Vu la requête, enregistrée le 5 août 2009, présentée pour M. Claude A, domicilié ... ;
M. A demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0801089 du 20 mai 2009 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier de Brioude à lui verser, suite au licenciement dont il a fait l'objet par décision du 20 novembre 2007, une indemnité d'un montant total de 48 890,98 euros en réparation du préjudice subi du fait de l'illégalité de ce licenciement ;
2°) de condamner le centre hospitalier de Brioude à lui verser les sommes suivantes :
- 2 945,80 euros au titre d'un préavis ;
- 224,58 euros au titre des congés payés sur préavis ;
- 15 720,60 euros au titre de l'indemnité de licenciement ;
- 30 000 euros à titre de dommages et intérêts ;
3°) de mettre à la charge du centre hospitalier de Brioude la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que :
- les dispositions de l'article 40 du décret n° 91-155 du 6 février 1991, qui imposent d'informer l'agent à l'encontre duquel une procédure disciplinaire a été engagée de son droit à la communication par l'administration de son dossier, ont été méconnues ;
- la lettre de licenciement du 20 novembre 2007 et la décision du 23 avril 2008 rejetant la demande préalable d'indemnité qu'il avait formée ne mentionnent pas les voies et délais de recours ;
- c'est à tort que les premiers juges n'ont pas tiré les conséquences de l'illégalité externe de la décision de licenciement ;
- la décision de licenciement repose sur des faits matériellement inexacts, dès lors qu'aucun élément ne permet de lui imputer la chute faite par la patiente dont il s'était occupé en début de matinée, cette seule circonstance n'étant pas suffisante à établir un lien de causalité entre les soins qu'il a prodigués et cette chute, dont on ignore l'heure, aucune précision n'étant également apportée quant aux horaires des différentes visites qui ont pu être faites à cette patiente durant la matinée ;
- il appartient à l'établissement hospitalier de déterminer quelle serait la faute commise, en l'absence de prescription médicale de maintenir la patiente attachée à son fauteuil et alors qu'il n'était pas tenu à une mission de surveillance ;
- la qualification de faute lourde est erronée dès lors qu'il lui est reproché une faute du service ; contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, le moyen tiré de l'erreur de qualification de la faute n'est pas inopérant ;
- la faute de service, alors même qu'elle aurait été commise, ne justifiait pas un licenciement ;
- le licenciement est intervenu pour des motifs personnels sans lien avec son activité professionnelle, et résulte d'un détournement de procédure, dès lors qu'il a toujours bénéficié de bonnes appréciations avant son affectation au centre hospitalier de Brioude ;
- la décision en litige est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
- l'illégalité de la décision lui a causé un préjudice qui mérite réparation ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire, enregistré le 15 mars 2010, présenté pour le centre hospitalier de Brioude, représenté par son directeur, qui conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 1 200 euros soit mise à la charge de M. A au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que :
- la décision de licenciement est devenue définitive faute d'avoir été contestée dans les délais de recours contentieux ;
- le dossier de M. A, qui a été convoqué à un entretien préalable à son licenciement, lui a été communiqué, et les droits de l'intéressé, qui a répondu aux reproches qui lui étaient faits, n'ont pas été méconnus ;
- les faits reprochés à M. A, qui n'a pas informé les infirmières du service qu'il avait installé la patiente dans son fauteuil après la fin de ses soins, alors qu'il devait en assurer la surveillance ou la confier à un tiers, et qui a installé ladite patiente, âgée, dans un fauteuil, sans que celui-ci soit équipé des éléments permettant d'éviter une chute, sont ainsi établis, et ces faits sont intervenus après que M. A a fait l'objet d'avertissements ;
- la décision de licenciement n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
- en raison de la faute commise, aucune indemnité de licenciement n'était due au requérant ; dès lors que les dispositions du code de l'article L. 122-12 du code du travail ne s'appliquent pas à la fonction publique, le contrat initial liant M. A à la clinique Saint-Dominique n'a pu être transféré au centre hospitalier de Brioude et son ancienneté était donc inférieure à huit mois, à la date de la décision de licenciement ;
Vu le mémoire, enregistré le 13 août 2010, présenté pour M. A, qui maintient les conclusions de sa requête, par les mêmes moyens, tout en chiffrant à 3 000 euros la somme réclamée sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les mémoires, enregistrés les 31 août et 1er septembre 2010, présenté pour le centre hospitalier de Brioude, qui maintient ses conclusions pour les mêmes motifs ;
Vu le mémoire, enregistré le 10 septembre 2010, présenté pour M. A, qui maintient ses conclusions ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
Vu la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;
Vu le décret n° 91-155 du 6 février 1991 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 septembre 2010 :
- le rapport de M. Seillet, premier conseiller ;
- et les conclusions de Mme Schmerber, rapporteur public ;
Considérant que M. A, qui exerçait initialement des fonctions de masseur-kinésithérapeute au sein d'une clinique privée, a, à la suite du transfert du service de chirurgie de ladite clinique au centre hospitalier de Brioude, été recruté par cet établissement, pour y exercer les mêmes fonctions, par contrat à durée indéterminée, en date du 7 juin 2007, pour un service de 10 heures par semaine ; que, par une décision du 20 novembre 2007 du directeur dudit centre hospitalier, M. A fait l'objet d'un licenciement, pour faute, au motif tiré de ce qu'il avait quitté la chambre dans laquelle se trouvait la patiente, opérée du col du fémur quelques jours auparavant, dont il s'était occupée, sans en informer l'équipe soignante, en laissant la patiente, sans la sécuriser, dans un fauteuil, dont elle était tombée, ce qui avait occasionné une nouvelle intervention chirurgicale ; qu'il fait appel du jugement du 20 mai 2009 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier de Brioude à lui verser la somme totale de 48 890, 98 euros en réparation du préjudice subi du fait de ce licenciement ;
