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08/07/2010 | FRANCE | N°08LY02414

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, Juge unique - 4ème chambre, 08 juillet 2010, 08LY02414


Vu l'arrêt en date du 17 mars 2010, par lequel la Cour, avant de statuer sur les conclusions de la requête de M. Ratko AA, enregistrée sous le n° 08LY02414, et tendant à ce qu'elle annule le jugement n° 0806588 en date du 21 octobre 2008 du magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Lyon, en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation, d'une part, de l'arrêté du 15 octobre 2008, par lequel le préfet du Rhône a ordonné sa reconduite à la frontière et, d'autre part, de la décision du même jour fixant le pays de renvoi, annule les décisions sus

mentionnées pour excès de pouvoir, enjoigne au préfet du Rhône de lui...

Vu l'arrêt en date du 17 mars 2010, par lequel la Cour, avant de statuer sur les conclusions de la requête de M. Ratko AA, enregistrée sous le n° 08LY02414, et tendant à ce qu'elle annule le jugement n° 0806588 en date du 21 octobre 2008 du magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Lyon, en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation, d'une part, de l'arrêté du 15 octobre 2008, par lequel le préfet du Rhône a ordonné sa reconduite à la frontière et, d'autre part, de la décision du même jour fixant le pays de renvoi, annule les décisions susmentionnées pour excès de pouvoir, enjoigne au préfet du Rhône de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de 100 € par jour de retard, et mette à la charge de l'Etat, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, la somme de 1 196 €, au profit de son conseil, sous réserve qu'il renonce au bénéfice de l'aide juridictionnelle, a ordonné un supplément d'instruction afin que le préfet du Rhône précise, d'une part, quelle est la capacité de l'offre de soins en Serbie dans la spécialité médicale concernée par la maladie de M. AA, d'autre part, si et dans quelles conditions les personnes d'origine rom peuvent dans ce pays bénéficier des soins médicaux prescrits à celui-ci en France ;

Vu, enregistré le 3 juin 2010, le mémoire présenté par le préfet du Rhône, qui conclut au rejet de la requête. Il soutient que les documents qu'il produit établissent que les soins et traitements que nécessite l'état de santé de M. A sont disponibles en Serbie et qu'ils sont accessibles aux personnes d'origine rom dès lors qu'elles sont titulaires de documents d'identité ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention des Nations-Unies sur les droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 1er juillet 2010 :

- le rapport de M. du Besset, président ;

- et les conclusions de Mme Gondouin, rapporteur public ;

Sur la légalité de l'arrêté de reconduite à la frontière :

Considérant qu'il ressort des pièces produites par le préfet du Rhône à la suite du supplément d'instruction ordonné par l'arrêt susvisé du 25 mars 2010 que les soins et traitements que nécessite l'état de santé de M. A sont disponibles en Serbie et accessibles à celles des personnes d'origine rom, qui, comme M. A, disposent de papiers d'identité ; qu'ainsi l'arrêté de reconduite à la frontière n'a pas été pris en méconnaissance des dispositions de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ;

Considérant que M. A fait valoir que son épouse et ses enfants sont en France ; que ceux-ci sont scolarisés ; que son fils Dalibor, né le 21 mai 1990, doit se voir délivrer un titre de séjour portant la mention vie privée et familiale en application des dispositions du 2° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que son fils Roberto, né le 12 octobre 1994, et son épouse doivent recevoir des soins en France ; que les membres de sa famille ont besoin de sa présence ; que toutefois, il ressort des pièces du dossier que Mme A se trouve également en situation irrégulière au regard du droit au séjour des étrangers ; qu'à supposer que leur fils Dalibor, désormais majeur, puisse prétendre à la délivrance d'un titre de séjour, cette circonstance n'est pas de nature à ouvrir un droit au séjour à son père ; que, si son fils Roberto a subi une intervention chirurgicale le 20 mai 2008, il ne ressort pas des pièces produites qu'à la date de l'arrêté en litige, il aurait encore besoin de soins nécessitant sa présence en France ; que les deux certificats médicaux établis par un médecin généraliste, en date des 10 et 16 novembre 2007, ne sont pas de nature, eu égard notamment à leur imprécision, à établir que l'état de santé de l'épouse du requérant nécessiterait des soins dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité ; que, dans ces conditions, le requérant ne démontre pas que la présence en France de membres de sa famille serait indispensable en raison de leur état de santé ; que M. et Mme A et leurs enfants peuvent poursuivre leur vie familiale ailleurs qu'en France ; que, par suite, l'arrêté de reconduite à la frontière en litige ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit de M. A au respect de sa vie privée et familiale ; qu'ainsi il ne méconnaît pas les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, pour les mêmes motifs, il n'est pas entaché d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur la situation personnelle de M. A ;

Considérant qu'aux termes du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : Dans toutes les décisions qui concernent des enfants, qu'elles soient le fait (...) des tribunaux, des autorités administratives (...), l'intérêt supérieur des enfants doit être une considération primordiale ;

Considérant que M. A fait valoir que ses enfants sont très bien intégrés en France et seraient privés de la présence de leur père s'il était reconduit à la frontière ; que toutefois, comme il a été dit plus haut, M. A peut poursuivre sa vie familiale avec ses enfants ailleurs qu'en France ; que, par suite, l'arrêté attaqué n'est pas contraire aux stipulations précitées du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

Considérant que M. A, qui possède un passeport serbe, ne peut utilement invoquer la méconnaissance des dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile à l'encontre de la décision fixant le pays dont il a la nationalité comme destination de la reconduite ;

Considérant que M. A fait valoir qu'en fixant la Serbie comme pays de renvoi le préfet a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et celles du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, alors que, selon lui, la communauté rom, à laquelle il appartient, n'aurait pas la possibilité dans ce pays de jouir pleinement de certains droits, notamment en matière d'accès à un logement, à un emploi, à la scolarité et aux soins, et que, par conséquent, il ne pourrait pas y poursuivre une vie familiale normale et ses enfants ne pourraient pas y être soignés ni scolarisés ; que toutefois, alors qu'il détient, ainsi que sa femme et ses enfants, des papiers d'identité permettant normalement de bénéficier des services de l'Etat serbe, l'impossibilité ainsi alléguée n'est pas établie ; que, par suite, M. et Mme A et leurs enfants pouvant poursuivre leur vie familiale en Serbie, la décision en litige ne méconnaît pas les stipulations précitées ; que, pour les mêmes motifs, elle n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur la situation personnelle de M. A ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que ses conclusions aux fins d'injonction et tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées par voie de conséquence ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Ratko A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Lu en audience publique, le 8 juillet 2010.

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N° 08LY02414


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : Juge unique - 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 08LY02414
Date de la décision : 08/07/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Emmanuel du BESSET
Rapporteur public ?: Mme GONDOUIN
Avocat(s) : SABATIER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2010-07-08;08ly02414 ?
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