M. Vincent-Marie PICARD
Rapporteur public ?: Mme MARGINEAN-FAURE
Avocat(s) : SCP BENICHOU-PARA-TRIQUET DUMOULIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2011-01-06;09ly02774 ?
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