Vu la requête, enregistrée le 26 mai 2008, présentée pour M. A, domicilié ... ;
M. A demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0302713 du 28 décembre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 1997, 1998 et 1999 ;
2°) de prononcer la décharge des impositions contestées ;
3°) de condamner l'Etat à l'indemniser à hauteur de 370 000 euros à raison de la faute des services fiscaux ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
M. A soutient :
- sur la régularité de la procédure d'imposition, que la procédure de visite et de saisie prévue à l'article L. 16 B qui lui a été appliquée viole l'article 6 § 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que la garantie prévue à l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales a été méconnue ainsi que l'instruction 13 L-6-06 du 21 septembre 2006 dès lors que l'administration fiscale ne lui a pas communiqué les documents qu'elle avait recueillis auprès des tiers ; que la taxation d'office lui a été irrégulièrement appliquée dès lors qu'il a répondu à la demande de justifications ; que la garantie prévue au VI de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales a été méconnue ;
- sur le bien-fondé de l'imposition, que la domiciliation de la société Argos Révision Conseil rejaillit sur sa propre domiciliation fiscale en Suisse ; qu'il est en droit de se prévaloir des pièces comptables de la société Argos Révision Conseil dès lors que sa comptabilité était régulière et sincère au cours des années en litige ; qu'il est donc fondé à se prévaloir tant des éléments inscrits par cette société que des éléments qu'elle n'y a pas fait figurer ; qu'il justifie de l'origine des revenus taxés en tant que revenus d'origine indéterminée ;
- sur la responsabilité des services fiscaux, qu'il établit avoir subi un préjudice moral, à hauteur d'une somme de 30 000 euros, un préjudice pour se défendre, à hauteur d'un montant de 40 000 euros, et un préjudice de 300 000 euros pour perte d'emploi et atteinte à sa réputation, à raison des dysfonctionnements de l'administration fiscale ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire, enregistré le 12 février 2009, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique, qui conclut au rejet de la requête ;
Le ministre soutient que la seule circonstance que M. A n'avait pas encore la possibilité de faire appel de l'ordonnance autorisant la procédure de visite et saisie prévue à l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales au moment où il a fait l'objet d'une telle procédure n'entache pas cette procédure d'illégalité ; que l'administration a respecté tant ses obligations d'information que de communication ; que la procédure de taxation d'office prévue par les articles L. 16 et L. 69 du livre des procédures fiscales a été régulièrement mise en oeuvre à l'égard des crédits demeurés inexpliqués dès lors que requérant n'a pas répondu dans les délais à la demande de justifications ; que le moyen tiré de la violation du VI de l'article L. 16 B est inopérant en application du principe d'indépendance des procédures ; que la domiciliation fiscale de la société Argos Révision Conseil est sans incidence sur le bien-fondé des impositions ; qu'au demeurant, cette société exerçait son activité en France et y est donc imposable en vertu du I de l'article 209 du code général des impôts et de la convention franco-suisse du 9 septembre 1966 ; que c'est à bon droit que l'administration a estimé que la comptabilité présentée par M. A était affectée de graves irrégularités ; que le détournement de chèque est imposable sur le fondement de l'article 109-1-2° du code général des impôts ; que le montant des bénéfices reconstitués est imposable dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers en vertu de l'article 109-1-1° du code général des impôts dès lors que le requérant était le seul maître de l'affaire ; que M. A ne démontre pas que les résultats pour les exercices 1997, 1998 et 1999 seraient inférieurs à ceux déterminés par le vérificateur ; qu'il n'apporte pas la preuve, qui lui incombe, de l'origine des revenus imposés d'office en tant que revenus d'origine indéterminée ; que s'agissant du compte courant d'associé, à supposer que les sommes de 616,45 et 2416,50 francs suisses versés, respectivement, les 13 décembre et 24 août 1999 ne puissent être imposées en tant que revenus d'origine indéterminée, il conviendrait de les imposer, sur le fondement de l'article 109-1-2° du code général des impôts dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers dès lors que toutes les garanties procédurales ont été respectées ; que les constatations de fait constituant le support nécessaire de l'arrêt du 15 février 2006, devenu définitif, par lequel la Cour d'appel de Chambéry a condamné M. A pénalement sont revêtues de l'autorité absolue de la chose jugée ;
