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24/08/2010 | FRANCE | N°08LY02897

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 24 août 2010, 08LY02897


Vu la requête, enregistrée le 29 décembre 2008, présentée pour M. Patrick A, domicilié ... ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 0804630 du 29 octobre 2008 du président du Tribunal administratif de Grenoble rejetant sa demande tendant à l'annulation de la délibération du 30 septembre 2008 par laquelle la commission de discipline des agents de direction et des agents comptables des organismes de mutualité sociale agricole s'est prononcée sur sa suspension sans traitement et a émis un avis sur son licenciement ;

2°) d'annuler cette délib

ration du 30 septembre 2008 ;

Il soutient que les litiges relatifs au fonctionneme...

Vu la requête, enregistrée le 29 décembre 2008, présentée pour M. Patrick A, domicilié ... ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 0804630 du 29 octobre 2008 du président du Tribunal administratif de Grenoble rejetant sa demande tendant à l'annulation de la délibération du 30 septembre 2008 par laquelle la commission de discipline des agents de direction et des agents comptables des organismes de mutualité sociale agricole s'est prononcée sur sa suspension sans traitement et a émis un avis sur son licenciement ;

2°) d'annuler cette délibération du 30 septembre 2008 ;

Il soutient que les litiges relatifs au fonctionnement de la commission de discipline des agents de direction et des agents comptables des organismes de mutualité sociale agricole relèvent de la compétence de la juridiction administrative, dès lors qu'ils concernent l'exercice de la tutelle, même si l'agent concerné n'est pas un agent public ; que cette commission de discipline a pris des décisions faisant grief en tant qu'elle s'est prononcée sur la mesure de suspension le frappant et en tant qu'elle a émis un avis sur les motifs de la sanction à lui infliger ; que l'avis de cette commission modifie sa situation juridique et ne constitue pas un simple avis qui ne lierait ni l'employeur ni l'administration ; que la commission de discipline n'a pas été régulièrement saisie par l'autorité de tutelle dans les quinze jours suivant sa décision, puisqu'elle l'a été, le 2 juillet 2008, par la présidente de la caisse de mutualité sociale agricole de la Drôme ; que la décision de suspension confirmée par la délibération litigieuse n'était pas fondée sur un motif valable, seule une faute grave pouvant justifier une suspension sans traitement ; que la commission ne s'est pas prononcée dans le mois suivant sa saisine ; que l'action disciplinaire a été engagée irrégulièrement par la présidente de la caisse et que la saisine de la commission a été échelonnée, en plusieurs mémoires, ce qui a fait obstacle à l'exercice des droits de la défense ; que la commission aurait dû se prononcer sur la suspension dans un délai d'un mois ; que la commission ne pouvait pas légalement siéger avant le 11 septembre 2008, le mandat de ses membres ayant pris fin ; qu'il n'a pas disposé d'un délai suffisant pour préparer sa défense ; que le principe du contradictoire n'a pas été respecté devant la commission ; que l'avis de la commission repose sur des motifs erronés ; que la commission, irrégulièrement composée, n'a pas pris en compte ses observations écrites ; que des griefs postérieurs à la décision du 20 juin 2008 ont été versés au dossier en septembre 2008 ; que la délibération litigieuse est présentée de manière fallacieuse ; que les faits qui lui sont reprochés n'étaient pas fautifs ; que la commission a retenu à tort que son attitude nuirait au rapprochement des caisses concernées ; que les motifs de licenciement examinés par la commission ne peuvent être retenus comme fautifs ;

Vu l'ordonnance attaquée ;

Vu le mémoire, enregistré le 18 mai 2009, présenté pour la caisse de mutualité sociale agricole de la Drôme, qui conclut au rejet de la requête et à la mise d'une somme de 4 500 euros à la charge de M. A au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que M. A n'a pas la qualité d'agent public et qu'un avis non conforme sur une décision disciplinaire ne saurait être assimilé à une décision faisant grief ; que la caisse a régulièrement saisi la commission par un courrier du 2 juillet 2008 ; qu'aucun texte ne limite la possibilité de suspendre un agent à l'existence d'une faute grave mais qu'une procédure de licenciement pour faute grave avait bien été engagée à l'encontre de M. A ; que la suspension de l'intéressé n'était pas préalable à sa mise à pied mais consécutive à cette mise à pied ; que la commission a été valablement saisie dans le délai de quinze jours à compter de la suspension et qu'une enquête a été décidée ; que s'il est exact que la commission ne pouvait fonctionner entre le 12 juillet et le 11 septembre 2008, la théorie de la formalité impossible doit être appliquée ; que l'action disciplinaire a été régulièrement engagée par la caisse ; que les droits de la défense ont été respectés ; que si la commission ne pouvait fonctionner entre le 12 juillet et le 11 septembre 2008, elle était valablement constituée lorsqu'elle a été saisie et lorsqu'elle s'est prononcée ; que l'ensemble des garanties procédurales ont été respectées lors de la réunion de la commission, valablement présidée par le représentant du directeur des affaires sociales ; que la régularité de la décision du conseil d'administration de la caisse relève de l'appréciation du conseil des prud'hommes ; que la caisse n'a pas fait disparaître une mention de confidentialité sur les copies produites devant la commission de discipline ; que les agissements de M. A étaient inacceptables ;

