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07/07/2010 | FRANCE | N°10LY00408

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 07 juillet 2010, 10LY00408


Vu la requête, enregistrée à la Cour le 18 février 2010, présentée pour Mme Lidya A, veuve B, domiciliée ... ;

Mme B demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0904568, en date du 13 octobre 2009, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet du Rhône, du 16 avril 2009, portant refus de délivrance d'un titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et désignation du pays à destination duquel elle serait reconduite à l'expiration de ce délai, à d

faut pour elle d'obtempérer à l'obligation de quitter le territoire français qui lu...

Vu la requête, enregistrée à la Cour le 18 février 2010, présentée pour Mme Lidya A, veuve B, domiciliée ... ;

Mme B demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0904568, en date du 13 octobre 2009, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet du Rhône, du 16 avril 2009, portant refus de délivrance d'un titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et désignation du pays à destination duquel elle serait reconduite à l'expiration de ce délai, à défaut pour elle d'obtempérer à l'obligation de quitter le territoire français qui lui était faite ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions susmentionnées ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de procéder au réexamen de sa situation dans le délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

Elle soutient que la décision portant refus de délivrance de titre de séjour est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; que les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination méconnaissent les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire enregistré le 12 avril 2010, présenté par le préfet du Rhône, qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que les décisions portant refus de délivrance de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français ne méconnaissent ni les dispositions de l'article

L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni celles de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention des Nations-Unies sur les droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 juin 2010 :

- le rapport de M. Le Gars, président,

- les observations de Me Pochard, avocat de Mme B,

- et les conclusions de M. Reynoird, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée à nouveau à Me Pochard ;

Sur la légalité de la décision portant refus de délivrance de titre de séjour :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ;

Considérant que Mme B, dont l'identité n'est attestée par aucun document officiel et qui se déclare comme étant née le 5 mars 1955 et de nationalité arménienne, est, selon ses déclarations, entrée clandestinement en France le 27 décembre 2006 avec sa fille, née le 18 septembre 1991, pour fuir les risques qu'elles encourraient dans leur pays d'origine ; que la demande d'asile qu'elle a présentée le 19 janvier 2007, a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides par décision du 19 juin 2007, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile, le 12 février 2009 ; que, prenant acte du rejet de la demande d'asile, le préfet du Rhône a, par la décision attaquée du 16 avril 2009, refusé de lui délivrer un titre de séjour ; que, pour contester cette décision, Mme B fait valoir l'impossibilité dans laquelle elle se trouverait de reconstruire sa vie en Arménie en raison des risques qu'elle encourrait en cas de retour dans ce pays ; que, ce faisant, elle ne conteste pas utilement la décision lui refusant un titre de séjour qui n'a pas, par elle-même, pour effet de la reconduire en Arménie ; qu'en outre, elle se présente comme étant veuve, vivant seule avec sa fille, et ne justifie pas d'une intégration particulière en France où elle séjournait depuis peu lorsque la décision critiquée a été prise et où elle ne possède aucune attache familiale ; que, dans ces conditions, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, le refus de délivrance de titre de séjour attaqué n'a pas porté au droit de Mme B au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs pour lesquels il a été pris ; qu'il en résulte qu'en prenant cette décision, le préfet du Rhône n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il n'a pas davantage commis une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de cette décision sur la situation personnelle de la requérante en lui opposant le refus de titre de séjour litigieux ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 : Dans toutes les décisions concernant les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ; qu'il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;

Considérant que Mme B invoque la présence en France de son enfant, Zaruhi, née le 18 septembre 1991 ; que la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour n'a ni pour effet ni pour objet de la séparer de son enfant qui, le cas échéant, pourra poursuivre sa scolarité en Arménie ou dans tout autre pays où elle serait légalement admissible ; qu'il suit de là que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant doit être écarté ;

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

Considérant que la décision portant obligation de quitter le territoire français ne désigne pas le pays de destination de la mesure d'éloignement ; que, dès lors, Mme B ne saurait utilement invoquer les risques et menaces qui pèseraient sur elle en cas de retour en Arménie ; que ce moyen ne peut donc qu'être écarté ;

Sur la légalité de la décision distincte fixant le pays de destination :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d' un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 et que ce dernier texte énonce que Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants ; que ces dispositions combinées font obstacle à ce que puisse être légalement désigné comme pays de destination d'un étranger faisant l'objet d'une mesure d'éloignement un Etat pour lequel il existe des motifs sérieux et avérés de croire que l'intéressé s'y trouverait exposé à un risque réel pour sa personne, soit du fait des autorités de cet Etat, soit même du fait de personnes ou de groupes de personnes ne relevant pas des autorités publiques, dès lors que, dans ce dernier cas, les autorités de l'Etat de destination ne sont pas en mesure de parer à un tel risque par une protection appropriée ;

Considérant que Mme B soutient qu'elle serait exposée à des traitements inhumains et dégradants en cas de retour au Arménie en raison de l'opposition politique qu'elle menait avec son mari au déplacement de la population arménienne dans le territoire du Haut-Karabakh ; qu'elle fait valoir que son mari a été exécuté après son enlèvement, le 16 octobre 2006 ; que Mme B, dont la demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et la Cour nationale du droit d'asile, n'apporte toutefois aucun commencement de preuve de la réalité de ses allégations et des risques qui la viseraient personnellement en cas de retour en Arménie ; que, par suite, les moyens tirés de la violation des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peuvent qu'être écartés ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme B n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que ses conclusions aux fins d'injonction et de mise à la charge de l'Etat des frais exposés par elle et non compris dans les dépens doivent être rejetées par voie de conséquence ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme B est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Lidya A, veuve B, et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 30 juin 2010, à laquelle siégeaient :

M. Le Gars, président de la Cour,

M. Bézard, président de chambre,

Mme Chevalier-Aubert, Premier conseiller.

Lu en audience publique, le 7 juillet 2010.

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N° 10LY00408


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 10LY00408
Date de la décision : 07/07/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LE GARS
Rapporteur ?: M. Jean Marc LE GARS
Rapporteur public ?: M. REYNOIRD
Avocat(s) : FRERY

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2010-07-07;10ly00408 ?
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