Vu le mémoire, enregistré le 6 octobre 2009, présenté par le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, qui conclut au rejet de la demande indemnitaire formée par M. A ;
Il soutient que de telles conclusions sont irrecevables comme nouvelles en appel ainsi qu'au regard des dispositions de l'article R. 772-1 du code de justice administrative et de celles de l'article R. 421-1 du code de justice administrative en l'absence de réclamation préalable susceptible de lier le contentieux ; qu'elles sont prescrites au regard de l'article 1er de la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 ; qu'elles sont au surplus infondées dès lors que le requérant n'établit ni la faute des services fiscaux ni le préjudice en résultant ;
Vu le mémoire, enregistré le 9 octobre 2009, présenté pour M. Yves A, qui conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens ;
Il soutient en outre que l'administration n'a pas appliqué loyalement la documentation n°5 B 8221 du 1er août 2001 relative aux deux hypothèses dans le cas où le contribuable a répondu dans le délai à une demande de communication et, à titre subsidiaire, en admettant même que la société Argos Révision Conseil puisse être regardée comme un sujet de droit français, il ne saurait être imposé sur l'ensemble des rémunérations perçues de cette société en vertu de l'article 18 de la convention franco-suisse du 9 septembre 1966 ;
Vu la lettre du 12 octobre 2009 par laquelle, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, les parties ont été informées de ce que la Cour était susceptible de soulever d'office l'irrecevabilité des conclusions indemnitaires de la requête, nouvelles en appel, et les observations du requérant enregistrées le 26 octobre 2009;
Vu le mémoire, enregistré le 19 novembre 2009, présenté par le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, qui conclut comme précédemment, par les mêmes moyens ;
Il soutient en outre que le requérant ne saurait prétendre que le service vérificateur n'aurait pas fait application de la doctrine administrative n° 5 B 8221 du 1er août 2001 dans la mesure où il n'a fourni aucun élément de réponse quant à la nature des crédits bancaires demeurés injustifiés en litige ; que le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure de redressement diligentée est inopérant et manque en fait ; que le requérant n'est pas fondé à soutenir que la question du bien-fondé des rappels d'impôts qui lui ont été personnellement assignés serait exclusivement liée à celle de la domiciliation fiscale de la Sarl Argos Révision Conseil ; qu'au demeurant, le requérant ne saurait valablement invoquer la motivation des sanctions fiscales à l'appui de sa demande au titre du bien-fondé des impositions ;
Vu le mémoire, enregistré le 29 juin 2010, présenté pour M. A, qui conclut aux mêmes fins que précédemment et demande à bénéficier de la question prioritaire de constitutionnalité posée par le Conseil d'Etat dans sa décision n° 338028 du 9 juin 2010 ;
Vu l'ordonnance du 23 septembre 2010 fixant la clôture d'instruction au 15 octobre 2010 à 16h30 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la Constitution, notamment son article 61-1 ;
Vu l'ordonnance n°58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée ;
Vu la décision du Conseil Constitutionnel n° 3010-19/27QPC en date du 30 juillet 2010 ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la convention franco-suisse du 9 septembre 1966 en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune modifiée ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie, notamment son article 164 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 novembre 2010 :
- le rapport de M. Chanel, président ;
- et les conclusions de Mme Jourdan, rapporteur public ;
Considérant que M. A unique salarié de la société Argos Révision Conseil, société d'expertise comptable de droit suisse sise à Genève qu'il détenait avec son épouse, et par ailleurs actionnaire avec cette société de la société Gemini Conseil SA, société d'expertise comptable de droit français, ayant son siège au domicile de M. A en Haute-Savoie et sous-traitante des prestations d'expertise comptable à la société Argos Révision Conseil, a fait l'objet, le 20 avril 2000, d'une visite à son domicile personnel en application de l'article L.16 B du Livre des procédures fiscales ; qu'à l'issue de l'examen contradictoire de la situation fiscale personnelle du contribuable, le service vérificateur a réintégré au revenu imposable les rémunérations de gérance majoritaire imposables en France que M. A avait initialement déclarées en tant que revenus perçus hors de France, ses revenus de capitaux provenant de la Société Argos Révision Conseil, qu'il n'avait pas déclarés, et des revenus d'origine indéterminée à défaut de réponse suffisante aux demandes de justifications et d'éclaircissements qui lui avaient été adressées ; qu'il interjette appel du jugement du 28 décembre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande en décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1997, 1998 et 1999 ;
