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08/07/2010 | FRANCE | N°09LY00865

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, Juge unique - 4ème chambre, 08 juillet 2010, 09LY00865


Vu l'arrêt en date du 17 mars 2010, par lequel la Cour, avant de statuer sur les conclusions de la requête de M. Xhevat A, enregistrée sous le n° 09LY00865, et tendant à ce qu'elle annule le jugement n° 0902211, en date du 15 avril 2009, par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet de l'Ain, du 15 janvier 2009, portant obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et désignation du pays à destination duquel il serait reconduit à l'expiration de ce d

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Vu l'arrêt en date du 17 mars 2010, par lequel la Cour, avant de statuer sur les conclusions de la requête de M. Xhevat A, enregistrée sous le n° 09LY00865, et tendant à ce qu'elle annule le jugement n° 0902211, en date du 15 avril 2009, par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet de l'Ain, du 15 janvier 2009, portant obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et désignation du pays à destination duquel il serait reconduit à l'expiration de ce délai, à défaut pour lui d'obtempérer à l'obligation de quitter le territoire français qui lui était faite, a ordonné un supplément d'instruction afin que le préfet de l'Ain précise quelle est la capacité de l'offre de soins au Kosovo dans la spécialité médicale concernée par la maladie de M. A ;

Vu, enregistré le 26 mai 2010, le mémoire présenté par le préfet de l'Ain, qui conclut au rejet de la requête. Il soutient que les documents qu'il produit établissent que les soins et traitements que nécessite l'état de santé de M. A sont disponibles au Kosovo ; que, le requérant ayant fait l'objet d'une reconduite à la frontière par le préfet du Rhône le 1er juillet 2009, il n'apparaît pas qu'il n'ait pas obtenu les soins nécessités par son état de santé ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention des Nations-Unies sur les droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 1er juillet 2010 :

- le rapport de M. du Besset, président,

- les observations de Me Pochard, représentant M. A,

- les conclusions de Mme Gondouin , rapporteur public,

la parole ayant été de nouveau donnée à Me Pochard ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

Considérant qu'aux termes du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : (...) L'obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation. (...) ;

Considérant, qu'il résulte de ces dispositions que le moyen tiré du défaut de motivation de la décision portant obligation de quitter le territoire français ne peut qu'être écarté ;

En ce qui concerne l'exception d'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour :

Considérant que cette décision, qui contient l'exposé de l'ensemble des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, est suffisamment motivée ;

Considérant qu'il ressort des pièces produites par le préfet de l'Ain à la suite du supplément d'instruction ordonné par l'arrêt susvisé du 17 mars 2010 que les soins et traitements que nécessite l'état de santé de M. A sont disponibles au Kosovo ; qu'ainsi la décision du 15 janvier 2009 portant refus de lui délivrer un titre de séjour n'a pas été prise en méconnaissance du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ;

Considérant que M. A soutient que le centre de ses intérêts privés et familiaux se situe en France, auprès de sa mère et de son frère ; que l'unité familiale doit être maintenue pour des raisons thérapeutiques et particulièrement pour l'amélioration de l'état de santé de son frère ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier qu'arrivé récemment en France de manière irrégulière à l'âge de trente et un ans, il a passé la majeure partie de sa vie au Kosovo où il ne conteste pas avoir conservé des attaches familiales ; qu'il est célibataire et sans enfants à charge ; qu'il ne ressort pas davantage des pièces médicales versées au dossier que sa présence serait indispensable pour l'amélioration de l'état de santé de son frère ou de sa mère, elle aussi en situation irrégulière ; que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment de la durée et des conditions de son entrée et de son séjour en France, la décision de refus de titre de séjour n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise ; qu'elle n'a, ainsi, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

En ce qui concerne les autres moyens :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : .../...10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays de renvoi ;

Considérant qu'ainsi qu'il a été dit plus haut il ressort des pièces du dossier que M. A peut bénéficier au Kosovo d'un traitement approprié à son état de santé ; qu'ainsi la décision portant obligation de quitter le territoire français ne méconnaît pas les dispositions précitées du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que pour la même raison, le moyen tiré par M. A de ce que, en raison de son état de santé, cette décision porterait à son droit au respect de sa vie privée une atteinte disproportionnée par rapport à ses objectifs, méconnaissant ainsi l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, doit être également écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, que M. A ne peut utilement invoquer les risques et menaces qui pèseraient sur lui en cas de retour au Kosovo, à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français, qui n'emporte pas, par elle-même, obligation pour lui de retourner dans son pays d'origine ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 14 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : La jouissance des droits et libertés reconnus dans la présente Convention doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l'origine nationale ou sociale, l'appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation ;

Considérant que la décision en litige ne comporte aucune discrimination à l'égard de M. A ; qu'ainsi elle ne méconnaît pas les stipulations précitées ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ; qu'aux termes de l'article 3 de cette convention : Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants ;

Considérant que ces dispositions et stipulations combinées font obstacle à ce que puisse être légalement désigné comme pays de destination d'un étranger faisant l'objet d'une mesure d'éloignement un Etat pour lequel il existe des motifs sérieux et avérés de croire que l'intéressé s'y trouverait exposé à un risque réel pour sa personne, soit du fait des autorités de cet Etat, soit même du fait de personnes ou de groupes de personnes ne relevant pas des autorités publiques, dès lors que, dans ce dernier cas, les autorités de l'Etat de destination ne sont pas en mesure de parer à un tel risque par une protection appropriée ;

Considérant que M. A soutient que sa famille et lui ont fait l'objet de persécutions au Kosovo après avoir été accusés de collaborer avec les Serbes ; qu'après l'assassinat de son père et l'incendie criminelle du commerce familial, il a été enlevé par l'Armée de Libération du Kosovo qui l'a torturé durant sa détention ; qu'après être revenu au Kosovo en 1999, il a été contraint, ainsi que sa famille, de fuir ce pays en 2006 pour la France en raison de nouvelles violences ; que toutefois, s'il produit des certificats médicaux selon lesquels certains des troubles dont il est affecté pourraient être la conséquence d'exactions subies durant sa détention au Kosovo, ils ne suffisent pas à établir l'existence même des mauvais traitements allégués ; que, par ailleurs, le requérant n'apporte aucun élément de preuve relativement ni à la réalité de ceux-ci ni à l'assassinat de son père ; qu'ainsi il n'établit pas courir des risques en cas de retour au Kosovo ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;

Considérant que, pour les mêmes motifs, la décision fixant le Kosovo comme pays de destination ne peut être regardée comme constituant une mesure discriminatoire prise en violation des stipulations citées plus haut de l'article 14 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que ses conclusions aux fins d'injonction et tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées par voie de conséquence ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Xhevat A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire. Copie en sera adressée au préfet de l'Ain.

Lu en audience publique, le 8 juillet 2010.

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N° 09LY00865


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : Juge unique - 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 09LY00865
Date de la décision : 08/07/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Emmanuel du BESSET
Rapporteur public ?: Mme GONDOUIN
Avocat(s) : FRERY

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2010-07-08;09ly00865 ?
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