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21/10/2010 | FRANCE | N°08LY02412

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 5, 21 octobre 2010, 08LY02412


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 6 novembre 2008, présentée pour la SOCIETE L'AUXILIAIRE, dont le siège est 50 cours Franklin Roosevelt à Lyon (69006) ;

la SOCIETE L'AUXILIAIRE demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 0302006 en date du 15 juillet 2008 du Tribunal administratif de Lyon en tant qu'il a condamné l'entreprise Gentilini et Berthon, son assurée, solidairement avec les sociétés EDA, Setec Bâtiment, entreprise Jacques et Entreprise ITL, à verser à la ville de Lyon la somme de 113 000 euros, en réparation du préjudice résul

tant des désordres affectant les gaines d'extraction d'air et de désenfumage de...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 6 novembre 2008, présentée pour la SOCIETE L'AUXILIAIRE, dont le siège est 50 cours Franklin Roosevelt à Lyon (69006) ;

la SOCIETE L'AUXILIAIRE demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 0302006 en date du 15 juillet 2008 du Tribunal administratif de Lyon en tant qu'il a condamné l'entreprise Gentilini et Berthon, son assurée, solidairement avec les sociétés EDA, Setec Bâtiment, entreprise Jacques et Entreprise ITL, à verser à la ville de Lyon la somme de 113 000 euros, en réparation du préjudice résultant des désordres affectant les gaines d'extraction d'air et de désenfumage de la cuisine du 6e étage de l'opéra, et la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de rejeter les conclusions de la Ville de Lyon en tant qu'elles sont dirigées contre l'entreprise Gentilini et Berthon ;

3°) de mettre à la charge de la Ville de Lyon une somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La SOCIETE L'AUXILIAIRE soutient que les désordres en litige ne sont que des désordres futurs, dès lors que, si l'on retient la notion de risque, ce risque ne s'est pas réalisé, et, si l'on retient la notion de désordre, ce désordre n'a pas été constaté pendant le délai décennal ; qu'ainsi la responsabilité des constructeurs ne peut être engagée sur le fondement des principes dont s'inspirent les articles 1792 et suivants du code civil, en l'absence de désordre rendant l'ouvrage impropre à sa destination ; que l'installation des éléments en litige n'était pas prévue par le cahier des clauses techniques particulières ; que, comme l'a relevé l'expert, la nature inappropriée des matériaux, du fait de la porosité des gaines, était apparente lors de la réception tant pour le maître d'ouvrage, qui disposait d'un service technique compétent, que pour l'équipe de maîtrise d'oeuvre ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les lettres du 28 mai 2009, adressées aux parties en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative ;

Vu, enregistré le 19 juin 2009, le nouveau mémoire présenté pour la SOCIETE L'AUXILIAIRE , qui conclut aux mêmes fins que précédemment et en outre à l'annulation du jugement du 15 juillet 2008 en tant qu'il a condamné l'entreprise Jacques, qui est également son assurée, par les mêmes moyens et en outre par les moyens qu'elle est subrogée dans les droits des entreprises Gentilini et Berthon et Jacques, dès lors qu'elle a versé, pour le compte de chacune d'entre elles, la somme de 22 900 euros à la société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics (SMABTP), qui a elle-même payé à la Ville de Lyon, la totalité du montant des condamnations prononcées par le Tribunal administratif de Lyon ;

Vu l'ordonnance du 16 février 2010 portant clôture de l'instruction au 18 mars 2010 ;

Vu, enregistré le 17 mars 2010, le mémoire présenté pour la Ville de Lyon, qui conclut au rejet de la requête et demande à la Cour de condamner la SOCIETE L'AUXILIAIRE à lui verser une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La Ville de Lyon soutient que la requérante, qui n'était pas partie en 1re instance, n'est pas recevable à faire appel, sauf à prouver qu'elle est subrogée dans les droits d'une partie ; qu'elle ne produit aucun acte justifiant de sa subrogation ; que le règlement effectué au profit de la SMABTP n'a été que partiel ; que la SMABTP, qui n'était pas elle-même partie à l'instance devant le Tribunal administratif, ne pouvait transmettre à la société requérante une subrogation qu'elle ne détenait pas ; que la subrogation, en tout état de cause, n'a pu intervenir qu'à la date du règlement des sommes en cause, intervenu le 1er avril 2009 ; qu'à la date où elle a formé appel la SOCIETE L'AUXILIAIRE ne disposait donc d'aucune subrogation ; qu'à supposer une telle subrogation, partielle, le délai d'appel était normalement expiré, si le jugement a été notifié à la société Gentilini et Berthon, comme à elle-même, le 3 septembre 2008 ;

