Vu le recours, enregistré au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 15 juillet 2009, présenté par le PREFET DE LA HAUTE-SAVOIE ;
Le PREFET DE LA HAUTE-SAVOIE demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0902482 du 26 juin 2009 du Tribunal administratif de Grenoble annulant son arrêté du 4 mai 2009 par lequel il a refusé à M. A la délivrance d'un titre de séjour et a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français à destination de l'Algérie ;
2°) de rejeter la demande de M. A devant les premiers juges ;
Le préfet soutient que M. A ne saurait bénéficier des stipulations des articles 6.4 et 7 bis g) de l'accord franco-algérien dès lors que la mère de son enfant exerce exclusivement l'autorité parentale et qu'il ne subvient pas aux besoins de cet enfant sans même s'efforcer de conserver des liens avec lui ; que le tribunal administratif de Grenoble a entaché à cet égard son jugement d'erreur de droit et d'erreur d'appréciation ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu l'ordonnance en date du 6 avril 2010 prise sur le fondement de l'article R. 613-1 du code de justice administrative fixant la clôture de l'instruction au 7 mai 2010 à 16 h 30 ;
Vu les pièces desquelles il résulte que la requête a été notifiée à M. A qui n'a pas produit d'observations ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la convention internationale des droits de l'enfant ;
Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié, dans sa rédaction issue du troisième avenant signé le 11 juillet 2001 et publié par le décret nº 2002-1500 du 20 décembre 2002 ;
Vu le code civil ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 juillet 2010 :
- le rapport de M. Monnier, premier conseiller ;
- et les conclusions de M. Gimenez, rapporteur public ;
Considérant qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention vie privée et familiale est délivré de plein droit : (...) 4) au ressortissant algérien ascendant direct d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il exerce même partiellement l'autorité parentale à l'égard de cet enfant ou qu'il subvienne effectivement à ses besoins. Lorsque la qualité d'ascendant direct d'un enfant français résulte d'une reconnaissance de l'enfant postérieure à la naissance, le certificat de résidence d'un an n'est délivré au ressortissant algérien que s'il subvient à ses besoins depuis sa naissance ou depuis au moins un an ;
Considérant que l'autorité parentale sur le fils de M. A a été confiée exclusivement à la mère de cet enfant par un jugement du 6 janvier 2009 du juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Thonon-les-Bains ; qu'il ne ressort pas des pièces versées au dossier que M. A, qui ne justifie d'aucun emploi ni de ressources suffisantes et stables, subvienne effectivement aux besoins de son fils ; que, dans ces conditions, à les supposer même établies, les circonstances qu'il aurait conservé des liens avec son fils et qu'il participerait à son entretien en lui offrant des jouets et en ayant adressé à la mère un mandat de cinquante euros sont sans incidence sur la légalité du refus de titre au regard des stipulations précitées du 4° de l'article 6 de l'accord franco-algérien ; que, par suite, le PREFET DE LA HAUTE-SAVOIE est fondé à soutenir que le tribunal administratif de Grenoble a fait une inexacte application de ces stipulations ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le Tribunal administratif s'est fondé sur les stipulations du 4° de l'article 6 de l'accord franco-algérien pour annuler les décisions du PREFET DE LA HAUTE-SAVOIE ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens présentés par M. A en première instance ;
Sur le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur des décisions portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français et désignation du pays de destination :
Considérant que M. Jean-François B, secrétaire général de la préfecture de la Haute-Savoie, signataire des décisions attaquées, bénéficiait, à la date de ces décisions, d'une délégation régulière de signature, en vertu d'un arrêté préfectoral du 28 mars 2008, publié au recueil des actes administratifs de ladite préfecture ; qu'ainsi, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur des décisions attaquées doit être écarté comme manquant en fait ;
Sur le surplus des moyens dirigés contre le refus de titre de séjour :