Sur les conclusions indemnitaires :
Considérant qu'en première instance, M. A n'a pas présenté de conclusions tendant à l'indemnisation du préjudice qu'il aurait subi à raison des dysfonctionnements des services fiscaux ; que, par suite, les conclusions indemnitaires de la requête, nouvelles en appel, doivent, en tout état de cause, être rejetées ;
Sur le surplus des conclusions :
En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :
S'agissant du moyen tiré de la violation de l'article 6 paragraphe 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales :
Considérant qu'aux termes du IV de l'article 164 de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 : 1. Pour les procédures de visite et de saisie prévues à l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales pour lesquelles le procès-verbal ou l'inventaire mentionnés au IV de cet article a été remis ou réceptionné antérieurement à la date d'entrée en vigueur de la présente loi, un appel contre l'ordonnance mentionnée au II de cet article, alors même que cette ordonnance a fait l'objet d'un pourvoi ayant donné lieu à cette date à une décision de rejet du juge de cassation, ou un recours contre le déroulement des opérations de visite ou de saisie peut, dans les délais et selon les modalités précisés au 3 du présent IV, être formé devant le premier président de la cour d'appel dans les cas suivants : (...) d) Lorsque, à partir d'éléments obtenus par l'administration dans le cadre d'une procédure de visite et de saisie, des impositions ont été établies ou des rectifications ne se traduisant pas par des impositions supplémentaires ont été effectuées et qu'elles font ou sont encore susceptibles de faire l'objet, à la date de l'entrée en vigueur de la présente loi, d'une réclamation ou d'un recours contentieux devant le juge, sous réserve des affaires dans lesquelles des décisions sont passées en force de chose jugée. Le juge, informé par l'auteur de l'appel ou du recours ou par l'administration, sursoit alors à statuer jusqu'au prononcé de l'ordonnance du premier président de la cour d'appel (...) 3. Dans les cas mentionnés aux 1 et 2, l'administration informe les personnes visées par l'ordonnance ou par les opérations de visite et de saisie de l'existence de ces voies de recours et du délai de deux mois ouvert à compter de la réception de cette information pour, le cas échéant, faire appel contre l'ordonnance ou former un recours contre le déroulement des opérations de visite ou de saisie. Cet appel et ce recours sont exclusifs de toute appréciation par le juge du fond de la régularité du déroulement des opérations de visite et de saisie. Ils s'exercent selon les modalités prévues respectivement aux articles L. 16 B et L. 38 du livre des procédures fiscales et à l'. En l'absence d'information de la part de l'administration, ces personnes peuvent exercer, selon les mêmes modalités, cet appel ou ce recours sans condition de délai (...) ;
Considérant qu'en application des dispositions précitées, lesquelles ont été déclarées conformes à la Constitution par le Conseil Constitutionnel, dans les motifs et le dispositif de sa décision n° 2010-19/27QPC en date du 30 juillet 2010, le juge judiciaire est seul compétent pour apprécier la régularité des ordonnances prises par le président du Tribunal de Grande Instance sur le fondement de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales ; que si M. A soutient que la procédure prévue par cet article dans sa rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de la loi du 4 août 2008 était contraire à l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, il ne résulte pas de l'instruction qu'il ait exercé les nouvelles voies de recours prévues par l'article 164 précité pour contester les actes relatifs aux visites et saisies effectuées en vertu de ces ordonnances, ni que l'intéressé n'ait pas été informé par l'administration de cette nouvelle voie de recours ; que, par suite, le requérant ne peut, en tout état de cause, utilement se prévaloir ni de l'irrégularité de ces ordonnances ni de la nullité des procès-verbaux rédigés le 20 avril 2000 ;
