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23/09/2010 | FRANCE | N°09LY00692

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre - formation à 3, 23 septembre 2010, 09LY00692


Vu la requête, enregistrée le 24 mars 2009, présentée pour la société CARS PHILIBERT, dont le siège est 24 avenue Barthélémy Thimonnier à Caluire et Cuire (69300) ;

La société CARS PHILIBERT demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0700654 du 24 février 2008 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à ce que le centre hospitalier du Vinatier soit condamné à lui verser la somme globale de 631 039,20 euros ;

2°) de prononcer ladite condamnation, outre intérêts au taux légal à compter du 2 octobre 2006 et capital

isation des intérêts ;

2°) de mettre à la charge du centre hospitalier du Vinatier la so...

Vu la requête, enregistrée le 24 mars 2009, présentée pour la société CARS PHILIBERT, dont le siège est 24 avenue Barthélémy Thimonnier à Caluire et Cuire (69300) ;

La société CARS PHILIBERT demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0700654 du 24 février 2008 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à ce que le centre hospitalier du Vinatier soit condamné à lui verser la somme globale de 631 039,20 euros ;

2°) de prononcer ladite condamnation, outre intérêts au taux légal à compter du 2 octobre 2006 et capitalisation des intérêts ;

2°) de mettre à la charge du centre hospitalier du Vinatier la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La société CARS PHILIBERT soutient que le Tribunal n'a pas statué sur la responsabilité sans faute du centre hospitalier du Vinatier ; que le choix réitéré de laisser libre M. A en fin de journée a fait peser un risque sur les tiers, ce dernier s'étant rendu coupable de nombreuses infractions engageant la responsabilité sans faute de l'établissement en raison des agissements du malade dont il avait la charge ; qu'à titre subsidiaire, le centre hospitalier du Vinatier, qui ne conteste pas avoir eu connaissance des agissements de pyromanie de M. A, a commis une faute tant en ce qui concerne sa mission, que son obligation de surveillance en décidant son placement en régime libre, lui laissant une totale liberté pendant la nuit, alors que sa dangerosité était connue ; que si le centre ne pouvait avoir l'initiative d'une aggravation des conditions d'hospitalisation, rien ne l'empêchait de prévenir les services préfectoraux ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 25 novembre 2009, présenté pour le centre hospitalier du Vinatier qui conclut, à titre principal, au rejet de la requête et, à titre subsidiaire, à une limitation de la condamnation à la somme de 185 217,13 euros ainsi qu'à la condamnation de la société CARS PHILIBERT à lui verser une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative par les motifs que l'hospitalisation en placement libre ne constitue par une méthode thérapeutique créant un risque spécial pour les tiers susceptible d'engager la responsabilité sans faute de l'administration ; que la pathologie de M. A ne justifiait pas un placement sous contrainte ; qu'il incombait d'ailleurs au seul préfet du Rhône, s'il l'avait estimé nécessaire, de prendre un arrêté prononçant son hospitalisation d'office ; qu'en outre, il ne pouvait solliciter une telle mesure en vertu de l'article L. 3212-1 du code de la santé publique ; que, d'ailleurs, il n'avait pas eu connaissance, entre le 16 juin et le 21 juillet 2004, des agissements qui étaient alors perpétrés par M. A ; que, dans ces conditions, il ne peut lui être reproché de ne pas avoir averti les autorités préfectorales ; qu'en tout état de cause, le simple fait que M. A avait un passé de pyromane n'aurait pu, à lui seul, justifier une hospitalisation sous contrainte ; que l'état clinique de l'intéressé ne nécessitait pas une telle hospitalisation ; qu'aucun défaut de surveillance ne peut lui être reproché alors même que M. A a commis les faits reprochés la nuit, alors qu'il n'était pas placé sous sa responsabilité ; que, par suite, il n'a commis aucune faute susceptible d'engager sa responsabilité ; qu'à titre subsidiaire, en cas de reconnaissance de responsabilité, il y aurait lieu de retenir la faute de la société CARS PHILIBERT en raison du manque de précaution prise pour assurer la sécurité de ses véhicules alors même qu'elle était au courant de la présence de M. A dans les parages, ce dernier occupant parfois les bus la nuit ; que la somme de 417 420 euros sollicitée par la société CARS PHILIBERT, et qui correspond à la différence entre le coût de rachat de véhicules neufs et la somme versée par son assurance, constitue un enrichissement sans cause ; que, d'ailleurs, l'évaluation d'un préjudice faite par le juge pénal ne saurait être entendue comme une constatation de fait au sens de la jurisprudence administrative ; que la perte d'exploitation alléguée n'est établie par aucun document comptable ;

