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12/10/2010 | FRANCE | N°08LY00815

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 12 octobre 2010, 08LY00815


Vu la requête, enregistrée le 9 avril 2008, présentée pour la SARL MAMI, dont le siège social est situé au Bâtoir à Autrans (38880) ;

La SARL MAMI demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Grenoble n° 0406541 du 12 février 2008 en tant qu'il a rejeté les conclusions de sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution additionnelle à cet impôt auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos le 30 septembre 2002 ;

2°) de prononcer la décharge en

droits et pénalités des impositions contestées ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une...

Vu la requête, enregistrée le 9 avril 2008, présentée pour la SARL MAMI, dont le siège social est situé au Bâtoir à Autrans (38880) ;

La SARL MAMI demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Grenoble n° 0406541 du 12 février 2008 en tant qu'il a rejeté les conclusions de sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution additionnelle à cet impôt auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos le 30 septembre 2002 ;

2°) de prononcer la décharge en droits et pénalités des impositions contestées ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que l'administration fiscale a réintégré dans les résultats de la SCI La Bourne, dont elle détenait 97,65 % du capital, une provision pour risque de réméré ; que la réponse de l'administration fiscale aux observations de la SCI La Bourne était insuffisamment motivée, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, l'administration s'étant bornée à réitérer son argumentation initiale, sans analyser les circonstances de fait de l'espèce et sans écarter l'application de sa doctrine ; que la SCI La Bourne a ainsi été privée de son droit à demander la saisine de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ; que cette irrégularité est d'ordre public ; que la vente en réméré consentie par la SCI La Bourne était assimilable à un prêt gagé et que l'annulation de la vente au terme convenu devait ainsi être rattachée à l'exercice au cours duquel la vente a eu lieu ; que la possibilité de constater une provision pour risque d'annulation était ainsi offerte par le n° 45 de l'instruction 4 B-3-96 ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 29 octobre 2008, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique, qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que la lettre adressée à la SCI La Bourne, en réponse à ses observations, rappelle les arguments exposés par cette société puis indique les motifs pour lesquels ils ne peuvent être retenus, en écartant notamment l'application de la doctrine contenue dans l'instruction 4 B-3-96 relative à l'annulation d'une vente, sans modifier les motifs exposés dans la proposition de rectification ; que la requérante n'a versé aux débats aucune explication permettant d'établir que la SCI La Bourne envisageait, dès la réalisation de la vente, de demander la résolution de cette vente ; que la faculté de réméré n'étant pas susceptible d'être mise en oeuvre avant le 28 mai 2004, le risque était inexistant à la date de constitution de la provision ;

Vu le mémoire, enregistré le 27 avril 2009, présenté pour la SARL MAMI, qui maintient ses conclusions par les moyens exposés dans sa requête ;

Vu le mémoire, enregistré le 28 mai 2009, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique, qui maintient ses conclusions par les moyens exposés dans son précédent mémoire ;

Vu le mémoire, enregistré le 28 janvier 2010, présenté pour la SARL MAMI, qui maintient ses conclusions ;

Elle soutient qu'un jugement du Tribunal de Grande Instance de Grenoble du 8 juillet 2009 a retenu que l'opération de vente à réméré conclue entre les parties était clairement envisagée par elles à l'origine comme une forme de crédit ;

Vu l'ordonnance en date du 3 mars 2010 fixant la clôture d'instruction au 2 avril 2010, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire, enregistré le 11 mars 2010, présenté pour la SARL MAMI, qui porte à 3 000 euros le montant de la somme demandée au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et maintient le surplus de ses conclusions, par les moyens exposés dans ses précédents mémoires ;

Vu le mémoire, enregistré le 15 mars 2010, présenté par le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, qui maintient ses conclusions ;

Il soutient, en outre, que le jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance de Grenoble ne lie pas l'administration et le juge de l'impôt et que la faculté de réméré n'a été exercée que le 4 août 2006, soit près de cinq ans après la vente du bien ;

Vu le mémoire, enregistré le 1er avril 2010, présenté pour la SARL MAMI, qui maintient ses conclusions sans apporter d'élément nouveau ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 septembre 2010 :

- le rapport de M. Pourny, premier conseiller ;

- et les conclusions de Mme Jourdan, rapporteur public ;