Vu l'ordonnance du 30 mars 2010 portant réouverture de l'instruction ;

Vu, enregistré le 12 juillet 2010, le mémoire présenté pour la société Installation Thermique Lyonnaise, qui conclut à ce que la Cour annule le jugement du Tribunal administratif de Lyon en tant qu'il l'a condamnée, rejette la demande présentée par la ville de Lyon et mette à la charge de celle-ci les dépens ainsi qu'une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; elle soutient qu'aucun dommage n'était apparu pendant le délai de garantie décennale et que, comme l'a relevé l'expert, les malfaçons étaient apparentes à la réception ;

Vu, enregistré le 29 juillet 2010, le mémoire présenté pour la société anonyme Setec Bâtiment, qui conclut à ce que la Cour annule le jugement du Tribunal administratif de Lyon en tant qu'il l'a condamnée, rejette la demande présentée par la ville de Lyon et mette à la charge de celle-ci les dépens ainsi qu'une somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; elle soutient que l'encrassement des gaines de ventilation, survenu 14 ans après la réception, ne peut être regardé comme rendant l'ouvrage impropre à sa destination ; que la non conformité des gaines litigieuses est l'oeuvre du groupement de maîtrise d'oeuvre mis en place après la résiliation de son contrat, intervenue le 20 décembre 1990 ; qu'elle a été étrangère aux opérations de réception ;

Vu les lettres du 7 septembre 2010, adressées aux parties en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative ;

Vu, enregistré le 13 septembre 2010, le nouveau mémoire présenté pour la ville de Lyon, qui conclut aux mêmes fins que précédemment par les mêmes moyens et qui, en réponse au moyen d'ordre public évoqué par les lettres susvisées, indique qu'elle le confirme en faisant valoir que les conclusions d'appel provoqué seraient irrecevables au cas où la situation des parties qui les présentent ne serait pas aggravée ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil ;

Vu le code des assurances ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 septembre 2010 :

- le rapport de M. du Besset, président de chambre ;

- les observations de Me Sinai-Sinelnikoff, représentant la SOCIETE L'AUXILIAIRE, et de Me Duflot, représentant la Ville de Lyon ;

- les conclusions de Mme Gondouin, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée de nouveau à Me Sinai-Sinelnikoff et à Me Duflot ;

Considérant que, saisi par la Ville de Lyon d'une demande tendant à l'indemnisation du préjudice résultant pour elle des désordres affectant son opéra après l'opération de rénovation dont il avait fait l'objet, le Tribunal administratif de Lyon, après avoir ordonné une expertise par jugement du 18 janvier 2007, a constaté, par le jugement susvisé du 15 juillet 2008, que l'ouvrage était affecté d'une malfaçon de nature à le rendre impropre à sa destination ; qu'il a de ce fait condamné solidairement, sur le fondement de leur responsabilité décennale, la SARL EDA et la SA Setec Bâtiment, formant l'équipe de maîtrise d'oeuvre, et les entreprises Gentilini et Berthon, Jacques et ITL composant le groupement chargé des travaux de climatisation et désenfumage, à verser à la Ville de Lyon une somme de 113 000 euros, au titre de son préjudice, et une somme de 1 500 euros, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que, se présentant comme subrogée dans les droits des entreprises Gentilini et Berthon et Jacques, la SOCIETE L'AUXILIAIRE demande à la Cour d'annuler le jugement du 15 juillet 2008 en tant qu'il les a condamnées ;

Considérant qu'aux termes de l'article 1251 du code civil : La subrogation a lieu de plein droit : /(...)/ 3° Au profit de celui qui, étant tenu avec d'autres ou pour d'autres au paiement de la dette, avait intérêt de l'acquitter (...) ; qu'aux termes de l'article L. 121-12 du code des assurances : L'assureur qui a payé l'indemnité d'assurance est subrogé, jusqu'à concurrence de cette indemnité, dans les droits et actions de l'assuré contre les tiers qui, par leur fait, ont causé le dommage ayant donné lieu à la responsabilité de l'assureur (...) ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la Ville de Lyon, qui, bénéficiant d'une condamnation solidaire prononcée à l'encontre de plusieurs entreprises, pouvait demander à l'une ou l'autre de celles-ci de lui verser la totalité du montant de la condamnation, a réclamé, au titre de l'exécution du jugement du 15 juillet 2008, les sommes de 113 000 et 1 500 euros à la SA Setec Bâtiment ; que la société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics (SMABTP), qui, en tant qu'assureur de la SA Setec Bâtiment, a payé ces sommes à la Ville de Lyon le 21 janvier 2009, a ensuite demandé et obtenu le remboursement par la SOCIETE L'AUXILIAIRE, assureur des entreprises Gentilini et Berthon et Jacques, de deux cinquièmes de ces sommes ;