S'agissant du moyen tiré de ce que la procédure d'imposition de la société Argos Révision Conseil aurait violé le VI de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales :
Considérant qu'une éventuelle irrégularité de la procédure d'imposition de la société Argos Révision Conseil est sans influence sur la validité de l'imposition personnelle de son gérant ; qu'ainsi, à la supposer établie, la circonstance que l'administration fiscale aurait opposé à cette société les documents qu'elle avait saisis le 20 avril 2000 avant de lui adresser un avis de vérification de comptabilité ne saurait utilement être invoquée à l'appui de l'irrégularité de la procédure afférente aux impositions de M. A ;
S'agissant du moyen tiré de l'irrégularité de la procédure de taxation d'office au titre des années 1998 et 1999 :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction alors en vigueur : En vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu, l'administration peut demander au contribuable des éclaircissements. (...) Les demandes visées aux alinéas précédents doivent indiquer explicitement les points sur lesquels elles portent et mentionner à l'intéressé le délai de réponse dont il dispose en fonction des textes en vigueur. Elle peut également lui demander des justifications lorsqu'elle a réuni des éléments permettant d'établir que le contribuable peut avoir des revenus plus importants que ceux qu'il a déclarés... ; qu'aux termes de l'article L. 16 A du même livre : Les demandes d'éclaircissements et de justifications fixent au contribuable un délai de réponse qui ne peut être inférieur à deux mois. Lorsque le contribuable a répondu de façon insuffisante aux demandes d'éclaircissements ou de justifications, l'administration lui adresse une mise en demeure d'avoir à compléter sa réponse dans un délai de trente jours en précisant les compléments de réponse qu'elle souhaite ; qu'aux termes de l'article L. 69 dudit livre : (...) sont taxés d'office à l'impôt sur le revenu les contribuables qui se sont abstenus de répondre aux demandes d'éclaircissements ou de justifications prévues à l'article L. 16 ;
Considérant que M. A a fait l'objet d'un examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle portant sur ses revenus au titre des années 1997, 1998 et 1999 ; qu'il a été invité, par courrier du 26 juin 2001, qui lui a été notifié le 30 juin 2001, à justifier de l'origine de crédits constatés au cours des années 1998 et 1999 sur ses comptes bancaires ainsi que sur ses comptes courants dans les sociétés Argos Révision Conseil et Gemini Conseil ;
Considérant que M. A a fait parvenir aux services fiscaux, dans le délai de deux mois qui lui avait été imparti, une réponse en date du 27 août 2001, joignant 7 annexes sur lesquelles il a porté, au regard de chaque crédit, de simples explications quant aux opérations concernées, qui ont été considérées, faute d'êtres assorties de justificatifs, comme insuffisantes sur certains points par l'administration fiscale ; que celle-ci, en application de l'article L. 16 A du livre des procédures fiscales, a, par un courrier du 28 septembre 2001 notifié le 4 octobre 2001, mis en demeure l'intéressé d'apporter les précisions nécessaires dans le délai de trente jours ; que, par courriers en date des 3 et 8 novembre 2001, M. A a fourni des compléments sur certains des points en question ainsi que des annexes ; que les compléments ainsi apportés, pour volumineux qu'ils fussent, se bornaient à donner des explications dénuées de justifications probantes, le requérant n'ayant d'ailleurs produit ni devant le tribunal administratif ni devant la Cour les annexes à sa réponse du 3 novembre 2001 ; que, par suite, les services fiscaux ont pu à bon droit assimiler les explications du contribuable à un défaut de réponse au sens de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales, autorisant l'administration à le taxer d'office à raison des sommes en litige ; que, contrairement à ce que soutient le requérant, l'administration a respecté le délai minimum de deux mois prévu à l'article L. 16 A du livre des procédures fiscales ;
Considérant, enfin, que M. A se prévaut de la doctrine administrative 5 B 8221 au 1er août 2001 relative à la taxation d'office pour défaut de réponse aux demandes d'éclaircissements ou de justifications qui subordonneraient la mise en oeuvre de la procédure de taxation d'office sur le fondement de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales à la circonstance que les réponses apportées par les contribuables aux demandes d'éclaircissements équivalent à des défauts de réponse en raison de l'imprécision de leur contenu ; que, toutefois, cette instruction ne peut, en tout état de cause, être utilement invoquée sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales dès lors qu'elle concerne la procédure d'imposition ;