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 311-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : La demande est présentée par l'intéressé dans les deux mois de son entrée en France. S'il y séjournait déjà, il présente sa demande : (...) 4° Soit dans le courant des deux derniers mois précédant l'expiration de la carte de séjour dont il est titulaire, sauf s'il est titulaire du statut de résident de longue durée-CE accordé par la France en application de l'article L. 314-8./ A l'échéance de ce délai et en l'absence de présentation de demande de renouvellement de sa carte de séjour, il justifie à nouveau des conditions requises pour l'entrée sur le territoire national lorsque la possession d'un visa est requise pour la première délivrance de la carte de séjour.(...) ;
Considérant que si M. A a été titulaire d'un certificat de résidence algérien vie privée et familiale en tant que parent d'enfant français valable un an à compter du 24 avril 2007, il n'en a demandé le renouvellement que le 16 janvier 2009, soit postérieurement à l'expiration de la validité du certificat, le 23 avril 2008 ; que, contrairement à ce qu'il soutient, la circonstance qu'il a été incarcéré en Suisse du 26 novembre 2007 au 23 octobre 2008 ne faisait pas obstacle à ce qu'il présente une demande par courrier dans les délais ou qu'il mandate quelqu'un pour ce faire ; que, du reste, il a présenté sa demande de titre plus de deux mois après avoir été libéré ; que, dès lors, c'est à bon droit que le préfet du Rhône a regardé la demande présentée par M. A le 16 janvier 2009 comme une première demande de titre et non comme une demande de renouvellement ;
Considérant, en deuxième lieu, que les termes de la circulaire du 20 janvier 2004 dont se prévaut M. A selon lesquels le défaut de ressources ne doit pas être un obstacle à l'admission au séjour du demandeur dès lors que celui-ci établit par tout autre moyen remplir ses obligations légales en matière de surveillance et d'éducation de l'enfant ne portent pas sur les stipulations précitées de l'article 6-4 de l'accord franco-algérien lequel, ainsi que le rappelle du reste un peu plus loin cette même circulaire, est réputé régir de manière complète l'admission au séjour et au travail et ne permet pas que soient appliquées aux ressortissants algériens l'ensemble des dispositions de l'ordonnance de 1945 ayant le même objet ;
Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 312-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Dans chaque département, est instituée une commission du titre de séjour (...) et qu'aux termes de l'article L. 312-2 du même code : La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12, ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3. ; qu'il résulte de ce qui précède que le préfet est tenu de saisir la commission du cas des seuls ressortissants qui remplissent effectivement les conditions prévues aux articles L. 313-11, L. 314-11, L. 314-12 et L. 431-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité, et non de celui de tous les ressortissants qui se prévalent de ces dispositions ; que M. A ne remplissant pas les conditions de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dont aucune n'est équivalente aux stipulations de l'accord franco-algérien susvisé sur lesquelles était fondée sa demande de titre de séjour, le préfet de la Haute-Savoie n'était pas tenu de consulter la commission du titre de séjour avant de prendre sa décision du 4 mai 2009 portant refus de délivrance d'un titre de séjour ;
Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui (...) ;
Considérant que M. A fait valoir qu'il est présent sur le territoire national depuis 2004 et qu'il a un fils de nationalité française âgé de trois ans vis-à-vis duquel il entend remplir ses obligations de père ; que, toutefois, il ressort des pièces des dossiers qu'il a été incarcéré sur le territoire helvétique du 16 novembre 2007 au 23 octobre 2008, qu'il ne dispose pas de l'autorité parentale sur son fils avec lequel il entretient des relations distendues, qu'il est entré irrégulièrement en France à l'âge de 25 ans, après avoir toujours vécu en Algérie où résident sa mère et ses deux soeurs et qu'il ne fait état d'aucune attache familiale en France autre que son fils ; qu'eu égard à la durée et aux conditions de son séjour en France, la décision portant refus de titre de séjour ne peut être regardée comme ayant porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit, dès lors, être écarté ; que, pour les mêmes motifs, la décision portant refus de titre de séjour n'est pas davantage entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990, publiée par décret du 8 octobre 1990 : Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;