Considérant, en premier lieu, que la circonstance, dont se prévaut le centre hospitalier de Brioude, que la décision du 20 novembre 2007 par laquelle a été prononcé le licenciement de M. A, n'aurait fait l'objet, dans le délai de recours contentieux, d'aucun recours tendant à son annulation pour excès de pouvoir, et serait ainsi devenue définitive, ne fait pas obstacle à ce que l'intéressé saisisse le juge administratif d'un recours de plein contentieux tendant à la condamnation de l'établissement à réparer les préjudices subis à raison de l'illégalité fautive de ladite décision, dès lors que l'objet de ce dernier recours n'est pas identique à celui tendant à l'annulation de la décision ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 39 du décret du 6 février 1991 susvisé, relatif aux dispositions générales applicables aux agents contractuels des établissements d'hospitalisation publics : Les sanctions disciplinaires susceptibles d'être appliquées aux agents contractuels sont les suivantes :/ 1° L'avertissement ; / 2° Le blâme ; / 3° L'exclusion temporaire des fonctions avec retenue de traitement pour une durée maximale de six mois pour les agents recrutés pour une période déterminée et d'un an pour les agents sous contrat à durée indéterminée. / 4° Le licenciement, sans préavis ni indemnité de licenciement. / La décision prononçant une sanction disciplinaire doit être motivée. ; qu'aux termes de l'article 40 du même décret : Le pouvoir disciplinaire appartient à l'autorité signataire du contrat. / L'agent contractuel à l'encontre duquel une sanction disciplinaire est envisagée a droit à la communication de l'intégralité de son dossier individuel et de tous les documents annexes. Il a également le droit de se faire assister par les défenseurs de son choix. L'intéressé doit être informé par écrit de la procédure engagée et des droits qui lui sont reconnus. ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'avant que ne fût infligée à M. A la sanction du licenciement, ce dernier n'a pas été informé de son droit à obtenir la communication intégrale de son dossier, en méconnaissance des dispositions précitées de l'article 40 du décret du 6 février 1991 ; qu'ainsi, et sans que le centre hospitalier de Brioude puisse utilement soutenir que l'intéressé a été convoqué à un entretien préalable au cours duquel il aurait eu connaissance d'éléments de son dossier, et qu'il aurait présenté des observations dans des lettres des 18 et 27 novembre 2007, la sanction infligée à M. A a été prise sur une procédure irrégulière et était, pour ce motif, illégale ;
Considérant, toutefois, en troisième lieu, que si l'intervention d'une décision illégale peut constituer une faute susceptible d'engager la responsabilité de l'autorité administrative qui l'a prise, elle ne saurait donner lieu à réparation si, dans le cas d'une procédure régulière, la même décision aurait pu légalement être prise ;
Considérant qu'ainsi qu'il a été dit, la décision prononçant le licenciement pour faute de M. A était motivée par le fait, pour ce dernier, d'avoir laissé la patiente, récemment opérée, à laquelle il avait prodigué des soins, seule, sans en avoir informé le service et sans l'avoir sécurisée, dans un fauteuil, dont elle était tombée, ce qui avait occasionné une nouvelle intervention chirurgicale ; qu'il résulte de l'instruction, et notamment de plusieurs fiches de signalement d'événements indésirables, que M. A n'informait pas l'équipe soignante des soins qu'il avait pu prodiguer aux patients dont il s'occupait ; qu'au demeurant, l'intéressé ne conteste pas ne pas avoir informé le personnel du service de chirurgie orthopédique de ce qu'il avait laissé la patiente dans son fauteuil, se bornant à soutenir qu'il n'était pas tenu à une obligation de surveillance et qu'il ne lui appartenait pas, en l'absence de prescription médicale, de maintenir la patiente attachée à son fauteuil ; qu'ainsi, dès lors qu'il n'est pas contesté que l'état de la patiente, souffrant de troubles neurologiques à type de confusion et d'agitation, nécessitait une surveillance et la mise en sécurité de son fauteuil, la matérialité des faits reprochés à M. A, auquel il appartenait d'informer l'équipe soignante de ce que la patiente demeurait, après ses soins, seule dans ce fauteuil, doit être regardée comme établie ; qu'il résulte également de l'instruction que cette abstention fautive a été à l'origine de la chute de la patiente ; qu'eu égard à la gravité des faits, M. A n'établit pas que le motif de la décision de licenciement dont il a fait l'objet soit entaché d'erreur de droit ou d'erreur manifeste d'appréciation ; que la qualification, erronée, au regard de la nature de la décision en litige, de faute lourde détachable du service, mentionnée dans ladite décision, n'est pas de nature à remettre en cause le caractère fautif des faits reprochés à l'intéressé ; que le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi ; que, par suite, le préjudice qu'aurait subi le requérant du fait de l'illégalité de la décision de licenciement ne peut être regardé comme la conséquence du vice dont cette décision est entachée ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande ; que doivent être également rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Sur les conclusions du centre hospitalier de Brioude tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu de mettre à la charge de M. A une somme de 1 200 euros, au titre des frais exposés par le centre hospitalier de Brioude et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A est rejetée.
Article 2 : M. A versera la somme de 1 200 euros au centre hospitalier de Brioude au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Claude A et au centre hospitalier de Brioude.
Délibéré après l'audience du 14 septembre 2010, à laquelle siégeaient :
M. Fontanelle, président de chambre,
M. Seillet et Mme Dèche, premiers conseillers.
Lu en audience publique, le 5 octobre 2010.
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N° 09LY01925
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