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23/11/2010 | FRANCE | N°10LY00522

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, Juge unique -1ère chambre, 23 novembre 2010, 10LY00522


Vu la requête, enregistrée par télécopie au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 8 mars 2010 et régularisée le 9 mars 2010, présentée pour M. Kamel A, de nationalité tunisienne, domicilié chez M. et Mme B, ... ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0906757 en date du 13 novembre 2009, par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 10 novembre 2009, par lequel le préfet de la Loire a ordonné sa reconduite à la frontière ;

2°)

d'annuler l'arrêté susmentionné pour excès de pouvoir ;

3°) d'enjoindre au préfet de la ...

Vu la requête, enregistrée par télécopie au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 8 mars 2010 et régularisée le 9 mars 2010, présentée pour M. Kamel A, de nationalité tunisienne, domicilié chez M. et Mme B, ... ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0906757 en date du 13 novembre 2009, par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 10 novembre 2009, par lequel le préfet de la Loire a ordonné sa reconduite à la frontière ;

2°) d'annuler l'arrêté susmentionné pour excès de pouvoir ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Loire de réexaminer sa situation dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros, au profit de son conseil, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Il soutient qu'il peut bénéficier de plein droit d'un titre de séjour sur le fondement de l'article 7 ter d) de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié, dès lors qu'il justifie résider habituellement en France depuis 1994 ; qu'ayant fixé le centre de sa vie privée en France, la mesure d'éloignement porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'à titre subsidiaire, il peut faire l'objet d'une régularisation sur le fondement des stipulations de l'article 7 quater de l'accord franco-tunisien ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les pièces desquelles il résulte que la requête a été notifiée au préfet de la Loire qui n'a pas produit d'observations ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle en date du 22 janvier 2010 accordant le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à M. A ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 octobre 2010 :

- le rapport de M. Bézard, président ;

- et les conclusions de M. Reynoird, rapporteur public ;

Considérant qu'aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : / 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement en France, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; (...) ;

Considérant qu'il est constant que M. A, de nationalité tunisienne, est entré irrégulièrement en France, selon ses dires, dans le courant de l'année 1994, et n'était pas titulaire d'un titre de séjour en cours de validité à la date de la mesure d'éloignement, le 10 novembre 2009 ; qu'ainsi, il entrait dans le cas prévu par les dispositions précitées du 1° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes des stipulations de l'article 7 ter de l'accord du 17 mars 1988 entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la république de Tunisie en matière de séjour et de travail modifié : d) reçoivent de plein droit un titre de séjour renouvelable valable un an et donnant droit à l'exercice d'une activité professionnelle dans les conditions fixées à l'article 7 : - Les ressortissants tunisiens qui, à la date d'entrée en vigueur de l'accord signé à Tunis le 28 avril 2008, justifient par tous moyens résider habituellement en France depuis plus de dix ans, le séjour en qualité d'étudiant n'étant pas pris en compte dans la limite de cinq ans (...) ; qu'indépendamment de l'énumération donnée par l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, des catégories d'étrangers qui ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français ou d'un arrêté de reconduite à la frontière, l'autorité administrative ne saurait légalement prendre une mesure de reconduite à la frontière à l'encontre d'un étranger que si ce dernier se trouve en situation irrégulière au regard des règles relatives à l'entrée et au séjour ; que, lorsque la loi, ou une convention internationale, prescrit que l'intéressé doit se voir attribuer de plein droit un titre de séjour, cette circonstance fait obstacle à ce qu'il puisse légalement faire l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière ;

Considérant que M. A n'établit pas être entré en France en 1994 ainsi qu'il le soutient ; que la production d'une facture, datée de 1996 qui, au demeurant, ne présente pas des garanties d'authenticité suffisantes, d'attestations de tiers, dénuées de valeur probante et établies postérieurement à la date de la décision litigieuse, qui se bornent à certifier que les signataires connaissent M. A depuis dix ans ou plus, ainsi que d'un certificat médical en date du 10 novembre 2009, au terme duquel l'intéressé serait suivi depuis une douzaine d'années, mais insuffisamment circonstancié, ne sont pas de nature à démontrer la réalité d'une résidence continue en France de M. A depuis dix ans ; que la circonstance que le consulat général de Tunisie en France ait délivré à M. A un passeport et une carte d'immatriculation en 1999 ne justifie que d'une seule présence ponctuelle de l'intéressé en France, dès lors qu'elle n'est corroborée d'aucune autre pièce probante ; qu'également, la production d'un projet de contrat de travail daté de 2002, ne prouve pas davantage la présence continue de l'intéressé en France ; qu'ainsi, à la date de l'arrêté attaqué, M. A ne pouvant se prévaloir des stipulations de l'article 7 ter d de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988, le préfet de la Loire n'a pas méconnu lesdites stipulations en ordonnant sa reconduite à la frontière ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ;

Considérant que, M. A fait valoir qu'il a fixé le centre de ses intérêts personnels en France où il réside depuis 1994, et qu'il y a tissé des liens amicaux, qu'il bénéficie d'une promesse d'embauche ; que, toutefois, ainsi qu'il a été dit, M. A n'établit pas l'ancienneté de son séjour en France ; que l'intéressé, qui n'a effectué aucune démarche en vue de régulariser sa situation, ne justifie pas d'une intégration particulière en France ; que la promesse d'embauche dont il se prévaut est sans incidence sur la légalité de la décision litigieuse, dès lors qu'elle a été établie postérieurement à la date de ladite décision ; qu'en tout état de cause, M. A a passé l'essentiel de son existence dans son pays d'origine où il ne conteste pas avoir conservé des attaches et la présence de ses parents, notamment ; que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment de ses conditions d'entrée et de séjour en France, et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté attaqué contesté n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels il a été pris ; qu'il n'a, ainsi, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant, en troisième et dernier lieu, que si M. A se prévaut des stipulations de l'article 7 quater de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 au terme duquel : Sans préjudice des dispositions du b) et du d) de l'article 7 ter, les ressortissants tunisiens bénéficient, dans les conditions prévues par la législation française, de la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale , il n'indique toutefois pas les dispositions de la législation française dont il entend se prévaloir ; qu'il s'ensuit qu'en tout état de cause, le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 7 quater de l'accord franco-tunisien précitées ne peut qu'être qu'écarté ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que ses conclusions aux fins d'injonction et de mise à la charge de l'Etat des frais exposés et non compris dans les dépens dans les conditions prévues par les dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées par voie de conséquence ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Kamel A et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration. Copie en sera adressée au préfet de la Loire.

Lu en audience publique, le 23 novembre 2010.

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N° 10LY00522

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : Juge unique -1ère chambre
Numéro d'arrêt : 10LY00522
Date de la décision : 23/11/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Alain BEZARD
Rapporteur public ?: M. REYNOIRD
Avocat(s) : BERTRAND HEBRARD

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2010-11-23;10ly00522 ?
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