Vu la requête, enregistrée le 11 décembre 2008, présentée pour M. A, domicilié ... ;
M. A demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0403386 du 23 octobre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande, tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée, ainsi que des pénalités y afférentes, qui ont été mises à sa charge au titre des années 2000 et 2002 par avis de mise en recouvrement du 30 avril 2004 ;
2°) de le décharger des impositions complémentaires susvisées, et d'ordonner la restitution des sommes payées à ce titre ;
Il soutient :
- que le jugement attaqué est irrégulier, dès lors, d'une part, qu'il ne porte pas les visas des mémoires déposés, en méconnaissance de l'article R. 741-2 du code de justice administrative, d'autre part, qu'il n'a pas statué sur l'ensemble des moyens dont il était saisi ;
- s'agissant de la procédure d'imposition :
o que les notifications de redressement en litige sont insuffisamment motivées ;
* qu'à cet égard, l'administration ne saurait se prévaloir d'une taxation d'office, en l'espèce, pour en déduire le caractère inopérant de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, dès lors que le vérificateur a expressément indiqué, en tête de la notification de redressement, qu'il entendait se placer dans le cadre de la procédure contradictoire prévue à l'article L. 55 ;
* que par cette mention, le service a pris formellement position sur l'appréciation d'une situation de fait, au regard d'un texte fiscal, laquelle s'impose ensuite à l'administration en vertu des dispositions de l'article L. 80 B dudit livre ;
* qu'enfin, l'administration ne saurait procéder à une substitution de procédure en cours de contrôle, les jurisprudences citées par l'administration, en première instance, n'étant pas transposables dès lors qu'elles sont relatives à des cas de passage de la taxation d'office à la procédure contradictoire, hypothèse inverse de celle rencontrée en l'espèce ;
o que rien ne prouve que le service a bien transmis à la Direction de la législation fiscale la demande de solution avant mise en recouvrement dont, sous son couvert, le requérant avait saisi ce dernier, puisque les impositions litigieuses ont été mises en recouvrement sans qu'aucune réponse de la Direction de la législation fiscale n'ait été transmise au requérant ;
- s'agissant du bien-fondé de l'imposition contestée :
o que le chiffre d'affaires d'une entreprise doit toujours être considéré comme TTC, même au titre d'une année au cours de laquelle cette entreprise a bénéficié du régime de la franchise de taxe sur la valeur ajoutée ;
o que ni le Tribunal ni l'administration n'ont répondu aux arguments avancés par le requérant sur ce point ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 6 juillet 2009, présenté pour le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, qui conclut au rejet de la requête ;
Il soutient que :
- le jugement attaqué est régulier ;
- la procédure d'imposition est régulière, dès lors que :
o l'administration fiscale est en droit de se prévaloir, à tout moment de la procédure, de la situation de taxation et d'évaluation d'office ; qu'est à cet égard sans incidence la circonstance que le vérificateur avait, initialement, expressément situé son contrôle dans le cadre de la procédure contradictoire, l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales étant inopérant en matière de garanties de procédure ;
o la notification de redressement est suffisamment motivée ; qu'elle précise notamment, contrairement à ce que soutient la requérante, si les chiffres d'affaires qu'elle mentionne sont HT ou TTC ; que la référence qui y est faite à l'article 293 B I du code général des impôts était suffisante pour mettre le contribuable à même de comprendre et discuter le redressement, sans qu'il ait été besoin d'y viser au surplus l'article 293 D I du même code ;
o dans sa réponse aux observations du 20 octobre 2003, le service a répondu aux observations non seulement écrites, mais au surplus orales, du contribuable, alors que s'agissant de ces dernières, l'administration n'y était en tout état de cause pas légalement tenue ;
o l'administration n'était pas tenue de répondre aux observations formulées postérieurement à sa lettre n° 3926 portant réponse aux observations formulées dans le délai de 30 jours prévu à l'article R.* 57-1 du livre des procédures fiscales ;
o la possibilité d'obtenir une réponse de la Direction de la législation fiscale, avant mise en recouvrement, n'est pas au nombre des garanties offertes par la loi et le règlement aux contribuables vérifiés ;
- l'imposition contestée est fondée, dès lors que :
o le chiffre d'affaires d'une entreprise qui ne collecte pas de TVA est, par construction, HT ;
o tel est le cas des bénéficiaires de la franchise en base de TVA ;
Vu le mémoire enregistré le 25 février 2010, présenté pour M. A, qui conclut aux mêmes fins que précédemment, par les mêmes moyens, et en outre à la condamnation de l'Etat à lui payer une somme de 1500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative;
Vu l'ordonnance en date du 12 mars 2010 fixant la clôture d'instruction au 16 avril 2010, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la sixième directive 77/388/CEE, du 17 mai 1977, et notamment son article 24 ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 23 novembre 2010 :
- le rapport de M. Lévy-Ben Cheton, premier conseiller ;
- et les conclusions de Mme Jourdan, rapporteur public ;
