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23/11/2010 | FRANCE | N°10LY00306

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, Juge unique -1ère chambre, 23 novembre 2010, 10LY00306


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon, le 10 février 2010, présentée pour Mme Naouel B épouse A, de nationalité algérienne, domiciliée ... ;

Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1000109 en date du 14 janvier 2010, par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 11 janvier 2010, par lequel le préfet de l'Isère a ordonné sa reconduite à la frontière ;

2°) d'annuler l'arrêté susmentionné pour excès

de pouvoir ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de réexaminer sa situation dans un délai d...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon, le 10 février 2010, présentée pour Mme Naouel B épouse A, de nationalité algérienne, domiciliée ... ;

Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1000109 en date du 14 janvier 2010, par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 11 janvier 2010, par lequel le préfet de l'Isère a ordonné sa reconduite à la frontière ;

2°) d'annuler l'arrêté susmentionné pour excès de pouvoir ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et de lui délivrer, dans un délai de huit jours, une autorisation provisoire de séjour de trois mois renouvelable, dans l'attente de l'exécution de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros au profit de son conseil, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Elle soutient que le jugement rendu par le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon est irrégulier en ce qu'il a omis à statuer sur les moyens tirés de l'erreur de droit et de l'erreur manifeste d'appréciation ; que la décision du préfet de l'Isère ordonnant sa reconduite à la frontière est entachée d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'en sa qualité d'épouse de ressortissant français, elle entre dans la catégorie d'étrangers qui bénéficie de plein droit de la délivrance d'un titre de séjour et ne peut faire l'objet d'une mesure d'éloignement ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les pièces desquelles il résulte que la requête a été notifiée au préfet de l'Isère qui n'a pas produit d'observations ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle en date du 19 mars 2010 accordant le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à Mme Naouel B épouse A ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, modifié, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 octobre 2010 :

- le rapport de M. Bézard, président ;

- et les conclusions de M. Reynoird, rapporteur public ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien : Les dispositions du présent article ainsi que celles des deux articles suivants, fixent les conditions de délivrance et de renouvellement du certificat de résidence aux ressortissants algériens établis en France ainsi qu'à ceux qui s'y établissent, sous réserve que leur situation matrimoniale soit conforme à la législation française. Le certificat de résidence d'un an portant la mention vie privée et familiale est délivré de plein droit : (...) 2) au ressortissant algérien, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que son entrée sur le territoire français ait été régulière, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français ; (...) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme A, de nationalité algérienne, a épousé en Algérie, le 18 juin 2008, un Français ; que ce mariage a été transcrit sur les registres de l'état civil français, le 2 avril 2009 ; qu'il n'est pas contesté que Mme A est régulièrement entrée en France, le 26 août 2009, sous couvert d'un visa court séjour, pour y rejoindre son époux ; qu'à la date de la décision litigieuse, Mme A remplissait ainsi les conditions lui ouvrant droit à l'obtention d'un certificat de résidence d'un an, sur le fondement des stipulations précitées du 2° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ; que, dès lors que l'intéressée devait se voir attribuer de plein droit un titre de séjour, cette circonstance fait obstacle à ce qu'elle puisse légalement être l'objet d'une mesure d'éloignement ; que, par suite, le préfet de l'Isère, en ordonnant la reconduite à la frontière de Mme A, le 11 janvier 2010, a méconnu lesdites stipulations ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a rejeté les conclusions de sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté de reconduite à la frontière du 11 janvier 2010 ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ; qu'aux termes de l'article L. 911-2 du même code : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette décision doit intervenir dans un délai déterminé et qu'aux termes de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Si l'arrêté de reconduite à la frontière est annulé (...) l'étranger est muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que le préfet ait à nouveau statué sur son cas. ;

Considérant, qu'à la suite de l'annulation d'un arrêté de reconduite à la frontière, il incombe au préfet, en application des dispositions précitées de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, non seulement de munir l'intéressé d'une autorisation provisoire de séjour mais aussi, qu'il ait été ou non saisi d'une demande en ce sens, de se prononcer sur son droit à un titre de séjour ; que, dès lors, il appartient au juge administratif, lorsqu'il prononce l'annulation d'un arrêté de reconduite à la frontière et qu'il est saisi de conclusions en ce sens, d'user des pouvoirs qu'il tient de l'article L. 911-2 du code de justice administrative pour fixer le délai dans lequel la situation de l'intéressé doit être réexaminée au vu de l'ensemble de la situation de droit et de fait existant à la date de ce réexamen ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu de prescrire au préfet de l'Isère de délivrer, sous quinze jours, à Mme A, une autorisation provisoire de séjour et de se prononcer sur sa situation dans le délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt ; sans qu'il y ait lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que Mme A a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que ce dernier renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros à son profit, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1000109, en date du 14 janvier 2010, du magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon est annulé.

Article 2 : La décision du 11 janvier 2010 du préfet de l'Isère portant reconduite à la frontière de Mme Naouel A est annulée.

Article 3 : Il est enjoint au préfet de l'Isère de délivrer dans le délai de quinze jours, à Mme A, une autorisation provisoire de séjour et de procéder à un nouvel examen de sa situation administrative dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, une somme de 1 000 euros au conseil de Mme A, sous réserve qu'il renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme A est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Naouel B épouse A, au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration et au préfet de l'Isère. Copie en sera adressée à Me Aboudahab.

Lu en audience publique, le 23 novembre 2010.

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N° 10L00306

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : Juge unique -1ère chambre
Numéro d'arrêt : 10LY00306
Date de la décision : 23/11/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Alain BEZARD
Rapporteur public ?: M. REYNOIRD
Avocat(s) : ABOUDAHAB

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2010-11-23;10ly00306 ?
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