Considérant que les entreprises Gentilini et Berthon et Jacques n'ont été condamnées par le jugement attaqué qu'à payer une indemnité à la Ville de Lyon, sans que ce jugement ne définisse un quelconque partage de responsabilité ni ne les condamne à garantir la SA Setec Bâtiment de tout ou partie de la condamnation prononcée contre elle ; qu'ainsi la répartition de la charge finale de l'indemnité, qu'a effectuée elle-même la SMABTP, est étrangère à l'exécution de ce jugement ; que, dès lors, le paiement effectué par la SOCIETE L'AUXILIAIRE au profit de celle-ci n'a pas eu pour effet de la subroger dans les droits dont disposaient ses assurés ou la SMABTP pour contester ce jugement ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la requête de la SOCIETE L'AUXILIAIRE est irrecevable et doit être rejetée ;

Sur les appels provoqués :

Considérant qu'en l'absence d'aggravation de leur situation les appels provoqués des sociétés Installation Thermique Lyonnaise et Setec Bâtiment ne sont pas recevables ;

Sur les conclusions présentées au titre des frais non compris dans les dépens :

Considérant que, d'une part, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme quelconque soit mise à la charge de la Ville de Lyon, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance ; que, d'autre part, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre des sommes à la charge des autres parties au titre des frais non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SOCIETE L'AUXILIAIRE est rejetée.

Article 2 : Les conclusions d'appel provoqué présentées par les sociétés Installation Thermique Lyonnaise et Setec Bâtiment sont rejetées.

Article 3 : Les conclusions présentées par les parties au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SOCIETE L'AUXILIAIRE, à la Ville de Lyon, à la SARL EDA, à la SA Setec Bâtiment, à l'entreprise ITL, à l'entreprise Jacques et au ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire.

Délibéré après l'audience du 30 septembre 2010, où siégeaient :

- M. du Besset, président de chambre,

- M. Givord et Mme Verley-Cheynel, présidents,

- M. Arbarétaz, premier conseiller,

- Mme Vinet, conseiller.

Lu en audience publique, le 21 octobre 2010

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N° 08LY02412


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 5
Numéro d'arrêt : 08LY02412
Date de la décision : 21/10/2010
Type d'affaire : Administrative

Analyses

12-03 ASSURANCE ET PRÉVOYANCE. CONTENTIEUX. - SUBROGATION LÉGALE (ART. L. 121-12 DU CODE DES ASSURANCES) - CONDITIONS - PARTIE CONDAMNÉE SOLIDAIREMENT AVEC D'AUTRES À VERSER UNE INDEMNITÉ SANS DÉFINITION D'UN PARTAGE DE RESPONSABILITÉ. REMBOURSEMENT PARTIEL DE CETTE INDEMNITÉ PAR L'ASSUREUR DE CETTE PARTIE À L'ASSUREUR D'UN AUTRE DES CO-RESPONSABLES. CIRCONSTANCE ÉTRANGÈRE À L'EXÉCUTION DE CE JUGEMENT. SUBROGATION DANS LES DROITS DE CONTESTER LE JUGEMENT. NON.

12-03 Un constructeur a été condamné, solidairement avec d'autres, à payer une indemnité à un maître d'ouvrage sans que le jugement les condamnant ne définisse de partage de responsabilité. Si son assureur a remboursé une part de cette indemnité à l'assureur d'un de ces autres constructeurs, qui en avait assumé la charge à l'égard du maître d'ouvrage, la répartition ainsi opérée de la charge finale de l'indemnité est étrangère à l'exécution de ce jugement, si bien qu'elle n'a pas pour effet de le subroger dans le droit de le contester.


Composition du Tribunal
Président : M. du BESSET
Rapporteur ?: M. Emmanuel du BESSET
Rapporteur public ?: Mme GONDOUIN
Avocat(s) : CABINET RACINE

Origine de la décision
Date de l'import : 22/01/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2010-10-21;08ly02412 ?
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