S'agissant du moyen tiré du droit de communication :
Considérant, en premier lieu, qu'il incombe à l'administration, quelle que soit la procédure d'imposition mise en oeuvre, et au plus tard avant la mise en recouvrement, d'informer le contribuable dont elle envisage soit de rehausser, soit d'arrêter d'office les bases d'imposition, de l'origine et de la teneur des renseignements obtenus auprès de tiers qu'elle a utilisés pour fonder les impositions, avec une précision suffisante pour permettre à l'intéressé de demander que les documents qui contiennent ces renseignements soient mis à sa disposition avant la mise en recouvrement des impositions qui en procèdent ; que, lorsque le contribuable en fait la demande à l'administration, celle-ci est tenue de lui communiquer les documents ou copies de documents contenant les renseignements obtenus auprès de tiers qui lui sont opposés ; qu'il en va ainsi alors même que le contribuable a pu avoir connaissance de ces renseignements ou de certains d'entre eux, afin notamment de lui permettre d'en vérifier, et le cas échéant d'en discuter, l'authenticité et la teneur ; que, toutefois, les documents contenant les renseignements obtenus auprès de tiers ne sauraient inclure les pièces et documents saisis au domicile même du contribuable dans le cadre de la procédure de visite domiciliaire instituée par l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales et qui, en application du V de cet article, lui ont été restitués dans les six mois de cette visite ; qu'il en résulte que, contrairement à ce que soutient le requérant, l'administration fiscale était en droit, suite à la mise en demeure du 29 juillet 2002 qu'il lui avait faite, de ne pas lui communiquer copie des pièces concernant la société Argos Révision Conseil, dont M. A était le gérant, que l'administration avait saisies à son domicile le 20 avril 2000 et qu'elle lui avait restituées dès le 29 mai 2000 ;
Considérant, en second lieu, que le requérant ne saurait utilement se prévaloir, ni, en tout état de cause, des dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales, qui sont postérieures à la mise en recouvrement des impositions, ni de la circonstance que l'administration a adopté une attitude différente vis-à-vis d'un autre contribuable, ni de la doctrine, contenue dans l'instruction du 21 septembre 2006 13 L-6-06, laquelle a trait à la procédure d'imposition ;
En ce qui concerne le bien-fondé des impositions :
S'agissant du moyen tiré de la domiciliation en Suisse de la société Argos Révision Conseil :
Considérant qu'il résulte des constatations faites par l'arrêt du 15 février 2006 de la Cour d'appel de Chambéry statuant sur les poursuites pour fraude fiscale engagées contre M. Yves A, que la SARL Argos Révision Conseil, créée en 1987, dont le siège est à Genève, qui est une société de droit Suisse avec un capital social fixé en francs suisses, possédait le siège de sa direction effective et de son établissement principal dans le département de la Haute-Savoie, d'abord à Annemasse, puis, à compter du 1er octobre 1998, à Vetraz-Monthoux ;
S'agissant des redressements opérés au titre des revenus de capitaux mobiliers :
Considérant qu'aux termes de l'article 109 du code général des impôts : 1. Sont considérés comme revenus distribués : 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital ; 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices. ;
Considérant, en premier lieu, que par un arrêt du même jour, la Cour de céans a jugé que l'administration fiscale a écarté à bon droit la comptabilité reconstituée a posteriori par la société Argos Révision Conseil après la visite domiciliaire effectuée le 20 avril 2000 et n'a retenu que les éléments comptables saisis à l'occasion de cette visite ; qu'en se bornant à se prévaloir, sans en justifier, d'éléments figurant dans la comptabilité que la société Argos Révision Conseil a communiquée postérieurement à la visite du 20 avril 2000, le requérant ne peut soutenir que le vérificateur a eu tort d'écarter cette comptabilité comme privée de tout caractère sincère et probant, et de procéder à la reconstitution des recettes de la SARL ayant abouti à mettre en évidence l'existence de bénéfices au titre desdits exercices ;