Vu le mémoire, enregistré le 31 juillet 2009, présenté pour M. A, qui maintient ses conclusions et demande en outre à la Cour :

1°) d'enjoindre à la caisse de mutualité sociale agricole de la Drôme, sous astreinte de 500 euros par jour de retard, de retirer sa décision de licenciement et de procéder à sa réintégration immédiate, dans toutes ses fonctions et attributions antérieures avec salaires, à effet du 20 juin 2008 ;

2°) d'enjoindre à l'autorité de tutelle, éventuellement sous astreinte, de veiller au retrait de la décision de licenciement du 8 octobre 2008 et de procéder à sa réintégration immédiate dans toutes ses fonctions et attributions antérieures, avec salaires à effet du 20 juin 2008 ;

3°) de condamner l'Etat et la caisse de mutualité sociale agricole de la Drôme à lui verser la somme de 3000 euros chacun en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que l'autorité judiciaire n'est pas compétente pour annuler une décision administrative constituant un acte préalable obligatoire à une décision de licenciement soumise au contrôle de l'autorité de tutelle ; que la suspension prévue par l'article R. 123-52 du code de la sécurité sociale est une mesure de tutelle distincte de la mise à pied décidée par l'employeur ; que l'impossibilité de réunir la commission de discipline dans les délais ne résultait pas d'une cause extérieure à l'administration ; que le procès-verbal de la commission de discipline n'est pas un document authentique ; que la participation du rapporteur à la commission constitue une grave illégalité et que la présence en surnombre de la directrice intérimaire de la caisse de mutualité sociale agricole de la Drôme a influencé la commission de discipline ;

Vu l'ordonnance en date du 30 novembre 2009 fixant la clôture d'instruction au 31 décembre 2009, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire, enregistré le 6 mai 2010, présenté sous une forme irrégulière par M. A ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 24 juin 2010, présentée pour M. A qui maintient ses conclusions ;

Il soutient, outre les moyens précédemment développés, que l'indication sur Sagace du sens des conclusions du rapporteur public ne correspondait pas aux conclusions effectivement prononcées au cours de l'audience du 22 juin 2010 ;

Vu le mémoire, enregistré le 5 juillet 2010, présenté pour la caisse de mutualité sociale agricole de la Drôme ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code rural et de la pêche maritime ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu l'arrêté du 17 septembre 1963 modifié, fixant les modalités d'application, en ce qui concerne les agents de direction et les agents comptables des caisses de mutualité sociale agricole, des dispositions des articles R. 123-51 et R. 123-52 du code de la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 juillet 2010 :

- le rapport de M. Pourny, premier conseiller ;

- les observations de Me Tordjman, avocat de la caisse de mutualité sociale agricole de la Drôme ;

- et les conclusions de M. Gimenez, rapporteur public ;

La parole ayant à nouveau été donnée à Me Tordjman ;

Considérant que, par une délibération du 30 septembre 2008, la commission de discipline des agents de direction et des agents comptables des organismes de mutualité sociale agricole a estimé que les faits reprochés à M. Patrick A, agent comptable de la caisse de mutualité sociale agricole de la Drôme, justifiaient, d'une part, une décision administrative du 23 juin 2008 le suspendant de ses fonctions sans traitement et, d'autre part, la rupture de son contrat de travail ; que M. A conteste l'ordonnance du président du Tribunal administratif de Grenoble n° 0804630 du 29 octobre 2008 rejetant sa demande tendant à l'annulation de cette délibération ;

Sur les conclusions dirigées contre la délibération du 30 septembre 2008 en tant qu'elle concerne la mesure de suspension :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 723-1 du code rural et de la pêche maritime : Les organismes de mutualité sociale agricole comprennent les caisses départementales et pluridépartementales de mutualité sociale agricole, la caisse centrale de la mutualité sociale agricole ainsi que leurs associations et groupements mentionnés à l'article L. 723-5. Sauf dispositions contraires du présent chapitre, ils sont soumis aux dispositions du livre Ier du code de la sécurité sociale. (...) ; que les dispositions des articles L. 123-2 et R. 123-51 à R. 123-53 du code de la sécurité sociale sont ainsi applicables aux agents comptables des caisses départementales et pluridépartementales de mutualité sociale agricole ;