Considérant que si M. A fait état de rencontres régulières avec son fils le dimanche en présence de la mère, il est constant qu'il a porté sous les yeux de son fils, des coups à sa mère alors qu'ils lui rendaient visite en prison en Suisse et que l'exercice de l'autorité parentale a été confiée exclusivement à la mère de l'enfant ; que, dans ces conditions, le préfet n'a pas méconnu l'intérêt supérieur de cet enfant, tel que protégé par le paragraphe 1 de l'article 3 de la convention de New York du 26 janvier 1990 sur les droits de l'enfant ;
Considérant, en sixième et dernier lieu, que les stipulations de l'article 9 de la convention relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 crées seulement des obligations entre Etats sans ouvrir de droits aux intéressés ; que M. A ne peut donc utilement se prévaloir de ces stipulations pour demander l'annulation de la décision lui refusant le séjour ;
Sur le surplus des moyens dirigés contre l'obligation de quitter le territoire français :
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède que les moyens tirés de l'erreur manifeste d'appréciation, d'un droit au séjour sur le fondement du 4° de l'article 6 de l'accord franco-algérien, de la violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que de celles des articles 3-1 et 9 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, qui reprennent ce qui a été précédemment développé à l'appui des conclusions tendant à l'annulation de la décision de refus de titre de séjour, doivent être écartés pour les mêmes motifs que précédemment ;
Considérant, en second lieu, que l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose : Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français ou d'une mesure de reconduite à la frontière en application du présent chapitre : (...) 6° L'étranger ne vivant pas en état de polygamie qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans ; qu'aux termes de l'article 371-2 du code civil : Chacun des parents contribue à l'entretien et à l'éducation des enfants à proportion de ses ressources, de celles de l'autre parent, ainsi que des besoins de l'enfant ;
Considérant que le mandat de cinquante euros adressé à la mère de son fils le 12 décembre 2008 et l'achat de jouets le 13 décembre 2008 ne sauraient suffire à justifier que M. A avait contribué, à la date de la décision attaquée, à l'entretien et à l'éducation de son fils à proportion de ses ressources depuis sa naissance ou depuis au moins deux ans ; que l'intéressé ne saurait davantage se prévaloir de la circonstance qu'il a été incarcéré en Suisse du 26 novembre 2007 au 23 octobre 2008 pour justifier du fait qu'il n'a rempli aucune de ses obligations à l'égard de son fils ; que, dans ces conditions, il n'est pas fondé à soutenir que la décision du préfet de la Haute-Savoie aurait été prise en violation des dispositions précitées de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il ne saurait enfin se prévaloir des termes de la circulaire du 20 janvier 2004 selon lesquels le défaut de ressources ne doit pas être un obstacle à l'admission au séjour du demandeur dès lors que celui-ci établit par tout autre moyen remplir ses obligations légales en matière de surveillance et d'éducation de l'enfant, qui, en tout état de cause, ne concernent que l'admission au séjour et non l'obligation de quitter le territoire ;
Sur le surplus des moyens dirigés contre la décision fixant le pays de destination :
Considérant que les moyens tirés de l'erreur manifeste d'appréciation et de la méconnaissance des articles 3 et 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne sont appuyés d'aucune précision permettant d'en apprécier le bien-fondé ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DE LA HAUTE-SAVOIE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a annulé ses décisions en date du 4 mai 2009 portant refus de délivrance de titre de séjour et obligation de quitter le territoire à destination de l'Algérie ; que les conclusions de M. A aux fins d'injonction et de remboursement de frais présentés devant le Tribunal administratif de Grenoble doivent être rejetées par voie de conséquence ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Grenoble du 26 juin 2009 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. A devant le Tribunal administratif de Grenoble est rejetée.
Article 3: Le présent arrêt sera notifié à M. Riad A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire. Copie en sera adressée au PREFET DE LA HAUTE-SAVOIE.
Délibéré après l'audience du 6 juillet 2010 à laquelle siégeaient :
M. Chanel, président de chambre,
MM. Monnier et Pourny, premiers conseillers.
Lu en audience publique, le 24 août 2010.
''
''
''
''
1
2
N° 09LY01622