Considérant, en second lieu, qu'il résulte de l'instruction que M. et Mme A, cogérants de la SARL Argos Révision Conseil et détenteurs de l'intégralité des parts sociales durant les exercices litigieux, assuraient la direction effective de l'entreprise dont M. A était l'unique salarié ; qu'ils devaient donc être regardés comme étant les maîtres de l'affaire ; que ne fournissant aucun élément qui conduirait à retenir une autre personne comme ayant été bénéficiaire des distributions opérées par la SARL, M. A ne saurait soutenir que c'est à tort que l'administration lui a imputé, ainsi qu'à son épouse, le bénéfice de ces distributions, telles qu'elles résultent de la reconstitution de recettes à laquelle l'administration fiscale a procédé ; qu'ainsi, s'agissant des sommes imposées sur le fondement des dispositions du 2° du 1 de l'article 109 du code général des impôts, l'administration doit être regardée comme établissant que M. et Mme A ont effectivement appréhendé les distributions qu'elle a identifiées résultant de ce que M. A a endossé à son profit des chèques établis par la société Gemini Conseil pour un montant de 202 500 francs en 1998 et pour un montant de 147 000 francs en 1999, en règlement de factures établies par la SARL Argos Révision Conseil dès lors que ces chèques ne figurent pas sur les relevés bancaires de la SARL Argos Révision Conseil et n'avaient pas été enregistrés dans la comptabilité de la société saisie le 20 avril 2000 ;
S'agissant des crédits sur les comptes bancaires imposés en tant que revenus d'origine indéterminée :
Considérant, en premier lieu, qu'en application du dernier alinéa de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales, la charge de la preuve du caractère exagéré des impositions incombe à M. A dès lors que ce dernier a été régulièrement taxé d'office en application des articles L. 16 et L. 69 du livre des procédures fiscales ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 1649 A du code général des impôts : Les personnes physiques, les associations, les sociétés n'ayant pas la forme commerciale, domiciliées ou établies en France, sont tenues de déclarer, en même temps que leur déclaration de revenus ou de résultats, les références des comptes ouverts, utilisés ou clos à l'étranger (...) Les sommes, titres ou valeurs transférés à l'étranger ou en provenance de l'étranger par l'intermédiaire de comptes non déclarés dans les conditions prévues au deuxième alinéa constituent, sauf preuve contraire, des revenus imposables. ;
Considérant que pour contester le bien-fondé des redressements afférents aux crédits inscrits sur son compte de la Banque Nationale de Paris (BNP), M. A soutient que toutes les opérations proviennent de l'un de ses comptes de l'Union des Banques Suisses (UBS) ; que, toutefois, il n'est pas contesté qu'il n'avait pas déclaré ce compte suisse à l'administration fiscale ; que, dans ces conditions, il ne saurait être regardé comme apportant la preuve, qui lui incombe, que les sommes transférées depuis ce compte ne sont pas imposables ;
Considérant, en troisième lieu, que si le requérant soutient que des crédits, pour des montants de 62 560 francs au titre de l'année 1998 et de 6 135 francs au titre de l'année 1999, correspondent à des prélèvements sur le compte UBS de la société Argos Révision Conseil, il est constant que les écritures comptables de cette société n'attestent pas de versements opérés au profit de l'intéressé, qu'aucune écriture comptable n'a été enregistrée au débit du compte courant dont il était titulaire dans la Sarl Argos Révision Conseil et que le montant des retraits opérés sur le compte bancaire de la société ne concordent pas avec le montant des versements sur le compte de M. A ; qu'il suit de là que M. A n'apporte pas la preuve, qui lui incombe, du caractère non imposable desdits crédits ;
Considérant, en quatrième lieu, qu'en se bornant, sans étayer ses affirmations par le moindre élément, à expliquer que la somme de 1 500 francs suisses en date du 5 juillet 1999 correspond au reversement partiel sur son compte d'un prélèvement de 26 200 francs suisses du compte UBS de la société Argos Révision Conseil, le requérant ne justifie pas du caractère non imposable de cette somme ;
Considérant, en cinquième lieu, que M. A soutient que les montants de 7 000 francs suisses, 1 800 francs suisses, et 1 300 francs suisses figurant sur l'un de ses comptes UBS en Suisse les 11 mars, 5 juin et 14 décembre 1998, correspondent à des versements après prélèvements effectués d'un autre compte UBS, il n'en apporte pas la preuve, compte tenu des écarts entre les montants, en se bornant à produire des certificats selon lesquels il a prélevé les mêmes jours sur ce dernier compte des sommes, respectivement, de 8 600, 16 000 et 15 300 francs suisses ;
Considérant, en sixième lieu, que M. A soutient que la somme de 1 933,20 francs suisses provient de la remise d'un chèque émis par M. B en remboursement d'une avance de frais privés qu'il lui avait consentie et que le montant de 279,86 francs suisses correspond à un remboursement de frais professionnels par la société GO, la seule circonstance que les libellés UBS/B et Virt Go figurent sur des pièces saisies le 20 avril 2000 ne saurait suffire à apporter la preuve requise ;