Considérant que, par un contrat de vente à réméré du 27 décembre 2001, la société civile immobilière La Bourne a cédé au prix de 228 673,53 euros un ensemble immobilier composé d'un bâtiment à usage de scierie et de terrains situé sur le territoire de la commune de Lans en Vercors ; qu'elle a constitué, au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2001, une provision de 120 711 euros pour risque de réméré ; que l'administration fiscale a remis en cause cette provision ; que la SARL MAMI, qui détenait 97,65 % des parts de la société civile immobilière La Bourne et était imposable à hauteur de sa quote-part de ses résultats, a été assujettie à des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution additionnelle à l'impôt sur les sociétés au titre de son exercice clos le 30 septembre 2002 à raison de ce redressement ; que la SARL MAMI conteste le jugement du Tribunal administratif de Grenoble du 12 février 2008 en tant qu'il a rejeté les conclusions de sa demande tendant à la décharge de ces impositions ;

Sur le bien-fondé des impositions en litige :

Considérant qu'aux termes de l'article 39 du code général des impôts, applicables à l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment : (...) 5° Les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que des événements en cours rendent probables, à condition qu'elles aient été effectivement constatées dans les écritures de l'exercice. (...) ; qu'il résulte de ces dispositions que lorsque des événements en cours rendent probable, à la clôture d'un exercice, la mise en oeuvre d'une faculté de réméré par une société ayant cédé un des éléments de son actif immobilisé, cette société peut constituer une provision à hauteur des pertes ou charges résultant de la future résolution de cette vente, même si ces pertes ne seront comptabilisées qu'au titre de l'exercice au cours duquel aura lieu la résolution de ladite vente ;

Considérant que la SARL MAMI établit, pour la première fois en appel, que la société civile immobilière La Bourne a mis en oeuvre, par un acte d'huissier du 4 août 2006, son intention d'exercer la faculté de rachat qui lui était ouverte par l'acte de vente du 27 décembre 2001 ; que le Tribunal administratif de Grenoble ne pouvait par suite se fonder sur l'absence de mise en oeuvre de cette faculté pour rejeter la demande de la SARL MAMI ; que la Cour se trouve ainsi saisie de l'entier litige par l'effet dévolutif de l'appel ;

Considérant qu'il ressort des pièces produites en appel par la SARL MAMI que le prix de cession de l'immeuble le 27 décembre 2001, soit 228 673,53 euros, était nettement inférieur à la valeur dudit immeuble, telle qu'elle résulte de l'indemnisation de 506 164,72 euros accordée à son acquéreur par une compagnie d'assurances à la suite d'un incendie en avril 2003 ; que la SARL MAMI établit ainsi que l'opération de vente à réméré était, dès l'origine, envisagée par les parties à cette vente comme une opération de crédit procurant à l'acquéreur une rémunération sous forme de loyers commerciaux ; que l'exercice ultérieur par la société civile immobilière La Bourne de la faculté de réméré qui lui était ouverte pendant cinq ans par l'acte de vente du 27 décembre 2001 était par suite probable, dès le 27 décembre 2001, avant la clôture de l'exercice 2001, même si cette faculté ne pouvait effectivement être mise en oeuvre qu'au terme d'un délai contractuel de trente mois ; que la société civile immobilière La Bourne était dès lors en droit de constituer une provision, dont le montant n'est pas contesté, à raison du risque lié à l'exercice de cette faculté ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté le surplus des conclusions de la SARL MAMI tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution additionnelle à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie à raison de cette rectification ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros à verser à la SARL MAMI au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La SARL MAMI est déchargée, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution additionnelle à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle restait assujettie au titre de l'exercice clos le 30 septembre 2002.

Article 2 : L'Etat versera une somme de 2 000 euros à la SARL MAMI en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le jugement du Tribunal administratif de Grenoble n° 0406541 du 12 février 2008 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL MAMI et au ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat.

Délibéré après l'audience du 21 septembre 2010 à laquelle siégeaient :

M. Chanel, président de chambre,

MM. Pourny et Segado, premiers conseillers.

Lu en audience publique, le 12 octobre 2010.

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N° 08LY00815


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08LY00815
Date de la décision : 12/10/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Composition du Tribunal
Président : M. CHANEL
Rapporteur ?: M. François POURNY
Rapporteur public ?: Mme JOURDAN
Avocat(s) : SCP ARBOR et TOURNOUD

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2010-10-12;08ly00815 ?
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