Vu le mémoire, enregistré le 2 février 2010, présenté pour la société CARS PHILIBERT qui conclut aux mêmes fins que précédemment, par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 septembre 2010 :

- le rapport de Mme Verley-Cheynel, président-assesseur ;

- les observations de Me Gicquele, avocat de la société CARS PHILIBERT et de Me Rey, avocat du centre hospitalier du Vinatier ;

- et les conclusions de Mme Marginean-A, rapporteur public ;

La parole ayant été de nouveau donnée aux parties présentes ;

Considérant que M. Bernard A, qui était suivi dans le cadre d'une hospitalisation de jour au sein du centre hospitalier spécialisé du Vinatier, s'est rendu coupable d'incendies criminels au cours de l'été 2004, entraînant la destruction de huit véhicules de la société CARS PHILIBERT ; que l'intéressé a été condamné, par un jugement du Tribunal correctionnel de Lyon en date du 30 mai 2005 confirmé par un arrêt de la Cour d'appel de Lyon, à une peine de 18 mois d'emprisonnement ainsi qu'au versement d'une somme de 629 604 euros en réparation des préjudices subis par la société ; qu'il a commis, au cours de l'été 2006, de nouvelles dégradations sur des véhicules de la même entreprise ; que la société CARS PHILIBERT a recherché la responsabilité du centre hospitalier du Vinatier devant le Tribunal administratif de Lyon et relève appel du jugement rejetant sa demande ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que si la société CARS PHILIBERT soutient que le tribunal administratif a omis de statuer sur le moyen tiré de la responsabilité sans faute de l'établissement hospitalier, un tel moyen manque en fait ;

Sur la responsabilité du centre hospitalier du Vinatier :

Considérant, en premier lieu, que l'hospitalisation en service libre, régime duquel relevait M. A, ne constituant pas une méthode thérapeutique créant un risque spécial pour les tiers, la société CARS PHILIBERT ne saurait s'en prévaloir pour soutenir que la responsabilité de l'établissement hospitalier serait engagée sans faute à son égard ;

Considérant, en deuxième lieu, que si la requérante soutient que M. A aurait dû faire l'objet d'un internement d'office en raison de sa dangerosité, il résulte de l'instruction, et en particulier du rapport d'expertise diligenté par le Tribunal de grande instance de Lyon, que l'état de santé psychiatrique de l'intéressé paraissait globalement stabilisé notamment en raison de la prise en charge institutionnelle antérieure ; que, par suite, et bien que l'intéressé présentât encore une perturbation relationnelle nette, le centre hospitalier du Vinatier n'a pas commis de faute en le plaçant dans un régime d'hospitalisation de jour, le laissant libre de ses mouvements le soir venu ; que, pour les mêmes raisons, M. A ne relevait pas de l'hospitalisation sous contrainte ; qu'ainsi, il ne peut être reproché, en tout état de cause, au centre hospitalier de ne pas avoir averti les services préfectoraux de l'état de santé de ce dernier ;

Considérant, en dernier lieu, que si la société CARS PHILIBERT soulève le moyen tiré de ce que le centre hospitalier du Vinatier est responsable d'une carence fautive dans la surveillance de son patient, elle n'apporte pas les précisions suffisantes pour en apprécier son bien-fondé ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société CARS PHILIBERT n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant, d'une part, que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du centre hospitalier du Vinatier, qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, quelque somme que ce soit au titre des frais exposés par la société CARS PHILIBERT et non compris dans les dépens ;

Considérant, d'autre part, qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société CARS PHILIBERT une quelconque somme au titre des frais exposés par le centre hospitalier spécialisé du Vinatier et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société CARS PHILIBERT est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du centre hospitalier du Vinatier présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société CARS PHILIBERT et au centre hospitalier du Vinatier.

Délibéré après l'audience du 2 septembre 2010, à laquelle siégeaient :

Mme Serre, présidente de chambre,

Mme Verley-Cheynel, président-assesseur,

M. Picard, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 23 septembre 2010.

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N° 09LY00692


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09LY00692
Date de la décision : 23/09/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme SERRE
Rapporteur ?: Mme Geneviève VERLEY-CHEYNEL
Rapporteur public ?: Mme MARGINEAN-FAURE
Avocat(s) : HOURSE JEAN-MARC

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2010-09-23;09ly00692 ?
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