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14/12/2010 | FRANCE | N°08LY02124

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 14 décembre 2010, 08LY02124


Vu la requête, enregistrée le 11 septembre 2008, présentée pour M. Jean-Pierre A, domicilié ... ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0503926 du Tribunal administratif de Grenoble

du 19 juin 2008 en tant que, par ce jugement, le Tribunal s'est borné à condamner la commune de La Bathie à lui verser une somme de 1 345,50 euros, outre intérêts et capitalisation des intérêts, en réparation des préjudices résultant du retrait illégal, par un arrêté du 14 septembre 2004, du permis de construire qui lui a été délivré le 12 janvier 2004

;

2°) de condamner la commune de La Bathie à lui verser :

. une somme de 46 472,16 euros...

Vu la requête, enregistrée le 11 septembre 2008, présentée pour M. Jean-Pierre A, domicilié ... ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0503926 du Tribunal administratif de Grenoble

du 19 juin 2008 en tant que, par ce jugement, le Tribunal s'est borné à condamner la commune de La Bathie à lui verser une somme de 1 345,50 euros, outre intérêts et capitalisation des intérêts, en réparation des préjudices résultant du retrait illégal, par un arrêté du 14 septembre 2004, du permis de construire qui lui a été délivré le 12 janvier 2004 ;

2°) de condamner la commune de La Bathie à lui verser :

. une somme de 46 472,16 euros, outre intérêts et capitalisation des intérêts, en réparation des préjudices résultant de ce retrait ;

. une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

M. A soutient que :

- les premiers juges ont dénaturé les éléments du dossier et commis une erreur manifeste d'appréciation ; que c'est à tort que le Tribunal a jugé que la lettre qu'il a adressée le 7 septembre 2004 à la direction départementale de l'équipement a pu induire le maire en erreur sur ses intentions et que son comportement est de nature à exonérer pour moitié la commune de La Bathie de sa responsabilité ; qu'aucune circonstance ne peut exonérer cette dernière de son entière responsabilité ;

- le Tribunal a entaché sa décision d'une erreur de droit ou, à tout le moins, d'une erreur manifeste d'appréciation ; que l'inconstructibilité du terrain n'est pas contestable, et n'a d'ailleurs pas été contestée par la commune en première instance ; que la perte de valeur vénale du terrain ne présente aucun caractère éventuel ; que la commune devra ainsi lui verser la somme de 36 101,16 euros, correspondant au coût d'acquisition du terrain et aux frais en résultant ;

- le remboursement d'une année de loyers est justifié, dès lors que, ne pouvant mettre en oeuvre le permis retiré, son épouse et lui-même ont été obligés de louer un logement ; que la commune devra ainsi être condamnée à lui verser une somme de 7 680 euros ;

- la commune étant pleinement responsable, il est fondé à réclamer le remboursement de la totalité des honoraires d'architecte qui ont été exposés en pure perte pour l'établissement du projet de construction initial ; que la Cour devra ainsi condamner la commune à lui verser une somme de 2 691 euros ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 23 juin 2009, présenté pour la commune de La Bathie, qui demande à la Cour :

- de rejeter la requête ;

- par la voie de l'appel incident, d'annuler le jugement attaqué en tant que, par ce jugement, le Tribunal administratif de Grenoble l'a condamnée à verser à M. et Mme A une somme de 1 345,50 euros, outre intérêts et capitalisation des intérêts, et de rejeter la demande de condamnation présentée par M. et Mme A devant le Tribunal ;

- de condamner M. et Mme A à lui verser une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La commune soutient que :

- elle n'a pas entendu retirer le permis de construire en raison d'une illégalité, mais à la demande des bénéficiaires ; que la délivrance du permis constitue le fait générateur de la taxe locale d'équipement et de la taxe départementale des espaces naturels sensibles ; qu'en demandant au maire un certificat attestant du non commencement des travaux et à la direction départementale de l'équipement l'annulation d'un avis d'imposition, les intéressés se sont clairement placés sous l'empire de la procédure prévue à l'article 1723 quinquies du code général des impôts ; que, par suite, la demande du 7 septembre 2004 ne pouvait qu'être regardée comme une demande de retrait du permis du 12 janvier 2004 ; qu'il appartenait à M. et Mme A de contester la décision de retrait, qui indique qu'elle intervient en raison de l'abandon du projet, ce qu'il n'ont pas fait ; que ce n'est que le 26 septembre 2005 qu'ils ont, pour la première fois, déclaré ne pas avoir formulé une demande de retrait ; que, par suite, le Tribunal ne pouvait estimer que le retrait est fautif et engage sa responsabilité ; qu'à tout le moins, la part de responsabilité des époux A devra être sensiblement majorée ;

- les frais d'architecte n'ont pas été exposés en pure perte ; que la seconde demande, qui a été rejetée par une décision dont la légalité n'a pas été contestée, a exploité ce travail ; que la perte définitive desdits frais supposerait une impossibilité de construire ; que les époux A ont renoncé de leur propre chef à ajouter, au projet architectural déjà élaboré, les mesures de protection nécessaires ;

- le terrain n'est pas définitivement inconstructible, des mesures de précaution contre les chutes de pierres étant simplement nécessaires ; que M. et Mme A n'indiquent pas en quoi la somme demandée correspondait à la valeur d'un terrain constructible ; qu'ils ont gardé la propriété du terrain qu'ils n'ont jamais tenté de vendre et pourraient céder à une personne souhaitant proposer un projet assorti des meures nécessaires ;

- la réalité des frais de loyers invoqués et le lien de causalité entre ces frais et la faute retenue par les premiers juges ne sont pas établis ; que le raisonnement du Tribunal n'est même pas critiqué ;