Considérant que M. A, qui exploitait un restaurant à Grenoble, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à la suite de laquelle l'administration fiscale a remis en cause, pour les années 2000 et 2002, le bénéfice du régime de la franchise en base de la taxe sur la valeur ajoutée, prévu par les dispositions de l'article 293 B du code général des impôts en considérant que le chiffre d'affaires réalisé par l'entreprise s'établissait à 88 031 euros pour 1999 et 91 134 euros pour 2001, années au cours desquelles elle avait bénéficié de la franchise en base, excédant ainsi les limites de 500 000 francs et de 76 300 euros, respectivement, prévus au 1 du I de l'article 293 B du code général des impôts ; qu'il relève appel du jugement du 23 octobre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée ainsi mis à sa charge ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 741-2 du code de justice administrative : La décision mentionne que l'audience a été publique (...) / Elle contient le nom des parties, l'analyse des conclusions et mémoires ainsi que les visas des dispositions législatives ou réglementaires dont elle fait application. (... ) ; que si l exemplaire du jugement reçu par le demandeur ne comporte pas l'analyse des mémoires des parties, cette analyse figure au dossier de première instance dans un document joint à la minute dudit jugement ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que ledit jugement serait irrégulier faute de comporter une telle analyse doit être écarté ;
Considérant, en second lieu, que le jugement attaqué répond à l'ensemble des conclusions et des moyens opérants des parties ; que, dès lors que le Tribunal n'est pas tenu de répondre à chacun des arguments formulés au soutien desdits moyens, M. A n'est pas fondé à soutenir que les premiers juges auraient entaché leur décision d'une omission à statuer ;
Sur le fond :
En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :
Considérant que l'administration fiscale est en droit de se prévaloir à tout moment devant le juge de l'impôt de la situation de taxation d'office dans laquelle était placé le contribuable en application du 3° de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales ; qu'il est constant que M. A n'a pas déposé, au titre des années 2000 et 2002, ses déclarations annuelles de taxe sur le chiffre d'affaires prévues au 3 de l'article 287 du code général des impôts ; qu'ainsi l'administration est fondée à se prévaloir de la situation de taxation d'office dans laquelle se trouvait M. A pour les années précitées ; que la circonstance qu'elle ait indiqué, dans la notification de redressement, suivre la procédure contradictoire, ne saurait être regardée comme une prise de position formelle à cet égard, l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales invoqué sur ce point par le requérant, n'étant pas applicable en matière de procédure d'imposition ;
Considérant qu'il y a lieu, par adoption des motifs retenus par les premiers juges, d'écarter les moyens, déjà présentés par le requérant, en première instance et repris en appel, tirés de ce que l'administration aurait insuffisamment motivé la notification de redressement et la réponse aux observations du contribuable, omis de répondre aux arguments avancés par le requérant, refusé de communiquer la réponse du service de la législation fiscale alors qu'il en avait fait la demande expresse, et de ce que l'interlocuteur départemental n'a pas fait état de cette réponse dans sa lettre du 13 avril 2004 ;
En ce qui concerne le bien-fondé de l'imposition :
Considérant qu'aux termes de l'article 293 B du code général des impôts dans sa rédaction applicable à l'année 2000 : I. - 1. Pour leurs livraisons de biens et leurs prestations de services, les assujettis établis en France bénéficient d'une franchise qui les dispense du paiement de la taxe sur la valeur ajoutée lorsqu'ils n'ont pas réalisé au cours de l'année civile précédente un chiffre d'affaires supérieur à : a. 500 000 F s'ils réalisent des livraisons de biens, des ventes à consommer sur place ou des prestations d'hébergement ; b. 175 000 F s'ils réalisent d'autres prestations de services. ( ...) ; que le même article prévoit, pour l'année d'imposition 2002, que pour leurs livraisons de biens et leurs prestations de services, les assujettis établis en France bénéficient du régime de la franchise en base s'ils n'ont pas réalisé au cours de l'année civile précédente un chiffre d'affaires supérieur à 76 300 euros s'ils réalisent des livraisons de biens, des ventes à consommer sur place ou des prestations d'hébergement et 27 000 euros s'ils réalisent d'autres prestations de services ; qu'aux termes de l'article 293 D du même code : I. Les chiffres d'affaires mentionnés aux I, II et IV de l'article 293 B sont constitués par le montant hors taxe sur la valeur ajoutée des livraisons de biens et des prestations de services effectuées au cours de la période de référence (...) ; qu'aux termes de l'article 293 E du même code : Les assujettis bénéficiant d'une franchise de taxe mentionnée à l'article 293 B ne peuvent opérer aucune déduction de la taxe sur la valeur ajoutée, ni faire apparaître la taxe sur leurs factures, notes d'honoraires ou sur tout autre document en tenant lieu. En cas de délivrance d'une facture, d'une note d'honoraires ou de tout autre document en tenant lieu par ces assujettis pour leurs livraisons de biens et leurs prestations de services, la facture, la note d'honoraires ou le document doit comporter la mention : TVA non applicable, article 293 B du CGI. ; qu'il résulte de ces dispositions que l'assujetti bénéficiant de la franchise prévue à l'article 293 B n'est pas redevable de la TVA, qu'il ne peut ni collecter, ni déduire ; que le chiffre d'affaires qu'il réalise au cours d'une année civile placée sous le bénéfice de cette franchise est en conséquence nécessairement exprimé hors taxe ;
Considérant que le chiffre d'affaires réalisé par l'entreprise individuelle de M. A, qui s'établissait à 88 031 euros pour l'année 1999 et 91 134 euros pour l'année 2001, excédait le montant du seuil prévu respectivement pour chacune d'elles au 1 du I de l'article 293 B du code général des impôts ; qu'ainsi c'est à bon droit que l'administration a estimé que M. A était redevable de la taxe sur la valeur ajoutée au titre des années 2000 et 2002, et a procédé au rappel des droits correspondants ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, les conclusions qu'il présente au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A et au ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat.
Délibéré après l'audience du 23 novembre 2010 à laquelle siégeaient :
M. Chanel, président de chambre,
MM. Pourny et Lévy-Ben Cheton, premiers conseillers.
Lu en audience publique, le 14 décembre 2010.
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N° 08LY02742