Considérant qu'aux termes de l'article R. 123-52 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction alors en vigueur : En cas d'urgence, l'agent de direction peut être suspendu avec ou sans traitement, par le ministre ou son représentant territorial. La suspension cesse d'avoir effet, si, dans un délai de quinze jours, la commission n'a pas été saisie. / Les dispositions de l'alinéa précédent sont applicables aux agents comptables. (...) ; qu'aux termes de l'article 6 de l'arrêté du 17 septembre 1963 susvisé : En cas de suspension préalable (...) la commission doit être saisie dans un délai de quinze jours à compter de la date de la décision de suspension. / La commission se prononce tout d'abord sur le maintien ou la levée de la suspension avec ou sans traitement. ; que s'il résulte de ces dispositions que la commission doit être saisie dans un délai de quinze jours suivant la suspension de l'agent de direction ou de l'agent comptable concerné pour que cette mesure puisse conserver ses effets, il n'en résulte pas que la commission puisse prendre une décision modifiant la situation juridique de l'agent concerné ; qu'en émettant l'avis que les faits reprochés à M. A justifiaient la suspension sans traitement décidée le 23 juin 2003 par le préfet de la région Rhône-Alpes, la commission de discipline s'est bornée, par la délibération litigieuse, à émettre une opinion de nature à éclairer l'autorité administrative, qui n'est pas liée par cette appréciation, sur un éventuel retrait de la décision prise le 23 juin 2003, sans prétendre confirmer ou infirmer cette décision ; que, dès lors, cette délibération du 30 septembre 2008 ne comporte, en tant qu'elle concerne la mesure de suspension prise à l'encontre de M. A, aucune décision faisant grief à l'intéressé ; que, par suite, c'est à bon droit que, par l'ordonnance attaquée, le président du Tribunal administratif de Grenoble a rejeté les conclusions tendant à l'annulation de l'avis émis par cette commission sur la suspension de M. A comme irrecevables ;

Sur les conclusions dirigées contre la délibération du 30 septembre 2008 en tant qu'elle exprime un avis sur la sanction disciplinaire à infliger à M. A :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 123-2 du code de la sécurité sociale : (...) les conditions de travail des agents de direction et de l'agent comptable font l'objet de conventions collectives spéciales qui ne deviennent applicables qu'après avoir reçu l'agrément de l'autorité compétente de l'Etat. (...) et qu'aux termes de l'article R. 123-51 du même code : Toute décision de rétrogradation, révocation ou licenciement d'un agent de direction ou de l'agent comptable ne peut intervenir qu'après avis d'une commission instituée pour chaque régime par arrêté conjoint des ministres intéressés. (...) ; que les litiges d'ordre individuel relatifs aux sanctions disciplinaires qui sont ou peuvent être infligées à l'agent comptable d'une caisse départementale ou pluridépartementale de mutualité sociale agricole ne ressortissent pas à la compétence de la juridiction administrative ; que la délibération du 30 septembre 2008 de la commission de discipline des agents de direction et des agents comptables des organismes de mutualité sociale agricole, en tant qu'elle exprime l'avis de cette commission sur la sanction à infliger à M. A, n'est pas détachable de la procédure disciplinaire engagée contre l'intéressé ; que, par suite, c'est à bon droit que, par l'ordonnance attaquée, le président du Tribunal administratif de Grenoble a rejeté les conclusions tendant à l'annulation de cet avis comme portées devant un ordre de juridictions incompétent pour en connaître ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le président du Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte doivent être rejetées ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant, en premier lieu, que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat et de la caisse de mutualité sociale agricole de la Drôme, qui ne sont pas la partie perdante dans la présente instance, quelque somme que ce soit au titre des frais exposés par M. A et non compris dans les dépens ;

Considérant, en second lieu, que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de condamner M. A à payer à la caisse de mutualité sociale agricole de la Drôme une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : M. A versera à la caisse de mutualité sociale agricole de la Drôme une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A, à la caisse de mutualité sociale agricole de la Drôme et au ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche.

Délibéré après l'audience du 6 juillet 2010 à laquelle siégeaient :

M. Chanel, président de chambre,

MM. Monnier et Pourny, premiers conseillers.

Lu en audience publique, le 24 août 2010.

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N° 08LY02897


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08LY02897
Date de la décision : 24/08/2010
Type d'affaire : Administrative

Composition du Tribunal
Président : M. CHANEL
Rapporteur ?: M. François POURNY
Rapporteur public ?: M. GIMENEZ
Avocat(s) : SCP BUCHALET-ESCURE et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2010-08-24;08ly02897 ?
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