En application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, par une ordonnance du 7 janvier 2010, la clôture de l'instruction a été fixée au 23 février 2010 ;

En application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, par une ordonnance du 22 septembre 2010, la clôture de l'instruction a été reportée au 27 octobre 2010 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 23 novembre 2010 :

- le rapport de M. Chenevey, premier conseiller ;

- les observations de Me Rigoulot, avocat de M. A, et celles de Me Xynopoulos, avocat de la commune de La Bathie ;

- les conclusions de M. Besson, rapporteur public ;

- et la parole ayant à nouveau été donnée aux parties présentes ;

Considérant que, par un arrêté du 12 janvier 2004, M. et Mme A ont obtenu du maire de la commune de La Bathie un permis pour la construction de deux maisons jumelées ; que ce permis de construire a été retiré par un arrêté du 14 septembre 2004 de ce maire ; que, le 16 novembre 2004, M. et Mme A ont déposé une nouvelle demande de permis, en vue de la construction de deux logements ; que cette demande a été rejetée par un arrêté du 3 mai 2005 du maire de la commune de La Bathie, au motif que le projet est de nature à porter atteinte à la sécurité publique, en raison d'un risque de chutes de pierres ; que M. et Mme A, qui n'ont pas contesté ce refus, ont saisi le Tribunal administratif de Grenoble d'une demande tendant à la réparation des préjudices, chiffrés à la somme de 46 472,16 euros, qui résulteraient du retrait illégal du permis de construire précité qu'ils avaient obtenu le 12 janvier 2004 ; que, par un jugement du 19 juin 2008, le Tribunal a estimé que ce retrait, intervenu plus de quatre mois après la délivrance du permis et en l'absence de toute demande des bénéficiaires, est entaché d'illégalité et, par suite, fautif et de nature à engager la responsabilité de la commune de La Bathie ; que le Tribunal a toutefois estimé que les époux A ont commis une faute en adressant à l'administration une lettre de nature à l'induire en erreur sur leurs intentions et que cette faute est de nature à exonérer de moitié la commune de sa responsabilité ; qu'en conséquence, le Tribunal, qui n'a retenu qu'un chef de préjudice sur les trois invoqués par M. et Mme A, a condamné la commune à verser à ces derniers une somme de 1 345,50 euros, outre intérêts et capitalisation des intérêts ; que, par la présente requête, M. A demande à la Cour d'annuler le jugement du 19 juin 2008, en tant qu'il s'est borné à condamner la commune de La Bathie à verser cette somme de 1 345,50 euros, et de condamner cette commune à lui verser ladite somme de 46 472,16 euros, outre intérêts et capitalisation des intérêts ; que, par la voie de l'appel incident, la commune de La Bathie demande l'annulation du même jugement, en tant qu'il a procédé à cette condamnation, et le rejet de la demande des époux A ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la décision du 14 septembre 2004 retirant le permis de construire que les époux A avaient obtenu le 12 janvier 2004 n'a été contestée qu'après le refus opposé le 3 mai 2005 par le maire de la commune de La Bathie à la seconde demande de permis ; que la demande préalable d'indemnité du 31 mai 2005 des époux A mentionne que le projet autorisé par le permis du 12 janvier 2004 n'a pu débuter pour des raisons budgétaires et qu'un nouveau projet, moins onéreux, a dû être élaboré ; que cette demande est fondée sur le fait que le maire n'aurait pas dû délivrer un permis, lequel a entraîné la réitération de la promesse de vente et l'acquisition du terrain, et non sur l'illégalité du retrait dudit permis, qui n'a été contesté, pour la première fois, que dans la demande qui a été adressée au Tribunal, que ce dernier a enregistrée le 25 juillet 2005 ; que, dans ces conditions, en l'absence de toute élément susceptible de permettre de penser que les époux A, même après le refus opposé le 3 mai 2005 à leur seconde demande, étaient en mesure et auraient sérieusement envisagé de mettre en oeuvre le projet autorisé par le permis du 12 janvier 2004, M. A ne peut soutenir que le retrait de ce permis a entraîné des préjudices que la commune de La Bathie doit réparer, résultant de la perte de valeur vénale du terrain, des loyers supplémentaires exposés et des frais d'architecte inutilement engagés ; qu'en conséquence, la demande de condamnation de cette commune à réparer ces préjudices doit être rejetée ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la commune de La Bathie est fondée à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Grenoble l'a condamnée à verser à M. et Mme A une somme de 1 345,50 euros, outre intérêts et capitalisation des intérêts ; qu'en conséquence, il y a lieu d'annuler les articles 1er, 2 et 3 du jugement attaqué et de rejeter les conclusions indemnitaires de M. et Mme A devant le Tribunal ;

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune de La Bathie, qui n'est pas, dans la présente instance, partie perdante, soit condamnée à payer à M. A la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de M. A le versement d'une somme quelconque au bénéfice de cette commune sur le fondement de ces mêmes dispositions ;

DECIDE :

Article 1er : Les articles 1er, 2 et 3 du jugement du Tribunal administratif de Grenoble du 19 juin 2008 sont annulés.

Article 2 : La demande de M. et Mme A devant le Tribunal est rejetée.

Article 3 : Les conclusions des parties tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme Jean-Pierre A et à la commune de La Bathie.

Délibéré après l'audience du 23 novembre 2010 à laquelle, siégeaient :

M. Bézard, président de chambre,

M. Chenevey et Mme Chevalier-Aubert, premiers conseillers.

Lu en audience publique, le 14 décembre 2010.

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N° 08LY02124

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08LY02124
Date de la décision : 14/12/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. BEZARD
Rapporteur ?: M. Jean-Pascal CHENEVEY
Rapporteur public ?: M. BESSON
Avocat(s) : BERTRAND PEYROT et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2010-12-14;08ly02124 ?
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