Considérant, en septième lieu, qu'à supposer que M. A puisse être regardé comme établissant que, pour les années 1998 et 1999, les trois sous-comptes de l'un de ses comptes UBS enregistrent des débits cumulés de 832 772,45 francs français, cette seule circonstance ne saurait suffire à établir le caractère exagéré de l'imposition dès lors que, ainsi qu'il a été dit précédemment, il n'établit pas que l'administration aurait ignoré à tort les opérations de compte à compte ;
Considérant, en dernier lieu, que M. A n'apporte aucune explication pour justifier de l'origine des autres sommes figurant au crédit de ses comptes bancaires ;
S'agissant des sommes figurant sur le compte courant d'associé :
Considérant qu'au cours de l'examen contradictoire de la situation fiscale personnelle de M. et Mme A, l'administration a constaté que figuraient au crédit de son compte courant d'associé ouvert dans la comptabilité de la SARL Argos Révision Conseil dont ils étaient les gérants, des sommes d'origine indéterminée ; que ces sommes ont été imposées en tant que revenus d'origine indéterminée ; que le ministre demande en appel que la Cour opère une substitution de base légale afin de maintenir l'imposition des sommes dont s'agit dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ;
Considérant que lorsque l'administration demande au juge de l'impôt une substitution de base légale, il incombe au juge de s'assurer, avant d'accueillir le principe d'une telle substitution, que la matérialité des circonstances qui auraient autorisé l'administration à mettre en oeuvre la procédure dont elle se réclame résulte, en l'état de l'instruction et, notamment, des éléments qu'il revient, dans ce cas, à l'administration d'apporter afin de justifier du bien-fondé de sa prétention ;
Considérant, que les sommes inscrites au crédit d'un compte courant d'associé ont, sauf preuve contraire apportée par l'associé titulaire du compte, le caractère de revenus et ne sont alors imposables que dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ; que, par suite, l'administration n'était pas en droit d'imposer de telles sommes en tant que revenus d'origine indéterminée ;
Considérant, d'une part, que si M. A soutient que les sommes dont son compte courant dans les écritures de la société SARL Argos Révision Conseil a été crédité correspondraient à des opérations de compte à compte ou au remboursement par la société Argos Révision Conseil de la taxe sur la valeur ajoutée suisse qu'il avait réglée le 24 août 1999, et ainsi n'auraient pas le caractère d'un revenu imposable dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, il ne l'établit pas du seul fait que les opérations se sont déroulées le même jour, et par le récépissé du 24 août 1999 qu'il produit ;
Considérant, d'autre part, qu'il résulte de l'instruction que si la notification du redressement litigieux faisait état de la procédure de taxation d'office mise en oeuvre en application des dispositions des articles L. 16 et L. 69 du livre des procédures fiscales, l'administration a, en fait, mis en oeuvre la procédure contradictoire pour établir ce redressement ; que la notification de redressement du 23 novembre 2001 précisait que M. A disposait d'un délai de 30 jours pour lui faire parvenir ses observations, ce qu'au demeurant a fait l'intéressé ; que le courrier par lequel le service lui a notifié ce redressement était suffisamment motivé, au regard des exigences de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales ; qu'il n'est pas contesté que la réponse aux observations du contribuable du 6 février 2003 était motivée conformément aux dispositions du dernier alinéa de cet article ; qu'ainsi M. A n'a pas été privé d'une des garanties de procédure auxquelles il avait droit ;
Considérant qu'il s'ensuit qu'il y a lieu de maintenir l'imposition des sommes litigieuses sur le fondement de la nouvelle base légale invoquée par les services fiscaux ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à la décharge des impositions restant en litige ; que ses conclusions au titre de l'article L. 761 du code de justice administrative doivent être rejetées par voie de conséquence ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Yves A et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat.
Délibéré après l'audience du 9 novembre 2010 à laquelle siégeaient :
M. Chanel, président de chambre,
MM. Pourny et Segado, premiers conseillers.
Lu en audience publique, le 30 novembre 2010.
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N° 08LY01191